La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/12/2016 | FRANCE | N°14NC01860

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 27 décembre 2016, 14NC01860


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société GTM Halle a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à lui verser la somme de 803 449,27 euros hors taxes augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée ainsi que les intérêts moratoires au taux de 4,11 % à compter du 5 décembre 2006 et d'arrêter en conséquence le décompte général et définitif du marché à la somme de 4 013 003,43 euros hors taxes.

Par un jugement n° 0800168 du 7 juillet 2014, le tribuna

l administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la requête de la société GTM Halle.

Pro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société GTM Halle a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à lui verser la somme de 803 449,27 euros hors taxes augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée ainsi que les intérêts moratoires au taux de 4,11 % à compter du 5 décembre 2006 et d'arrêter en conséquence le décompte général et définitif du marché à la somme de 4 013 003,43 euros hors taxes.

Par un jugement n° 0800168 du 7 juillet 2014, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la requête de la société GTM Halle.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 septembre 2014, 19 novembre 2015, 23 juin 2016 et 26 août 2016, la société GTM Halle, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 juillet 2014 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de fixer le décompte général et définitif du lot n° 2 à la somme de 4 013 003,43 euros hors taxes ;

3°) de condamner en conséquence la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à lui verser la somme de 803 449,27 euros hors taxes compte tenu des acomptes versés, augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée ainsi que les intérêts moratoires au taux de 4,11 % à compter du 5 décembre 2006, au titre du solde du décompte et la capitalisation des intérêts ;

4°) de condamner la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à lui verser la somme de 33 425,45 euros au titre des frais d'expertise, augmentée des intérêts légaux à compter de la date de chaque règlement à l'expert ;

5°) de condamner la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à restituer sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, la somme de 593 267,64 euros versée par la société en exécution du jugement attaqué ;

6°) de mettre à la charge de la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse le versement de la somme de 40 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de première instance était recevable dès lors que son courrier du 25 avril 2007 est un mémoire en réclamation, qui comprend les motifs de désaccord, les montants ainsi que les justifications des sommes réclamées ;

- l'envoi du mémoire en réclamation au maître d'ouvrage est conforme à la contestation d'un différend survenu directement entre l'entrepreneur et la personne responsable du marché, et relève donc de l'article 50.22 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) travaux ; en tout état de cause, les parties ont eu la commune intention de déroger aux stipulations de l'article 13.44 du CCAG travaux relatives à l'envoi du mémoire en réclamation au maître d'oeuvre ; qu'il y a lieu ainsi de faire application du principe de la loyauté contractuelle ;

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de l'irrégularité de la notification du décompte général ;

- il est inéquitable de la condamner aux frais d'expertise ;

- elle a droit au paiement des travaux effectués sur ordre de service pour un montant de 74 977,63 euros hors taxe (HT) ;

- elle a droit au paiement des travaux effectués sans ordre de service pour un montant de 12 647,92 euros HT dans la mesure où il s'agit de travaux supplémentaires qui ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art ;

- les frais de nettoyage et de chauffage pour un montant total de 17 468,66 euros HT ont été mis à sa charge sans justification alors qu'ils étaient imputables à une faute du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

- elle est bien fondée à demander la somme de 568,95 euros HT correspondant au paiement des intérêts moratoires dus au retard sur le paiement de l'avance forfaitaire, qui n'a pas été payée par le maître d'ouvrage ;

- au titre de la révision des prix, elle est fondée à demander la somme de 153 637,02 euros HT ;

- le maître d'ouvrage ne pouvait pas, au stade du décompte, revenir sur les ordres de service qu'il a émis et par lesquels il a accepté le paiement de la somme de 532 000 euros au titre des indemnités d'ajournement ;

- elle est bien fondée à être indemnisée des préjudices qu'elle a subis du fait du retard au démarrage des travaux, du premier et du second arrêt de chantier, du changement de sous-traitant, de la perte de rendement en conditions hivernales, de l'immobilisation du personnel d'encadrement et du matériel pour les hivers 2003/2004 et 2004/2005, du préjudice lié aux intempéries, du surcoût lié aux quantités d'acier ainsi que des incidences complémentaires et des frais financiers, qui ne lui sont pas imputables au titre de l'article 48 du CCAG travaux, de la responsabilité pour faute du maître de l'ouvrage ou de ses locateurs d'ouvrage ainsi que sur le fondement des sujétions imprévues ;

- les sommes dues au titre du solde du marché sont à augmenter de la taxe sur la valeur ajoutée au taux en vigueur lors de leur encaissement ;

- elle est bien fondée à demander les intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 5 décembre 2006 sur le solde du marché d'un montant de 964 139, 12 euros toutes taxes comprises.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2015, la société Agibat ingénierie, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la société GTM Halle ;

2°) à titre subsidiaire, de rejeter toutes les demandes de condamnation solidaire ou in solidum dirigées à son encontre ;

3°) très subsidiairement, de réduire les condamnations prononcées à son encontre aux seuls préjudices qui lui sont imputables ;

4°) de mettre à la charge de chacun des concluants la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société GTM Halle ne présente aucune demande à son encontre de sorte que sa requête en tant qu'elle est dirigée à son encontre est irrecevable ;

- la demande de première instance est irrecevable en l'absence de contestation régulière par un mémoire en réclamation du décompte général notifié par la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à la société GTM Halle, qui est ainsi devenu définitif ;

- s'agissant des travaux supplémentaires, l'entrepreneur ne démontre pas la réalité des travaux supplémentaires qu'il prétend avoir réalisés ni que ceux-ci résulteraient de sujétions présentant un caractère exceptionnel, imprévisible et extérieur aux parties ;

- le retard dans le démarrage des travaux et les arrêts de chantier étaient totalement étrangers à la maîtrise d'oeuvre et en particulier à la société Agibat ingénierie qui n'était en charge que de la mission BET structure ;

- l'appel en garantie du maître de l'ouvrage à son endroit au titre du démarrage du chantier et des deux arrêts de chantier devra être rejeté.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 novembre 2015, 25 juillet 2016 et 3 octobre 2016, la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse, représentée par la SCP Sartorio-Lonqueue-Sagalovitsch et Associés, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société GTM Halle ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner les entreprises composant le groupement conjoint de maîtrise d'oeuvre aux sommes auxquelles elle serait condamnée ;

3°) de mettre à la charge de la société GTM Halle la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable dès lors que la société GTM Halle n'a pas présenté de mémoire en réclamation et qu'il n'a pas été adressé au maître d'oeuvre en application des stipulations de l'article 13-44 du CCAG travaux ;

- la circonstance que le maître de l'ouvrage a arrêté le décompte général pour pallier la défaillance du maître d'oeuvre auquel cette charge incombait en application de l'article 13-41 du CCAG travaux n'emportait aucune dérogation à l'application des autres stipulations du CCAG travaux auxquelles se référait le marché ;

- les travaux supplémentaires sur ordre de service ne peuvent être rémunérés dès lors, d'une part, que le marché a été conclu à prix global et forfaitaire et, d'autre part, que l'article 3.3.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché s'oppose à une telle demande ; au surplus, la société GTM Halle ne démontre pas la réalité de l'exécution des prestations dont elle se prévaut et leur caractère supplémentaire par rapport aux prévisions du marché ;

- s'agissant des travaux supplémentaires sans ordre de service, la société GTM Halle ne démontre pas le caractère indispensable de ces travaux ;

- le maître de l'ouvrage a dû supporter des frais de nettoyage et de chauffage qui ne lui incombaient pas ;

- aucun protocole d'accord transactionnel concernant l'indemnité d'ajournement n'a été conclu entre le maître d'ouvrage et la société GTM Halle, de sorte qu'elle ne peut se prévaloir d'aucun droit acquis ;

- les intérêts de retard sur avance forfaitaire ont d'ores et déjà été payés ;

- aucune indemnisation ne peut être versée au titre des surcoûts supportés par la société en raison des retards de chantier dans la mesure où le marché a été conclu à prix global et forfaitaire ; subsidiairement, aucune faute n'est imputable à la maitrise d'ouvrage qui devra être garantie par les sociétés membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

- la société GTM Halle ne peut imputer au maître d'ouvrage sa propre carence à exiger l'application du contrat de sous-traitance qui la liait à la société SATTP ;

- la société GTM Halle n'apporte aucune pièce au soutien de ses conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice lié aux intempéries ;

- le caractère global et forfaitaire du prix du marché fait obstacle à toute demande d'indemnisation liée à un surcoût des quantités d'armatures ;

- la demande relative aux incidences complémentaires est irrecevable, en l'absence de demande préalable chiffrée ;

- l'état du solde fait apparaître un trop-perçu de la société GTM Halle d'un montant de 496 043,18 euros HT ;

- son appel en garantie dirigé contre les sociétés Chabanne, Ethis et Echologos est recevable en l'absence de décompte général et définitif ;

- la demande de mise hors de cause de la société Green concept ne peut qu'être rejetée dès lors qu'elle est membre du groupement de maîtrise d'oeuvre et est intervenue en phase " EXE " ;

- la demande de la société GTM Halle tendant à la restitution de la somme de 593 267,64 euros est une demande nouvelle qui est dès lors irrecevable ;

- à titre subsidiaire, la société GTM Halle ne justifie pas avoir régulièrement contesté le titre de recette devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 décembre 2015, 20 juin 2016 et 12 septembre 2016, les sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos, représentées par la SELARL Billet Morel Billet-Deroi Thibaut, demandent à la cour :

1°) de rejeter la requête la société GTM Halle ;

2°) de condamner la société GTM Halle aux dépens ;

3°) de mettre à la charge de la société GTM Halle le versement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) à titre subsidiaire, de rejeter toutes les demandes présentées par la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse dirigées contre elles, de la condamner aux dépens et de mettre à la charge de cette dernière la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) à titre très subsidiaire, de condamner solidairement les sociétés Agibat ingénierie, BET Arnould, E2CA économiste, Green concept et SNC Fievet à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre au titre du préjudice subi résultant du retard dans le démarrage du chantier ;

6°) de condamner solidairement les sociétés Agibat ingénierie, BET Arnould, E2CA économiste, Green concept, SNC Fievet, Warsman et Hervé thermique à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre au titre du préjudice subi résultant des 2ème et 3ème arrêts de chantier ;

7°) de condamner solidairement les sociétés Agibat ingénierie, BET Arnould, E2CA économiste, Green concept, SNC Fievet, Warsman et Hervé thermique à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre au titre du préjudice résultant du changement de sous traitant, du préjudice résultant des pertes de rendement en conditions hivernales, du préjudice subi du fait des prolongations de délais ainsi que du préjudice subi du fait des intempéries ;

8°) de condamner solidairement les sociétés Agibat ingénierie, BET Arnould, E2CA économiste et Green concept à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre au titre du préjudice subi du fait des surcoûts liés aux quantités d'armature ;

9°) de condamner les sociétés Agibat ingénierie, BET Arnould, E2CA économiste, Green concept et SNC Fievet, Warsmann et Hervé thermique aux dépens ;

10°) de mettre à la charge des sociétés Agibat ingénierie, BET Arnould, E2CA économiste, Green concept, SNC Fievet, Warsmann et Hervé thermique la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la demande de première instance de la société GTM Halle est irrecevable dès lors qu'en l'absence de contestation régulière par un mémoire en réclamation du décompte général notifié par la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à la société GTM Halle, ce décompte est devenu définitif ;

- subsidiairement, l'appel en garantie du maître d'ouvrage est irrecevable en raison du caractère intangible du décompte général du marché de maîtrise d'oeuvre ;

- s'agissant des travaux supplémentaires, la société GTM Halle ne démontre ni la réalité des travaux qu'elle allègue avoir réalisés ni le caractère exceptionnel, imprévisible et extérieur aux parties de ces travaux ; elle ne justifie pas non plus que ces travaux étaient indispensables à la réalisation des ouvrages selon les règles de l'art ;

- le retard dans le démarrage des travaux ne leur est pas imputable ;

- si les arrêts de chantier et les postes de préjudice allégués par la société GTM Halle sont imputables en partie à la maîtrise d'oeuvre, ils sont le fait d'entreprises défaillantes, qui devront les garantir, et sont également imputables au maître de l'ouvrage dont l'appel en garantie devra être rejeté.

Par des mémoires en défense enregistrés le 31 août 2016 et le 4 octobre 2016, la société Hervé thermique, représentée par la SELARL Walter et Garance avocats, demande à la cour :

1°) de rejeter l'appel en garantie formée par les sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos ;

2°) de mettre à la charge des sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions d'appel en garantie des sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos présentées pour la première fois en appel sont nouvelles et par suite irrecevables ;

- ces conclusions sont également irrecevables dès lors que l'appel de la société GTM Halle est lui-même irrecevable en raison de sa tardiveté ;

- la demande de première instance de la société GTM Halle est irrecevable en application des stipulations contractuelles du marché, le décompte étant devenu définitif ;

- les premiers juges n'étaient pas tenu de répondre au moyen tiré des conditions irrégulières de notification du décompte général ; ce moyen n'est en tout état de cause pas fondé ;

- les demandes de la société GTM Halle contre la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse sont mal fondées ;

- l'appel en garantie formé par la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse à l'encontre de la maîtrise d'oeuvre est irrecevable en raison du caractère définitif du décompte ;

- l'appel en garantie formé à son encontre par les sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologis est prescrit en application de l'article 1382 du code civil ;

- aucune faute ne lui est imputable ;

- il n'y a pas de lien de causalité entre le retard qui lui est imputé et les retards allégués par la société GTM Halle ;

- subsidiairement, sa responsabilité ne saurait être retenue qu'à hauteur de 4,8 % des préjudices invoqués.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 août 2016, la société Green concept, représentée par la SELARL DMJB Avocats, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, de rejeter l'appel en garantie présenté par la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse ainsi que par voie de conséquence celui présenté par la société Chabanne et partenaires, la société Ethis et la société Echologos ;

3°) à titre très subsidiaire, de rejeter les appels en garantie formés à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse ou de toute partie perdante la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance de la société GTM Halle est irrecevable en l'absence de réclamation respectant les stipulations du CCAG travaux, son décompte étant devenu définitif ;

- l'appel en garantie formé par la communauté de communes Rives de Meuse est irrecevable dès lors que le décompte général avec le groupement de maîtrise d'oeuvre est devenu définitif ;

- à titre subsidiaire, aucune faute qui lui serait imputable n'est démontrée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- et les observations de Me D...pour la société GTM Halle, ainsi que celle de Me C...pour la société Hervé thermique.

Une note en délibéré présentée par la société Green concept a été enregistrée le 7 décembre 2016.

1. Considérant que le district de la région de Chooz, auquel a succédé la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse, a conclu un marché de maîtrise d'oeuvre le 18 avril 2001 avec un groupement conjoint d'entreprises, composé du cabinet ateliers d'architecture Chabanne, devenu la société Chabanne et Partenaires, et des sociétés E2CA économiste, Ethis, Agibat ingénierie, Echologos et Green concept, pour la construction d'un centre aqualudique à Givet ; que par un acte d'engagement du 19 mai 2003, le district de la région de Chooz a confié à la société GTM génie civil l'exécution des travaux du lot n°2 " gros oeuvre-façade " pour un montant de 2 544 100 euros hors taxe (HT), à prix global et forfaitaire ; qu'à la suite de retards dans l'exécution du chantier, la société GTM Halle, venant aux droits de la société GTM génie civil, a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande de référé constat, ainsi que d'une demande de désignation d'un expert ; qu'après dépôt du rapport d'expertise le 8 septembre 2007, la société GTM Halle a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse, maître d'ouvrage, à lui verser la somme de 803 449,27 euros correspondant au solde du marché ; que par un jugement du 7 juillet 2014, dont la société GTM Halle relève régulièrement appel dans le délai de deux mois prévu à l'article R. 811-2 du code de justice administrative, le tribunal a rejeté sa demande ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) travaux applicable au marché : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de trente jours, si le marché a un délai d'exécution inférieur ou égal à six mois. Il est de quarante-cinq jours dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché. Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50 (...)" ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des stipulations susmentionnées du CCAG travaux que l'entrepreneur dispose d'un délai fixé selon le cas à trente ou à quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte général par le maître de l'ouvrage pour faire valoir, dans un mémoire de réclamation remis au maître d'oeuvre, ses éventuelles réserves, le règlement du différend intervenant alors selon les modalités précisées à l'article 50 ; que ce renvoi à l'article 50 n'a ni pour objet ni pour effet d'écarter les stipulations de l'article 13-44 du CCAG travaux selon lesquelles si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, l'entrepreneur doit adresser son mémoire de réclamation au maître d'oeuvre ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société GTM Halle, sa réclamation ne pouvait être régulièrement adressée au maître d'ouvrage en application des stipulations des articles 50-11 et 50-12 du CCAG travaux ;

4. Considérant, toutefois, que si la société GTM Halle a adressé son mémoire en réclamation directement au maître d'ouvrage et non au maître d'oeuvre, il résulte de l'instruction que par un ordre de service n° 26 du 19 mars 2007, la communauté de communes Ardenne Rive de Meuse avait directement notifié à la société GTM Halle le décompte général en lui demandant expressément de lui retourner un exemplaire de cet ordre de service du décompte général signé dans un délai inférieur à quarante-cinq jours ; que par un courrier du 25 avril 2007 adressé au maître de l'ouvrage, la société GTM Halle l'a informé de son refus de signer le décompte général et a accompagné ce courrier d'un mémoire présentant ses réclamations ; que, dans ces conditions, le maître de l'ouvrage doit être regardé comme ayant renoncé expressément aux stipulations précitées de l'article 13.44 du CCAG travaux exigeant la transmission du mémoire en réclamation au maître d'oeuvre et ne peut, par suite, compte tenu du principe de loyauté des relations contractuelles, les invoquer devant le juge du contrat pour soutenir que la réclamation de la société GTM Halle est irrecevable ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le mémoire transmis le 25 avril 2007 par la société GTM Halle au maître d'ouvrage indiquait avec une précision suffisante les motifs de sa réclamation ainsi que le montant des sommes demandées et comprenait les justifications nécessaires ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que la société GTM Halle n'aurait pas transmis de mémoire en réclamation au sens des stipulations précitées de l'article 13.44 du CCAG travaux doit être écartée ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que la société GTM Halle est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande comme irrecevable au titre des stipulations précitées de l'article 13.44 du CCAG travaux ;

7. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société GTM Halle devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

Sur la demande au titre des travaux supplémentaires :

8. Considérant que dans le cadre d'un marché à prix global et forfaitaire, l'entreprise titulaire du marché n'est fondée à réclamer un supplément de prix au maître d'ouvrage que pour autant qu'elle justifie qu'elle a effectué, sur ordre de service, des travaux non prévus au marché, ou que ces travaux présentent un caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art et ce quel qu'en soit le montant, alors même que ces travaux supplémentaires n'auraient pas bouleversé l'économie du contrat et n'auraient pas été imprévisibles ;

En ce qui concerne les travaux supplémentaires sur ordre de service :

9. Considérant que la société GTM Halle demande le paiement de travaux supplémentaires sur ordre de service pour un montant total de 74 977,63 euros HT ; que le maître d'ouvrage, dans le décompte général qu'il a lui-même établi et notifié à l'entrepreneur le 20 mars 2007, a accepté de payer à la société GTM Halle la somme de 40 171,92 euros au titre de ces travaux ; que la société GTM Halle demande ainsi le paiement des sommes non accordées par le maître de l'ouvrage ;

10. Considérant, en premier lieu, que s'agissant de la vidange du bassin de loisirs, le devis n° 7 de la société GTM Halle d'un montant de 2 193 euros HT n'a donné lieu à un paiement que de 1 933 euros HT ; que la somme de 260 euros que le maître de l'ouvrage a ainsi refusé de payer correspond à la prestation " fourniture et pose de regard 60x60 et tampon béton " ; qu'il résulte de l'instruction et plus particulièrement de la décomposition du prix global et forfaitaire et de l'avenant n° 2 du 15 juillet 2004 auquel renvoie l'ordre de service n° 12 que cette prestation était prévue au marché ; qu'il suit de là que la société GTM Halle n'est pas fondée à demander le paiement de cette somme au titre des travaux supplémentaires ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que s'agissant des gradins et jacuzzis, la société GTM Halle a présenté un devis n°14 d'un montant de 1 148,51 euros HT correspondant au prix du béton hydraulique complémentaire qu'elle a dû utiliser à la suite de la modification des armatures et du coffrage de la zone du jacuzzi et des gradins Ouest ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'ordre de service n° 16 que le maître de l'ouvrage n'a fait droit à cette demande que pour la somme 803,97 euros correspondant au prix fixé par le marché pour la réalisation d'un coffrage ; qu'aux termes de l'article 11.22 du CCAG travaux applicable au marché, relatif à la rémunération de l'entrepreneur : " Dans le cas d'application d'un prix forfaitaire, le prix est dû dès lors que l'ouvrage, la partie d'ouvrage ou l'ensemble de prestations auquel il se rapporte a été exécuté ; les différences éventuellement constatées, pour chaque nature d'ouvrage ou chaque élément d'ouvrage entre les quantités réellement exécutées et les quantités indiquées dans la décomposition de ce prix (...) ne peuvent conduire à une modification de ce prix " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans le cas d'un marché à prix forfaitaire, sauf circonstances particulières ou accord non équivoque des parties sur une révision du prix convenu, le prix stipulé est dû dès lors que l'ouvrage, la partie d'ouvrage ou l'ensemble des prestations objets du marché a été exécuté sans qu'il faille tenir compte des quantités réellement mises en oeuvre ; que, par suite, et en l'absence de circonstances particulières ou d'accord non équivoque des parties sur le prix, la demande de la société GTM Halle d'un montant de 288,89 euros en raison de la quantité de béton hydraulique complémentaire qu'elle a dû utiliser relève du prix global et forfaitaire du marché ;

12. Considérant, en troisième lieu, que la société GTM Halle demande le paiement de la somme de 11 571,59 euros, qui correspondrait selon elle à des travaux de réseaux sous dallage réalisés à la suite de la remise des nouveaux plans d'exécution des réseaux par le maître d'oeuvre ; que toutefois le devis n° 31 dont se prévaut la société requérante au soutien de sa demande ne concerne pas seulement des travaux de réseaux sous dallage ; que, par ailleurs, l'ordre de service n° 20 prescrivant la réalisation des travaux ne concerne pas uniquement le devis n°31 mais renvoie également à neuf autres devis de la société ; que, dans ces conditions, la société GTM Halle ne justifie pas de manière suffisamment précise que l'exécution des travaux de réseaux sous dallage correspondrait à la somme demandée de 11 571,59 euros ;

13. Considérant, en quatrième lieu, que s'agissant de la reprise du linteau de la poutre 139, la société GTM Halle a demandé ainsi qu'il résulte de son devis n° 19 le paiement d'une somme de 1 684,36 euros HT auquel le maître de l'ouvrage n'a fait droit qu'à hauteur de 996,87 euros dès lors que le poste " montage et démontage échafaudage " était inclus dans la réalisation du clavetage des poutres ; que la société GTM Halle demande le paiement de la somme restante de 687,49 euros correspondant au coût des échafaudages qu'elle aurait dû réinstaller pour réaliser la reprise du linteau à la suite d'une erreur de la maîtrise d'oeuvre ; que la société GTM Halle ne justifie pas, ainsi que le fait valoir le maître de l'ouvrage, qu'elle ne disposait pas d'un échafaudage pour effectuer durant la même période des travaux de clavetage des poutres ; que, par suite, elle ne justifie pas du surcoût dont elle demande le paiement ;

14. Considérant, en revanche, qu'il ressort du devis n°19 que le poste " montage et démontage échafaudage " était d'un montant de 475 euros ; qu'il suit de là que le montant du devis n° 19 accepté par le maître d'oeuvre s'établit à la somme de 1 209,36 euros et non de 996,87 euros ; que, dès lors, il y a de lieu de réintégrer dans le décompte la somme de 212,49 euros ;

15. Considérant, en cinquième lieu, que s'agissant des " enduits ciment " de la face intérieure du mur pignon Est, la société GTM Halle a présenté un devis n° 44 d'un montant de 13 050,40 euros HT correspondant à la quantité mise en oeuvre pour les réaliser ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'ordre de service n° 24 que le maître de l'ouvrage n'a fait droit à cette demande que pour la somme de 5 837,22 euros correspondant au prix fixé par le marché de 32,20 euros/m2 ; que si la société GTM Halle demande le paiement de la somme de 7 604,69 euros correspondant au montant non accepté, il résulte des stipulations susmentionnées de l'article 11.22 du CCAG travaux applicable au marché, relatif à la rémunération de l'entrepreneur, qu'en l'absence de circonstances particulières ou d'accord non équivoque des parties sur le prix, la demande de la société GTM Halle en raison de la quantité d'enduit ciment qu'elle a dû utiliser relève du prix global et forfaitaire du marché ;

16. Considérant, en sixième lieu, que la société GTM Halle demande le paiement de la somme de 978 euros correspondant aux travaux de mise en conformité du seuil au droit de l'entrée principale ; qu'il résulte de l'instruction que la société GTM Halle a été contrainte de démolir des ouvrages déjà réalisés pour se mettre en conformité avec les nouveaux plans de la maîtrise d'oeuvre ; que, dans ces conditions, la société est bien fondée à demander une rémunération supplémentaire pour cette prestation à concurrence de la somme demandée de 978 euros ;

17. Considérant, enfin, que si la société GTM Halle demande que le prix des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés soit majoré du coefficient d'actualisation de 3 % en application de l'annexe 1 de l'acte d'engagement, l'actualisation demandée s'applique exclusivement au prix de l'offre pour indemniser le titulaire en cas de retard dans le commencement des travaux de son lot et non aux travaux supplémentaires, dont la valeur est appréciée à la date à laquelle ils ont été exécutés ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société GTM Halle est fondée à demander au titre des travaux supplémentaires réalisés sur ordre de service la somme de 1 190,49 euros ;

En ce qui concerne les travaux supplémentaires sans ordre de service :

19. Considérant, en premier lieu, que s'agissant des platines de pré-scellement des voiles courbes au sud, la société GTM Halle soutient avoir subi un préjudice d'immobilisation d'une équipe de coffreurs dès lors que l'entreprise Parisot, qui devait réaliser cette prestation n'est pas intervenue sur le chantier le 17 février 2004 ; qu'un préjudice d'immobilisation ne constitue toutefois pas une prestation susceptible d'être rémunérée au titre des travaux supplémentaires ; que, par suite, la demande de la société GTM Halle à ce titre ne peut qu'être rejetée ;

20. Considérant, en deuxième lieu, que la société GTM Halle soutient qu'elle a été contrainte, d'une part, de purger les remontrées d'eau du tapis drainant et, d'autre part, de pomper l'eau qui recouvrait le chantier à la suite de son interruption ; que, contrairement à ce que fait valoir le maître d'ouvrage qui ne conteste pas la réalisation de ces prestations, ces travaux ne concernaient ni la fosse de plongée ni l'entretien du chantier tels qu'ils étaient prévus au marché, mais résultaient d'une interruption du chantier en raison du défaut de plan d'exécution du maître d'oeuvre ; que si la société GTM Halle n'apporte pas la preuve d'un ordre verbal du maître d'oeuvre, elle est bien fondée à demander la rémunération de ces prestations d'un montant respectivement de 909 euros et de 2 660 euros qui ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art ;

21. Considérant, en troisième lieu, que si la société GTM Halle soutient qu'après les travaux, des réservations ont été ajoutées sur les plans l'obligeant à ouvrir des espaces, elle ne justifie ni d'un ordre verbal du maître d'oeuvre ni du caractère indispensable de la prestation pour la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art ;

22. Considérant, en dernier lieu, que pour la réalisation de remblais, la société GTM Halle soutient avoir été contrainte de mettre en oeuvre à la demande de la maîtrise d'oeuvre une méthodologie différente de celle initialement prévue, correspondant à un phasage particulier qui lui aurait occasionné un surcoût de 5 973,76 euros correspondant à deux jours supplémentaires de travaux par rapport aux prévisions du marché ; que la société GTM Halle ne justifie pas que la réalisation des remblais selon ce phasage ne relève pas du prix global et forfaitaire du marché ;

23. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société GTM Halle est seulement fondée à demander au titre des travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service la somme de 3 569 euros ;

Sur les retenues opérées par le maître d'ouvrage :

24. Considérant, en premier lieu, que la société GTM Halle soutient qu'elle a droit au paiement des prestations de fourniture et pose de canalisations et regards que le maître d'oeuvre a supprimées pour un montant de 6 018,46 euros ; que l'ordre de service n° 16 mentionne que sont supprimées deux prestations de canalisation de diamètre 400 mm et de regards de 60x60 ; qu'il résulte de l'instruction que ces prestations font l'objet d'une cotation spécifique dans la décomposition du prix global et forfaitaire et correspondent ainsi non à une diminution de la quantité mise en oeuvre mais à la suppression de prestations initialement prévues au marché ; qu'il suit de là que la société GTM Halle n'est pas fondée à demander le paiement de ces prestations ;

25. Considérant, en deuxième lieu, que la société GTM Halle demande la réintégration au décompte les sommes de 1 489,75 euros et 15 978,91 euros correspondant respectivement aux frais de nettoyage et de chauffage ; que s'agissant des frais de chauffage, il résulte de l'instruction qu'en raison des décalages successifs des plannings d'exécution résultant de la maîtrise d'oeuvre, l'exécution des lots secondaires est intervenue en période hivernale nécessitant la mise en place d'installations provisoires de chauffage ; que, par suite, la société GTM Halle ne saurait supporter ces frais ; que s'agissant des frais de nettoyage, la société GTM Halle ne conteste pas sérieusement la mise à sa charge de ces frais tant dans leur principe que dans leur quantum ; que, dès lors, la société requérante est seulement fondée à demander la réintégration au décompte de la somme de 15 978,91 euros correspondant aux frais de chauffage ;

26. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 14.3 du CCAG travaux applicable au marché relatif aux ouvrages ou travaux dont la réalisation est décidée par ordre de service : " L'ordre de service mentionné au 1. du présent article (...) notifie à l'entrepreneur des prix provisoires pour le règlement des travaux nouveaux ou modificatifs (...). Les prix provisoires sont des prix d'attente qui n'impliquent ni l'acceptation du maître de l'ouvrage ni celle de l'entrepreneur " ;

27. Considérant que la société GTM Halle demande que soit réintégrée au décompte la somme de 532 000 euros qui avait été accordée par le maître d'ouvrage à titre d'indemnité d'ajournement des travaux en raison des difficultés rencontrées dans l'exécution du marché qui ont notamment conduit à des arrêts de travaux et à l'impossibilité de les poursuivre à compter du 26 août 2004 ; qu'il résulte de l'instruction que par des ordres de service n° 1 du 29 novembre 2004 et n° 2 du 21 décembre 2004, le maître de l'ouvrage a accepté de verser à titre provisoire à la société GTM Halle respectivement les sommes de 95 874,84 euros HT et de 270 935,25 euros HT soit une somme totale de 366 810 HT ; que ces ordres de service mentionnent qu'ils constituent des " paiements provisoires des indemnités d'ajournement conformément à l'article 14.3 du CCAG travaux " ; que l'ordre de service n° 2 précise en outre que le montant global et définitif des indemnités d'ajournement fera l'objet d'un protocole transactionnel qui reprendra les éléments de justifications fournis par la société ; que par une télécopie du 26 janvier 2005, le président de la communauté de commune Ardenne Rives de Meuse a indiqué à la société GTM Halle qu'un accord de principe lui était donné pour la rédaction d'un protocole transactionnel mais que le maître de l'ouvrage avait des réserves sur les pièces justificatives fournies par la société ; que par une délibération du 30 novembre 2015, le conseil de la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse a arrêté le principe de l'indemnité " d'attente provisoire " pour la société GTM Halle en raison de l'ajournement des travaux, à la somme de 532 000 euros et a décidé, compte tenu des précédents paiements intervenus, du versement d'une somme complémentaire de 165 190 euros HT ; qu'il résulte de l'instruction qu'aucun protocole transactionnel n'est finalement intervenu et que le caractère définitif de l'indemnité d'ajournement était conditionné à l'absence de réserves de la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse sur les justificatifs produits par la société GTM Halle ; que, par suite, les paiements susmentionnés ne présentaient qu'un caractère provisoire ; que, dès lors, la société GTM Halle n'est pas fondée à soutenir que ces indemnités d'ajournement revêtaient un caractère définitif que le maître de l'ouvrage ne pouvait remettre en cause lors de l'établissement du décompte du marché ;

Sur les intérêts moratoires au titre du retard dans le paiement de l'avance forfaitaire :

28. Considérant que la société GTM Halle demande le paiement de la somme de 568,95 euros au titre des intérêts moratoires en raison du retard du maître d'ouvrage dans le paiement de l'avance de démarrage des travaux ; qu'il résulte de l'instruction que la somme demandée par la société GTM Halle au titre des intérêts moratoires lui a été réglée le 5 septembre 2003 ; que, par suite, cette demande ne peut qu'être rejetée ;

Sur la demande au titre des difficultés rencontrées dans l'exécution du marché :

29. Considérant que les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics ;

30. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'ordre de service de démarrage de la période de préparation a été notifié le 26 mai 2003 ; que l'ordre de service de démarrage des travaux est intervenu le 8 septembre 2003 au lieu du 26 juin 2003 comme le prévoyait l'annexe 3 du CCAP du marché ; que ce retard est imputable au maître d'ouvrage qui a délivré l'ordre de service de démarrage de la période de préparation alors que certains lots techniques n'étaient pas attribués et, en particulier, les lots chauffage, ventilation, traitement d'air et plomberie dont la présence des titulaires était pourtant nécessaire à la planification des travaux et à la mise en synthèse ; que, par suite, la société GTM Halle est fondée à rechercher la responsabilité contractuelle du maître d'ouvrage en raison de l'allongement de la durée du chantier du fait du retard dans le démarrage des travaux ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que cet allongement de la durée du chantier a causé à la société GTM Halle un préjudice d'immobilisation d'un montant de 107 906 euros dont elle est bien fondée à en demander le paiement ;

31. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que le chantier a été interrompu indépendamment de tout fait imputable à la société GTM Halle entre le 1er janvier 2004 et le 26 juillet 2004 ; que les travaux ont de nouveau été interrompus le 26 août 2004 du fait de l'impossibilité de réaliser le plancher haut du sous-sol jusqu'au 16 septembre 2004 ; que ces arrêts de chantier sont imputables à la maîtrise d'oeuvre qui n'a pas réalisé les plans d'exécution ; que, par suite, le préjudice allégué par la société GTM Halle ne résulte ni d'une faute du maître de l'ouvrage ni de difficultés matérielles présentant un caractère exceptionnel, imprévisible et extérieur aux parties ; que, dès lors, sa demande ne peut qu'être rejetée ;

32. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société SATTP, sous-traitante de la société GTM Halle, a retiré son matériel et a refusé de reprendre les travaux en raison des nombreux arrêts de chantier ; que la société GTM Halle l'a remplacée par l'entreprise Fievet pour un coût supérieur dont elle demande l'indemnisation ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les arrêts de chantier sont imputables à une faute de la maîtrise d'oeuvre ; que, par suite, le préjudice allégué par la société requérante ne résulte ni d'une faute du maître d'ouvrage ni de difficultés matérielles présentant un caractère exceptionnel, imprévisible et extérieur aux parties ;

33. Considérant, en quatrième lieu, que la société GTM Halle soutient avoir subi un préjudice du fait des pertes de rendement en conditions hivernales ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que ce préjudice est lié à l'allongement des délais d'exécution des travaux et au dysfonctionnement des missions d'études d'exécution (EXE), de synthèse et d'ordonnancement, coordination et pilotage du chantier (OPC) de la maîtrise d'oeuvre ; qu'il résulte de l'instruction que le retard dans le démarrage de chantier imputable au maître de l'ouvrage n'a pas conduit à une prolongation du délai d'exécution des travaux au-delà de l'été 2004 ; qu'ainsi, l'allongement des délais qui a conduit la société GTM Halle à poursuivre ses travaux lors d'un second hiver est uniquement imputable au maître d'oeuvre ; que par suite, le préjudice allégué par la société requérante ne résulte ni d'une faute du maître d'ouvrage ni de difficultés matérielles présentant un caractère exceptionnel, imprévisible et extérieur aux parties ;

34. Considérant, en cinquième lieu, que la société GTM Halle soutient avoir subi un préjudice du fait d'un nombre de jours d'intempéries plus important que ceux prévus au contrat en raison des retards et de l'allongement des délais d'exécution des travaux ; que s'agissant des intempéries de l'hiver 2003-2004, il résulte de l'instruction que la durée du marché de la société GTM Halle était de quarante semaines ; que, par suite, les retards et l'allongement des délais invoqués par la société ne sont pas la cause du préjudice allégué, la durée du marché couvrant l'hiver 2003-2004 ; que s'agissant de l'hiver 2004-2005, il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert et ainsi qu'il a été dit au point 33 que l'allongement des délais résulte du dysfonctionnement des missions EXE, Synthèse et OPC de la maîtrise d'oeuvre ; que, par suite, la société GTM Halle ne saurait rechercher la responsabilité du maître de l'ouvrage de ce fait ; que, par ailleurs, à supposer même que les intempéries aient présenté un caractère exceptionnel et imprévisible au cours de ces deux hivers, le surcoût, qui ne représente que 5 % du montant du marché ne constitue pas un bouleversement de l'économie du contrat ; que, par la suite, la société GTM Halle n'est pas fondée à demander l'indemnisation de ces jours d'intempéries ainsi que, pour les mêmes motifs, la somme de 24 279,44 euros au titre de la part non prise en charge par la caisse des intempéries ;

35. Considérant, en sixième lieu, que la société GTM Halle soutient avoir subi un préjudice du fait des surcoûts liés aux quantités d'armatures pour un montant de 30 297,92 euros ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'augmentation de ces quantités résulte d'une faute du maître d'oeuvre qui a notamment sous évalué les quantités d'armatures nécessaires et n'a pas pris en compte les alertes de la société GTM Halle ; qu'ainsi, le préjudice allégué par la société GTM Halle ne résulte ni d'une faute du maître de l'ouvrage ni de difficultés matérielles présentant un caractère exceptionnel, imprévisible et extérieur aux parties ;

36. Considérant, en septième lieu, que la société GTM Halle soutient avoir subi des préjudices du fait du décalage de la réalisation des dallages extérieurs pour un montant de 11 016 euros, de la fermeture autour des poutres reconstituées soudées et de la tête du voile courbe pour un montant de 5 425 euros ainsi que de l'instruction du dossier chauffage du bâtiment durant l'hiver 2005-2006 pour un montant de 2 325 euros ; que, toutefois, la société GTM Halle ne justifie pas de la réalité de ces préjudices ;

37. Considérant, en dernier lieu, que la société GTM Halle demande à être indemnisée des frais financiers qu'elle a exposés liés aux avances de trésorerie qu'elle aurait été contrainte d'engager pour faire face aux dépenses supplémentaires résultant des difficultés d'exécution du chantier pour une somme de 92 477,24 euros ; que selon les stipulations de l'article 13.44 du CCAG travaux applicable au marché, le mémoire en réclamation de l'entrepreneur doit, à peine de forclusion, comporter le montant des sommes dont il revendique le paiement, les motifs de la demande ainsi que les justifications nécessaires ; qu'il résulte de l'instruction que si cette demande a été présentée dans le mémoire en réclamation, elle ne précisait notamment pas ses motifs et le montant des sommes en cause, se bornant à indiquer pour chaque poste de préjudice la mention " hors les frais financiers à parfaire " ; qu'il suit de là que cette demande ne peut qu'être rejetée comme irrecevable ;

38. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société GTM Halle est seulement fondée à demander au titre des difficultés rencontrées dans l'exécution du marché la somme 107 906 euros ;

Sur la révision des prix du marché :

39. Considérant que la société GTM Halle demande que soit réintégrée au décompte la somme de 6 929,43 euros au titre de la révision des prix appliquée sur les travaux supplémentaires ; que, toutefois, la clause de révision des prix a pour objet de prendre en compte les modifications des conditions économiques entre le prix du marché à la date de remise de l'offre de l'entreprise et le prix du marché à la date d'exécution effective des prestations ; que les indemnités allouées par le présent arrêt étant évaluées, non à la date de remise de l'offre de groupement, mais à la date d'exécution effective des travaux ou des prestations, ces indemnités ne sont pas susceptibles de se voir appliquer une formule de révision du prix ;

Sur le solde du décompte général du marché :

40. Considérant que le décompte général établi par le maître d'ouvrage le 19 mars 2007 fait état d'un prix du marché augmenté des travaux supplémentaires et de la révision de prix de 2 730 979,51 euros HT ; que compte tenu de ce qui a été précédemment dit, il convient d'ajouter les sommes de 4 759,49 euros au titre des prestations supplémentaires et de 107 906 euros au titre du préjudice d'immobilisation soit un montant total de 2 843 645 euros HT ainsi que la somme de 15 978,91 euros correspondant aux frais de chauffage que la société avait déjà versée au maître de l'ouvrage ; qu'il convient de déduire de ce montant les frais de nettoyage pour la somme de 1 489,75 euros ainsi que la provision pour indemnité d'ajournement de 532 000 euros ; que le montant du décompte général du lot n° 2 " gros oeuvre-façade " s'établit donc à la somme de 2 326 134,89 euros HT ; que sur ce montant, il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que le maître d'ouvrage a déjà réglé la somme de 2 677 554,03 euros ; que le décompte général du marché s'établit donc à un solde négatif de 351 419,87 euros correspondant à un trop perçu par la société GTM Halle ;

Sur les dépens :

41. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties " ;

42. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de la société GTM Halle, partie perdante, les frais de l'expertise réalisée par M.B..., taxés et liquidés à la somme globale de 33 425,45 euros TTC par une ordonnance du président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 25 octobre 2007 ;

Sur l'appel en garantie de la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse :

43. Considérant qu'en raison du solde négatif du décompte général correspondant à un trop perçu de la société GTM Halle, son appel en garantie formé à l'encontre des sociétés du groupement de maîtrise d'oeuvre doit être rejeté ;

Sur l'appel en garantie des sociétés des sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos :

44. Considérant qu'aucune condamnation n'étant prononcée à l'encontre des sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos par le présent arrêt, leur appel en garantie formé à l'encontre des sociétés Agibat ingénierie, BET Arnould, E2CA économiste, Green concept, SNC Fievet, Warsmann et Hervé thermique doivent être rejetés ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

45. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société GTM Halle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société GTM Halle le versement de la somme que la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse, la société Agibat ingénierie, les sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos et la société Green concept demandent sur le fondement des mêmes dispositions ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des sociétés Chabanne et Partenaires, Ethis et Echologos le versement de la somme que la société Hervé thermique demande sur le fondement de ces dispositions ; qu'il n'y a pas davantage lieu de mettre à la charge de la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse, de la société Hervé thermique et de la société Green concept le versement de la somme que la société Agibat ingénierie demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0800168 du 7 juillet 2014 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : Le solde du décompte général du lot n° 2 " gros oeuvre-façade " est fixé à la somme de 351 419,87 euros hors taxes au débit de la société GTM Halle.

Article 3 : Le surplus de la demande présentée par la société GTM Halle devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ainsi que le surplus des conclusions des parties en appel sont rejetés.

Article 4 : Les frais de l'expertise taxés et liquidés à la somme de 33 425,45 euros toutes taxes comprises sont mis à la charge de la société GTM Halle.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société GTM Halle, à la société Chabanne et Partenaires, à la société Ethis, à la société Echologos, à la société E2CA économiste, à la société BET Arnould, à la SNC Fievet, à la société Warsmann, à la société Agibat ingénierie, à la société Hervé thermique, à la société Green concept et à la communauté de communes Ardenne Rives de Meuse.

2

N° 14NC01860


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award