La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/03/2017 | FRANCE | N°15NC01577

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 09 mars 2017, 15NC01577


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Ensisheim a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement, au titre de la responsabilité décennale, M. I...J...et M. F... B..., la SA Gherardi et la SARL Schneck Eric à lui verser une somme de 186 193, 99 euros à raison des désordres apparus dans le centre sportif appelé "Duopôle".

Par un jugement n° 1205389 du 13 mai 2015, le tribunal administratif a condamné solidairement M.J..., M. B...et la société Gherardi à payer à la commune la somme de 146 089,

43 euros TTC au titre des désordres, ainsi que les frais d'expertise et a condamné...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune d'Ensisheim a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement, au titre de la responsabilité décennale, M. I...J...et M. F... B..., la SA Gherardi et la SARL Schneck Eric à lui verser une somme de 186 193, 99 euros à raison des désordres apparus dans le centre sportif appelé "Duopôle".

Par un jugement n° 1205389 du 13 mai 2015, le tribunal administratif a condamné solidairement M.J..., M. B...et la société Gherardi à payer à la commune la somme de 146 089, 43 euros TTC au titre des désordres, ainsi que les frais d'expertise et a condamné les constructeurs à se garantir mutuellement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 13 juillet 2015 et le 9 février 2016, M. J..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;

2°) de rejeter la demande de première instance de la ville d'Ensisheim en tant qu'elle était dirigée contre lui ;

3°) de mettre à la charge de la commune une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

subsidiairement :

4°) de répartir la charge finale de la condamnation à hauteur de 90 % pour l'entreprise Gherardi et de 10 % pour M. B...;

5°) de condamner l'entreprise Gherardi et M. B...à le garantir des condamnations en principal, intérêts, dommages et intérêts qui pourraient être prononcées contre lui au titre des désordres affectant la grande salle ;

6°) de condamner M. B... et la société Schneck à le garantir de toutes condamnations au titre des désordres affectant le couloir ;

7°) de mettre à la charge solidaire de l'entreprise Gherardi et de M. B...une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les désordres ne lui sont pas imputables ;

- subsidiairement, le montant de la condamnation de 140 000 euros TTC au titre des travaux de réfection de la grande salle est excessif dès lors que le rapport d'expertise l'avait chiffré à 137 000 euros ;

- il n'y a pas lieu à compensation des travaux conservatoires dont il n'est pas établi qu'ils correspondent à la reprise de désordres relevant de la responsabilité décennale ;

- à titre subsidiaire, les condamnations prononcées par le tribunal administratif au titre des appels en garantie sont erronées.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 1er octobre 2015 et le 5 février 2016, la SARL Schneck Eric, représentée par MeL..., conclut :

1°) au rejet de la requête de M. J...et des conclusions de la commune d'Ensisheim dirigées contre elle ;

2°) au rejet des appels en garantie et de toutes conclusions dirigés par M. B...et par la société Gherardi contre elle ;

3°) à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise in solidum à la charge de M. J..., de la commune d'Ensisheim, de M. B...et de la société Gherardi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) à titre subsidiaire :

- à ce qu'une somme de 3 000 euros HT soit allouée au maximum à la commune d'Ensisheim au titre des travaux de réfection du couloir ;

- à ce que sa condamnation à supporter les frais d'expertise, de constats et d'investigations soit proportionnelle à sa part de responsabilité ;

5°) à titre infiniment subsidiaire :

- à ce que M.J..., M. B...et la société Gherardi soient condamnés in solidum à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre elle au titre des travaux de réfection de la grande salle et des travaux conservatoires qui s'y rapportent, y compris en ce qui concerne l'indemnité de procédure, les frais d'expertise, de constats et d'investigations.

Elle soutient que :

- l'appel de M. J...n'est pas dirigé contre elle et le tribunal administratif n'a pas prononcé de condamnation à son encontre ;

- les conclusions de la commune d'Ensisheim doivent être rejetées, dès lors que les désordres affectant le petit couloir n'ont pas un caractère décennal ;

- à titre subsidiaire, le montant de la réparation demandée par la ville à ce titre est excessif, une somme de 3 000 euros suffisant, ainsi qu'il ressort du rapport d'expertise ;

- aucun appel en garantie n'est dirigé contre elle en ce qui concerne la grande salle et ne saurait aboutir dès lors que les désordres ne lui sont pas imputables ;

- les conclusions de la société J...tendant à sa condamnation in solidum avec MM. J...et B...ne peuvent qu'être rejetées en ce qui concerne la grande salle dès lors que les désordres ne lui sont pas imputables et en ce qui concerne le couloir dont les désordres ne sont pas de nature décennale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2016, la commune d'Ensisheim, représentée par MeG..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué :

- à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté partiellement ses conclusions à fin d'indemnisation au titre de la garantie décennale ;

- en ce qui concerne la responsabilité décennale au titre de la grande salle, à la condamnation de MM. J...et B...et de la société Gherardi à lui payer, d'une part, une somme de 5 730, 62 euros au titre des travaux conservatoires qu'elle a dû réaliser, assortie des intérêts à compter de l'arrêt à intervenir, d'autre part, une somme de 19 810 euros au titre des frais de maîtrise d'oeuvre, assortie des intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ;

- en ce qui concerne la responsabilité décennale au titre des travaux de réfection du couloir, à la condamnation de la société Schneck Eric, de MM. J...et B...à lui payer une somme de 15 581, 48 euros, assortie des intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ;

- en ce qui concerne la responsabilité décennale au titre des travaux de réfection de la petite salle annexe, à la condamnation de MM. J...et B...et de la société Gherardi à lui payer la somme de 5 071, 88 euros, assortie des intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Schneck Eric, de MM. J...et B...et de la société Gherardi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) à ce que la société Schneck Eric, MM. J...et B...et la société Gherardi soient condamnés aux dépens.

Elle soutient que :

- les désordres de la grande salle la rendent impropre à sa destination et sont imputables à MM. J...et B...qui avaient une mission complète comportant la direction d'exécution des travaux ;

- le montant des condamnations prononcées à ce titre par le tribunal administratif ne sont pas excessives dès lors que le montant relatif à la réfection de la salle est conforme à celui mentionné dans le rapport d'expertise et que le montant qu'elle a exposé pour les travaux conservatoires est établi par les pièces qu'elle produit ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation des frais de maîtrise d'oeuvre qu'elle devra exposer dès lors que les travaux de réfection vont exiger l'élaboration d'un cahier des charges et un suivi des travaux qu'elle évalue en fonction d'un taux à appliquer au montant du marché ;

- c'est à tort que le tribunal administratif n'a remboursé les travaux d'investigation qu'à hauteur de 358, 80 euros alors que le carottage effectué pour les besoins de l'expertise a dégradé le sol et qu'elle produit un devis justifiant le montant de 5 071, 88 euros TTC demandé ;

- en ce qui concerne le couloir, elle a commandé un équipement conforme à ce que prévoyait le cahier des charges d'origine et c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la condamnation des constructeurs à lui rembourser le montant qu'elle justifie.

Par un mémoire, enregistré le 28 janvier 2016, M. F...B..., représenté par Me A..., conclut :

1°) au rejet de la requête et au rejet des conclusions de la commune d'Ensisheim ou de toute autre partie dirigées contre lui ;

2°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué :

à titre principal :

- à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il le condamne ;

- à ce qu'une somme de 2 500 euros à lui payer soit mise à la charge de toute partie succombante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

à titre subsidiaire :

- à la réformation du jugement attaqué en ce qui concerne les appels en garantie ;

- à la condamnation in solidum de M. J..., de la société Gherardi et de la société Schneck Eric à le garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui en principal, dommages et intérêts, frais, dépens et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à ce que soit mise à la charge de M.J..., de la société Gherardi et de la société Schneck Eric une somme de 2 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

à titre infiniment subsidiaire :

- à la répartition de la charge finale des condamnations relatives aux désordres affectant la grande salle à hauteur de 90 % à l'entreprise Gherardi et de 10 % à l'encontre de la maîtrise d'oeuvre dont 2/3 pour M. J...et 1/3 pour lui ;

en conséquence :

- à la condamnation de l'entreprise Gherardi à le garantir à hauteur de 90 % des condamnations prononcées contre lui en principal, dommages et intérêts, frais, dépens et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à la condamnation de M. J... à le garantir à hauteur de 6, 67 % des condamnations prononcées contre lui en principal, dommages et intérêts, frais, dépens et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à la répartition de la charge finale des condamnations relatives à la grande salle et des autres frais à hauteur de 90 % à l'entreprise Schneck Eric et de 10 % à l'encontre de la maîtrise d'oeuvre dont 2/3 pour M. J...et 1/3 pour M. B...;

en conséquence :

- à la condamnation de l'entreprise Schneck Eric à le garantir à hauteur de 90 % des condamnations prononcées contre lui en principal, dommages et intérêts, frais, dépens et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à la condamnation de M. J... à le garantir à hauteur de 6, 67 % des condamnations prononcées contre lui en principal, dommages et intérêts, frais, dépens et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- à ce que soit mise à la charge des appelés en garantie une somme de 2 500 euros à lui payer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont déclaré que les désordres de la grande salle lui étaient imputables dès lors qu'il n'y a aucune erreur de conception de la part de la maîtrise d'oeuvre ;

- les désordres affectant la petite salle et le couloir ne sont pas imputables à la maîtrise d'oeuvre ;

- subsidiairement, M. J... n'est pas fondé à l'appeler en garantie, dès lors que M. J...était mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, qu'il devait assurer la majeure partie des prestations de direction de l'exécution des travaux ;

- aucune partie ne peut demander à ce qu'il la garantisse, la maîtrise d'oeuvre, qui n'était pas un conducteur de travaux, n'étant présente que lors des réunions de chantier et les malfaçons étant invisibles pour elle ;

- si les désordres lui étaient imputés, M. J... devrait le garantir sur le fondement quasi-délictuel, subsidiairement contractuel et les entreprises Gherardi et Schneck Eric devraient le garantir sur le fondement quasi délictuel au regard de défauts de mise en oeuvre ;

- si la mauvaise exécution des travaux par son sous-traitant est imputable à l'entreprise Gherardi, celle-ci est en outre responsable du défaut de surveillance dudit sous-traitant, ce qui, à titre subsidiaire, doit conduire à imputer à l'entreprise 90 % des désordres et seulement 10 % à la maîtrise d'oeuvre ;

- la part de responsabilité serait de même de 90 % pour l'entreprise Schneck Eric et de 10 % pour la maîtrise d'oeuvre en ce qui concerne les désordres affectant le couloir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2016, la société Gherardi, représentée par MeC..., conclut :

à titre principal :

- au rejet de la requête, des prétentions de la ville d'Ensisheim, de M. B...et de la SARL Schneck Eric dirigées contre elle ;

- à l'annulation du jugement en tant qu'il a déclaré que les désordres lui étaient imputables ;

- à ce soit mise in solidum à la charge de M.J..., de M.B..., de la SARL Schneck Eric et de la commune d'Ensisheim une somme de 5 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les frais et dépens de première instance ;

à titre subsidiaire :

- au rejet des appels en garantie de M. J..., de M. B... et la SARL Schneck Eric ;

- à ce que M.J..., M. B...et la SARL Schneck Eric la garantissent de toute condamnation prononcée contre elle au profit de la commune d'Ensisheim, en principal, intérêts, dommages et intérêts et frais ;

- à ce soit mise in solidum à la charge de M. J..., de M. B... et de la SARL Schneck Eric une somme de 5 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les frais et dépens de première instance.

Elle soutient que :

- la maîtrise d'oeuvre est seule responsable des désordres, d'une part, dès lors que leur cause principale tient à des remontées d'humidité connues avant la mise en route du chantier qui auraient justifié une autre implantation de l'ouvrage, d'autre part, pour ne pas avoir surveillé les travaux effectués par la société Rocland, son sous-traitant ;

- elle n'a commis aucune faute et n'a pas de lien de solidarité avec son sous-traitant ;

- en tout état de cause, elle ne peut être tenue au paiement de travaux autres que ceux préconisés par l'expert en ce qui concerne la grande salle ;

- les désordres affectant le couloir et les salles annexes ne sont pas de caractère décennal ;

- la maîtrise d'oeuvre étant entièrement responsable des désordres devra la garantir intégralement des condamnations prononcées contre elle ;

- en tout état de cause, elle ne peut être responsable que de ses propres fautes dans le cadre des appels en garantie ;

- l'évaluation des préjudices ne doit pas inclure les travaux conservatoires qui n'ont pas de lien avec les désordres, ni excéder la somme de 137 000 euros retenue par l'expert pour les travaux de reprise de la grande salle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me E...pour M. J..., ainsi que les observations de Me A...pour M.B..., les observations de Me H...pour la SARL Schneck et les observations de Me G...pour la commune d'Ensisheim.

Considérant ce qui suit :

1. Par marché du 13 février 2000, la commune d'Ensisheim a confié à un groupement solidaire composé notamment de M. J...et de M.B..., architectes associés, la maîtrise d'oeuvre de la création d'un centre multisports appelé " Duopôle " et destiné notamment à accueillir les entraînements et compétitions des équipes de handball et de volleyball de la commune.

2. Le lot n° 2 "gros oeuvre" a été attribué à la société Gherardi et le lot n° 10 "sols collés-sols sportifs" à la société Schneck Eric. La réception sans réserve a été prononcée le 8 novembre 2002.

3. A partir de 2006, des désordres tels que décollement du sol et cloques se sont manifestés dans la salle destinée aux entraînements et compétitions dite "grande salle". Des défauts sur le sol d'un couloir sont également apparus.

4. A la suite du rapport déposé le 28 novembre 2011 par l'expert nommé par le tribunal administratif de Strasbourg, la commune d'Ensisheim a saisi le tribunal administratif sur le fondement de la responsabilité décennale et a demandé la condamnation de M. J..., de M.B..., de la société Gherardi et de la société Schneck Eric à lui payer une somme de 186 193, 99 euros en réparation des préjudices qu'elle avait subis en raison de ces désordres. Les intéressés ont présenté des conclusions tendant à être garantis d'éventuelles condamnations par les autres constructeurs.

5. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a estimé que les désordres affectant le couloir, imputés aux travaux de la société Schneck Eric, n'étaient pas de nature à remettre en cause l'utilisation de cet espace et ne relevaient donc pas de la responsabilité décennale. Il a en conséquence rejeté les conclusions de la commune relatives à la réparation de ces désordres.

6. En revanche, il a jugé que les désordres affectant la grande salle remettaient en cause son utilisation, relevaient de la responsabilité décennale et étaient imputables à la société Gherardi en raison de malfaçons commises par l'un de ses sous-traitants, la société SIE Rocland Nord et Est, ainsi qu'aux architectes. En conséquence, il a condamné solidairement M.J..., M. B...et la société Gherardi à verser à la commune d'Ensisheim une somme de 146 089, 43 euros TTC, ainsi qu'à lui rembourser les frais d'expertise.

7. En ce qui concerne les conclusions à fin de garantie, le tribunal administratif a fixé la charge définitive de la condamnation à 25 % pour l'entreprise Gherardi et à 25 % pour la maîtrise d'oeuvre, dont 2/3 pour M. J...et 1/3 pour M.B....

8. M. J...forme appel principal du jugement du tribunal administratif en ce qu'il l'a condamné au titre de la garantie décennale comme au titre des appels en garantie. Par la voie d'appels incident et provoqué, la commune d'Ensisheim demande l'annulation du jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses prétentions au titre de la responsabilité décennale. Les autres constructeurs condamnés par le tribunal administratif, demandent également par la voie d'appels incidents ou provoqués l'annulation du jugement en tant qu'il les a condamnés à l'égard de la commune au titre de la responsabilité décennale, ainsi que dans le cadre des appels en garantie. La société Schneck Eric, qui n'a pas été condamnée par le tribunal administratif, demande le rejet de toute demande dirigée contre elle.

I - Sur la responsabilité décennale :

9. M. J...demande, par la voie de l'appel principal, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamné à indemniser la commune sur le fondement de la responsabilité décennale. Il soutient à titre principal que les désordres ne lui sont pas imputables et, à titre subsidiaire, que le montant des réparations fixé par le tribunal administratif est excessif.

10. Par la voie de l'appel incident en tant qu'il est dirigé contre M. J...et de l'appel provoqué en tant qu'il est dirigé contre les autres constructeurs, la commune d'Ensisheim demande l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté partiellement ses conclusions à fin d'indemnisation des désordres.

11. Les autres constructeurs, M. B...et la société Gherardi, demandent, par la voie de l'appel provoqué à être déchargés de toute condamnation à l'égard de la commune en soutenant que les désordres relatifs à la grande salle ne leurs sont pas imputables. Ils demandent également, à titre subsidiaire, la diminution du montant des condamnations prononcées par le tribunal administratif au profit de la commune au titre de la responsabilité décennale. La société Schneck Eric demande le rejet des conclusions de la commune en tant que celle-ci demande l'annulation du jugement en ce qu'il a rejeté ses prétentions relatives aux désordres constatés dans un couloir.

12. Il incombe au juge administratif, lorsqu'est recherchée devant lui la responsabilité décennale des constructeurs, d'apprécier, au vu de l'argumentation que lui soumettent les parties sur ce point, si les conditions d'engagement de cette responsabilité sont ou non réunies et d'en tirer les conséquences, le cas échéant d'office, pour l'ensemble des constructeurs (CE 7 décembre 2015 n° 380419).

A - En ce qui concerne la grande salle :

S'agissant du principe de la mise en jeu de la garantie décennale pour les désordres affectant la grande salle :

13. Il résulte de l'instruction qu'à partir de 2006, après la réception prononcée sans réserves en 2002, le sol du terrain de sport de la grande salle a présenté des décollements de son revêtement et d'importantes cloques apparaissant de façon épisodique en fonction des conditions climatiques.

14. Des attestations produites par la ville d'Ensisheim, émanant du responsable du complexe sportif et des adjoints au maire, établissent que des rencontres régionales de handball et de volleyball ont été perturbées en 2008, que la même année des matchs ont dû être reportés ou annulés en raison de la présence d'une énorme cloque rendant le terrain inutilisable, que des journées de compétitions ont été annulées en 2008, 2009, 2010 et 2011 et que la salle n'a pas toujours pu être mise à la disposition d'autres groupes pour leurs activités sportives.

15. Ces décollements et cloques ont donc rendu impossible et dangereuse la pratique de sports dans la salle, que ce soit par les équipes de la ville ou les élèves des écoles ou d'autres associations souhaitant utiliser le terrain.

16. Ainsi, ces désordres qui n'étaient pas apparents lors de la réception et rendaient la grande salle impropre à sa destination relèvent, contrairement à ce que soutient M.B..., de la garantie décennale et sont de nature à engager la responsabilité des constructeurs.

S'agissant de la responsabilité des constructeurs :

17. Il résulte notamment du rapport de l'expert nommé par le tribunal administratif, que les désordres de la grande salle résultent de "remontées" de la nappe phréatique située sous le bâtiment et notamment sous la grande salle située en-dessous du niveau du sol naturel.

18. Pour préserver l'étanchéité du sol de la grande salle, les maîtres d'oeuvre, M. J... et M.B..., avaient prévu la pose, sous le sol sportif, d'un film de polyane de qualité supérieure à celui que prévoyait le DTU alors applicable, suffisamment épais pour éviter que l'humidité provenant de la nappe phréatique n'atteigne par capillarité le revêtement de la salle de sports.

19. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les désordres sont dus à la circonstance que la société SIE Rocland nord et est, sous-traitant de la société Gherardi, a posé un film de polyane plus mince que celui prévu par les maîtres d'oeuvre, très insuffisant pour protéger le sol de la salle de sports de l'humidité du sous-sol et qu'elle l'a, en outre, imparfaitement posé. Ces malfaçons sont la cause des décollements et cloques du revêtement du terrain. Ainsi, contrairement à ce que soutient la société Gherardi, les désordres liés à l'exécution de ces travaux engagent la responsabilité de cette société qui était titulaire de ce lot en raison du défaut d'exécution de ces travaux, qui lui sont imputables, nonobstant le fait qu'elle les ait fait réaliser par son sous-traitant.

20. En second lieu, il résulte notamment de l'acte d'engagement du contrat de maîtrise d'oeuvre, que MM. J...et B...étaient chargés d'une mission complète comportant notamment la "direction et l'exécution des contrats de travaux", dite DET.

21. Aux termes de l'article 9 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre : " La direction de l'exécution du ou des contrats de travaux a pour objet : / a) De s'assurer que les documents d'exécution ainsi que les ouvrages en cours de réalisation respectent les dispositions des études effectuées ; / b) De s'assurer que les documents qui doivent être produits par l'entrepreneur, en application du contrat de travaux ainsi que l'exécution des travaux sont conformes audit contrat ; / c) De délivrer tous ordres de service, établir tous procès-verbaux nécessaires à l'exécution du contrat de travaux, procéder aux constats contradictoires et organiser et diriger les réunions de chantier ; (...)".

22. M. J... soutient qu'en l'espèce, les maîtres d'oeuvre n'assuraient la coordination des travaux qu'au cours de réunions de chantier hebdomadaires ou bimensuelles prévues par un calendrier annuel et, qu'ainsi que l'a souligné l'expert nommé par le tribunal administratif, ils n'étaient donc pas en mesure de contrôler l'ensemble des travaux au moment de leur exécution, contrairement à l'entreprise Gherardi qui devait s'assurer de la bonne exécution des travaux par son sous-traitant. Il fait également valoir, comme M.B..., que, dans ces conditions, les maîtres d'oeuvre ne pouvaient pas contrôler l'épaisseur du film une fois celui-ci, posé faute d'instruments de mesure adaptés et à plus forte raison, une fois le film recouvert par le béton et le revêtement de sol.

23. Cependant, de tels arguments, qui ne concernent que l'organisation concrète des opérations de contrôle durant le chantier, ne suffisent pas à établir que les désordres sont dépourvus de lien avec les obligations contractuelles des maîtres d'oeuvre portant notamment sur le contrôle des documents d'exécution ainsi que sur les ouvrages en cours de réalisation et sur la conformité des travaux, alors que le contrat de maîtrise d'oeuvre ne comportait pas de limitations à la mission DET. En outre, ainsi que le fait valoir la commune d'Ensisheim, la mission DET imposait également aux maîtres d'oeuvre de vérifier que les documents d'exécution des ouvrages en cours de réalisation respectaient les études jointes au marché et qu'ils étaient produits par l'entrepreneur. Ainsi, les maîtres d'oeuvre devaient s'assurer que le film de polyane livré à l'entreprise Gherardi et à son sous-traitant était conforme aux prescriptions techniques du marché. Dans ces conditions, et même si l'expert a estimé que la surveillance du chantier revenait principalement à l'entreprise Gherardi et qu'il n'y a pas eu d'erreur de la maîtrise d'oeuvre dans la direction des travaux, les désordres sont également imputables aux maîtres d'oeuvre.

24. Par contre, il ne résulte pas de l'instruction que les désordres trouveraient également leur origine dans une erreur de conception des maîtres d'oeuvre, qui auraient dû, ainsi que le soutient la société Gherardi, prévoir une autre implantation du bâtiment et choisir d'autres matériaux pour tenir compte de la présence en sous-sol d'une nappe phréatique de hauteur variant avec les conditions climatiques, ainsi que de la proximité d'une gravière. En effet, le film de polyane prévu par les maîtres d'oeuvre, d'épaisseur supérieure à celle prévue pas les DTU alors en vigueur, tenait compte des particularités de l'implantation du bâtiment, notamment du fait que la salle de sport était située sous le niveau naturel du terrain contrairement à d'autres parties du bâtiment et suffisait à assurer l'étanchéité du terrain de sports.

25. Ainsi, il résulte de ce qui précède que la pose défectueuse du film de polyane à l'origine des désordres engage la responsabilité solidaire de M.J..., de M. B...et de la société Gherardi à l'égard de la commune d'Ensisheim.

S'agissant du montant des réparations :

26. Si le maître d'ouvrage a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a subi, l'indemnisation qui lui est allouée ne doit pas dépasser le montant des travaux strictement nécessaires pour rendre l'ouvrage conforme à sa destination, en usant des procédés de remise en état les moins onéreux possibles.

27. En premier lieu, le tribunal administratif a fixé à 140 000 euros TTC, le montant des travaux de réfection de la grande salle.

28. M. J...et la société Gherardi font valoir que l'évaluation des dommages doit être faite à la date où leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, il peut être procédé aux travaux de réparation et qu'il résulte du rapport d'expertise que cette somme devait être fixée à 137 000 euros TTC à la date à laquelle les travaux de réparation pouvaient être effectués..

29. Toutefois, le rapport d'expertise précise que si le montant des travaux nécessaires est de 137 000 euros compte tenu d'un devis établi par une entreprise spécialisée, il convient de le fixer à 140 000 euros TTC à la date du 28 novembre 2011 d'établissement du rapport, en appliquant l'indice BT O1. Ainsi et alors qu'il n'est pas contesté que la date retenue par l'expert est celle à laquelle il pouvait être procédé aux travaux de réparation, le moyen invoqué par M. J...et la société Gherardi doit être écarté.

30. En deuxième lieu, le tribunal administratif a également condamné les constructeurs à verser à la commune d'Ensisheim une somme de 5 730, 63 euros payée par la ville pour traiter les premiers désordres dès leur apparition, avant la fin de la mission d'expertise.

31. M. J...et la société Gherardi soutiennent qu'aucun élément ne permet de justifier ce montant, qui n'est pas mentionné dans le rapport d'expertise, ni que les travaux exécutés portaient sur des désordres de nature décennale.

32. Toutefois, il résulte de l'instruction que les travaux ont été effectués afin de traiter les premières cloques et décollements apparus dans le sol du terrain de sport qui sont des désordres de même nature que ceux qui se sont manifestés par la suite. Ainsi, ces désordres ne peuvent être regardés que comme également dus aux malfaçons dans la pose du film de polyane. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif a inclus le montant de 5 730, 63 euros dans la somme mis à la charge des constructeurs à l'égard de la commune.

33. En troisième lieu, la commune d'Ensisheim interjette appel du jugement en tant qu'il a refusé de condamner les constructeurs à lui verser une somme de 19 810 euros correspondant à des frais de maîtrise d'oeuvre qu'elle soutient avoir à exposer lorsqu'elle fera procéder aux travaux de restauration du sol de la grande salle et qu'elle calcule en appliquant au montant des travaux de réfection, un pourcentage qu'elle indique correspondre au coût habituel de la maîtrise d'oeuvre.

34. Il résulte de l'instruction que les travaux de réfection ne vont pas consister en la réfection du film de polyane, qui exigerait la destruction de la chape de béton en place, mais dans la pose d'un revêtement de sol selon un nouveau procédé qui le rendra imperméable à l'humidité du sous-sol. Dans ces conditions, la commune qui soutient, sans être contredite, qu'elle ne dispose pas de services suffisamment spécialisés pour contrôler ces travaux, démontre que l'assistance d'un maître d'oeuvre lui sera nécessaire pour contrôler l'exécution des travaux et l'assister dans la réception. En conséquence et alors que le montant des frais de maîtrise d'oeuvre qu'elle évalue n'est pas contesté, il convient de condamner les constructeurs à verser à la commune la somme de 19 810 euros.

35. Enfin, la ville soutient qu'en lui accordant une somme de 358, 80 euros au titre de frais de réparation de sondages destructifs effectués dans une salle annexe au cours des opérations d'expertise afin d'examiner le film de polyane identique à celui posé dans la grande salle, le tribunal administratif n'a pas exactement apprécié son préjudice, les coûts de réparation s'élevant à 5 071, 88 euros TTC. Toutefois, en se bornant à présenter le devis du 3 octobre 2012 mentionnant ce montant pour des travaux de réfection totale du sol d'une salle annexe, la commune n'apporte pas de précisions permettant d'apprécier l'utilité de ces travaux, leurs liens avec les désordres de nature décennale, ni la justification du montant demandé par rapport à celui accordé par le tribunal administratif. Dans ces conditions, ce chef de demande ne peut être accueilli.

B- En ce qui concerne les désordres affectant le couloir :

36. La commune interjette appel du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la mise en oeuvre de la responsabilité décennale de MM. J...et B...et de l'entreprise Schneck Eric, qui avait posé le revêtement de sol, à raison de défauts apparus dans le sol d'un couloir et que les premiers juges ont regardés comme ne compromettant pas la destination de l'ouvrage.

37. La commune soutient que le revêtement de sol de ce couloir menant aux salles annexes et aux bureaux se soulève en sept endroits, ainsi que le relève le rapport d'expertise, ce qui comporte une dangerosité rendant le couloir impropre à sa destination.

38. Toutefois, il résulte du rapport d'expertise que les désordres du couloir, situé au niveau zéro par rapport au sol naturel contrairement à la grande salle, qui n'ont pas pour origine des infiltrations d'eau mais un défaut de ragréage, n'affectent qu'une demi-douzaine de petites zones éparses d'environ 25 à 30 cm dans des endroits où se produisent davantage de piétinements et qu'ils ne comportent pas de dangers, ni de gêne pour les utilisateurs. Ainsi, ils ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination.

39. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté les prétentions de la commune au motif que ces désordres n'étaient pas suffisamment graves pour engager la responsabilité décennale des constructeurs.

40. Il résulte de ce qui précède que M.J..., M. B...et la société Gherardi ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif les a condamnés solidairement à indemniser la commune d'Ensisheim des désordres de la grande salle au titre de la responsabilité décennale.

41. En revanche, la commune est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a limité cette somme à 146 089, 43 euros TTC et ne l'a pas portée au montant de 165 899, 43 euros comprenant 19 810 euros au titre de frais de maîtrise d'oeuvre à exposer dans le cadre des travaux de réfection.

C - En ce qui concerne les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

42. Il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune d'Ensisheim, qui n'est pas la partie perdante dans l'instance relative à la responsabilité décennale en ce qui concerne les désordres relatifs à la grande salle, une somme à payer à M.J..., à M. B...et à la société Gherardi au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

43. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de M. J..., appelant principal, une somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Ensisheim au titre des mêmes frais. En revanche, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. B...et de la société Gherardi une somme à ce titre.

44. Il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Ensisheim une somme de 1 500 euros à verser à la société Schneck Eric au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II - Sur les appels en garantie :

45. En l'absence de condamnation prononcée contre la société Schneck, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions d'appel en garantie présentées par cette dernière. En l'absence de faute relevée à l'encontre de la société Schneck Eric, les conclusions d'appel en garantie formées à son encontre par MM. J...et B...et la société Gherardi ne peuvent qu'être rejetées.

46. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a jugé que la charge de l'indemnisation finale devait être répartie à hauteur de 25 % pour la maîtrise d'oeuvre et de 25 % pour l'entreprise Gherardi compte tenu des seules fautes qu'elle avait commises dans la surveillance des travaux de son sous-traitant.

47. Dans le cadre de son appel principal, M. J...fait valoir à titre subsidiaire, qu'à supposer les désordres imputables à la maîtrise d'oeuvre, il n'a pas commis de faute et particulièrement pas une faute présentant un caractère de gravité suffisante, seule de nature à engager la responsabilité des maîtres d'oeuvre, dans le cadre de la répartition de la charge finale des condamnations.

48. Si, comme il a été dit ci-dessus, aucune faute de conception n'est à l'origine des désordres survenus dans la grande salle, il résulte de l'instruction que les maîtres d'oeuvre n'ont rempli leur mission DET que par la tenue périodique de réunions de chantier et qu'ils n'ont pas vérifié, pour le moins, que les caractéristiques du film de polyane utilisé par la société Rocland était conforme aux spécifications du marché, alors que le terrain de sport était situé sous le niveau du sol naturel, au-dessus de la nappe phréatique, susceptible d'évolutions en fonction des circonstances climatiques, et que ce film constituait la seule barrière contre les infiltrations d'eau en provenance de la nappe. Ils n'ont pas davantage contrôlé la réalisation des travaux de pose du polyane dont il n'est d'ailleurs pas démontré, ainsi qu'ils le soutiennent, que le film a été très rapidement recouvert par la chape de béton.

49. M. J...fait valoir en outre qu'aucune faute ne peut être retenue contre lui, car seul M. B...assurait le suivi des réunions de chantier et assurait donc la fonction DET. Toutefois, il ne le démontre pas, alors que, comme le soutient M.B..., M. J...faisait partie du groupement de maîtrise d'oeuvre avec son associé M.B..., était mandataire du groupement et avait la charge principale de l'exercice des missions, ainsi que le révèle la circonstance que sa rémunération était, y compris pour la mission DET, supérieure à celle de M.B.... Ainsi, le moyen tiré par M.J..., également chargé de la mission DET, de ce qu'il n'a pas commis une faute suffisamment caractérisée dans la survenance des désordres, doit être écarté.

50. M. J...soutient que c'est à tort que le tribunal administratif n'a mis à la charge de la société Gherardi que la part du préjudice résultant de ses fautes propres et non également celles résultant de l'action de son sous-traitant, alors que la société Gherardi était titulaire du lot dont la mauvaise exécution a causé les désordres. Il fait également valoir que la condamnation mise à la charge de la maîtrise d'oeuvre ne saurait excéder 10 % des condamnations, les 90 % restants devant être mis à la charge de la société Gherardi en raison des fautes commises par son sous-traitant, la société Rocland.

51. Il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que les désordres ont pour origine la pose d'un film de polyane trop fin et non conforme aux documents du marché avec, en outre, des malfaçons dans la pose. Ces fautes ont été commises par la société Gherardi, titulaire du lot, soit directement en raison du défaut de surveillance de son sous-traitant, soit par l'intermédiaire de ce sous-traitant, la société Rocland. Dans ces conditions, les autres constructeurs sont fondés à demander que la société Gherardi les garantissent de la totalité des condamnations résultant de ces malfaçons.

52. En conséquence, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et eu égard aux fautes respectives des différents intervenants à l'origine des désordres tenant aux défectuosités du film de polyane, de fixer la charge définitive des condamnations en principal, intérêts et dépens à raison de ces désordres à 75 % pour la société Gherardi et à 25 % pour les architectes maîtres d'oeuvre, MM. J...etB..., M...J...devant prendre à sa charge finale les 2/3 de ces 25 % et M.B..., le tiers restant.

53. Il résulte de ce qui précède que M. J...et M. B...sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à ce que la société Gherardi les garantisse à concurrence de 75% de la totalité des condamnations prononcées contre eux, au profit de la commune d'Ensisheim et que la société Gherardi n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à ce que M. J...et B...la garantisse au-delà de 25% de la totalité des mêmes condamnations.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 :

54. Il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M.J..., qui n'est pas la partie perdante dans le litige relatif aux appels en garantie, une somme à verser à M. B...et à la société Gherardi au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

55. Il y a lieu de mettre à la charge de la société Gherardi une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à verser à M. J...ainsi qu'à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

56. Il y a lieu de mettre à la charge de la société Gherardi et de M. B...une somme de 500 euros chacun à verser à M. K...au titre des mêmes frais.

57. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... et de la société Schneck Eric une somme à verser à la société Gherardi au titre des mêmes frais, ni de mettre à la charge de la société Schneck Eric et de la société Gherardi une somme à verser à M.B....

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : M.J..., M. B...et la société Gherardi sont condamnés, conjointement et solidairement, à verser à la commune d'Ensisheim la somme de 165 899, 43 euros (cent soixante cinq mille huit cent quatre vingt dix neuf euros et quarante trois centimes).

Article 2 : Les conclusions de M.J..., de M. B...et de la société Gherardi relatives à la garantie décennale ainsi que le surplus des conclusions de la commune d'Ensisheim sont rejetées.

Article 3 : Le jugement attaqué en tant qu'il statue sur la responsabilité décennale est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : M. J...versera une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à la commune d'Ensisheim au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La commune d'Ensisheim versera une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à la société Schneck Eric au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la commune d'Ensisheim, de la société Schneck Eric et les conclusions de M.J..., de M. B...et de la société Gherardi dirigées contre la commune d'Ensisheim sont rejetées.

Article 7 : Les condamnations conjointes et solidaires, d'un montant de 165 899, 43 euros, ainsi que les frais d'expertise d'un montant de 20 218, 16 euros sont supportées à titre définitif, à hauteur de 75 % par la société Gherardi et à hauteur de 25 % par MM. J...etB..., maîtres d'oeuvre, M. J...supportant deux tiers de ces 25% et M.B..., le tiers restant.

Article 8 : Le jugement attaqué en tant qu'il statue sur les appels en garantie est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 9 : La société Gherardi versera une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à M. J...et à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 10 : La société Gherardi et M. B...verseront chacun une somme de 500 euros (cinq cents euros) à la société Schneck Eric au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 11 : Les conclusions de la société Gherardi et le surplus des conclusions de M. J..., de M. B...et de la SARL Schneck Eric relatifs à l'article L. 761- 1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 12 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... J..., à la société Gherardi, à M. F... B..., à la SARL Schneck Eric et à la commune d'Ensisheim.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

13

N° 15NC01577


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01577
Date de la décision : 09/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SELARL LE DISCORDE-DELEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-03-09;15nc01577 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award