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06/07/2017 | FRANCE | N°15NC01152

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 06 juillet 2017, 15NC01152


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010 et des majorations correspondantes.

Par un jugement n°1405558 du 24 mars 2015 le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mai 2015, MmeA..., représentée par DGM Associés, demande à la cour :r>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de prononcer la décharg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010 et des majorations correspondantes.

Par un jugement n°1405558 du 24 mars 2015 le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mai 2015, MmeA..., représentée par DGM Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010 et des majorations correspondantes et de lui accorder le bénéfice du report de la réduction d'impôt au titre des années 2009, 2010 et 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

-la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts est acquise l'année où l'investissement productif est livré ; les centrales photovoltaïques en cause étaient ainsi achevées au 31 décembre des années 2008 et 2009 ;

- le jugement est irrégulier car le tribunal a omis de répondre à l'un des moyens soulevés devant lui, tiré de l'irrégularité de l'exercice du droit de communication par l'administration au regard de l'ampleur et de la nature des investigations qu'elle a menées ;

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en ne l'informant pas de l'origine des renseignements obtenus dans l'exercice de son droit de communication ;

- l'administration a exercé irrégulièrement son droit de communication, en méconnaissance de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales ;

- la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts est acquise l'année où l'investissement productif est livré ;

- en vertu de l'instruction BOI 5-B-2-07 n° 148, la date de réalisation de l'investissement est, ainsi qu'il est précisé au premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II du code général des impôts, l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée par l'entreprise, ou lui est livrée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'administration a régulièrement obtenu d'Électricité de France (EDF) la communication des informations contenues dans le dossier de demande de raccordement au réseau électrique des installations photovoltaïques ;

- le contribuable a été informé de l'origine des renseignements sur lesquels l'administration s'est fondée pour émettre la proposition de rectification ;

- pour ouvrir droit à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts, les centrales photovoltaïques doivent être livrées, installées et en mesure d'être raccordées au réseau, ce qui suppose le dépôt d'un dossier complet de demande de raccordement auprès d'EDF et la certification par le CONSUEL de l'achèvement et de l'état de fonctionnement des installations avant le 31 décembre de l'année civile au titre de laquelle les investisseurs sollicitent le bénéfice de cette réduction d'impôt ;

- l'instruction administrative 5 B-2-07 n'ajoute pas à la loi.

Par un mémoire en réplique enregistré le 6 septembre 2016, Mme A...conclut aux mêmes fins que la requête.

Elle soutient en outre, que :

- l'administration ne lui a pas fait connaître la méthode de calcul utilisée afin de déterminer la valeur vénale des centrales photovoltaïques ;

- en limitant par voie de compensation la réduction d'impôt à laquelle elle pouvait prétendre au titre des années 2010 et 2011, l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales ;

- l'administration ne démontre pas que les centrales photovoltaïques ont été acquises à un prix excessif.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martinez,

- les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant MmeA....

1. Considérant que MmeA..., associée de plusieurs sociétés en nom collectif, a imputé sur le montant de son impôt sur le revenu au titre des années 2008, 2009 et 2010, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, une réduction d'impôt résultant de divers investissements réalisés dans l'île de La Réunion par lesdites sociétés consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à d'autres sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique ; que ces réductions d'impôt ont été remises en cause par l'administration fiscale au motif qu'en l'absence de raccordement des installations au réseau électrique géré par la société Électricité de France (EDF) à la date des 31 décembre 2008, 31 décembre 2009 et 31 décembre 2010, les investissements considérés n'étaient pas éligibles au bénéfice du régime de faveur et ne pouvaient en conséquence ouvrir droit à une réduction d'impôt au titre de ces années ; que MmeA..., qui ne conteste pas l'imposition due au titre de l'année 2008, a formé plusieurs réclamations par lesquelles elle a notamment demandé le report de la réduction d'impôt pratiquée en 2008 et 2009 sur les années suivantes au cours desquelles le fait générateur de ladite réduction pouvait être regardé comme réalisé ; que par deux décisions d'admission partielle respectivement datées du 30 mai 2013 et du 14 août 2014, l'administration a admis le principe de la réduction d'impôt pour les investissements des SNC Sungest 46, 47, 48, 49 et 50 au titre de l'année 2009, pour les investissements des SNC Sunergy 28, 29 et 30 au titre selon le cas des années 2010 et 2011, et pour les investissements des SNC Sundom 25, 26 et 27 au titre de l'année 2011 dès lors que les centrales photoélectriques en cause étaient susceptibles avant le 31 décembre de l'année considérée d'être effectivement raccordées au réseau électrique ; que le service a en revanche, par ces décisions, limité le montant de chacune des réductions d'impôt accordées au motif que l'acquisition du bien concerné par l'investissement avait donné lieu à une surfacturation ; que Mme A... relève appel du jugement n°1405558 du 24 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010 et des majorations correspondantes et, d'autre part, à bénéficier du report de l'intégralité de la réduction d'impôt au titre des années pour lesquelles l'investissement considéré devait être regardé comme réalisé ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant d'une part, que pour répondre au moyen tiré de ce que l'administration fiscale aurait exercé de façon irrégulière son droit de communication auprès de la société EDF, les premiers juges, qui n'étaient en tout état de cause pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par Mme A...à l'appui dudit moyen, ont d'abord précisé l'étendue et les limites du droit de communication, tel que défini aux articles L. 81 et L. 83 du livre des procédures fiscales, dont ils ont notamment rappelé le caractère ponctuel ; qu'ils ont indiqué les caractéristiques du document de service au sens des dispositions précitées de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales ; qu'ils ont ensuite précisé que les renseignements obtenus par l'administration se limitent à la détermination des dates relatives au raccordement des centrales photovoltaïques au réseau électrique géré par la société EDF ; que le tribunal a enfin indiqué que ces renseignements se rapportent à l'activité professionnelle de celle-ci et résultent de documents de service alors même que l'administration fiscale avait invité EDF à renseigner des tableurs joints à sa demande ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait sur ce point entaché d'un défaut de réponse au moyen, pris dans toutes ses branches, selon lequel l'administration fiscale aurait excédé les pouvoirs que lui conférait le droit de communication mentionné aux articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales ; que d'autre part, la circonstance que le tribunal aurait, comme le soutient la requérante, dénaturé les faits pour écarter le moyen tiré du droit au report intégral de la réduction d'impôt au titre des années de réalisation effective du fait générateur de ladite réduction d'impôt, qui met en cause le bien-fondé du jugement, n'a pas d'incidence sur sa régularité ;

Sur la procédure :

3. Considérant, en premier lieu, que l'administration, qui ne peut renoncer au bénéfice de la loi fiscale, est en droit, lorsqu'elle statue sur la réclamation du contribuable, de substituer à cette fin une base légale nouvelle à celle initialement retenue pour la liquidation des impositions dès lors que le contribuable peut contester ce nouveau fondement, de manière contradictoire, dans le cadre de la procédure contentieuse devant la juridiction administrative saisie du litige et que, dans le cas où l'imposition primitive a fait l'objet d'une procédure de rectification, les garanties de la procédure d'imposition afférentes à la nouvelle base légale ont été respectées ; qu'en outre, dans le cas où l'administration a utilisé des documents ou des renseignements obtenus de tiers pour fonder une rectification au titre de la nouvelle base légale dont elle se prévaut au cours de la procédure contentieuse, il lui appartient, lors de l'instance devant le juge saisi pour la première fois de la demande de substitution de base légale ou, le cas échéant, lors de l'instance d'appel, et au cas où cette obligation n'aurait pas déjà été satisfaite au cours de la procédure d'imposition, d'informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur de ces documents ou de ces renseignements, dans des délais permettant à l'intéressé d'en demander, le cas échéant, la communication et le mettant à même, après celle-ci, de présenter utilement ses observations avant la clôture de l'instruction ;

4. Considérant que la requérante doit être regardée comme soutenant que l'administration ne pouvait régulièrement, au moment où elle a statué sur sa réclamation, retenir un fondement légal différent de celui sur lequel elle avait opéré le redressement au titre de l'année 2009 ; que, si postérieurement à l'établissement de l'imposition litigieuse l'administration, saisie d'une réclamation du contribuable, a justifié le maintien de l'imposition en lui donnant un nouveau fondement légal, cette seule circonstance n'est, en tout état de cause, ainsi qu'il a été dit plus haut, pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que dans ses décisions du 30 mai 2013 et 14 août 2014, lesquelles se rattachent à la procédure contentieuse et non à la procédure d'établissement de l'impôt, l'administration a statué sur les réclamations présentées par Mme A...tendant à obtenir le bénéfice du report de la réduction d'impôt au titre des années où l'investissement pouvait être regardé comme réalisé ; que, pour limiter le montant de la réduction d'impôt accordée aux contribuables, l'administration s'est fondée sur des factures obtenues auprès de fournisseurs grâce à l'exercice de son droit de communication dans le cadre de la procédure de vérification de comptabilité de la société SFER, gérante des sociétés en nom collectif dont le contribuable est l'associé ; qu'il est constant, ainsi qu'il ressort des termes mêmes des décisions d'acceptation partielle des réclamations préalables que l'administration a informé le contribuable de ce que plusieurs factures de centrales photovoltaïques, obtenues au moyen du droit de communication exercé auprès de fournisseurs de centrales, lui avaient permis de déterminer un montant moyen par Watt-crète (Wc) ; qu'ainsi, dès ce stade, le contribuable était suffisamment informé de l'origine et de la teneur des renseignements sur lesquels l'administration s'appuyait pour retenir le nouveau fondement légal justifiant la remise en cause partielle de la réduction d'impôt et a été mis à même de présenter utilement ses observations au cours de la procédure contentieuse ; que dès lors, le moyen selon lequel en violation du principe du contradictoire, l'administration n'a pas fait connaître au contribuable la méthode de calcul utilisée afin de déterminer la valeur vénale des centrales photovoltaïques ne peut qu'être écarté ; qu'il est enfin constant que la requérante, qui avait bénéficié des garanties de la procédure de rectification contradictoire, n'a pas été privée des garanties inhérentes à la nouvelle base légale retenue par le service ;

6. Considérant, en troisième lieu, que l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dispose : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l' article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des termes des propositions de rectification adressées au contribuable, que l'administration a exercé son droit de communication auprès de la société EDF, afin d'obtenir des informations sur les dates de dépôt de demandes de raccordement complètes, de réception du certificat du comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité et de mise en production effective des centrales photovoltaïques acquises par les sociétés en nom collectif dont Mme A...est l'associée ; qu'il est constant que ces éléments d'information mentionnés dans les propositions de rectification, qui comportaient l'identité du tiers ayant communiqué à l'administration les renseignements considérés et étaient d'une précision suffisante, ont été portés à la connaissance du contribuable dès lors que les réponses et attestations d'EDF étaient annexées à la proposition de rectification concernée ; que la requérante ne saurait utilement se prévaloir de la circonstance qu'une erreur matérielle ait pu, le cas échéant, être commise par EDF quant aux dates des différentes demandes de communication, laquelle est sans incidence sur l'obligation à laquelle est tenue le service ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que pour établir les motifs et le montant des redressements contestés, l'administration aurait eu recours à d'autres éléments ni qu'elle aurait utilisé d'autres documents obtenus de tiers ; qu'il s'ensuit que l'administration, qui n'était pas tenue d'indiquer les modalités d'exercice du droit de communication et notamment la date de demande de communication, s'est acquittée de ses obligations d'information au sens des dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales tant en ce qui concerne la teneur que l'origine des renseignements utilisés ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées " ; qu'aux termes de l'article L. 83 du même livre : " Les administrations de l'État, des départements et des communes, les entreprises concédées ou contrôlées par l'État, les départements et les communes, ainsi que les établissements ou organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents de service qu'ils détiennent sans pouvoir opposer le secret professionnel, y compris les données conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques dans le cadre de l'article L.34-1 du code des postes et des communications électroniques et les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique " ; qu'il résulte de ces dispositions que le droit de communication reconnu à l'administration fiscale par les articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales a seulement pour objet de permettre à l'administration fiscale, pour l'établissement et le contrôle de l'imposition d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela nécessite d'investigations particulières ou, dans les mêmes conditions, de prendre connaissance et, le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé ; que ce droit de communication ne s'exerce que sur des documents de service que les personnes destinataires des demandes de l'administration fiscale détiennent du fait de leur activité ; qu'un document de service au sens des dispositions précitées de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales s'entend de tout document élaboré dans le cadre des missions de l'organisme à raison desquelles celui-ci est regardé comme soumis au contrôle de l'autorité administrative ;

9. Considérant que Mme A...soutient qu'en adressant des demandes de communication à EDF de portée générale et relatives à plusieurs années d'imposition, l'administration s'est livrée non pas à un contrôle passif et ponctuel de données brutes auprès d'un tiers, mais à une investigation qui, par son ampleur et sa nature, excède les limites du droit de communication ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que les demandes adressées à la société EDF, qui pouvaient à bon droit porter sur plusieurs années d'imposition non prescrites, se limitaient aux seuls éléments d'information de nature à établir le raccordement effectif des installations concernées au réseau électrique ; qu'en outre, les données brutes reportées dans les tableurs fournis par l'administration à la société EDF étaient détenues par celle-ci dans le cadre de ses obligations de service et le contenu des attestations se limitait également à des données issues de documents de service ; qu'ainsi, l'établissement de ces documents n'a nécessité ni retraitement de données ni investigations particulières de la part de l'opérateur ; que par ailleurs, dès lors que l'enregistrement des demandes de raccordement et du courrier de transmission des attestations du comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité à cette entreprise relève des obligations de service d'EDF, la requérante ne saurait soutenir que les informations ainsi recueillies par le service résultaient de documents n'entrant pas dans la catégorie des documents de service au sens des dispositions de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales ; qu'il s'ensuit que doit être écarté le moyen tiré de ce que l'administration a excédé les pouvoirs que lui conférait le droit de communication mentionné à l'article L. 81 du livre des procédures fiscales ;

10. Considérant, en dernier lieu, que le principe d'indépendance des procédures d'imposition n'interdit pas à l'administration d'utiliser des documents obtenus par l'exercice régulier du droit de communication auprès des fournisseurs et installateurs de centrales photovoltaïques afin d'apprécier, au stade de la procédure contentieuse, le bien-fondé de la réclamation du contribuable tendant au bénéfice de la réduction d'impôt ; que pour s'opposer aux prétentions du contribuable, l'administration n'était pas tenue de procéder préalablement à la correction de la valeur de l'immobilisation inscrite au bilan de la société ayant réalisé l'investissement dans le cadre d'une procédure de rectification visant ladite société et n'était pas davantage tenue d'informer le contribuable des suites de la vérification de comptabilité engagée à l'encontre de la société SFER ; que, par suite, et en tout état de cause, le moyen fondé, selon la requérante, sur le principe d'indépendance des procédures d'imposition et tiré de l'inopposabilité au contribuable de la vérification de comptabilité de la société SFER, des propositions de rectification adressées aux SNC concernées et des factures de fournisseurs de centrales photovoltaïques, ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les investissements des SNC Sundom 25, 26 et 27 :

11. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. Le contribuable domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant (...) une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 / (...) La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) " ; qu'aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code, dans sa version applicable au litige: " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts est la date à laquelle, du fait de sa livraison effective ou de sa création dans le département ou le territoire d'outre-mer, l'immobilisation, au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé, peut être effectivement exploitée et par suite être productive de revenus ; que le juge de l'impôt se prononce sur l'éligibilité des investissements qui lui sont soumis à la réduction d'impôt prévue par les dispositions précitées de l'article 199 undecies B du code général des impôts au regard des éléments apportés par l'une et l'autre partie ;

12. Considérant que la requérante fait valoir que c'est à tort que le service a, par une proposition de rectification du 29 avril 2013, remis en cause la réduction d'impôt qu'elle a pratiquée en 2010 au titre des investissements des SNC Sundom 25, 26 et 27 ; que, cependant, des panneaux photovoltaïques ne peuvent être effectivement exploités sans être intégrés dans une installation et raccordés au réseau électrique ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des renseignements obtenus auprès de la société EDF, qu'aucune des centrales photovoltaïques concernées par les investissements litigieux n'avait fait l'objet d'un raccordement au réseau électrique à la date du 31 décembre 2010 ; que pour sa part, Mme A... n'apporte aucun élément de nature à infirmer le constat sur lequel s'est fondée l'administration ; que, dans ces conditions, les installations photovoltaïques en cause ne pouvant, ni être effectivement exploitées, ni être productives de revenus à la date du 31 décembre 2010, l'administration a pu à bon droit estimer que les investissements déclarés par la requérante ne pouvaient être regardés comme ayant été effectivement réalisés au cours de ladite année et remettre en cause, pour ce motif, la réduction d'impôt litigieuse ;

13. Considérant que d'autre part, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ;

14. Considérant que si Mme A...se prévaut du point n° 148 de l'instruction 5 B-2-07 du 30 janvier 2007, intitulée " Année au titre de laquelle la réduction est pratiquée ", qui énonce que " conformément aux dispositions du vingtième alinéa du I de l'article 199 undecies B, la réduction d'impôt est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Le premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II prévoit que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par l'entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail ", ces énonciations, qui se bornent à expliciter la notion de livraison de l'immobilisation, ne donnent pas une interprétation différente du dispositif légal de celle mentionnée au point 7 ci-dessus en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt, subordonné, ainsi qu'il a été dit, à la condition tenant à l'exploitation effective de l'immobilisation ; qu'elles ne sauraient dès lors être utilement invoquées sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

15. Considérant qu'il suit de là, que la demande de la requérante tendant au bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année 2010 pour les investissements des SNC Sundom 25, 26 et 27 ne peut qu'être rejetée ;

En ce qui concerne les autres investissements :

16. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande " ;

17. Considérant que pour soutenir que l'administration a opéré une compensation en violation des conditions prévues à l'article L. 203 précité, la requérante argue de ce que le service ne pouvait plus, dans ses décisions du 30 mai 2013 et du 14 août 2014, valablement opposer le motif de redressement tiré de la surfacturation faute de l'avoir fait au cours de la procédure de rectification préalable, la problématique de la surfacturation étant apparue avant l'instruction de la réclamation du contribuable ;

18. Considérant qu'en l'espèce, l'administration s'est bornée à statuer sur les réclamations présentée par Mme A...tendant à obtenir le bénéfice de la réduction d'impôt lié à l'investissement en litige au titre des années 2009, 2010 et 2011 et à constater que les conditions légales requises n'étaient pas satisfaites à hauteur du montant pour lequel la réduction était sollicitée ; qu'elle n'a, ce faisant, pas procédé à une compensation ; que le moyen tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales ne peut donc qu'être écarté ;

19. Considérant, en deuxième lieu, que le I de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'article 16 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer prévoit que : " Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...), dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale (...) / La réduction d'impôt est de 50 % du montant hors taxes des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique. (...) Ces taux sont majorés de dix points pour les investissements réalisés dans le secteur de la production d'énergie renouvelable (...) / Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 (...) ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement (...) " ; que l'article 95 K de l'annexe II au code général des impôts prévoit que les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies B sont : " les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article " ; qu'aux termes du 1 de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / a. Pour les immobilisations acquises à titre onéreux, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat minoré des remises, rabais commerciaux et escomptes de règlement obtenus et majoré des coûts directement engagés pour la mise en état d'utilisation du bien (...) " ;

20. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le montant des investissements productifs à prendre en compte pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier un associé d'une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 du code général des impôts est en principe calculé à partir de la valeur pour laquelle l'immobilisation en cause est inscrite au bilan de cette société en application de l'article 38 quinquies de l'annexe III à ce code ; que toutefois, l'administration peut apporter la preuve que cette valeur est surévaluée par rapport au prix normal du marché ; qu'elle peut dans ce cas se fonder sur la valeur de l'immobilisation rectifiée, non seulement pour remettre en cause la déductibilité du montant des amortissements pratiqués par la société qui en est propriétaire, mais aussi pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier l'associé de la société en application de l'article 199 undecies B ;

21. Considérant d'une part, que Mme A...soutient que seul le pouvoir règlementaire pouvait limiter la base de la réduction d'impôt, en application des dispositions de l'article 199 undecies B dans sa rédaction issue de la loi du 27 mai 2009 dont l'article 16 a ajouté au I de l'article 199 undecies B les dispositions suivantes : " Les projets d'investissement comportant l'acquisition, l'installation ou l'exploitation d'équipements de production d'énergie renouvelable sont pris en compte dans la limite d'un montant par watt installé fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l'outre-mer et de l'énergie pour chaque type d'équipement. Ce montant prend en compte les coûts d'acquisition et d'installation directement liés à ces équipements " ;

22. Considérant que l'arrêté interministériel prévu par les dispositions précitées n'ayant pas été pris, les dispositions ajoutées sur ce point par l'article 16 précité sont inapplicables tandis que l'article 199 undecies B, mis en oeuvre conformément à ce qui a été dit au point précédent, est applicable dans sa rédaction issue de la loi du 27 mai 2009, y compris pour les investissements réalisés dans le secteur de la production d'énergie renouvelable ; qu'en outre, ainsi qu'il a été dit plus haut, si le montant des investissements productifs à prendre en compte pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier un associé d'une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 du code général des impôts est en principe calculé à partir de la valeur pour laquelle l'immobilisation en cause est inscrite au bilan de cette société, l'administration peut apporter la preuve que cette valeur est surévaluée par rapport au prix normal du marché et, dans ce cas, elle peut se fonder sur la valeur de l'immobilisation rectifiée, pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier l'associé de la société en application de l'article 199 undecies B ; que par suite, le moyen tiré de ce que l'administration ne pouvait légalement limiter la base de la réduction d'impôt doit être écarté ;

23. Considérant, d'autre part, que l'administration a exercé auprès de plusieurs fournisseurs et installateurs de matériels photovoltaïques sur l'île de La Réunion un droit de communication afin de déterminer le prix moyen pratiqué par watt-crête pour des centrales de gammes comparables ; que le prix moyen en résultant, soit selon les années en cause, 5,85 euros, 5,35 euros ou 4,54 euros hors taxe par watt-crête, correspond à un montant nettement inférieur à celui facturé aux sociétés dans lesquelles la requérante a investi ; que, ce faisant, l'administration a suffisamment justifié de la réalité de la surfacturation tandis que les requérants se bornent à contester la méthode retenue par l'administration et la précision des éléments qu'elle a produits sans apporter d'éléments justifiant cette différence de prix ni proposer de méthode de calcul alternative ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;

24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

25. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui, dans la présente instance, n'est pas la partie perdante, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N°15NC01152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01152
Date de la décision : 06/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : DGM et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-06;15nc01152 ?
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