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27/02/2018 | FRANCE | N°18NC00189

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 27 février 2018, 18NC00189


Vu la requête enregistrée le 20 janvier 2018 présentée pour l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Fernando Puatto, par Me A... ;

L'EURL Fernando Puatto demande au juge des référés de la cour administrative de Nancy d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la mise en recouvrement des impositions visées par le jugement

n° 1505250-3 du 21 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur aj

outée et des majorations correspondantes qui lui ont été réclamés au titre...

Vu la requête enregistrée le 20 janvier 2018 présentée pour l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Fernando Puatto, par Me A... ;

L'EURL Fernando Puatto demande au juge des référés de la cour administrative de Nancy d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la mise en recouvrement des impositions visées par le jugement

n° 1505250-3 du 21 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des majorations correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er août 2010 au 28 février 2013.

Elle soutient que :

- la condition relative à l'urgence est remplie dès lors qu'elle ne dispose pas d'un actif suffisant pour régler les sommes mises en recouvrement ; en effet l'actif ne comporte aucun élément immobilisé susceptible d'être liquidé, ni aucun élément circulant dont la nature permettrait le règlement des sommes réclamées ; la société présente des capitaux propres ainsi que des soldes de gestion négatifs pour l'exercice clos au 31 décembre 2016 ; la disproportion entre la capacité financière de la société Puatto et les redressements litigieux est ainsi avérée ; en outre le contentieux judiciaire qui l'oppose à la société Deveaux a paralysé son activité et a entraîné une chute importante de son chiffre d'affaires ;

- la condition tenant au doute sérieux sur le bien-fondé des impositions contestées est remplie ; en premier lieu, la procédure d'imposition est irrégulière, car d'une part l'EURL n'a jamais reçu de proposition de rectification et d'autre part l'administration ne l'a pas mise à même de demander la communication des pièces sur lesquelles elle a fondé sa décision, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; en second lieu, l'administration a considéré à tort que les opérations d'achat auprès de la société Deveaux ayant donné lieu à l'exercice du droit de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ne revêtent aucune réalité économique alors que l'l'EURL justifie de la réalité de ces opérations et dispose de factures conformes relatives à ces opérations ; l'absence de flux financier s'explique par un accord de compensation des créances et dettes réciproques des deux sociétés en cause ; l'inexécution par la société Deveaux d'une partie du contrat de vente dont s'agit n'a pas d'incidence sur la substance économique et juridique des opérations ; en vertu de l'instruction BOI-TVA-BASE-20-10 n°4 du 1er juillet 2013, l'administration ne pouvait pas exiger la délivrance physique d'un bien pour caractériser le transfert du pouvoir de disposition d'un bien vendu et elle aurait dû considérer le fait générateur du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée comme étant accompli.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2018, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas remplie : il se réfère en ce sens à l'ordonnance

n° 17NC03154 du 4 janvier 2018 par laquelle la juge des référés de la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté la demande précédente de référé suspension présentée par l'EURL Fernando Puatto au motif que la condition d'urgence n'était pas remplie ;

- la condition tenant au doute sérieux sur la légalité des impositions mises en recouvrement n'est pas davantage remplie ; en premier lieu, d'une part, la proposition de rectification a été régulièrement notifiée ; un avis de passage a été délivré et faute d'avoir été réclamé, le pli a été retourné à l'expéditeur en portant la mention " pli avisé et non réclamé " et la requérante n'établit nullement que le courrier comporterait des mentions qui ne seraient pas claires, précises et concordantes ; la requérante ne peut pas non plus se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales puisque c'est son inaction qui a conduit à ce qu'elle ne soit pas en mesure de demander la communication des documents ; en second lieu, en ce qui concerne le bien-fondé des impositions, d'une part la réalisation du fait générateur intervient lors de la livraison des biens ; or en l'espèce, l'exécution seulement partielle du contrat de vente par la société Deveaux ne permettait pas à la requérante de demander la déduction en litige ; d'autre part, le service établit la falsification des factures présentées par la requérante comme ayant été délivrées par la société Deveaux, mais qui n'ont notamment pas été retrouvées dans la comptabilité de ladite société ; dès lors, les achats ne correspondaient à aucune réalité économique et commerciale et le bien-fondé du rappel de taxe ne peut qu'être confirmé.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 16 février 2018, l'EURL Fernando Puatto conclut aux mêmes fins que de la requête par les mêmes moyens.

Elle soutient en outre que :

- le ministre ne remet pas utilement en cause les éléments présentés par la requérante pour établir que la condition tenant à l'urgence est remplie ;

- concernant le bien fondé des rappels de taxe en litige, d'une part, le juge judiciaire a constaté le caractère parfait de la vente litigieuse, ; la réalité économique du contrat conclu entre la société requérante et la société Devaux a ainsi été confirmé par la Cour de cassation ; de plus, le matériel concerné a été revendu par la requérante confirmant la réalité des opérations d'achat effectuées par la société requérante ; d'autre part, les factures présentées au service sont régulières, le seul argument tenant à l'absence de ces factures dans la comptabilité de la société Deveaux n'est pas suffisant pour établir une falsification ; par ailleurs, la taxe sur la valeur ajoutée étant exigible lorsque la vente est réalisée, c'est à bon droit que la requérante en a demandé la déduction ; enfin, l'administration ne peut, en raison de sa propre doctrine (BOI-TVA-BASE-20-10 n°40, 1er juillet 2013), exiger la délivrance physique des biens pour admettre le droit à déduction.

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 décembre 2017 sous le numéro 17NC03109, présentée pour l'EURL Fernando Puatto par MeA..., qui demande l'annulation du jugement n° 1505250 du 21 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des majorations correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er août 2010 au 28 février 2013 ;

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu la décision en date du 2 mai 2017 de la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy désignant M. Martinez, président de chambre, comme juge des référés, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Vu l'audience publique du 22 février 2018 à 9 heures 15 au cours de laquelle ont été entendus :

- le rapport de M. Martinez, juge des référés,

- et les observations de MeA..., représentant l'EURL Fernando Puatto.

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 522-1 dudit code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique. Sauf renvoi à une formation collégiale, l'audience se déroule sans conclusions du rapporteur public " ;

2. Considérant que le contribuable qui a saisi le juge de l'impôt de conclusions tendant à la décharge de tout ou partie d'une imposition à laquelle il a été assujetti est recevable à demander au juge des référés, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la mise en recouvrement de l'imposition, dès lors que celle-ci est exigible ; que le prononcé de cette suspension est subordonné à la double condition, d'une part, qu'il soit fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la régularité de la procédure d'imposition ou sur le bien-fondé de l'imposition et, d'autre part, que l'urgence, qui doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, justifie la mesure de suspension sollicitée ;

3. Considérant qu'en l'état de l'instruction, eu égard notamment à l'office du juge des référés, les moyens présentés par la société requérante à l'appui de sa demande de suspension ne paraissent pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité des impositions litigieuses ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de vérifier si la condition d'urgence est en l'espèce remplie, la demande de l'EURL Fernando Puatto tendant à la suspension de la mise en recouvrement de ces impositions ne peut, en application des dispositions précitées du code de justice administrative, qu'être rejetée ;

ORDONNE :

Article 1er : La requête de l'EURL Fernando Puatto est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'EURL Fernando Puatto et au ministre de l'action et des comptes publics.

Fait à Nancy, le 27 février 2018.

Le juge des référés

Signé : J. MARTINEZ

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. GODARD

2

18NC00189


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC00189
Date de la décision : 27/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Avocat(s) : HEINRICH

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-02-27;18nc00189 ?
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