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08/04/2020 | FRANCE | N°19NC02876

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 08 avril 2020, 19NC02876


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le département de la Moselle à lui verser la somme de 6 031,40 euros au titre des frais de mission qu'elle a exposés au cours des années 2011 à 2013.

Par un jugement n° 1501747 du 10 août 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le département de la Moselle à verser à Mme E... la somme de 1 490 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance du 11 d

cembre 2017, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, auquel la présidente...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le département de la Moselle à lui verser la somme de 6 031,40 euros au titre des frais de mission qu'elle a exposés au cours des années 2011 à 2013.

Par un jugement n° 1501747 du 10 août 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le département de la Moselle à verser à Mme E... la somme de 1 490 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance du 11 décembre 2017, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, auquel la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy avait transmis le recours de Mme E... par une ordonnance du 25 octobre 2017, a attribué à la cour la requête d'appel présentée par Mme E... contre ce jugement.

Par cette requête et un mémoire, enregistrés le 10 octobre 2017 et le 25 octobre 2019, Mme B... E..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 août 2017 en tant qu'il limite le montant des remboursements mis à la charge du département de la Moselle à la somme de 1 490 euros ;

2°) de condamner le département de la Moselle à lui verser la somme de 6 031,40 euros au titre des frais de mission qu'elle a exposés au cours des années 2011 à 2013 ;

3°) de mettre à la charge du département de la Moselle la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a droit au remboursement des frais de mission et de formation qu'elle a exposés en application de l'article 1er du décret du 19 juillet 2001 et de l'article 3 du décret du 3 juillet 2006.

- le président du conseil départemental de la Moselle ne peut pas exiger qu'elle produise la validation de sa créance par les services compétences dès lors que sa hiérarchie s'oppose à sa demande de remboursement ;

- sa demande de remboursement a été présentée dans le délai de prescription quadriennale prévu à l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 ;

- le président du conseil départemental de la Moselle ne peut pas lui opposer le non-respect de la note de service du 28 décembre 2011, dont les termes ne peuvent prévaloir sur le décret du 20 janvier 2016 ou la loi du 31 décembre 1968 ; en outre cette note ne prévoit pas l'absence de remboursement des frais déposés plus de deux mois après le déplacement ;

- le président du conseil départemental de la Moselle n'a jamais contesté l'avoir autorisée à utiliser son véhicule ; les autorisations de circuler étaient accordées postérieurement au déplacement en raison de l'insuffisance du nombre de véhicule de service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 décembre 2019, le département de la Moselle, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme E... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 6 décembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 janvier 2020 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2001-654 du 19 juillet 2001 ;

- le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour le conseil départemental de la Moselle.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., médecin, a travaillé à la division de la protection maternelle et infantile du département de la Moselle jusqu'à son admission à la retraite en octobre 2013. Par un courrier du 24 septembre 2014, elle a demandé au département le remboursement de frais de mission et de transport qu'elle avait exposés en 2011 et 2012. Cette demande a été rejetée par une décision du 15 octobre 2014. Par un courrier du 12 décembre 2014, l'intéressée a renouvelé cette demande en la complétant d'un état de frais au titre de l'année 2013. Elle a ensuite saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à la condamnation du département à lui verser la somme de 6 031,40 euros au titre des frais de mission et de formation exposés au cours des années 2011, 2012 et 2013. Par un jugement du 10 août 2017, dont Mme E... fait appel, le tribunal a partiellement fait droit à sa demande en condamnant le département à lui verser la somme de 1 490 euros correspondant aux frais de repas et de transport en commun au cours de ces trois années. Mme E... doit être regardée comme demandant l'annulation du jugement en tant qu'il a limité son droit à remboursement à cette somme.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 19 juillet 2001 : " Les conditions et modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des collectivités et établissements publics mentionnés à l'article 2 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée et de toute personne dont les frais de déplacement temporaires sont à la charge des budgets de ces collectivités et établissements sont, sous réserve des dispositions du présent décret, celles fixées par le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'Etat. / (...) ".

3. Aux termes de l'article 3 du décret du 3 juillet 2006 : " Lorsque l'agent se déplace pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale à l'occasion d'une mission, d'une tournée ou d'un intérim, il peut prétendre : / - à la prise en charge de ses frais de transport sur production des justificatifs de paiement auprès du seul ordonnateur ; / - et à des indemnités de mission qui ouvrent droit, cumulativement ou séparément, selon les cas, au : / 1° Remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de repas ; / 2° Remboursement forfaitaire des frais d'hébergement et, pour l'étranger et l'outre-mer, des frais divers, sur production des justificatifs de paiement de l'hébergement auprès du seul ordonnateur. / (...) /. A l'occasion d'un stage, l'agent peut prétendre : / - à la prise en charge de ses frais de transport ; / - et à des indemnités de stage dans le cadre d'actions de formation initiale ou d'indemnités de mission dans le cadre d'actions de formation continue. Dans ce dernier cas, s'il a la possibilité de se rendre dans un restaurant administratif ou d'être hébergé dans une structure dépendant de l'administration moyennant participation, l'indemnité de mission attribuée à l'agent est réduite d'un pourcentage fixé par le ministre ou par délibération du conseil d'administration de l'établissement. / (...) ". Aux termes de l'article 9 du même décret : " Le service qui autorise le déplacement choisit le moyen de transport au tarif le moins onéreux et, lorsque l'intérêt du service l'exige, le plus adapté à la nature du déplacement. (...) ". L'article 10 du même décret dispose que : " Les agents peuvent utiliser leur véhicule terrestre à moteur, sur autorisation de leur chef de service, quand l'intérêt du service le justifie. En métropole et outre-mer, l'agent autorisé à utiliser son véhicule terrestre à moteur pour les besoins du service est indemnisé de ses frais de transport soit sur la base du tarif de transport public de voyageurs le moins onéreux, soit sur la base d'indemnités kilométriques, dont les taux sont fixés par un arrêté conjoint du ministre chargé de la fonction publique, du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l'outre-mer. (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'un agent public qui se déplace pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale à l'occasion d'une mission peut prétendre au remboursement de ses frais de transport. Lorsqu'il a été expressément autorisé par son supérieur hiérarchique à utiliser son véhicule personnel pour les besoins du service, il peut prétendre à l'indemnisation de ses frais de transport sur la base du transport public le moins onéreux ou d'indemnités kilométriques.

5. Mme E... a demandé, en 2014, au président du conseil départemental de la Moselle le remboursement, sur la base d'indemnités kilométriques, des frais de transport réalisés avec son véhicule personnel au cours des années 2011 à 2013 à l'occasion de missions et de formations.

6. Il résulte de l'instruction, notamment des ordres de mission produits aux débats, que Mme E... a été autorisée à se rendre à des formations qu'elle a suivies les 24 et 25 novembre 2011 et le 30 novembre 2012 en utilisant indifféremment un véhicule de service ou son véhicule personnel. En revanche, la requérante ne justifie d'aucune autorisation pour les six autres formations et ne peut donc prétendre au remboursement des frais de transport y afférents. Dans ces conditions, Mme E... a droit au remboursement des frais de déplacement relatifs à ces trois jours de formation, lesquels s'élèvent pour 2011 et 2012 respectivement à 108,96 et 75,78 euros.

7. Si Mme E... justifie également d'ordres de mission annuels pour 2011 et 2013 et que le département de la Moselle ne conteste pas qu'elle bénéficiait aussi d'un tel ordre de mission pour 2012, l'intéressée n'établit toutefois pas avoir obtenu l'autorisation expresse d'utiliser son véhicule personnel pour les déplacements professionnels dont elle demande le remboursement au titre des trois années en litige, alors que les ordres de mission annuels mentionnent explicitement que le véhicule de service peut être utilisé sous réserve d'une autorisation. Si la requérante fait valoir que le service ne disposait pas de suffisamment de véhicules de service, cette circonstance ne la dispensait pas de solliciter et d'obtenir le cas échéant l'autorisation prévue par les dispositions précitées. Par ailleurs, le remboursement de frais de mission engagés en juin 2012 ne saurait valoir, comme l'intéressée le soutient, autorisation tacite d'utiliser son véhicule personnel pour l'accomplissement de ses missions et lui conférer un droit au remboursement de l'ensemble des frais de transport qu'elle a supportés pour la période en litige.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a limité son droit au remboursement de ses frais de mission à la somme de 1 490 euros et qu'il y a seulement lieu de porter cette somme à 1 674,74 euros.

Sur les frais de l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme E..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le département de la Moselle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du département de la Moselle une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme E... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La somme que le département de la Moselle a été condamné à payer à Mme E... est portée de 1 490 euros à 1 674,74 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la demande de Mme E... est rejeté.

Article 3 : Le jugement du 10 août 2017 du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le département de la Moselle versera à Mme E... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par le département de la Moselle sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... pour Mme E... en application des dispositions de l'article 13 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 et au département de la Moselle.

N° 19NC02876 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02876
Date de la décision : 08/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03-004 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers. Frais de déplacement.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : SELARL PAREYDT-GOHON

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-04-08;19nc02876 ?
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