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02/07/2020 | FRANCE | N°18NC01442

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 02 juillet 2020, 18NC01442


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 à 2014, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1601845, 1700261 du 15 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mai 2018, M. A...,

représenté par Me Le Bigot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 mars 2018 par le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 à 2014, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1601845, 1700261 du 15 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mai 2018, M. A..., représenté par Me Le Bigot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

en confirmant la position de l'administration, les premiers juges ont validé une nouvelle norme règlementaire sans en avoir la compétence ;

- les premiers juges auraient dû qualifier l'activité dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au regard des dispositions de l'article 156 du code général des impôts ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit dès lors que les textes applicables ne prévoient aucune condition de rentabilité pour définir le caractère professionnel d'une activité ;

- il y a lieu d'appliquer l'instruction administrative BOI-BIC-DEF-10-20130109 du 9 janvier 2013 en ce qui concerne les critères de l'activité professionnelle ;

- le jugement est entaché d'un défaut de base légale ;

- les premiers juges ont également commis une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stenger,

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Bigot, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., retraité de l'armée de l'air depuis le mois de mars 2000, a développé une activité de mandataire en assurances puis de conseil en gestion de patrimoine au cours des années 2000 à 2015. Par une proposition de rectification du 25 août 2015, établie selon la procédure de rectification contradictoire, l'administration lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales pour les années 2012 à 2014, assorties de la pénalité pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général

des impôts au motif que l'activité précitée ne présentait pas le caractère d'une activité professionnelle et que les charges qu'il avait déduites ne pouvaient être regardées comme ayant été nécessitées par l'exercice de sa profession. Les réclamations de M. A... du 2 juin et du 5 octobre 2016 ont fait respectivement l'objet d'une décision de rejet le 4 juillet 2016 et d'une décision implicite de rejet. M. A... relève appel du jugement du 15 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a répondu, avec une motivation suffisante à l'ensemble des moyens soulevés par le requérant en première instance. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait, pour ce motif, entaché d'irrégularité.

3. En second lieu, le requérant ne saurait utilement soutenir qu'en corroborant la position de l'administration qu'il estime illégale, les premiers juges ont validé une nouvelle norme règlementaire sans en avoir la compétence. Par suite, ce moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. Aux termes de l'article 92 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. ". Aux termes de l'article 93 du même code : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession (...) ". Aux termes de l'article 156 dudit code, dans sa rédaction applicable au litige : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l'article 6, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction : (...)/I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement./ Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...)/2° Des déficits provenant d'activités non commerciales au sens de l'article 92, autres que ceux qui proviennent de l'exercice d'une profession libérale ou des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants ; ces déficits peuvent cependant être imputés sur les bénéfices tirés d'activités semblables durant la même année ou les six années suivantes ; (...). ".

5. L'activité professionnelle est caractérisée par l'exercice habituel de l'activité et par la recherche du profit. Il résulte de l'instruction que l'activité de conseil en patrimoine exercée par M. A... au titre des années 2012 à 2014 ne lui a procuré que des revenus très modiques, 69 euros en 2012, 115 euros en 2013 et aucun revenu pour 2014, soit un montant total de 184 euros pour les trois années en litige alors que les dépenses qu'il a déclarées avoir engagées pour l'exercice de cette activité, au titre des mêmes années, représentaient un montant total de 55 079 euros. L'importante disproportion entre ces recettes et ces dépenses doit être regardée comme un indice du caractère non professionnel de cette activité, lequel est corroboré par l'absence de pièce justifiant qu'elle a été exercée dans un but lucratif pendant la période contrôlée. Ainsi, et comme l'ont relevé les premiers juges, les documents produits, consistant notamment en plusieurs attestations de clients, dont certaines sont assorties d'études patrimoniales relatives à des opérations réalisées antérieurement aux années en litige, des courriers d'organismes attestant qu'il a été inscrit sur le registre spécial des agents commerciaux ainsi que sur le " registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance " du 22 mars 2013 au 29 février 2016 et qu'il a été agent commercial à compter de 2012 pour la société W conseil et gestion de patrimoine ainsi que délégué du Conseil patrimonial de la fonction publique depuis 2004, établissent que M. A... a exercé de manière habituelle et constante une activité de conseil en patrimoine. Toutefois, ces documents ne justifient pas que le requérant exerçait cette activité dans un but lucratif, alors que comme le fait valoir l'administration, elle s'est caractérisée entre 2007 et 2014 par un niveau très faible de recettes d'un montant total de 9 397 euros et par un niveau très élevé de charges d'un montant total de 146 985 euros, ayant généré des déficits oscillant entre 14 299 euros et 19 020 euros au cours de cette même période. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que son activité de conseil en patrimoine ne présentait pas un caractère professionnel et que les dispositions du 2° du I de l'article 156 du code général des impôts faisaient obstacle à ce que les charges qu'il avait déduites puissent être regardées comme ayant été nécessitées par l'exercice de sa profession, au sens du I de l'article 93 du même code.

En ce qui concerne le bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

6. Aux termes de l'article L. 80. A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration./ Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".

7. M. A... ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions de l'instruction administrative BOI-BIC-DEF-10-20130109 du 9 janvier 2013 qui exposent les critères de détermination du caractère professionnel ou non d'une activité en matière de bénéfices industriels et commerciaux, dans les prévisions desquelles il n'entre pas dès lors qu'il est constant que son activité relevait des bénéfices non commerciaux, comme il l'a lui-même indiqué dans ses déclarations.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'action et des comptes publics.

3

N° 18NC01442


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC01442
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : LE BIGOT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-07-02;18nc01442 ?
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