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29/12/2020 | FRANCE | N°19NC02090

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 29 décembre 2020, 19NC02090


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Cabinet C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1602020 du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 juillet 2019 la SELARL Cabinet

C..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 avril 2019 en tant qu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Cabinet C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1602020 du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 juillet 2019 la SELARL Cabinet C..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 avril 2019 en tant qu'il rejette ses conclusions relatives aux frais de blanchisserie et aux soldes créditeurs de compte courant d'associés au 1er janvier 2012 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- s'agissant des frais de blanchisserie, dès lors que l'administration a décidé, à la suite de la vérification de comptabilité, de déterminer son résultat selon les règles des bénéfices non commerciaux et non pas selon les règles de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, elle était tenue d'admettre en déduction ces frais, déterminés selon les règles forfaitaires admises par la doctrine BOI-BNC-BASE-40-60-30-20120912, § 370 qu'elle a appliquées au titre des années 2012 et 2013 ;

- s'agissant des soldes créditeurs des comptes courant au 1er janvier 2012, c'est à tort que l'administration applique les règles de l'article 38 du code général des impôts alors qu'elle a renoncé à déterminer le bénéfice des années 2012 et 2013 selon les règles des bénéfices industriels et commerciaux ;

- en tout état de cause, l'administration ne pouvait, compte tenu du principe d'intangibilité du bilan d'ouverture de la période vérifiée, rectifier l'actif net du bilan d'ouverture de l'exercice 2012 ;

- les revenus distribués entre les mains de ses associés ne sont pas constitués.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 décembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SELARL Cabinet C..., qui exerce une activité de masseur-kinésithérapeute, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. Au cours de cette opération de contrôle, le vérificateur a constaté que la société avait déterminé ses bénéfices selon le mode de comptabilisation propre aux titulaires des bénéfices non commerciaux alors qu'étant soumise de plein droit à l'impôt sur les sociétés, elle aurait dû suivre les règles de la comptabilité d'engagement propre aux bénéfices industriels et commerciaux conformément aux dispositions de l'article 209 du code général des impôts. Le service, par une proposition de rectification du 17 avril 2015, a procédé à un certain nombre de rehaussements, selon la procédure contradictoire de rectification, des bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés des années 2012 et 2013 et a remis partiellement en cause les déficits reportables des années antérieures après avoir estimé que les frais de blanchisserie déduits forfaitairement au titre des exercices 2008, 2009, 2010 et 2011 n'étaient pas justifiés. Les suppléments d'impôt sur les sociétés consécutifs à ces rectifications ont été mis en recouvrement le 18 avril 2016 et les réclamations préalables de la société des 15 juin et 11 octobre 2016 ont été rejetées les 30 juin et 13 octobre 2016, respectivement. Par le jugement attaqué du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de la société tendant à la décharge partielle, en droits et pénalités, de ces impositions. La SELARL Cabinet C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions supplémentaires découlant des redressements en matière de frais de blanchisserie et celui relatif à un passif injustifié de l'exercice 2012.

Sur les frais de blanchisserie :

2. Aux termes de l'article 209 du code général des impôts : " I. - Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45,53 A à 57,108 à 117,237 ter A et 302 septies A bis ". Aux termes de l'article 38 du même code : "1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation./ 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés/ (...) 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. ". Aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment :/ 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire de son chiffre d'affaires que du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

3. Il résulte de ce qui a été dit au point 1 ci-dessus que la société requérante n'a pas déterminé ses bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés en respectant les règles rappelées par les dispositions ci-dessus reproduites lui imposant d'enregistrer ses créances acquises et ses dettes certaines mais s'est bornée à enregistrer ses recettes encaissées et ses dépenses payées. S'il était loisible à l'administration à la suite de la vérification de comptabilité de reconstituer le chiffre d'affaires concourant à la détermination des bénéfices imposables de la période vérifiée selon les règles de la comptabilité d'engagement, elle n'y était pas tenue compte tenu des éléments en sa possession. En s'étant abstenue de procéder à cette reconstitution, elle ne saurait être regardée comme ayant renoncé à l'application des règles légales de détermination des bénéfices imposables selon les règles ci-dessus rappelées pour suivre les règles propres aux bénéfices non commerciaux.

4. Il résulte de ce qui précède que, dès lors que la société requérante ne dispose d'aucune pièce de nature à justifier de la réalité et du montant des sommes qu'elle a déduites de ses bénéfices imposables au titre des travaux de blanchisserie que M. et Mme C..., ses associés et gérants, auraient réalisés pour elle, et dont les montants ont été inscrits au crédit de leurs comptes courants, les dispositions de l'article 39 du code général des impôts font obstacle à ce qu'elle puisse déduire des sommes forfaitaires à ce titre et alors que l'administration a admis la déduction des charges réelles de blanchisserie justifiées par ailleurs.

5. Il résulte également du point 3 ci-dessus que la société requérante ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine administrative, référence BOI BNC BASE 40 60 30 20120912, § 370, autorisant les titulaires des bénéfices non commerciaux à déduire de manière forfaitaire les frais de blanchisserie correspondant aux travaux qu'ils effectuent à domicile.

Sur le solde créditeur des comptes courants d'associés à l'ouverture de la période vérifiée :

6. Dès lors que la société requérante n'a justifié ni de la réalité, ni de la valeur des travaux de blanchisserie que les époux C... auraient réalisés pour son compte au titre des années 2008 à 2011, c'est à juste titre que l'administration, après avoir réintégré les sommes déduites à ce titre dans les résultats de la société, a regardé le solde créditeur des comptes courants d'associés à la clôture du premier exercice non prescrit comme un passif injustifié et l'a réintégré dans le bénéfice imposable de l'année 2012 en application des dispositions ci-dessus reproduites du 2 de l'article 38 du code général des impôts, sans que la société requérante ne puisse utilement soutenir que ces dispositions ne sont pas applicables à la détermination des bénéfices non commerciaux.

7. Le passif injustifié réintégré au bénéfice de l'année 2012 correspond au solde créditeur des comptes courants d'associés au 31 décembre 2012 figurant au passif du bilan à cette date. En réintégrant ce solde créditeur, l'administration n'a pas remis en cause l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit alors même que les soldes de ces comptes courants trouveraient leurs origines au cours d'exercices prescrits. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait fait une inexacte application des dispositions ci-dessus reproduites du 2 et du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts.

Sur les revenus réputés distribués :

8. La SELARL Cabinet C... n'a fait l'objet d'aucune imposition supplémentaire à raison des revenus qui ont été réputés distribués entre les mains de ses associés à la suite de la procédure de rectification litigieuse. Par suite, les moyens invoqués relatifs à l'existence de tels revenus distribués sont inopérants.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Cabinet C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SELARL Cabinet C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Cabinet C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02090
Date de la décision : 29/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SCHAUFELBERGER - MONNIN - SIRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-12-29;19nc02090 ?
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