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28/12/2021 | FRANCE | N°18NC02425

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 28 décembre 2021, 18NC02425


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Art et Build Architectes a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, par une demande enregistrée sous le n° 1505047, à titre principal, d'ordonner la reprise des relations contractuelles du marché de maîtrise d'œuvre conclu avec les hôpitaux civils de Colmar pour l'opération de construction du pôle femme mère enfants et du nouveau bâtiment technique et de condamner les hôpitaux civils de Colmar à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice causé p

ar la non-exécution du marché à compter du 6 juillet 2015 ou, à titre subsidiaire...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Art et Build Architectes a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, par une demande enregistrée sous le n° 1505047, à titre principal, d'ordonner la reprise des relations contractuelles du marché de maîtrise d'œuvre conclu avec les hôpitaux civils de Colmar pour l'opération de construction du pôle femme mère enfants et du nouveau bâtiment technique et de condamner les hôpitaux civils de Colmar à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice causé par la non-exécution du marché à compter du 6 juillet 2015 ou, à titre subsidiaire, de condamner les hôpitaux civils de Colmar à lui verser une somme de 496 900,41 euros hors taxe (HT) en réparation des préjudices subis du fait de la résiliation fautive de son contrat et, d'autre part, par une demande enregistrée sous le n° 1601379, de condamner les hôpitaux civils de Colmar à lui verser une somme de 804 545,31 euros toutes taxes comprises (TTC) au titre du solde du marché résilié, assortie des intérêts au taux légal à compter de son mémoire en réclamation et de la capitalisation des intérêts échus au 31 décembre 2015.

Par un jugement nos 1505047, 1601379 du 6 juillet 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande de reprise des relations contractuelles, rejeté comme étant portée devant un ordre de juridiction incompétent la demande tendant à la réparation des atteintes portées au droit de propriété intellectuelle et rejeté le surplus des demandes de la société Art et Build Architectes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 6 septembre, 15 novembre 2018 et 10 septembre 2021, la société Art et Build Architecte, représentée par Me Blandin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 6 juillet 2018 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'indemnisation des préjudices résultant de la résiliation fautive et, d'autre part, au versement du solde du marché résilié ;

2°) à titre principal, de condamner les hôpitaux civils de Colmar à lui verser une somme de 506 400,41 euros HT en réparation des préjudices subis du fait de la résiliation fautive de son contrat et une somme de 704 535,31 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 novembre 2015 et de la capitalisation des intérêts échus au 31 décembre 2017 au titre du solde du marché résilié ;

3°) à titre subsidiaire, de désigner, avant-dire droit, un expert aux fins de donner son avis d'une part, sur les manquements qui lui sont reprochés pour fonder la décision de résiliation et, d'autre part, sur la gravité de ceux-ci et notamment leurs conséquences sur les délais de l'opération, de chiffrer le montant du décompte et de donner son avis et d'évaluer les préjudices causés du fait de la résiliation ;

4°) de mettre à la charge des hôpitaux civils de Colmar le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

sur la résiliation :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la résiliation est irrégulière dès lors que le maître de l'ouvrage ne pouvait pas prononcer une résiliation aux frais et risques, les documents particuliers du marché ne prévoyant pas une telle sanction contrairement à ce qui est stipulé par l'article 36.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles (CCAG-PI) ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la résiliation est infondée ;

- elle n'est pas à l'origine de production de prototypes non conformes par le menuisier et du retard dans l'avancement des travaux ; elle a respecté ses obligations contractuelles concernant les délais, les validations et le suivi ; les plans réalisés pour le dossier de consultation des entreprises étaient d'une précision suffisante pour servir de plans d'exécution ;

- elle a réorganisé de façon immédiate son équipe afin de répondre à la demande du maître de l'ouvrage ; celui-ci ne justifie pas des raisons pour lesquelles il a estimé que cette réorganisation était " tardive et inappropriée " ;

- il n'est pas établi que la faute qui lui est reprochée dans la direction des travaux ait eu des conséquences sur la bonne exécution du marché ; le tribunal n'a pas apprécié ce point, ni examiné si la gravité des manquements était suffisante pour justifier une résiliation aux torts exclusifs ;

- à supposer qu'elles soient considérées comme établies, les fautes reprochées ne présentaient pas un caractère de gravité suffisant pour justifier une résiliation aux torts exclusifs ; il s'agit d'un évènement isolé, pour le premier manquement, et d'une critique générale et subjective, pour le second manquement ; les fautes reprochées n'ont engendré aucun retard significatif dans l'exécution des travaux du lot n°5, ni aucun surcoût financier, ni aucune autre incidence sur l'opération ;

- elle a droit à l'indemnisation du manque à gagner résultant de la résiliation infondée du marché, lequel sera évalué à la somme de 197 024,03 euros selon une marge nette escomptée de 22,5 % ;

- elle a droit à l'indemnisation du préjudice moral et d'atteinte à la réputation professionnelle résultant de la résiliation infondée du marché, lequel sera évalué à la somme de 200 000 euros ;

- elle a droit à l'indemnisation des dépenses engagées à perte pour l'exécution du marché pour un montant total de 89 376,11 euros ;

- elle a droit à l'indemnisation de ses frais d'avocats à hauteur de 10 500 euros ;

sur le décompte de résiliation :

- la résiliation aux frais et risques étant irrégulière et infondée, le supplément des dépenses résultant de la passation d'un marché de substitution ne pouvait donc pas être inclus au débit du décompte du marché résilié, et c'est à tort que le tribunal a estimé que sa demande tendant à l'établissement du décompte du marché résilié et au paiement du solde était irrecevable ;

- en jugeant que le décompte de résiliation devait prendre en compte le montant du marché de substitution sans toutefois vérifier si elle avait été en mesure d'user de son droit de suivre, en vue de sauvegarder ses intérêts, les opérations exécutées à ses risques et périls par son remplaçant, le tribunal a omis de statuer sur une condition essentielle de l'opposabilité du marché de substitution au titulaire initial ;

- le marché de substitution ne lui est pas opposable car elle n'a pas pu exercer son droit de suivi, de sorte que sa demande tendant au paiement du solde du marché n'est pas irrecevable ;

- elle a droit à la somme de 89 598,45 euros HT au titre des prestations réalisées en tant que mandataire ;

- elle a droit à la somme de 753 135,41 euros HT au titre des prestations réalisées en tant qu'architecte ;

- elle a droit à la somme de 84 422,88 euros HT au titre des prestations supplémentaires qu'elle a réalisées ;

- elle a droit à l'indemnisation des dépenses engagées à perte pour l'exécution du marché pour un montant total de 89 376,11 euros ;

- elle a droit à la somme de 1 232,96 euros HT au titre de la révision des prix.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 septembre 2020 et 3 octobre 2021, les hôpitaux civils de Colmar concluent, à titre principal, au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, au rejet des conclusions tendant à obtenir une indemnisation et à l'établissement du décompte du marché résilié, en incluant, au débit de la société Art et Build les montants de 3 200 000 euros au titre des pénalités de retard, 18 302 euros au titre de la réalisation des constats contradictoires, 199 902 euros au titre de la reprise des études et 1 518 euros au titre de la mobilisation des personnels et au rejet de la demande d'expertise et, dans tous les cas, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen soulevé par la société Art et Build en ce qui concerne l'appréciation par les premiers juges de la régularité de la décision de résiliation n'est pas fondé ;

- les moyens soulevés par la société Art et Build en ce qui concerne l'appréciation par les premiers juges du bien-fondé de la décision de résiliation ne sont pas fondés ; les plans d'exécution déposés tardivement sur la plateforme dématérialisée concernant le lot n° 5, qui correspondaient en réalité aux plans réalisés pour le dossier de consultation des entreprises, n'étaient pas suffisamment précis et détaillés pour pouvoir servir de base à la réalisation des plans d'atelier et de chantier de l'entrepreneur et comportaient des erreurs ; la première faute justifiait à elle seule le prononcé de la résiliation ; la tardiveté de la société Art et Build à réorganiser la direction du chantier, alors que celui-ci souffrait d'un important retard et qu'une nouvelle organisation lui avait été expressément demandée, est établie et constitue elle aussi une faute d'une gravité suffisante pour justifier la mesure de résiliation ;

- subsidiairement, les préjudices dont la société Art et Build demande à être indemnisée en conséquence du caractère, selon elle, infondé de la résiliation, ne sont pas justifiés ;

- la demande relative au décompte de résiliation était prématurée ainsi que l'ont jugé les premiers juges ;

- subsidiairement, pour le calcul de la rémunération des prestations réalisées par la société Art et Build il faut tenir compte d'un état d'avancement des travaux de 15,14 % ; la demande de la société requérante au titre des prestations supplémentaires n'est pas fondée ; la demande de la société requérante au titre de la révision des prix n'est pas suffisamment étayée ; la résiliation étant fondée, la requérante n'a pas le droit à l'indemnisation d'un quelconque préjudice résultant d'une résiliation prétendument fautive ;

- subsidiairement, une somme de 3 220 200 euros doit être portée au débit du décompte selon le tableau récapitulatif des pénalités de retard joint ;

- une somme de 18 302 euros, correspondant au coût des constats contradictoires réalisés, doit être portée au débit du décompte ;

- une somme de 199 902 euros, correspondant au coût de la reprise des études d'étanchéité et des prototypes des menuiseries extérieures, doit être portée au débit du décompte ;

- une somme de 1 518 euros, correspondant au coût de la mobilisation de leur personnel pour se substituer à la société requérante, doit être portée au débit du décompte.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;

- le décret n°93-1263 du 29 novembre 1993 ;

- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picque, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Wagner, représentant la société Art et Build Architectes ainsi que celles de Me Pareydt, représentant les hôpitaux civils de Colmar.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement signé le 13 août 2012, les hôpitaux civils de Colmar ont confié le marché de maîtrise d'œuvre de l'opération de construction d'un pôle femme mère enfant (B...) et d'un nouveau bâtiment médicotechnique (BMT) à un groupement momentané d'entreprises solidaires composé de la société Art et Build Architectes, mandataire du groupement, de la société B+B, architecte, de la société OTE, bureau d'études et de la société Gamba, acousticienne. Le 6 juillet 2015, la directrice des hôpitaux civils de Colmar a pris la décision de résilier ce marché à l'égard de la seule société Art et Build, à raison de deux manquements commis par cette dernière dans l'exécution de ses missions contractuelles. Cette résiliation pour faute a été prononcée à ses frais et risques. Par un avenant au marché de maîtrise d'œuvre signé le 27 juillet 2015, prenant effet au 7 juillet 2015, les hôpitaux civils de Colmar ont transféré à la société B + B la mission de mandataire et, aux sociétés B+B et OTE, les éléments de mission de base et optionnels inachevés par la société Art et Build. Le 3 septembre 2015, la société Art et Build a contesté cette résiliation et a demandé, à titre subsidiaire, la réparation des préjudices subis. Le lendemain, par une demande enregistrée sous le n° 1505047, la société Art et Build a introduit devant le tribunal administratif de Strasbourg un recours en contestation de validité de la résiliation. A la suite du rejet le 2 octobre 2015 par les hôpitaux civils de Colmar de sa réclamation du 3 septembre 2015, la société Art et Build a mis en demeure la personne publique de lui notifier le décompte de résiliation du marché. En l'absence de réponse, par un mémoire en réclamation du 6 novembre 2015, elle a demandé aux hôpitaux civils de Colmar de lui verser le solde de son contrat résilié. Cette demande n'ayant pas été satisfaite, elle a porté sa contestation devant le tribunal administratif de Strasbourg, par une demande enregistrée sous le n° 1601379. La société Art et Build fait appel du jugement du 6 juillet 2018 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'indemnisation des préjudices résultant de la résiliation irrégulière et non-fondée de son contrat et, d'autre part, au paiement du solde du décompte de résiliation.

Sur la résiliation :

2. Aux termes de l'article 32.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles (CCAG-PI), dans sa version issue de l'arrêté du 16 septembre 2009 : " Le pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants : (...) c) Le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels ". Selon l'article 36.1 du même document contractuel : " A la condition que les documents particuliers du marché le prévoient et que la décision de résiliation le mentionne expressément, le pouvoir adjudicateur peut faire procéder par un tiers à l'exécution des prestations prévues par le marché, aux frais et risques du titulaire, soit en cas d'inexécution par ce dernier d'une prestation qui, par sa nature, ne peut souffrir aucun retard, soit en cas de résiliation du marché prononcée pour faute du titulaire (...) ".

En ce qui concerne la régularité de la résiliation :

3. La décision de résilier un marché pour faute et la poursuivre de l'exécution des prestations aux frais et risques du titulaire sont deux mesures distinctes. Dès lors, la société Art et Build ne peut utilement soutenir, pour contester la régularité de la décision du 6 juillet 2015 résiliant à son égard le marché de maîtrise d'œuvre, que les hôpitaux civils de Colmar ne pouvaient pas, à défaut de stipulation des documents particuliers du marché le prévoyant, décider de poursuivre à ses frais et risques l'achèvement de ses missions.

En ce qui concerne le bien-fondé de la décision de résiliation :

4. En premier lieu, selon les articles 1 à 3 de l'annexe 1 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché en litige, la mission " exécution et synthèse " (EXE-SYN) du titulaire comprenait notamment " l'établissement de tous les plans d'exécution et spécifications à l'usage du chantier, en cohérence avec les plans de synthèse correspondants et définissant les travaux dans tous leurs détails, sans nécessiter pour l'entrepreneur d'études complémentaires autres que celles concernant les plans d'atelier et de chantier, relatifs aux méthodes de réalisation, aux ouvrages provisoires et aux moyens de chantier ". Le titulaire devait plus particulièrement " fournir les plans de repérage et de calepinage " et " les coupes et détails à grande échelle avec définitions des interfaces entre composants et corps d'état " du second œuvre. Les plans d'exécution devaient être remis quinze jours avant la remise du dossier " PRO " (études de projet).

5. Il résulte de l'instruction, et en particulier du compte-rendu de la réunion de coordination-pilotage n° 23 du 18 mars 2015, des rapports d'examen de l'Apave des 16 avril, 6 mai, 12 mai et 26 mai 2015, des constats contradictoires des 29 mai et 5 juin 2015 et du courrier de l'Apave du 30 octobre 2015, que l'entrepreneur titulaire du lot n°5 " menuiseries extérieures ", qui devait mettre en œuvre le prototype " châssis RDJ " pour le 20 avril 2015, a remis le 3 avril 2015 les plans d'atelier et de chantier (PAC) de cet ouvrage, réalisés sur la base des plans fournis par la société Art et Build dans le dossier de consultation des entreprises (DCE). Ces premiers plans " PAC " ont reçu le 16 avril 2015 un avis suspendu du bureau de contrôle, l'Apave, en raison notamment de l'absence de justification de l'incidence thermique des modifications proposées par rapport au dossier de consultation des entreprises et de l'absence de plans d'exécution (EXE). Ces derniers, destinés à permettre à l'entrepreneur titulaire du lot n°5 de réaliser ses plans " PAC ", n'ont été remis par la société Art et Build sur la plateforme dématérialisée dédiée à cet effet que le 6 mai 2015. Ces plans " EXE ", dont la société requérante reconnaît elle-même qu'il s'agissait en réalité de plans identiques aux plans " DCE ", n'ont pas été soumis à la validation du bureau de contrôle et n'étaient pas conformes à la réalité du chantier. L'Apave, à l'issue d'une visite effectuée le 22 mai 2015, a, à nouveau, suspendu son avis sur la pose du prototype réalisé par l'entrepreneur titulaire du lot " menuiseries extérieures " sur la base des plans de la société Art et Build, après avoir constaté des défauts d'étanchéité et d'isolation. Un deuxième prototype non-conforme, également réalisé sur la base des plans erronés fournis par la société Art et Build, a ensuite été réalisé. Ce n'est que le 17 septembre 2015 que l'Apave a donné un avis favorable aux plans " PAC " du lot n° 5 et à la pose du prototype réalisé sur la base de nouveaux plans " EXE " fournis par la société B+B. Il en résulte que le manquement de la société Art et Build à ses obligations contractuelles au titre de la mission " EXE-SYN " est établi.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 : " La direction de l'exécution du ou des contrats de travaux [DET] a pour objet : De s'assurer que les documents d'exécution ainsi que les ouvrages en cours de réalisation respectent les dispositions des études effectuées ;/ De s'assurer que les documents qui doivent être produits par l'entrepreneur, en application du contrat de travaux ainsi que l'exécution des travaux sont conformes audit contrat ; / De délivrer tous ordres de service, établir tous procès-verbaux nécessaires à l'exécution du contrat de travaux, procéder aux constats contradictoires et organiser et diriger les réunions de chantier ;/ (...) ".

7. Il résulte de l'instruction, et en particulier du courrier de mise en demeure du 15 mai 2015, que les hôpitaux civils de Colmar ont demandé depuis le 2 avril 2015 à la société Art et Build d'assurer une présence effective sur le chantier du lundi au vendredi pour " mettre rapidement en cohérence les documents réalisés par les entreprises dans le respect des dispositions architecturales et techniques ". Si la société Art et Build, dans des courriers des 1er juin et 18 juin 2015, a proposé de nommer un directeur des travaux par intérim du 2 juin au 28 juillet 2015, dans l'attente de l'arrivée d'un directeur titulaire le 1er septembre 2015, en indiquant que celui-ci ne serait présent sur le site que deux jours par semaine, en alternance avec deux chefs de projet, cette organisation temporaire, au regard des difficultés que le chantier présentait, n'a pas répondu aux exigences de présence souhaitée par le maître d'ouvrage quant à la conduite par la société de sa mission " DET ". Ce second manquement est par suite établi.

8. Par leur nature et leur ampleur, les manquements contractuels de la société Art et Build, et plus particulièrement la faute commise dans l'exercice de la mission " EXE-SYN ", sont d'un degré de gravité suffisant pour justifier la mesure de résiliation en litige.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la résiliation prononcée à l'encontre de la société Art et Build n'est ni irrégulière, ni infondée. La société requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de préjudices subis, selon elle, en raison du caractère irrégulier et infondé de la décision de résiliation partielle du 6 septembre 2015.

Sur le décompte de résiliation :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de la société Art et Build :

10. D'une part, il résulte des règles générales applicables aux contrats administratifs que l'acheteur public qui a vainement mis en demeure son cocontractant d'exécuter les prestations qu'il s'est engagé à réaliser conformément aux stipulations du contrat dispose de la faculté de faire exécuter celles-ci, aux frais et risques de son cocontractant, par une entreprise tierce. La conclusion de marchés de substitution, destinée à surmonter l'inertie, les manquements ou la mauvaise foi du cocontractant lorsqu'ils entravent l'exécution d'un marché, est possible même en l'absence de toute stipulation du contrat le prévoyant expressément, en raison de l'intérêt général qui s'attache à l'exécution des prestations. La règle selon laquelle, même dans le silence du contrat, l'acheteur public peut recourir à des marchés de substitution aux frais et risques de son cocontractant revêt le caractère d'une règle d'ordre public à laquelle le CCAG-PI ne peut déroger. Le cocontractant défaillant doit être mis à même de suivre l'exécution du marché de substitution ainsi conclu afin de lui permettre de veiller à la sauvegarde de ses intérêts, les montants découlant des surcoûts supportés par le maître d'ouvrage en raison de l'achèvement des travaux par un nouvel entrepreneur étant à sa charge.

11. D'autre part, l'article 34.5 du CCAG-PI prévoit que : " La notification du décompte par le pouvoir adjudicateur au titulaire doit être faite au plus tard deux mois après la date d'effet de la résiliation du marché ". L'article 36.4 du même CCAG stipule que : " L'augmentation des dépenses, par rapport aux prix du marché, résultant de l'exécution des prestations aux frais et risques du titulaire est à la charge du titulaire. La diminution des dépenses ne lui profite pas ". Selon l'article 34. 3 : " Le décompte de résiliation à la suite d'une décision de résiliation prise en application de l'article 32 comprend : (...) le cas échéant, le supplément des dépenses résultant de la passation d'un marché aux frais et risques du titulaire dans les conditions fixées à l'article 36 ".

12. Il doit être déduit de ces stipulations que le cocontractant de l'administration dont le marché a été résilié à ses frais et risques ne peut obtenir le décompte général de ce marché, en vue du règlement des sommes dues au titre des prestations exécutées, qu'après règlement définitif du nouveau marché passé pour l'achèvement des prestations. Les conclusions présentées au juge du contrat en vue d'obtenir le règlement des sommes contractuellement dues avant le règlement définitif du nouveau marché sont ainsi irrecevables. Ces principes, applicables lorsque le marché a été régulièrement résilié, ne font cependant pas obstacle à ce que, sous réserve que le contentieux soit lié, le cocontractant dont le marché a été résilié à ses frais et risques saisisse le juge du contrat afin de faire constater l'irrégularité ou le caractère infondé de cette résiliation ou la méconnaissance de son droit de suivi et de demander, de ce fait, le règlement des sommes qui lui sont dues, sans attendre le règlement définitif du nouveau marché après, le cas échéant, que le juge du contrat a obtenu des parties les éléments permettant d'établir le décompte général du marché résilié.

13. En l'espèce, au regard de ce qui a été dit au point 10, les hôpitaux civils de Colmar pouvaient, alors même que les stipulations particulières du marché ne le prévoyaient pas, prononcer la réalisation en litige aux frais et risques du titulaire. Il résulte toutefois de l'instruction que la société Art et Build n'a pas été mise à même de suivre les prestations exécutées dans le cadre de l'avenant du 27 juillet 2015 par lequel les hôpitaux civils de Colmar lui ont substitué la société B + B en qualité de mandataire du marché de maitrise d'œuvre et les sociétés B+B et OTE pour la poursuite des missions " exécution et synthèse " (EXE-SYN), " direction de l'exécution des travaux " (DET), " assistance aux opérations de réception " (AOR), " coordination du système de sécurité incendie " (CSSI) et " ordonnancement, pilotage, coordination " (OPC). La méconnaissance du droit de suivi de la société Art et Build fait obstacle à ce que les hôpitaux civils de Colmar mettent à sa charge, dans le décompte de résiliation, le supplément des dépenses qui résulterait, le cas échéant, de la passation de cet avenant. Par conséquent, en application des principes rappelés au point 12, la société Art et Build, qui a lié le contentieux, est recevable à demander le règlement des sommes qu'elle estime lui être contractuellement dues, sans attendre le règlement définitif du marché se poursuivant entre les hôpitaux civils de Colmar et ses anciens cotraitants.

14. Il résulte de ce qui précède que la société Art et Build est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande au motif de son irrecevabilité. Il s'ensuit que le jugement est irrégulier et doit, dans cette mesure, être annulé.

15. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande tendant au règlement du marché partiellement résilié présentée par la société Art et Build devant le tribunal administratif de Strasbourg.

En ce qui concerne le paiement des prestations contractuelles reçues :

16. Aux termes du b) de l'article 20 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché en litige : " Le règlement de sommes dues au maître d'œuvre fait l'objet d'acomptes périodiques calculés à partir de la différence entre deux décomptes successifs. Chaque décompte est lui-même établi à partir d'un état périodique des prestations établi par le maître d'œuvre, qui indique les prestations effectuées par celui-ci depuis le début du marché par référence aux éléments de la mission. Il sert de base à l'établissement, par le maître d'œuvre, du projet de décompte périodique auquel il doit être annexé ". Selon le tableau annexé à cet article, la valeur des prestations reçues au titre des missions " DET " et " EXE-SYN " est calculée au prorata de l'avancement des travaux.

17. En premier lieu, la valeur hors taxe (HT) des prestations reçues par les hôpitaux civils de Colmar au titre des missions " ESQ ", " APS ", " APD ", " PRO ", " ACT ", " CSSI " et " OPC " de la société Art et Build, en tant que mandataire du groupement et architecte, arrêtée à la somme totale de 724 709, 92 euros HT selon le décompte final réalisé par la société requérante, n'est pas contestée.

18. En second lieu, il résulte de l'instruction, et en particulier de l'avenant du 27 juillet 2015, qu'au jour de la résiliation en litige, l'état d'avancement des travaux était de 15,14 %. Si la société Art et Build soutient qu'elle avait réalisé 60,43 % de la mission " EXE-SYN " et 15,20 % de la mission " DET ", cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur l'appréciation de la valeur contractuelle des prestations reçues par le maître de l'ouvrage, laquelle doit s'apprécier, selon les stipulations du marché rappelées au point 16, au prorata de l'avancement des travaux en ce qui concerne ces deux éléments de mission. Dès lors, en application du contrat, la rémunération due à la société Art et Build doit être fixée à la somme de 118 862,93 euros HT (15,14 % de 785 092 euros HT) au titre de la mission " DET " et 3 661,12 euros HT (15, 14 % de 24 181,80 euros HT) au titre de la mission " EXE-SYN ".

19. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'inscrire dans le décompte, au crédit de la société requérante, la somme totale de 847 233,97 euros HT correspondant à la valeur contractuelle des prestations reçues par les hôpitaux civils de Colmar.

En ce qui concerne la révision des prix :

20. Il résulte de l'article 19 du CCAP du marché en litige que les prix sont révisables pour les phases " DET ", " EXE " et " OPC " selon le coefficient suivant : C = 0,85 + 0,15 * (A....m/A....0).

21. Selon la société Art et Build, les hôpitaux civils de Colmar lui doivent la somme de 1 232,96 euros au titre de la révision des prix. Ce montant a été calculé en fonction d'un index A....0 d'août 2012 de 837,6 et d'un index A....m de juillet 2015 de 108,5. Ces index ne sont pas contestés par les hôpitaux civils de Colmar. Dans ces conditions, il y a lieu d'inscrire dans le décompte, au crédit de la société requérante, la somme de 1 232,96 euros correspondant à la révision des prix.

En ce qui concerne le paiement de prestations supplémentaires :

22. Il résulte des dispositions des articles 9 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 et 30 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 que le titulaire d'un contrat de maîtrise d'œuvre est rémunéré par un prix forfaitaire couvrant l'ensemble de ses charges et missions, ainsi que le bénéfice qu'il en escompte, et que seule une modification de programme ou une modification de prestations décidées par le maître de l'ouvrage peut donner lieu à une adaptation et, le cas échéant, à une augmentation de sa rémunération. En outre, le maître d'œuvre ayant effectué des missions ou prestations non prévues au marché de maîtrise d'œuvre et qui n'ont pas été décidées par le maître d'ouvrage a droit à être rémunéré de ces missions ou prestations, nonobstant le caractère forfaitaire du prix fixé par le marché si elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, ou si le maître d'œuvre a été confronté dans l'exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat.

23. Aux termes de l'article 8 du décret du 29 novembre 1993 : " " I. Les études d'exécution permettent la réalisation de l'ouvrage. Elles ont pour objet, pour l'ensemble de l'ouvrage ou pour les seuls lots concernés : a) D'établir tous les plans d'exécution et spécifications à l'usage du chantier ainsi que les plans de synthèse correspondants ; (...) II. Lorsque les études d'exécution sont, partiellement ou intégralement, réalisées par les entreprises, le maître d'œuvre s'assure que les documents qu'elles ont établis respectent les dispositions du projet et, dans ce cas, leur délivre son visa ". Il résulte des articles 1 et 2.1 de l'annexe 1 du CCTP du marché en litige que la mission d'exécution et de synthèse confiée à la société Art et Build comprenait notamment la mise en cohérence des plans d'atelier, de montage et de mise en œuvre réalisés par les entrepreneurs.

24. Il résulte de ce qui précède qu'il appartenait à la société Art et Build, en application du contrat, de s'assurer que les plans d'ateliers respectaient les dispositions du projet et, le cas échéant, de leur délivrer un visa. Par conséquent, elle n'est pas fondée à demander l'inscription dans le décompte, à son crédit, d'une quelconque somme au titre de prestations supplémentaires correspondant au visa de 1 607 plans d'atelier et de chantier.

En ce qui concerne l'indemnisation de préjudices demandée par la société :

25. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 du présent arrêt que la société Art et Build n'établit, ni l'irrégularité, ni le caractère infondé de la décision de résiliation du 6 septembre 2015. Par conséquent, elle n'est pas fondée à demander l'inscription à son crédit, dans le décompte de résiliation, d'une quelconque somme correspondant à l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subi à raison de cette décision.

En ce qui concerne les pénalités :

26. Selon le point 12 du tableau du b) de l'article 23 du CCAP du marché en litige, en cas de retard sur la transmission de tout type de document pour lequel le maître d'œuvre est engagé ou s'est engagé sur une date, le maître de l'ouvrage se réserve le droit d'appliquer de plein droit une pénalité HT de 500 euros par jour calendaire de retard. Ce même article 23 stipule que " le calcul des jours de retard se fait à compter du lendemain de la date limite contractuelle de l'exécution effective inclus ".

27. Les hôpitaux civils de Colmar demandent au juge du contrat d'inscrire dans le décompte de résiliation, au débit de la société Art et Build, le montant des pénalités qu'elle entend lui infliger en application des stipulations du 12 du tableau du b) de l'article 23 du CCAP, au titre du retard dans la remise de plans d'exécution des lots nos 3, 4, 5, 6, 8, 9, 10, 11, 12 et 13. Ce montant s'élève à la somme de 2 683 500 euros et non 3 220 200 euros, les pénalités de retard étant, ainsi que le rappellent les stipulations générales et particulières du marché, hors champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. La société Art et Build, qui ne conteste pas qu'elle s'était engagée à remettre les plans d'exécution le 1er avril 2015, ce qui correspond à la date de fin des études d'exécution selon le planning produit par les hôpitaux civils de Colmar, à partir duquel les pénalités ont été décomptées, ne remet pas en cause la réalité des retards en se bornant à faire valoir que le tableau détaillé intitulé " calcul des pénalités de retard de remise des plans EXE " produit en défense n'a pas de valeur probante. Par ailleurs, la circonstance que le marché a été résilié, au demeurant sur le fondement d'autres manquements contractuels de la société Art et Build, ne fait pas obstacle à l'application des pénalités prévues par le marché.

28. Toutefois, si, lorsqu'il est saisi d'un litige entre les parties à un marché public, le juge du contrat doit, en principe, appliquer les clauses relatives aux pénalités dont sont convenues les parties en signant le contrat, il peut, à titre exceptionnel, saisi de conclusions en ce sens par une partie, modérer ou augmenter les pénalités de retard résultant du contrat si elles atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire, eu égard au montant du marché et compte tenu de l'ampleur du retard constaté dans l'exécution des prestations. Lorsque le titulaire du marché saisit le juge de conclusions tendant à ce qu'il modère les pénalités mises à sa charge, il ne saurait utilement soutenir que le pouvoir adjudicateur n'a subi aucun préjudice ou que le préjudice qu'il a subi est inférieur au montant des pénalités mises à sa charge. Il lui appartient de fournir aux juges tous éléments, relatifs notamment aux pratiques observées pour des marchés comparables ou aux caractéristiques particulières du marché en litige, de nature à établir dans quelle mesure ces pénalités présentent selon lui un caractère manifestement excessif. Au vu de l'argumentation des parties, il incombe au juge soit de rejeter les conclusions dont il est saisi en faisant application des clauses du contrat relatives aux pénalités, soit de rectifier le montant des pénalités mises à la charge du titulaire du marché dans la seule mesure qu'impose la correction de leur caractère manifestement excessif.

29. Il résulte de l'instruction que le montant des pénalités dont la société Art et Build est redevable en application des clauses du contrat représente 41 % du montant total du marché HT qui s'élève à 6 513 514,21 euros selon l'acte d'engagement. Au regard de l'ampleur des retards constatés, et alors que la société Art et Build ne présente aucun élément d'appréciation ou de comparaison permettant d'établir qu'au cas d'espèce le montant de ces pénalités présenterait un caractère manifestement excessif, il n'y a pas lieu de modérer leur montant.

En ce qui concerne l'indemnisation de préjudices demandée par les hôpitaux civils de Colmar :

30. En premier lieu, si les hôpitaux civils de Colmar demandent à être indemnisés du préjudice financier, d'une part, résultant du coût des constats contradictoires nécessaires pour établir la réalité des fautes contractuelles commises par la société Art et Build, à l'origine de la mesure de résiliation, et d'autre part, résultant de la mobilisation de leur personnel pour se substituer à leur co-contractant défaillant, ils n'apportent aucun élément de nature à établir la réalité des coûts exposés.

31. En second lieu, il résulte de l'instruction, que la reprise des études d'étanchéité et des prototypes du lot n° 5 " menuiseries extérieures " a été exécutée dans le cadre de l'avenant conclu le 27 juillet 2015 entre les hôpitaux civils de Colmar et les anciens cotraitants solidaires de la société Art et Build. Ainsi qu'il a été dit au point 13, à défaut d'avoir respecté le droit de suivi de la requérante, le maître de l'ouvrage ne peut faire supporter à la société requérante les éventuels surcoûts, au demeurant non établis, résultant de l'exécution de ces prestations.

32. Il résulte de ce qui précède que les hôpitaux civils de Colmar ne sont pas fondés à demander l'inscription dans le décompte de résiliation, au débit de la société Art et Build, des sommes qu'ils réclament au titre de l'indemnisation de ces préjudices.

En ce qui concerne le solde :

33. Il résulte de tout ce qui précède que le montant des prestations réalisées par la société Art et Build, à porter à son crédit, s'élève à la somme de 847 233,97 euros HT, auquel il faut ajouter la révision des prix d'un montant de 1 232,86 euros HT. Il y a lieu d'inscrire sur le décompte de résiliation, au débit de la société Art et Build, la somme de 804 712,17 HT versée, correspondant aux paiements déjà effectués par les hôpitaux civils de Colmar à ce jour, et la somme de 2 683 500 euros au titre des pénalités de retard. Ainsi, la somme totale de 3 488 212,17 euros HT doit être inscrite au débit de la société requérante tandis le crédit s'élève à la somme de 848 466,83 euros HT. Dès lors, la société Art et Build est redevable d'une somme de 2 639 745,34 euros HT envers les hôpitaux civils de Colmar au titre du solde du marché résilié. Par conséquent, ses conclusions tendant à la condamnation des hôpitaux civils de Colmar à lui verser la somme de 704 535, 31 euros TTC euros en règlement du marché partiellement résilié doivent être rejetées.

Sur les frais d'instance :

34. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par la société Art et Build au titre des frais de l'instance soit mise à la charge des hôpitaux civils de Colmar qui n'ont pas la qualité de partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'appelante une somme de 1 500 euros à verser à l'intimé sur le fondement de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1505047, 1601379 du tribunal administratif de Strasbourg du 6 juillet 2018 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de la société Art et Build Architectes tendant au paiement du solde du décompte de résiliation du marché conclu avec les hôpitaux civils de Colmar.

Article 2 : La demande de la société Art et Build Architectes tendant au paiement du solde du décompte de résiliation du marché conclu avec les hôpitaux civils de Colmar est rejetée.

Article 3 : La société Art et Build Architectes versera aux hôpitaux civils de Colmar une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Art et Build Architectes et aux hôpitaux civils de Colmar.

2

N° 18NC02425


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02425
Date de la décision : 28/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02 MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. - FIN DES CONTRATS. - RÉSILIATION. - DÉCOMPTE GÉNÉRAL D'UN MARCHÉ RÉSILIÉ - DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 34.5 DU CCAG-PI PRÉVOYANT LA NOTIFICATION DU DÉCOMPTE AU PLUS TARD APRÈS LA DATE D'EFFET DE LA RÉSILIATION DU MARCHÉ. DISPOSITIONS DE L'ART. 34.3 DU CCAG-PI PRÉVOYANT L'INSCRIPTION DANS LE DÉCOMPTE DE RÉSILIATION DU SUPPLÉMENT DES DÉPENSES RÉSULTANT DE LA PASSATION D'UN MARCHÉ AUX FRAIS ET RISQUES DU TITULAIRE - DROIT DE SUIVI DES OPÉRATIONS EXÉCUTÉES DANS LE CADRE DU MARCHÉ DE SUBSTITUTION. - POSSIBILITÉ DE SAISIR LE JUGE DU CONTRAT AFIN DE FAIRE CONSTATER LA MÉCONNAISSANCE DU DROIT DE SUIVI (1) ET DE DEMANDER LE RÈGLEMENT DES SOMMES DUES - EXISTENCE. (2).

39-04-02 Il doit être déduit des stipulations de l'article 34.3 du CCAG-PI que le cocontractant de l'administration dont le marché a été résilié à ses frais et risques ne peut obtenir le décompte général de ce marché, en vue du règlement des sommes dues au titre des prestations exécutées, qu'après règlement définitif du nouveau marché passé pour l'achèvement des prestations. Les conclusions présentées au juge du contrat en vue d'obtenir le règlement des sommes contractuellement dues avant le règlement définitif du nouveau marché sont ainsi irrecevables. Ces principes, applicables lorsque le marché a été régulièrement résilié, ne font cependant pas obstacle à ce que, sous réserve que le contentieux soit lié, le cocontractant dont le marché a été résilié à ses frais et risques saisisse le juge du contrat afin de faire constater l'irrégularité ou le caractère infondé de cette résiliation ou la méconnaissance de son droit de suivi et demande le règlement des sommes qui lui sont dues, sans attendre le règlement définitif du nouveau marché après, le cas échéant, que le juge du contrat a obtenu des parties les éléments permettant d'établir le décompte général du marché résilié. ......[RJ1]...[RJ2].


Références :

[RJ1]

Rappr. CE, 18 décembre 2020, Société Treuils et Grues Labor, n° 433386, aux Tables. ...

[RJ2]

Cf. CE, 15 novembre 2012, Société Axima Concept, n° 356832, T. pp. 851-854.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SELARL PAREYDT-GOHON

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-28;18nc02425 ?
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