La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2023 | FRANCE | N°21NC01770

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 14 mars 2023, 21NC01770


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros, portée à 100 000 euros dans le dernier état de ses écritures, en réparation du préjudice psychologique résultant de la perquisition administrative dont il a fait l'objet le 6 janvier 2016 à son domicile.

Par un recours distinct, M. I... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite par laq

uelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa réclamation préalable présentée par co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros, portée à 100 000 euros dans le dernier état de ses écritures, en réparation du préjudice psychologique résultant de la perquisition administrative dont il a fait l'objet le 6 janvier 2016 à son domicile.

Par un recours distinct, M. I... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa réclamation préalable présentée par courrier du 8 janvier 2020 et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 100 000 euros en réparation du préjudice physique résultant de cette même perquisition.

Par un jugement nos 1902630 et 2000771 du 27 avril 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes et mis les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 720 euros, à la charge de l'Etat.

Mme B... C... née E... a demandé au tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice résultant de la même perquisition administrative.

Par un jugement n° 1902788 du 27 avril 2021, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Par trois recours distincts, Mme B... C... née E..., agissant en qualité de représentante légale de ses trois fils M. A... D..., M. F... C... et M. G... C..., a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner l'Etat à lui verser des sommes de 50 000 euros en réparation du préjudice subi par chacun d'eux et résultant de la même perquisition administrative.

Par un jugement nos 1902790, 1902791 et 1902871 du 27 avril 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 17 juin 2021 sous le n° 21NC01770, M. I... C..., représenté par Me Ludot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1902630 et 2000771 du 27 avril 2021 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant qu'il a rejeté sa demande enregistrée sous le n° 2000771 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa réclamation préalable présentée par courrier du 8 janvier 2020 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice physique ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'exécution de la perquisition la nuit était fautive, ainsi que l'a estimé la cour dans un précédent arrêt ; la violence avec laquelle s'est déroulée la perquisition est nécessairement fautive ; la faute lourde de l'Etat est caractérisée ; l'ordre de perquisition n'a été présenté qu'après la perquisition ;

- il a subi des séquelles physiques et psychiques à l'issue de cette perquisition ; il sollicite l'indemnisation de son préjudice physique.

Par un mémoire enregistré le 25 janvier 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable en l'absence de moyens d'appel ;

- à titre subsidiaire, la demande de première instance est irrecevable ; elle est tardive ; elle se heurte à l'autorité de la chose jugée par la cour dans son arrêt du 26 septembre 2017 ;

- à titre infiniment subsidiaire, la requête n'est pas fondée ; seule la faute tenant au caractère nocturne de la perquisition peut être invoquée ; les préjudices invoqués ne présentent pas de lien avec cette dernière ; ils ne sont pas établis ; les violences alléguées ne sont pas établies ; en toute hypothèse, le montant de l'indemnisation susceptible d'être accordée à l'intéressé devrait être ramené à de plus justes proportions.

II. Par une requête enregistrée le 17 juin 2021 sous le n° 21NC01771, M. I... C..., représenté par Me Ludot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1902630 et 2000771 du 27 avril 2021 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant qu'il a rejeté sa demande enregistrée sous le n° 1902630 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa réclamation préalable présentée par courrier du 8 janvier 2020 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice psychologique ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction n'est pas tenue par la qualification de la faute indiquée dans la demande préalable ;

- l'exécution de la perquisition la nuit était fautive, ainsi que l'a estimé la cour dans un précédent arrêt ; la violence avec laquelle s'est déroulée la perquisition est nécessairement fautive ; la faute lourde de l'Etat est caractérisée ; l'ordre de perquisition n'a été présenté qu'après la perquisition ;

- il a subi des séquelles physiques et psychiques à l'issue de cette perquisition dont il demande l'indemnisation, en tant que victime directe et que victime indirecte des dommages subis par son épouse et leurs enfants ; il sollicite l'indemnisation de son préjudice psychologique.

Par un mémoire enregistré le 25 janvier 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable en l'absence de moyens d'appel ;

- à titre subsidiaire, la demande de première instance est irrecevable ; elle est tardive ; elle se heurte à l'autorité de la chose jugée par la cour dans son arrêt du 26 septembre 2017 ;

- à titre infiniment subsidiaire, la requête n'est pas fondée ; seule la faute tenant au caractère nocturne de la perquisition peut être invoquée ; les préjudices invoqués ne présentent pas de lien avec cette dernière ; ils ne sont pas établis ; les violences alléguées ne sont pas établies ; en toute hypothèse, le montant de l'indemnisation susceptible d'être accordée à l'intéressé devrait être ramené à de plus justes proportions.

III. Par une requête enregistrée le 17 juin 2021 sous le n° 21NC01772, Mme B... C... née E... représentée par Me Ludot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1902788 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat trois sommes de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à juste titre que le tribunal n'a pas fait droit à la fin de non-recevoir tirée de l'absence de réclamation préalable ;

- c'est à juste titre que le tribunal a écarté le moyen de défense tiré de l'autorité de la chose jugée ;

- la juridiction n'est pas tenue par la qualification de la faute indiquée dans la demande préalable ;

- l'exécution de la perquisition la nuit était fautive, ainsi que l'a estimé la cour dans un précédent arrêt ; la violence avec laquelle s'est déroulée la perquisition est nécessairement fautive ; la faute lourde de l'Etat est caractérisée ; l'ordre de perquisition n'a été présenté qu'après la perquisition ;

- elle a subi des séquelles à l'issue de cette perquisition dont elle demande l'indemnisation, en tant que victime directe et que victime indirecte des dommages subis par son époux et leurs enfants.

Par un mémoire enregistré le 25 janvier 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable en l'absence de moyens d'appel ;

- à titre subsidiaire, la demande de première instance est irrecevable ; elle est tardive ; elle se heurte à l'autorité de la chose jugée par la cour dans son arrêt du 26 septembre 2017 ;

- à titre infiniment subsidiaire, la requête n'est pas fondée ; seule la faute tenant au caractère nocturne de la perquisition peut être invoquée ; les préjudices invoqués ne présentent pas de lien avec cette dernière ; ils ne sont pas établis ; les violences alléguées ne sont pas établies.

IV. Par une requête enregistrée le 17 juin 2021 sous le n° 21NC01773, Mme B... C... née E..., représentée par Me Ludot, agissant en qualité de représentante légale de ses trois fils M. A... D..., M. F... C... et M. G... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1902790, 1902791 et 1902871 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de condamner l'Etat à verser trois sommes de 50 000 euros en réparation du préjudice subi par chacun de ses trois enfants ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à juste titre que le tribunal a écarté le moyen de défense tiré de l'autorité de la chose jugée à l'encontre des conclusions présentées au profit de son fils M. A... D... ;

- la juridiction n'est pas tenue par la qualification de la faute indiquée dans la demande préalable ;

- l'exécution de la perquisition la nuit était fautive, ainsi que l'a estimé la cour dans un précédent arrêt ; la violence avec laquelle s'est déroulée la perquisition est nécessairement fautive ; la faute lourde de l'Etat est caractérisée ; l'ordre de perquisition n'a été présenté qu'après la perquisition ;

- chacun des enfants a subi des séquelles à l'issue de cette perquisition dont il est demandé l'indemnisation, en tant que victime directe et que victime indirecte des dommages subis par ses parents et les autres membres de la fratrie.

Par un mémoire enregistré le 25 janvier 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable en l'absence de moyens d'appel ;

- à titre subsidiaire, la demande de première instance est irrecevable ; elle est tardive ; elle se heurte à l'autorité de la chose jugée par la cour dans son arrêt du 26 septembre 2017 ;

- à titre infiniment subsidiaire, la requête n'est pas fondée ; seule la faute tenant au caractère nocturne de la perquisition peut être invoquée ; les préjudices invoqués ne présentent pas de lien avec cette dernière ; ils ne sont pas établis ; les violences alléguées ne sont pas établies ; l'enfant Romaïssa est né deux ans après les faits.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme H...,

- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. En exécution d'une décision prise le 6 janvier 2016 par le préfet de la Marne, le domicile de M. C... et Mme E..., son épouse, a, sur le fondement de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, été perquisitionné le jour même, entre 22h10 et 00h05. Par un arrêt

n° 17NC00091-17NC00246 du 26 septembre 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté le recours en annulation exercé par ces derniers contre cet ordre de perquisition et a condamné l'Etat à verser respectivement à Mme E... et son fils, M. A... D..., une somme de 750 euros en réparation du préjudice moral subi en raison du caractère nocturne de cette perquisition.

2. M. C... et Mme E..., agissant en son nom propre et en qualité de représentante légale de ses trois enfants, ont saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de six demandes sollicitant la condamnation de l'Etat à les indemniser des préjudices qu'ils estiment imputables aux modalités selon lesquelles cette perquisition a été réalisée. Par quatre requêtes, qu'il y a lieu de joindre, ils relèvent appel des jugements par lesquels le tribunal a rejeté leurs demandes.

Sur le cadre juridique :

3. Saisi d'une demande indemnitaire, il appartient au juge administratif d'accorder réparation des préjudices de toute nature, directs et certains, qui résultent de l'illégalité fautive entachant l'ordre de perquisition. Le caractère direct du lien de causalité entre l'illégalité commise et le préjudice allégué ne peut notamment être retenu dans le cas où la décision ordonnant la perquisition est seulement entachée d'une irrégularité formelle ou procédurale et que le juge considère, au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties devant lui, que la décision ordonnant la perquisition aurait pu être légalement prise par l'autorité administrative, au vu des éléments dont elle disposait à la date à laquelle la perquisition a été ordonnée.

4. En outre, les conditions matérielles d'exécution des perquisitions sont susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat à l'égard des personnes concernées par les perquisitions. Ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2016-536 QPC du 19 février 2016, les conditions de mise en œuvre des perquisitions ordonnées sur le fondement de l'article 11 de la loi du 3 avril 1955 doivent être justifiées et proportionnées aux raisons ayant motivé la mesure, dans les circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence. En particulier, la perquisition d'un domicile de nuit doit être justifiée par l'urgence ou l'impossibilité de l'effectuer de jour. Sauf s'il existe des raisons sérieuses de penser que le ou les occupants du lieu sont susceptibles de réagir à la perquisition par un comportement dangereux ou de détruire ou dissimuler des éléments matériels, l'ouverture volontaire du lieu faisant l'objet de la perquisition doit être recherchée et il ne peut être fait usage de la force pour pénétrer dans le lieu qu'à défaut d'autre possibilité. Lors de la perquisition, il importe de veiller au respect de la dignité des personnes et de prêter une attention toute particulière à la situation des enfants mineurs qui seraient présents. L'usage de la force ou de la contrainte doit être strictement limité à ce qui est nécessaire au déroulement de l'opération et à la protection des personnes. Lors de la perquisition, les atteintes aux biens doivent être strictement proportionnées à la finalité de l'opération ; aucune dégradation ne doit être commise qui ne serait justifiée par la recherche d'éléments en rapport avec l'objet de la perquisition.

5. Toute faute commise dans l'exécution des perquisitions ordonnées sur le fondement de la loi du 3 avril 1955 est susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat. Il appartient au juge administratif, saisi d'une demande en ce sens, d'apprécier si une faute a été commise dans l'exécution d'une perquisition, au vu de l'ensemble des éléments débattus devant lui, en tenant compte du comportement des personnes présentes au moment de la perquisition et des difficultés de l'action administrative dans les circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence. Les résultats de la perquisition sont par eux-mêmes dépourvus d'incidence sur la caractérisation d'une faute. En cas de faute, il appartient au juge administratif d'accorder réparation des préjudices de toute nature, directs et certains, qui en résultent.

6. Si la responsabilité de l'Etat pour faute est seule susceptible d'être recherchée par les personnes concernées par une perquisition, la responsabilité de l'Etat à l'égard des tiers est engagée sans faute, sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, en cas de dommages directement causés par des perquisitions ordonnées en application de l'article 11 de la loi du 3 avril 1955. Doivent être regardés comme des tiers par rapport à la perquisition les personnes autres que la personne dont le comportement a justifié la perquisition ou que les personnes qui lui sont liées et qui étaient présentes dans le lieu visé par l'ordre de perquisition ou ont un rapport avec ce lieu. Doivent notamment être regardés comme des tiers les occupants ou propriétaires d'un local distinct de celui visé par l'ordre de perquisition mais perquisitionné par erreur ainsi que le propriétaire du lieu visé par l'ordre de perquisition, dans le cas où ce propriétaire n'a pas d'autre lien avec la personne dont le comportement a justifié la perquisition que le bail concernant le lieu perquisitionné.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

7. La décision dont M. C... demande l'annulation a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de sa demande initiale. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait entachée la décision qui a lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige. Les conclusions aux fins d'annulation de la décision rejetant la réclamation indemnitaire de M. C... ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal.

Sur la responsabilité :

8. Pour demander la condamnation de l'Etat à les indemniser, sur le fondement de la faute, les requérants ne se prévalent d'aucune illégalité de la mesure de perquisition mais en contestent les conditions d'exécution.

En ce qui concerne les fautes :

9. D'une part, comme il a été déjà jugé par la présente cour dans son arrêt nos 17NC00091-17NC00246 du 26 septembre 2017, il n'est ni établi ni même allégué par l'administration qu'une urgence particulière rendait nécessaire que la perquisition soit réalisée de nuit ou qu'il aurait été impossible de la réaliser au cours de la journée. Dès lors, la réalisation nocturne de la perquisition constitue une faute engageant la responsabilité de l'Etat.

10. D'autre part, en revanche, comme il a été déjà jugé par la présente cour dans son arrêt nos 17NC00091-17NC00246 du 26 septembre 2017, si les requérants font état de violences, les éléments qu'ils produisent sont insuffisants pour tenir leur existence pour établie, en l'absence en particulier d'éléments de preuve en ce sens recueillis à proximité de la commission des faits reprochés. A cet égard, les certificats médicaux produits sont insuffisants, au regard des éléments qu'ils relatent, pour permettre d'établir de manière suffisamment probante l'existence de violences. Par ailleurs, si les consorts C... indiquent qu'ils n'ont pris connaissance qu'à la fin de l'intervention des forces de l'ordre qu'il s'agissait d'une perquisition administrative réalisée dans le cadre de l'état d'urgence, la circonstance ainsi invoquée manque en fait et ne saurait donc, en toute hypothèse, présenter le caractère d'une faute engageant la responsabilité de l'administration, dans la mesure où il ressort des mentions du procès-verbal de perquisition, non efficacement contredites, que l'ordre de perquisition a été notifié aux intéressés au début de l'opération.

En ce qui concerne les préjudices :

11. En premier lieu, il ne résulte pas de l'instruction que la seule faute établie, tenant au caractère nocturne de la perquisition, aurait été, spécifiquement, à l'origine des atteintes dont se prévaut M. I... C..., consistant en des troubles anxio-dépressifs réactionnels qui ont nécessité des soins psychiatriques depuis 2018, soit deux ans après les faits, ainsi qu'un diabète et une perte d'audition.

12. En deuxième lieu, il ne résulte pas davantage de l'instruction que la seule faute engageant la responsabilité de l'administration aurait été à l'origine des bouleversements dont se prévalent les requérants au sein du foyer familial. En particulier, Mme E... épouse C..., agissant en son nom propre et en qualité de représentante de ses enfants mineurs, ne peut se prévaloir de troubles dans les conditions d'existence résultant de l'état de santé de son époux dont il vient d'être dit qu'il n'est pas imputable à la faute retenue au point n° 9 du présent arrêt. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que M. A... D... et M. F... C... auraient été victimes de troubles spécifiquement imputables au caractère nocturne de la perquisition.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir invoquées à l'encontre des requêtes d'appel et des demandes de première instance, ni sur les autres moyens de défense soulevés par l'administration, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté leurs demandes.

Sur les dépens :

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de revenir sur la dévolution des frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés, telle qu'elle a été décidée par le jugement nos 1902630 et 2000771 du 27 avril 2021.

Sur les frais de l'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que demandent les requérants à ce titre.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 21NC01770, 21NC01771, 21NC01772 et 21NC01773 sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... C..., à Mme B... C... née E..., à M. A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 14 février 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mars 2023.

La rapporteure,

Signé : A. H...La présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

Nos 21NC01770, 21NC01771, 21NC01772, 21NC01773


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01770
Date de la décision : 14/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : LUDOT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-03-14;21nc01770 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award