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19/10/2023 | FRANCE | N°21NC01505

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 19 octobre 2023, 21NC01505


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012, et la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1807733 du 12 jan

vier 2021, le tribunal administratif de Strasbourg n'a que partiellement fait droit à ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012, et la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1807733 du 12 janvier 2021, le tribunal administratif de Strasbourg n'a que partiellement fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 mai 2021 et un mémoire enregistré le 24 juillet 2023, M. D... B..., représenté par Me Kretz, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 janvier 2021 en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités laissées à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité dès lors qu'il a été privé de la possibilité, prévue par la charte du contribuable vérifié rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, de saisir le supérieur hiérarchique des difficultés rencontrées dans le déroulement du contrôle ainsi que, postérieurement à la réponse aux observations du contribuable, des désaccords persistants avec le vérificateur ; en l'espèce, si le premier entretien du 12 février 2016 a bien été mené par la vérificatrice, l'inspectrice divisionnaire a personnellement pris en charge le déroulement de la suite de la procédure d'examen de situation fiscale personnelle en devenant sa seule interlocutrice à compter du 2ème entretien du 26 septembre 2016 et en signant la proposition de rectification 3924 du 15 décembre 2016 ainsi que la réponse aux observations du contribuable du 23 mars 2017 ; alors que l'avis d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle mentionnait le nom de l'inspectrice divisionnaire comme recours hiérarchique, le service ne l'a pas informé de son remplacement par un autre inspecteur divisionnaire ; la circonstance qu'il n'ait pas formulé de demande ne saurait lui être opposée, dès lors qu'il n'avait aucun intérêt à saisir l'inspectrice divisionnaire des difficultés qu'il rencontrait avec elle-même dans le déroulement du contrôle ;

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité dès lors qu'il n'a pas bénéficié du délai de trente jours prévu par l'article L. 11 du livre des procédures fiscales pour répondre à la demande de renseignements formulée en vue de la réunion de synthèse, notifiée le 30 novembre 2016, soit seize jours avant la date de la proposition de rectification ; cette demande de renseignements ne peut être regardée comme réitérant celles formulées antérieurement par l'administration ; la demande de renseignements portait sur des éléments relatifs à la valeur des véhicules qui ne pouvaient être déduits des documents obtenus à la suite de l'exercice d'un droit de communication auprès de la préfecture ; le service lui a opposé la circonstance qu'il n'avait pas produit les pièces demandées lors de la réunion de synthèse pour fonder l'ensemble des rectifications qui lui a été notifié par la proposition de rectification du 15 décembre 2016 et procéder de manière non contradictoire à l'évaluation des véhicules en cause ;

- la réponse aux observations du contribuable est insuffisamment motivée en ce qui concerne sa contestation des revenus distribués mis à sa charge à raison de la minoration de produits correspondant aux réparations effectuées sur son véhicule personnel de marque DS, immatriculé 2023 WY 67 ;

- les factures de réparation relatives au véhicule de marque DS, immatriculé 2023 WY 67, dont il est le propriétaire, ne pouvaient être prises en compte en tant que minoration de produits et réintégrées dans les bénéfices de la société pour être imposées en tant que revenus distribués après application d'un coefficient de marge alors qu'il ne s'agit que d'un acte anormal de gestion ne devant conduire qu'à la remise en cause de la charge déduite à tort et de la taxe sur la valeur ajoutée déductible figurant sur les factures du sous-traitant ;

- s'agissant des factures relatives au véhicule 2CV immatriculé 4546 RU 78 lui appartenant, les travaux ont été engagés dans l'intérêt de l'entreprise ; en outre, la distribution prétendue ne peut avoir eu lieu qu'au moment de la facture du sous-traitant du 20 décembre 2013 et ne pouvait dès lors être imposée entre ses mains au titre de l'année 2014 ;

-s'agissant des factures relatives au véhicule HY, immatriculé 6299 ZS 67, lui appartenant, les travaux ont été également engagés dans l'intérêt de l'entreprise ; à titre subsidiaire, l'application du coefficient de marge n'est pas davantage fondée que pour le véhicule de marque DS précédemment mentionné ;

- les rectifications qui lui ont été notifiées sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts à raison de libéralités qui lui auraient été consenties par la SARL Ami de la 2 Cv en ce qui concerne les véhicules immatriculés DB 489 ML, DH 421 DK, DJ 095 QX et DH 546 LA ne sont pas fondées en ce que l'immatriculation ne constitue pas un titre de propriété ; l'administration ne démontre pas que ces véhicules, qui ne figuraient pas sur le livre de police, appartenaient à la société à la date des rehaussements notifiés ; les évaluations des véhicules immatriculés DB 489 ML et DH 421 DK sont exagérées ; s'agissant du véhicule 2 CV de 1952, immatriculé DH 546 LA, c'est à tort que le tribunal, tout en admettant que la cession est intervenue en 2015, a maintenu une partie de l'imposition au motif, non démontré, que ce véhicule a été mis à sa disposition de juillet 2014 à juillet 2015 ;

- l'administration ne démontre pas son intention d'éluder l'impôt en ce qui concerne les pénalités dont sont assorties les rectifications notifiées en matière de revenus fonciers ; elle n'apporte pas davantage la preuve du caractère délibéré des omissions et insuffisances déclaratives qui lui sont reprochées s'agissant des revenus distribués mis à sa charge à raison d'apports injustifiés inscrits au crédit de son compte courant d'associé ouvert au sein des comptes de la SARL Ami de la 2 cv ainsi qu'à raison des minorations de produits réintégrées dans les bases imposables de cette même société ; l'administration ne démontre pas non plus qu'il aurait délibérément éludé l'imposition due à raison des avantages occultes consentis par la SARL Ami de la 2 cv dès lors que ces rectifications ne sont pas fondées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourguet-Chassagnon,

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... B... est le gérant et l'associé unique de la SARL Ami de la 2 cv et de la société civile immobilière (SCI) Les Six Troènes. La SARL Ami de la 2 cv, qui exerce une activité de négoce de véhicules et de pièces détachées pour véhicules neufs et d'occasion, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er juillet 2011 au 30 juin 2014, à l'issue de laquelle lui ont été notifiés par une proposition de rectification modèle 3924 du 18 décembre 2015, selon la procédure contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour l'ensemble de la période vérifiée. La SCI Les six troènes, société de personnes soumise à l'impôt sur le revenu, a également fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des années 2012 à 2014. M. D... B... a, quant à lui, fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2013 et 2014. A l'issue des vérifications de comptabilité des deux sociétés, par une proposition de rectification 2120 du 18 décembre 2015, l'administration a notifié à M. D... B..., selon la procédure contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 à 2014, d'une part, dans la catégorie des revenus fonciers et, d'autre part, dans celle des revenus de capitaux mobiliers à raison de revenus réputés distribués par la SARL Ami de la 2 cv. Après que le contribuable a présenté ses observations par un courrier du 3 février 2016, les suppléments d'imposition mis à sa charge ont été maintenus partiellement dans la réponse aux observations du contribuable du 22 mars 2016. A l'issue de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle, le service lui a notifié, selon la procédure contradictoire, par une proposition de rectification modèle 3924 du 15 décembre 2016, des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2013 et 2014, dans la catégorie des revenus distribués à raison d'avantages occultes consentis par la SARL Ami de la 2 cv. A la suite des observations du contribuable du 31 janvier 2017, reçues le 10 février 2017 par l'administration dans le délai prorogé, les suppléments d'imposition mis à sa charge ont été maintenus dans la réponse aux observations du contribuable du 23 mars 2017. Les compléments d'imposition en résultant, assortis de l'intérêt de retard et de pénalités ont été mis en recouvrement le 30 avril 2017, pour un montant total de '129 622' euros. M. D... B... a présenté le 23 mai 2017 une réclamation visant à obtenir la décharge de ces impositions supplémentaires. Cette réclamation a fait l'objet d'une décision de rejet du 15 novembre 2018. M. D... B... relève appel du jugement du 12 janvier 2021, en tant que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires.'''

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la garantie du recours auprès du supérieur hiérarchique :

2. En premier lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ". La charte des droits et obligations du contribuable vérifié (millésime 2016) indique en sa page 4 que : " En cas de difficultés, vous pouvez vous adresser à l'inspecteur divisionnaire ou principal et ensuite à l'interlocuteur désigné par le directeur. Leur rôle vous est précisé plus loin (voir p. 20). Vous pouvez les contacter pendant le contrôle. (...) ". Elle énonce également en sa page 20 que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les rectifications envisagées, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur divisionnaire ou principal ". Un contribuable qui n'a, à aucun moment de la procédure de vérification, manifesté son intention de demander à bénéficier de la garantie lui ouvrant la faculté de s'adresser au supérieur hiérarchique du vérificateur en cas de difficultés affectant le déroulement des opérations de contrôle ou qui s'est abstenu de présenter une demande en cas de désaccord persistant avec le vérificateur après la notification de la réponse à ses observations ne saurait soutenir utilement devant le juge de l'impôt qu'il aurait été privé de l'une ou l'autre de ces garanties et que la procédure d'imposition serait, pour ce motif, irrégulière. Toutefois, il peut utilement faire valoir que, compte tenu des circonstances de fait, et notamment des informations que l'administration a portées à sa connaissance depuis l'engagement du contrôle, l'administration l'a induit en erreur sur la possibilité d'obtenir un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur sur les difficultés rencontrées au cours des opérations de contrôle ou sur les points où persiste un désaccord avec le vérificateur.

3. Si la charte des droits et obligations du contribuable vérifié prévoit la faculté pour le contribuable de saisir le supérieur hiérarchique des difficultés rencontrées au cours des opérations de contrôle ou en cas de désaccord persistant avec le vérificateur, elle n'impose pas à l'administration de notifier le nom du supérieur hiérarchique ni d'informer le contribuable du remplacement de l'inspecteur principal ou divisionnaire en temps utile.

4. D'une part, le requérant soutient qu'il a été privé de la possibilité d'échanger utilement avec le supérieur hiérarchique de la vérificatrice dès lors que l'inspectrice divisionnaire nommément désignée par l'avis d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle a remplacé la vérificatrice en cours de contrôle à compter des échanges intervenus en vue de la préparation de la 2ème réunion et jusqu'à l'issue de la procédure d'imposition. N'ayant pas été informé de la nomination d'un agent de rang supérieur afin de lui soumettre les difficultés qu'il rencontrait avec l'inspectrice divisionnaire, il a été dissuadé de demander à bénéficier de la garantie en cause, n'ayant aucun intérêt à s'entretenir avec cette dernière, en sa qualité de supérieure hiérarchique, des difficultés découlant de la partialité avec laquelle elle menait, en qualité de vérificatrice, les opérations de contrôle à son encontre. Il résulte toutefois des règles ci-dessus rappelées que sa décision de ne pas demander le bénéfice du recours hiérarchique, prévu par les dispositions précitées de la charte en sa page 4, ne saurait être regardée comme ayant été induite par le défaut d'information qu'il reproche au service. Au demeurant, et en tout état de cause, M. D... B... ne démontre pas avoir rencontré des difficultés particulières avec l'inspectrice au cours de l'examen de sa situation fiscale personnelle en se bornant à soutenir que cette dernière a fait preuve de partialité à son encontre. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir avoir été privé de la garantie relative à la possibilité d'un entretien avec le supérieur hiérarchique en cours de contrôle.

5. D'autre part, M. D... B... soutient également avoir été dissuadé de saisir le supérieur hiérarchique des points de désaccord persistants avec la vérificatrice dès lors que les opérations de contrôle ont été menées par l'inspectrice divisionnaire elle-même, laquelle a également signé la proposition de rectification ainsi que la réponse aux observations du contribuable, alors que l'avis d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle la désignait comme l'agent à contacter dans le cadre du recours hiérarchique pendant et après le contrôle. Toutefois, pour le motif exposé au point 4 du présent arrêt, sa décision de ne pas demander le bénéfice du recours hiérarchique prévu par les dispositions précitées de la charte en sa page 20 ne saurait être regardée comme ayant été induite par le défaut d'information reproché au service, relatif au remplacement de l'inspectrice divisionnaire en tant que supérieure hiérarchique de la vérificatrice. Au demeurant et en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration n'aurait pas procédé à la nomination d'un autre agent pour débattre avec lui des désaccords persistants dès lors que l'inspectrice divisionnaire, en tant que signataire de la proposition de rectification et de la réponse aux observations du contribuable y apparait expressément comme l'agent en charge du contrôle. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir avoir été privé du bénéfice de la garantie du recours hiérarchique ouverte après le contrôle, en l'absence de demande de sa part. Pour le même motif, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la procédure d'imposition a porté atteinte aux droits de la défense et en déduire que la décharge de l'ensemble des majorations mises à sa charge à l'issue de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle doit être prononcée, en application des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales :

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. / Elle contrôle, également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursements, ou d'acquitter tout ou partie d'une imposition au moyen d'une créance sur l'Etat. / A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés ". Aux termes de l'article L. 11 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " A moins qu'un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification ".

7. Il résulte de l'instruction que M. D... B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2012 à 2014, que ce contrôle a débuté le 8 janvier 2016 et s'est achevé par la notification de la proposition de rectification du 15 décembre 2016. Au cours de la procédure de contrôle, la vérificatrice a sollicité par courrier du 19 janvier 2016, en vue de la tenue d'une deuxième réunion, la communication de la liste exacte des véhicules automobiles appartenant en 2013 et 2014 aux membres du foyer fiscal ainsi que leurs dates et prix d'achat. Cette demande a été réitérée par l'inspectrice divisionnaire par courrier du 12 septembre 2016 en vue de la préparation d'un nouvel entretien, cette dernière sollicitant également les justificatifs des ventes de véhicules qui correspondraient à certains crédits bancaires détaillés par ailleurs dans son envoi. Par un courrier daté du 28 novembre 2016, il a été demandé au contribuable, dans la perspective de l'entretien de synthèse du 7 décembre 2016, de bien vouloir produire les justificatifs d'achat et de règlement ainsi que les copies des certificats d'immatriculation concernant les achats et les ventes de huit véhicules appartenant à M. et Mme D... B... et à leurs fils en 2013 et 2014. La demande de production de pièces du 28 novembre 2016, qui n'a d'ailleurs pas été adressée au contribuable au moyen d'un formulaire normalement utilisé pour les demandes prévues à l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, a été formulée par le service dans le cadre de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle. Il résulte ainsi de l'instruction que cette demande, qui vise à obtenir la justification de crédits portés sur les comptes bancaires du contribuable, constitue un élément du dialogue auquel donne lieu un examen contradictoire de situation fiscale personnelle et n'est pas au nombre de celles émises en application de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales et soumises au respect des règles fixées par l'article L. 11 précité. Dès lors, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que, en méconnaissance de cet article, la notification de la proposition de rectification du 15 décembre 2016 est intervenue moins de trente jours après la demande de renseignements en cause.

En ce qui concerne la régularité de la réponse aux observations du contribuable :

8. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". L'exigence de motivation qui s'impose à l'administration dans ses relations avec le contribuable vérifié en application du dernier alinéa de cet article s'apprécie au regard de l'argumentation de celui-ci. Il résulte de ces dispositions que si l'administration n'est pas tenue de répondre à tous les arguments du contribuable, elle doit cependant répondre, même succinctement, à ses principales observations.

9. Il résulte de l'instruction que, par courrier daté du 3 février 2016 et reçu par le service le lendemain, M. D... B... a présenté, dans le délai prorogé, ses observations en réponse à la proposition de rectification du 18 décembre 2015, notifiée le jour suivant. Le contribuable y conteste le principe même de l'existence d'une renonciation à recettes consentie par la SARL Ami de la 2 cv en ce qui concerne les factures relatives au véhicule de marque DS 21 lui appartenant. Bien que cette observation ait été reprise par l'administration dans sa synthèse des arguments du contribuable, elle s'est, en retour, bornée à maintenir la rectification et à se référer à la réponse aux observations du contribuable 3926 adressée à la SARL Ami de la 2 cv, jointe en copie. Or, il résulte de l'instruction que l'administration s'est abstenue de répondre à l'observation précise correspondante développée par la société et qui ne saurait être regardée comme mineure. L'administration ne peut dès lors être regardée comme ayant permis au contribuable, ainsi privé d'une garantie, de connaître les motifs pour lesquels l'administration a maintenu le rehaussement contesté notifié dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à raison de la réintégration dans les bases imposables de sa société de recettes omises, révélées par la déduction de factures relatives au véhicule de marque DS immatriculé 2023 WY 67 lui appartenant. Par suite, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 précité est de nature à vicier la procédure d'imposition en ce qui concerne cet élément du chef de rectification. Il suit de là que le requérant est fondé à demander la réduction des rehaussements qui lui ont été notifiés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2013 et 2014, correspondant aux minorations de produits réintégrées dans les bases imposables de la SARL Ami de la 2 cv et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée, à raison des factures de sous-traitance relatives au véhicule de marque DS immatriculé 2023 WY 67. ''''

'Sur le bien-fondé des impositions :'''

En ce qui concerne les revenus distribués découlant des minorations de produits :

10. Aux termes des dispositions de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ". Ces revenus sont présumés distribués à la date de clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si le contribuable ou l'administration apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, soit postérieure, soit antérieure à cette date. A cet égard, la seule circonstance que le contribuable soit le maître de l'affaire n'est pas de nature à apporter une telle preuve.

11. Constatant que la SARL Ami de la 2 cv a déduit des charges correspondant à des factures de garages sous-traitants relatives à des véhicules ne pouvant être rattachés à ceux de son stock ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur ces factures, la vérificatrice a considéré que l'absence de refacturation aux clients, propriétaires desdits véhicules, démontre l'existence d'une minoration de produits. Pour déterminer le montant des recettes et de la taxe sur la valeur ajoutée collectée non déclarées, l'administration a appliqué un coefficient de marge, respectivement de 1,79 et de 1,80 pour les exercices clos en 2013 et 2014, aux montants figurant sur les factures des sous-traitants. Le requérant conteste les revenus distribués qui lui ont été notifiés à raison de la partie de ces rectifications portant sur des réparations effectuées sur ses véhicules personnels, immatriculés 2023 WY 67, 4546 RU 78 et 6299 ZS 67 mais ne conteste pas la qualification de maitre de l'affaire retenue par le service pour démontrer l'appréhension par ses soins des revenus réputés distribués par cette société. Compte tenu des contestations abandonnées expressément par le requérant à hauteur d'appel et de la décharge partielle prononcée par la présente décision en conséquence de ce qui a été dit en ce qui concerne la régularité de la réponse aux observations du contribuable, le moyen est désormais circonscrit aux minorations de recettes relatives au véhicule de marque Citroën modèle 2 cv immatriculé 4546 RU 78 et au véhicule utilitaire modèle HY immatriculé 6299 ZS 67, propriétés de M. D... B....

S'agissant des impositions découlant des rehaussements prononcés en matière d'impôt sur les sociétés :

12. En premier lieu, aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu du I de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. / 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services (...) ". En vertu de ces dispositions, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.

13. Le requérant soutient que l'administration ne peut déduire de l'absence de refacturation à son nom des charges que la SARL Ami de la 2 cv a comptabilisées, correspondant aux factures des sous-traitants établies à la suite de travaux entrepris sur certains de ses véhicules personnels, que la société a ainsi renoncé à une recette. Il considère que s'agissant de frais incombant à l'associé unique de la société, le service aurait dû se contenter de rejeter la charge déduite à tort comme constitutive d'un acte anormal de gestion. Toutefois, la correction des écritures de charges en cause, qui n'ont pas été remises en cause par le service, est justifiée en l'espèce par l'existence de recettes omises, dès lors que, dans le cadre de son activité de négoce de véhicules et de pièces détachées pour véhicules neufs et d'occasion, la société effectue, comme l'a démontré la vérification de comptabilité, des prestations de service consistant dans la rénovation de véhicules anciens de marque Citroën appartenant à certains de ses clients, en recourant à des garages sous-traitants. En l'absence de toute refacturation à son associé unique des factures des garages sous-traitants en cause, et alors que le requérant ne soutient ni n'allègue qu'une écriture aurait été passée en contrepartie au débit du compte courant d'associé ouvert à son nom, c'est à juste titre que cette société commerciale a été regardée par l'administration comme ayant délibérément consenti à son client un avantage anormal en ne comptabilisant pas les recettes correspondant au prix de revient de ses prestations augmenté par l'application d'un coefficient de marge. Contrairement à ce que soutient M. D... B..., la circonstance qu'il a bénéficié de la renonciation à recettes en litige démontre l'existence de liens d'intérêts entre la société et le bénéficiaire de l'opération et renforce, s'il en était besoin, la présomption d'anormalité de l'acte de gestion en cause, étranger par son objet aux opérations que choisit de mener une société commerciale dans le cadre d'une gestion normale. Le requérant conserve cependant la faculté de démontrer que cette renonciation à recettes comporte, pour la société, une contrepartie et qu'elle a agi dans son propre intérêt en accomplissant ces opérations.

14. Le requérant soutient en effet que la déduction des factures de sous-traitance correspondant aux travaux effectués sur le véhicule de marque Citroën modèle 2CV immatriculé 4546 RU 78 lui appartenant était justifiée dès lors que ces frais avaient été engagés dans l'intérêt de l'entreprise. Il doit ainsi être entendu comme visant à démontrer l'existence de la contrepartie que la société a retirée de la renonciation aux recettes correspondant aux prestations qu'elle a accomplies sur ce véhicule. Il fait valoir que les travaux en cause auraient permis à la société de tester l'intérêt d'installer un kit cylindre pistons en 500 cm3 sur ce type de véhicule avant de commercialiser cet équipement. Toutefois, M. D... B... se borne à affirmer qu'en cas d'échec du test, la société aurait été contrainte d'engager des frais de même montant pour restaurer l'état initial de l'un de ses véhicules destinés à la vente. Ce faisant, le requérant ne justifie pas de l'intérêt de procéder à ce test sur l'un de ses véhicules personnels alors, de surcroît, que la société disposait de nombreux véhicules anciens du même modèle dans son stock en 2013. Au demeurant, le détail de la facture du 20 décembre 2013 émise par le garage " Technique de traction avant " pour un montant hors taxe de 2 618,50 euros, tel qu'exposé dans la proposition de rectification, ne comporte aucune mention relative à l'installation d'un kit pistons 500 cm3 sur ce véhicule. Le requérant n'apportant pas la preuve de ce que la société aurait agi dans son propre intérêt en renonçant à refacturer sa prestation à son associé, le service doit être regardé comme ayant démontré l'existence d'une omission de recettes et, par suite, le bien-fondé de la rectification contestée, imposée en tant que revenus distribués entre les mains de M. D... B..., en ce qui concerne les prestations accomplies sur ce véhicule.

15. Si le requérant soutient, par ailleurs, que la recette découlant de la facture de sous-traitance du 20 décembre 2013 d'un montant de 5 606 euros toutes taxes comprises, relative au véhicule 2CV immatriculé 4546 RU 78, ne peut être imposée entre ses mains en tant que revenus distribués au titre de l'année 2014, il résulte de ce qui a été dit au point 11 de la présente décision, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le moyen identique présenté à titre subsidiaire au regard de la facture du 31 octobre 2013 d'un montant de 5 000 euros toutes taxes comprises, relative au véhicule de marque DS immatriculé 2023 WY 67 compte tenu de ce qui a été dit au point 10 de la présente décision, que le requérant ne renverse pas la présomption de distribution des revenus à la clôture de l'exercice par la seule observation de la date de la facture de sous-traitance, comptabilisée par la société le 20 décembre 2013 en compte 401 comme une dette à court terme, faute de justifier de son règlement par la société au plus tard le 31 décembre 2013. C'est dès lors à bon droit que l'administration a rattaché la distribution de revenus en litige à l'année 2014.

16. S'agissant des travaux effectués sur le véhicule utilitaire modèle HY immatriculé 6299 ZS 67, appartenant à M. D... B..., ce dernier ne démontre pas que cet utilitaire aurait été utilisé dans l'intérêt propre de la SARL Ami de la 2 cv, dans le cadre de manifestations de voitures anciennes pour valoriser l'image de l'entreprise, par la seule production de la photo non datée d'un véhicule camionnette ancien de marque Citroën tractant une 2 cv. En outre, le service fait valoir que lors de la vérification de comptabilité, le gérant a indiqué utiliser un véhicule utilitaire modèle XM pour le transport des véhicules. En l'absence de refacturation de la charge déduite en totalité pour des frais exposés sur un bien personnel de son associé et de démonstration de l'intérêt qu'aurait eu la société à renoncer aux recettes correspondant aux prestations qu'elle a accomplies s'agissant de ce véhicule, le service doit être regardé comme ayant démontré l'existence d'une omission de recettes et le bien-fondé de la rectification contestée. Par suite, le requérant n'est pas fondé à demander la réduction des suppléments d'imposition qui lui ont été notifiés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à raison de la réintégration de ces recettes dans les bases imposables de sa société.

S'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

17. En deuxième lieu, en ce qui concerne les compléments d'imposition découlant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée relatifs aux minorations de produits correspondant au véhicule de marque Citroën modèle 2 cv immatriculé 4546 RU 78 et au véhicule utilitaire modèle HY immatriculé 6299 ZS 67, le requérant se borne à soutenir que ces deux véhicules étaient utilisés dans l'intérêt de l'entreprise. Il résulte de ce qui a été dit aux points ci-dessus que ce moyen ne peut qu'être écarté. Ainsi, par les seuls moyens qu'il invoque, le requérant n'est pas fondé à demander la réduction des impositions mises à sa charge à raison des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à sa société au titre des minorations de produits.

En ce qui concerne les avantages occultes :

18. En troisième lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". En cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minorée, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées du c de l'article 111 du code, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du cocontractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause. La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession.

19. Le requérant soutient que l'administration ne démontre pas que les membres de son foyer fiscal auraient obtenu des avantages occultes de la part de la SARL Ami de la 2 cv à l'occasion de l'acquisition sans contrepartie des véhicules immatriculés DB 489 ML, DH 421 DK, DJ 095 QX et DH 546 LA. Il conteste également l'évaluation de la valeur de ces véhicules retenue par la vérificatrice.

20. S'agissant du véhicule DB 489 ML, la vérificatrice a constaté que ce véhicule, acquis en 2003, avait été immatriculé au nom de la SARL Ami de la 2 cv, sans pour autant faire l'objet d'une inscription dans le livre de police de la société. Compte tenu des nombreuses irrégularités dans la tenue du livre de police relevées à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société, de ce que le véhicule était immatriculé au nom de la société depuis 2003 et du changement de titulaire du certificat d'immatriculation intervenu en 2013 et alors que le requérant se borne à soutenir que ce véhicule lui avait été donné à titre personnel par un ami, l'administration doit être regardée comme démontrant que le véhicule appartenait à la SARL Ami de la 2 CV jusqu'en 2013 et que la cession intervenue à cette date constitue une libéralité accordée par cette société sans contrepartie. Dès lors que cet avantage occulte a bénéficié à l'un des enfants mineurs de M. D... B..., gérant et associé unique de la société, l'administration doit être regardée comme démontrant l'intention pour la société d'octroyer une libéralité et pour le bénéficiaire, rattaché au foyer fiscal, de la recevoir. Par ailleurs, l'évaluation du véhicule a été effectuée par la vérificatrice contradictoirement lors de la réunion de synthèse à partir de la cote moyenne des 2 cv6 mentionnée par M. D... B... au cours de la vérification de comptabilité de sa société, en cohérence avec les prix des véhicules achetés auprès de tiers par la société au cours des années 2013 et 2014. Le requérant n'apportant aucun élément probant au soutien de sa contestation de l'estimation en cause, le moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté sur ce point.

21. S'agissant du véhicule modèle Acadiane jaune, comportant un logo Michelin, immatriculé DH 421 DK, la proposition de rectification indique que le véhicule est immatriculé au nom de la SARL Ami de la 2 cv depuis le 5 juin 2002 puis au nom de l'un des fils du requérant à compter du 27 juin 2014. La vérificatrice a fixé contradictoirement la valeur de ce véhicule à 10 000 euros en tenant compte de son très bon état, constaté sur photo lors de la vérification de comptabilité de la société. Pour le motif exposé au point précédent, le requérant n'apportant aucun élément probant justifiant qu'il était le véritable propriétaire du véhicule depuis 2002 ou permettant de remettre en cause l'évaluation retenue par le service, l'administration doit être regardée comme établissant le bien-fondé de cette rectification.

22. En revanche, s'agissant du véhicule 2 cv6 de 1985, immatriculé DJ 095 QX, alors qu'il est constant que ce véhicule ne figure pas dans les inventaires de la SARL Ami de la 2 cv, il ne résulte pas de l'instruction, notamment pas de l'exercice du droit de communication auprès de la préfecture, que ce véhicule aurait été immatriculé au nom de cette société avant le changement de certificat d'immatriculation du 27 août 2014 faisant mention, comme titulaire, du nom du fils de M. D... B.... En se bornant à affirmer qu'au cours de la vérification de comptabilité de la société, il avait été confirmé que la société pouvait acquérir des véhicules sans procéder au changement de carte grise, et que tel était le cas pour ce véhicule précis, l'administration ne démontre pas, ainsi qu'il lui incombe de le faire, l'existence de l'avantage occulte en litige. Par suite, le requérant est fondé à demander la réduction des compléments d'imposition mis à sa charge au titre de l'année 2014 correspondant à un montant en base de 4 725 euros, ainsi que des pénalités les assortissant.

23. Enfin, s'agissant de la 2 cv de 1952, immatriculée DH 546 LA, le requérant a démontré devant le tribunal administratif que ce véhicule acquis le 6 juin 2014 par la SARL Ami de la 2 cv et inscrit dans l'inventaire de cette société au n° 233, a été cédé le 1er juillet 2015 à son fils, le règlement de cet achat ayant été effectué par l'inscription d'une somme de 18 000 euros au débit du compte courant d'associé ouvert à son nom et le produit de cette cession comptabilisé par la société au crédit de ses comptes 707 et 445 pour un montant toutes taxes comprises correspondant. L'immatriculation d'un véhicule, si elle apporte un commencement de preuve de la propriété d'un véhicule, ne constitue cependant pas un titre de propriété. Dès lors, la circonstance que le certificat d'immatriculation a été établi, dès 2014, au nom du fils du gérant, ne suffit pas à démontrer que la cession de ce véhicule au profit d'un des membres du foyer fiscal aurait eu lieu dès 2014. Par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal, l'administration ne démontre pas l'existence de l'avantage occulte résultant de la cession sans contrepartie au fils de l'associé unique d'un bien appartenant à cette société. Elle ne démontre pas davantage, en tout état de cause, l'existence de l'avantage occulte qui résulterait de la mise à disposition de ce véhicule à titre gratuit au bénéfice de M. D... B... ou de son fils entre juillet 2014 et juillet 2015 par la seule circonstance de l'établissement du certificat d'immatriculation au nom de ce dernier dès 2014, avantage évalué par le tribunal à une annuité d'amortissement du véhicule. Il suit de là que le requérant est fondé à demander la réduction des compléments d'imposition maintenus à sa charge au titre de l'année 2014 correspondant à un montant en base de 3 600 euros en matière de contributions sociales au titre de l'année 2014 et de 4 500 euros, après application du coefficient de 1,25 prévu par les dispositions du 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, en matière d'impôt sur le revenu au titre de la même année, ainsi que des pénalités les assortissant.

Sur les pénalités :

24. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffres d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration ".

En ce qui concerne les revenus fonciers :

25. Il résulte des dispositions du a) du 1° du I de l'article 28 du code général des impôts que, pour les locaux autres que ceux qui sont à usage d'habitation, seules sont déductibles des revenus fonciers les dépenses correspondant à des travaux d'entretien et de réparation. Ces travaux sont ceux qui ont pour objet de maintenir ou de remettre un immeuble en bon état et d'en permettre un usage normal sans en modifier la consistance, l'agencement ou l'équipement initial. Il appartient au contribuable qui entend déduire de son revenu foncier brut les dépenses constituant, selon lui, des charges de la propriété, de justifier de la réalité, de la consistance et, par suite, du caractère déductible de ces charges, en produisant des pièces justificatives, permettant d'établir avec précision la nature, le montant et la réalité de la charge supportée.

26. La SCI Les six troènes, dont M. D... B... est le gérant et l'associé unique, est propriétaire d'un local de 850 m2 situé au Mullerhof qu'elle loue à la SARL Ami de la 2 cv pour entreposer son stock de véhicules d'occasion. La société a déduit des dépenses correspondant à des travaux effectués par la société allemande Ringwald dans le local en cause, à hauteur d'un montant de 36 721 euros au titre de l'année 2012, le montant des déductions opérées en 2011 pour les travaux effectués par cette même société dans ce même local s'établissant à la somme de 30 165 euros. La société n'a pas été en mesure de justifier la déduction de cette dépense et le service a réintégré cette somme dans le revenu foncier imposable. Le bien-fondé de cette rectification n'est pas contestée. Pour établir l'existence d'un manquement délibéré, l'administration relève que la SCI Les six troènes, dont le requérant est l'associé unique, ne pouvait ignorer devoir justifier les charges qu'elle avait déduites en 2012 et constate que les charges déduites n'ont été justifiées ni dans leur montant ni dans leur nature, la société n'ayant produit ni l'intégralité des factures correspondantes ni les documents permettant de corroborer que les travaux accomplis ne modifiaient pas la consistance, l'agencement ou l'équipement initial du bâtiment. Le service souligne également que les montants déduits en 2012 ne sont étayés par aucune facture supplémentaire et qu'ils pourraient correspondre à la construction d'une mezzanine dès lors que ces travaux d'aménagement n'ont fait l'objet d'aucune facturation de la part de la société Ringwald selon les explications apportées par M. D... B... au cours du contrôle. Compte tenu de l'importance des montants déduits en charge, de l'impossibilité de rattacher ceux-ci aux différents postes de travaux mentionnés par une facture Ringwald du 5 octobre 2011, de l'absence de justification du règlement effectif en 2012 par M. D... B... de travaux supplémentaires, non facturés par la société allemande, et de la circonstance que des travaux de construction d'une mezzanine, par nature non-déductibles, étaient réalisés à la même période et par la même entreprise au sein du local en cause, l'insuffisance déclarative reprochée à la SCI Les six troènes, et par suite à son associé unique, ne peut procéder d'une simple erreur commise de bonne foi mais révèle au contraire une intention délibérée de minorer le montant des revenus fonciers imposable, au demeurant corroborée par l'abstention de la société à produire tout type de justificatif, nécessairement en sa possession, pour suppléer les éventuelles insuffisances commises par son fournisseur dans sa facturation. En l'absence de complexité particulière des règles applicables à la situation de cet immeuble, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du manquement délibéré du contribuable à ses obligations fiscales. C'est dès lors à bon droit qu'elle a assorti la rectification en cause de la pénalité de 40 %.

En ce qui concerne les crédits injustifiés inscrits au compte courant d'associé :

27. Pour justifier l'application des pénalités prévues par les dispositions précitées du a) de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale relève que M. D... B... s'est abstenu de justifier la comptabilisation de sommes inexpliquées au crédit de son compte courant, que ces apports non justifiés ont été relevés au titre de trois années successives et que le contribuable, compte tenu de l'importance des montants rectifiés, du caractère répétitif des manquements et de l'absence de tout justificatif, ne pouvait ignorer le caractère abusif de ces écritures en sa qualité de gérant et associé unique de la SARL Ami de la 2 cv. Ce faisant, et alors que les montants en cause ne peuvent être qualifiés de " résiduels " ainsi que le soutient M. D... B..., l'administration doit être regardée comme démontrant l'intention du contribuable d'éluder l'impôt. Par suite, c'est à juste titre que les compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014 à raison de ce chef de rectification ont été assortis de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 susvisé du code général des impôts.

En ce qui concerne les minorations de produits :

28. Si l'administration relève que M. D... B... n'a pu ignorer son obligation de refacturer les prestations effectuées pour le compte de clients auprès de sous-traitants, d'autant qu'une partie importante des produits non comptabilisés concernent des réparations effectuées sur certains de ses véhicules personnels, elle ne peut toutefois être regardée comme démontrant la volonté délibérée de l'intéressé d'éluder l'impôt, compte tenu notamment de la décharge partielle prononcée par la présente décision s'agissant des revenus distribués découlant de ce chef de rectification. Par suite, le requérant est fondé à demander la décharge de la majoration pour manquement délibéré appliquée aux revenus distribués découlant des minorations de produits.

En ce qui concerne les avantages occultes :

29. Le requérant soutient que, compte tenu des explications qu'il apporte au regard du bien-fondé de ces rectifications, les pénalités dont elles ont été assorties sont également intégralement contestées. Il estime en outre que ces véhicules n'appartenaient pas à la société et considère que l'administration ne démontre pas son intention d'éluder l'imposition en se bornant à affirmer qu'il n'a pu ignorer l'avantage qu'il a retiré de l'encaissement sur ses comptes du prix de ventes de véhicules appartenant juridiquement à la SARL Ami de la 2 cv.

30. D'une part, en ce qui concerne les rehaussements notifiés à M. D... B... sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, l'administration a considéré que la propriété de certains véhicules appartenant à la SARL Ami de la 2 cv avait été transférée dans le patrimoine de membres du foyer fiscal au cours des années 2013 et 2014, sans qu'aucun produit de ces ventes n'ait été comptabilisé en contrepartie par la société. S'agissant des véhicules immatriculés DJ 095 QX et DH 546 LA, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les moyens de bien-fondé du requérant ont été accueillis et que la décharge des pénalités assortissant les rectifications en litige a été prononcée, par voie de conséquence. S'agissant du véhicule immatriculé DW 567 RA, il résulte de l'instruction que le jugement du 12 janvier 2021 a prononcé la décharge des impositions supplémentaires notifiées à M. D... B... à raison de cette rectification ainsi que des majorations correspondantes. S'agissant des véhicules immatriculés DB 489 ML et DH 421 DK, il résulte de ce qui a été dit aux points ci-dessus que les moyens de bien-fondé invoqués par M. D... B... ont été écartés, compte tenu des éléments de preuve apportés par l'administration démontrant que la SARL Ami de la 2 cv en était propriétaire lors de leur acquisition en 2013 et 2014 par certains membres du foyer fiscal de M. E.... Compte tenu des liens d'intérêts entre la SARL Ami de la 2 cv et M. E..., l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence d'une libéralité consentie par la société et acceptée par le bénéficiaire. Le requérant n'est par suite pas fondé à soutenir qu'en raison du caractère infondé de ces rehaussements, la majoration dont ils ont été assortis est elle-même infondée, par voie de conséquence. En relevant que le requérant n'a pu ignorer, en tant que gérant et associé unique de la SARL Ami de la 2 cv, avoir bénéficié de revenus distribués imposables correspondant à la valeur des véhicules affectés à son patrimoine privé sans contrepartie pour la société, l'administration établit l'intention délibérée du contribuable d'éluder l'impôt.

31. D'autre part, s'agissant du véhicule modèle C3 immatriculé 983 AWH 67, il résulte de l'instruction que le jugement du 12 janvier 2021 a prononcé la décharge des compléments d'impositions notifiés à M. D... B... à raison de cette rectification ainsi que des majorations correspondantes. S'agissant du véhicule modèle Mehari immatriculé AW 403 VS, il résulte du droit de communication exercé par l'administration auprès de la préfecture que la SARL Ami de la 2 cv a été titulaire du certificat d'immatriculation depuis le 11 octobre 2010 et jusqu'au 8 septembre 2014, date à laquelle l'immatriculation a été établie au nom de M. E..., sans qu'aucune mention de la revente ne soit inscrite dans le livre de police ni qu'aucun produit ne soit inscrit en comptabilité. Il est par ailleurs constant que la cession de ce véhicule le 12 septembre 2014 par M. D... B... à Mme A... a donné lieu à l'encaissement sur le compte bancaire personnel du requérant d'un chèque de 18 500 euros le 17 septembre suivant. En l'absence de tout justificatif produit par le requérant, et compte tenu des liens d'intérêts entre la SARL Ami de la 2 cv et M. D... B..., l'administration doit être regardée comme démontrant ainsi l'existence d'une libéralité consentie par la société et acceptée par le bénéficiaire. Le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'en raison du caractère infondé de ce rehaussement, la majoration dont il a été assorti serait elle-même infondée, par voie de conséquence. En relevant que le requérant n'a pu ignorer, en tant que gérant et associé unique de la SARL Ami de la 2 cv, avoir bénéficié de revenus distribués imposables provenant de sommes encaissées sur ses comptes bancaires personnels correspondant à la cession de ce véhicule à un tiers par M. D... B... après l'avoir transféré irrégulièrement dans son patrimoine privé sans contrepartie inscrite en comptabilité pour la société, l'administration établit l'intention délibérée du contribuable d'éluder l'impôt. Il suit de là que le moyen doit être écarté.

32. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... B... est seulement fondé à demander la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 résultant de ce qui a été dit aux points 9, 22, 23 et 28 et la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance :

33. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme que réclame M. D... B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Il est déduit des revenus de capitaux mobiliers imposables de M. D... B... la somme de 45 111 euros au titre de l'année 2013 et de 18 562 euros au titre de l'année 2014.

Article 2 : M. D... B... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 et des pénalités les assortissant, correspondant à la réduction des bases d'imposition décidée à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : La majoration pour manquement délibéré dont ont été assorties les rectifications relatives aux minorations de produits est déchargée, conformément au point 28 du présent arrêt.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg n° 1807733 du 12 janvier 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. E... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Agnel, président,

Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2023.

La rapporteure,

Signé : M. Bourguet-ChassagnonLe président,

Signé : M. Agnel

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la France en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 21NC01505


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01505
Date de la décision : 19/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Mariannick BOURGUET-CHASSAGNON
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : KRETZ

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-10-19;21nc01505 ?
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