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23/09/1992 | FRANCE | N°91NT00143;91NT00144

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Pleniere, 23 septembre 1992, 91NT00143 et 91NT00144


Vu, 1°) la requête présentée pour M. Dominique X..., demeurant ... de La Motte, 50700, Valognes, par Me Y..., avocat, et enregistrée le 7 mars 1991 au greffe de la Cour sous le n° 91NT00143 ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 87252 du 11 décembre 1990 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la réduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamée pour la période du 1er avril 1980 au 31 mars 1983 par avis de mise en recouvrement du 3 décembre 1985 et des pénalités

y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaire...

Vu, 1°) la requête présentée pour M. Dominique X..., demeurant ... de La Motte, 50700, Valognes, par Me Y..., avocat, et enregistrée le 7 mars 1991 au greffe de la Cour sous le n° 91NT00143 ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 87252 du 11 décembre 1990 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la réduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamée pour la période du 1er avril 1980 au 31 mars 1983 par avis de mise en recouvrement du 3 décembre 1985 et des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires et pénalités mises à sa charge ainsi que la restitution des droits et pénalités réglés à ce jour, assortis des intérêts moratoires institués par les dispositions de l'article L.208 du livre des procédures fiscales ;

Vu 2°) la requête présentée pour M. Dominique X..., demeurant ... de La Motte, 50700, Valognes, par Me Y..., avocat, et enregistrée le 7 mars 1991 au greffe de la Cour sous le n° 91NT00144 ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 87253 du 11 décembre 1990 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus des conclusions de sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités mises à sa charge ainsi que la restitution des droits et pénalités réglés à ce jour assortis des intérêts moratoires institués par les dispositions de l'article L.208 du livre des procédures fiscales ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984, notamment son article 89 ;
Vu la loi de finances rectificative pour 1986, n° 86-1318, du 30 décembre 1986, notamment son article 42 ;
Vu le décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 1992 :
- le rapport de Melle Brin, conseiller,
- et les conclusions de M. Lemai, commissaire du gouvernement,

Considérant que les requêtes susvisées de M. X... sont dirigées contre deux jugements en date du 11 décembre 1990 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes, d'une part, en réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période du 1er avril 1980 au 31 mars 1983 et, d'autre part, en décharge du supplément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de chacune des années 1981, 1982 et 1983 ; que ces requêtes présentant à juger des questions semblables, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que par une décision, en date du 30 septembre 1991, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la Manche a prononcé le dégrèvement en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 6 105 F du supplément d'impôt sur le revenu auquel M. X... a été assujetti au titre de l'année 1983 ; que les conclusions de la requête n° 91NT00144 relative à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur les bases de la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant, qu'aux termes de l'article 266-1 du code général des impôts : "La base d'imposition est constituée ... b. Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : - opérations d'entremise qui ne sont pas rémunérées exclusivement par une commission dont le taux est fixé au préalable d'après le prix, la quantité ou la nature des biens ou des services ou qui ne donnent pas lieu à reddition de compte au commettant du prix auquel le mandataire a traité avec l'autre contractant ..." ;

Considérant que M. X..., marbrier funéraire, fait valoir sa qualité de commissionnaire à la vente, mandaté par la société des pompes funèbres générales, pour soutenir que seul le montant des remises consenties par cette dernière doit être inclus dans son chiffre d'affaires imposable ; qu'il résulte de l'instruction que les divers taux des remises versées par ladite société ne sont pas déterminés sur la base des éléments fixés au contrat de mandat conclu le 1er décembre 1947 dont le requérant se prévaut et qui aurait été reconduit tacitement à son profit ; qu'il ressort des pièces apportées par M. X... que le montant des prestations "pompes funèbres générales" qui apparaît sur les ordres de commande qu'il remplit pour ses clients et adresse à la société, et à partir desquels celle-ci détermine les remises, est, dans de nombreux cas, inférieur au montant correspondant à des prestations figurant sur les factures établies par le requérant à ses clients ; que celui-ci encaisse sur un compte bancaire distinct le montant global de ces factures et reverse, à partir de ce compte, à son commettant les sommes mentionnées sur les ordres de commande ; qu'il est constant que le contribuable ne tenait pas de comptabilisation des opérations effectuées dans ce secteur d'activité ; que, dans ces conditions, M. X..., se trouvait dans la situation d'un intermédiaire dont la rémunération n'est pas exclusivement constituée par une commission dont le taux est fixé au préalable et qui ne rendait pas compte à son commettant du prix auquel il avait traité avec l'autre contractant ; que, par suite, les opérations litigieuses sont taxables sur le montant total de la transaction, en vertu des dispositions précitées de l'article 266-1-b du code ;
Sur les déductions de taxe à la valeur ajoutée :
Considérant, qu'aux termes de l'article 223 de l'annexe II au code général des impôts : "La taxe dont les entreprises peuvent opérer la déduction est, ... celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures ; ... 2. La déduction ne peut être opérée si les entreprises ne sont pas en possession ... desdites factures ..." ;
Considérant que l'état récapitulatif établi par la société des pompes funèbres générales de Cherbourg, postérieurement aux redressements, pour la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1984 et les fiches qui y sont annexées font apparaître, d'une part, les sommes versées mensuellement par M. X... sans préciser, par opération, le montant hors taxe des fournitures et prestations et la taxe à la valeur ajoutée correspondante et, d'autre part, des noms accompagnés de l'indication de sommes ; que ces documents ne peuvent être assimilés aux factures d'achat qui seules ouvrent droit à déduction en vertu des dispositions précitées du code général des impôts ;

Sur les pénalités :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :
Considérant qu'il résulte tant de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, que des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, qu'une peine ne peut être infligée qu'à la condition que soit garanti, notamment, le principe du respect des droits de la défense ; que cette exigence ne concerne pas seulement les peines prononcées par les juridictions répressives, mais s'étend à toute sanction ayant le caractère d'une punition, même si le législateur a laissé le soin de la prononcer à une autorité de nature non judiciaire ;
Considérant que si le législateur a entendu, par l'article 42 de la loi susvisée du 30 décembre 1986, codifié à l'article L.80 D du livre des procédures fiscales, autoriser l'administration à motiver les sanctions fiscales au plus tard lors de la notification du titre exécutoire et s'il répute régulières les décisions notifiées antérieurement qui répondent à ces conditions, il n'a pas cependant expressément écarté l'application du principe, de valeur constitutionnelle, du respect des droits de la défense préalablement à la décision d'infliger une sanction fiscale ;
Considérant que les pénalités applicables en cas de mauvaise foi du contribuable, prévues par les dispositions des articles 1729 et 1731 du code général des impôts, dans leur rédaction applicable aux impositions litigieuses, constituent des sanctions qui répriment le comportement fautif du contribuable ; qu'elles ne peuvent, dès lors, être prononcées par l'administration fiscale sans que l'intéressé ait été, au préalable, informé des griefs retenus contre lui et mis à même de présenter des observations pour sa défense ;
Considérant qu'en se référant aux dispositions de l'article 8 du décret susvisé du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers, qui s'inspirent de ce principe, M. X... a entendu faire valoir que les majorations, prévues aux articles 1729 et 1731 alors en vigueur du code général des impôts, lui ont été appliquées sans qu'il ait pu présenter sa défense ; qu'il résulte de l'instruction que la lettre par laquelle l'administration lui a fait connaître les motifs pour lesquels les majorations litigieuses seraient appliquées, ne l'informait pas de la faculté qu'il avait de présenter des observations ; que lesdites pénalités sont, dès lors, intervenues sur une procédure irrégulière ; qu'il y a lieu d'en prononcer la décharge, dans la limite des intérêts et indemnités de retard applicables de plein droit en cas d'insuffisance de déclaration et de réformer en ce sens le jugement attaqué ;
Sur la suppression de l'abattement en faveur des adhérents des centres de gestion agréés :
Considérant, d'une part, qu'à la suite de la vérification de la comptabilité de M. X... l'administration a remis en cause l'abattement pour adhésion à un centre de gestion agréé dont bénéficiait le contribuable ; que la notification de redressements en date du 21 mai 1985 indique les considérations de droit et de fait qui ont fondé cette suppression ; que cette décision est régulièrement et suffisamment motivée conformément aux dispositions de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 158-4 bis, 5è alinéa, du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur lors du fait générateur des impositions litigieuses : "A condition que la bonne foi du contribuable soit admise le bénéfice de l'abattement est, en revanche, maintenu lorsque le redressement porte exclusivement sur des erreurs de droit ou des erreurs matérielles ou lorsque l'insuffisance n'excède pas le dixième du revenu professionnel déclaré et la somme de 5 000 F" ; qu'il est constant que M. X... n'a pas comptabilisé les opérations relatives au secteur d'activité "pompes funèbres générales", a encaissé certaines opérations sur un compte bancaire distinct et a omis, de façon répétée et pour des montants importants, de déclarer des recettes ; que sa mauvaise foi est établie ; que, dès lors, sans que le requérant puisse utilement se prévaloir utilement de la doctrine administrative donnant un effet rétroactif aux dispositions de l'article 158-4 bis, 5è alinéa, du code issues de l'article 89 de la loi susvisée du 29 décembre 1984, lesquelles ne s'appliquent que si la bonne foi est admise, l'administration a, à bon droit, estimé que le bénéfice de l'abattement ne pouvait être maintenu ;
Sur les conclusions relatives aux intérêts moratoires institués par l'article L.208 du livre des procédures fiscales :
Considérant que M. X... ne fait état d'aucune décision refusant le remboursement de ces intérêts ; qu'ainsi en l'absence de litige né et actuel, les conclusions susvisées ne sont pas recevables ;
Considérant que, de tout ce qui précède, il résulte que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Caen n'a pas prononcé, dans la limite des intérêts de retard, la décharge des pénalités ;
Article 1er : A concurrence de la somme de six mille cent cinq francs (6 105 F), en ce qui concerne le supplément d'impôt sur le revenu auquel M. X... a été assujetti au titre de l'année 1983, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 91NT00144 de M. X....
Article 2 : Les intérêts de retard sont substitués, dans la limite du montant desdites pénalités, aux pénalités de 50 % et de 60 % mises à la charge de M. X... et afférentes d'une part, au supplément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1981, 1982 et 1983 et, d'autre part, au complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période du 1er avril 1980 au 31 mars 1983.
Article 3 : Les jugements en date du 11 décembre 1990 du Tribunal administratif de Caen sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. X... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Dominique X... et au ministre du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 91NT00143;91NT00144
Date de la décision : 23/09/1992
Sens de l'arrêt : Non-lieu partiel rejet surplus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - GENERALITES - Champ d'application de la procédure de redressement - Procédure d'établissement des pénalités - Respect des droits de la défense (1).

19-01-03-02-01, 19-01-04 En application du principe, de valeur constitutionnelle, du respect des droits de la défense, l'administration doit, préalablement à la décision d'infliger une sanction fiscale, en l'espèce les pénalités applicables en cas de mauvaise foi, informer le contribuable de la faculté qu'il a de présenter des observations pour sa défense.

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS - Procédure - Droits de la défense - Obligation de respecter les droits de la défense - Existence (1).


Références :

CGI 266 par. 1, 1729, 1731, 158 par. 4 bis al. 5
CGI Livre des procédures fiscales L80 D, L208
CGIAN2 223
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8
Loi 79-587 du 11 juillet 1979
Loi 84-1208 du 29 décembre 1984 art. 89 Finances pour 1985
Loi 86-1318 du 30 décembre 1986 art. 42 Finances rectificative pour 1986

1. Comp. CE, Assemblée, 1979-04-27, Société Yacht Motors Corporation, p. 169


Composition du Tribunal
Président : M. Capion
Rapporteur ?: Mlle Brin
Rapporteur public ?: M. Lemai

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1992-09-23;91nt00143 ?
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