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27/06/2003 | FRANCE | N°02NT00567

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4eme chambre, 27 juin 2003, 02NT00567


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 avril 2002, présentée pour M. Philippe Y, demeurant ..., par Me GRIFFITHS, avocat au barreau de Lisieux ;

M. Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 00-87 et 00-133, du 3 avril 2002, par lequel le Tribunal Administratif de Caen l'a condamné, solidairement avec l'entreprise Garguilo-Françoise, le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC, à payer la somme de 347 904,13 euros à la ville de Caen en réparation des désordres affectant le musée des Beaux-Arts de cette commune, à la restructuration du

quel il a participé ; l'a condamné à garantir les autres parties à hauteur d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 avril 2002, présentée pour M. Philippe Y, demeurant ..., par Me GRIFFITHS, avocat au barreau de Lisieux ;

M. Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 00-87 et 00-133, du 3 avril 2002, par lequel le Tribunal Administratif de Caen l'a condamné, solidairement avec l'entreprise Garguilo-Françoise, le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC, à payer la somme de 347 904,13 euros à la ville de Caen en réparation des désordres affectant le musée des Beaux-Arts de cette commune, à la restructuration duquel il a participé ; l'a condamné à garantir les autres parties à hauteur de 10 % de cette somme ;

2°) de rejeter la demande de la ville de Caen ;

3°) de condamner la ville de Caen à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

…………………………………………………………………………………………………

C+ CNIJ n° 17-03-02-05

n° 39-06-01-01-02

n° 39-06-01-04-03-01

n° 39-06-01-02-02

n° 39-06-01-06

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 juin 2003 :

- le rapport de M. FAESSEL, premier conseiller,

- les observations de Me LE GUERN substituant Me GRIFFITHS, avocat de M. Y,

- les observations de Me RAMDENIE substituant Me GRANGE, avocat de la ville de Caen,

- et les conclusions de M. MORNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement en date du 3 avril 2002, le Tribunal administratif de Caen a condamné solidairement M. Y, l'entreprise Garguilo-Françoise, le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC à réparer les désordres affectant les dispositifs de sécurité et de circulation sous combles du musée des Beaux-Arts de la ville de Caen ; que par le même jugement, les constructeurs ont été condamnés à se garantir partiellement de la condamnation solidaire dont ils faisaient l'objet ; que M. Y et M. interjettent appel de ce jugement ; que par la voie de l'appel provoqué, le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC concluent également à l'annulation du jugement ;

Sur les conclusions de l'appel de M. :

Considérant, nonobstant la circonstance qu'une collectivité publique dont l'action devant le juge administratif tend à faire reconnaître et évaluer ses droits à la suite de désordres constatés dans un ouvrage construit pour elle par une entreprise admise ultérieurement à la procédure de liquidation judiciaire n'aurait pas en temps utile déclaré sa créance auprès du représentant des créanciers et n'aurait pas été relevé de la forclusion, que si les dispositions législatives réservent à l'autorité judiciaire la détermination des modalités de règlement des créances sur les entreprises en état de redressement puis de liquidation judiciaire, il appartient néanmoins au juge administratif, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur le recouvrement ou l'extinction des créances, de juger si cette collectivité publique a droit à la réparation de son préjudice et de fixer le montant des indemnités qui lui sont dues à ce titre par l'entreprise défaillante ; qu'ainsi M. n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué, qui se bornait à fixer les indemnités dues par l'entreprise en liquidation Garguilo-Françoise, méconnaissait les dispositions de l'article L.621-46 du code du commerce relatif au redressement judiciaire et à la déclaration des créances ;

Sur les conclusions de l'appel de M. Y :

En ce qui concerne sa condamnation solidaire :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la demande présentée par la ville de Caen devant le Tribunal administratif et qui tendait notamment à la condamnation de M. Y, architecte du projet, était fondée sur la garantie de parfait achèvement à laquelle sont soumis les entrepreneurs et sur la garantie décennale ; qu'il ressort des conclusions de l'expert désigné par ordonnance du 29 mai 1996 du président du Tribunal administratif de Caen, et n'est d'ailleurs pas contesté, que les désordres dont est affecté l'ouvrage litigieux ne rendent pas celui- ci impropre à sa destination ; que leur réparation ne pouvait alors relever de l'exercice de la garantie décennale ; que, par ailleurs, ni les principes dont s'inspirent les articles 1792-6 et 2270 du code civil, ni aucune stipulation contractuelle et notamment l'article 44-1 du cahier des clauses administratives générales ne mettent à la charge des constructeurs autres que les entrepreneurs une obligation contractuelle de parfait achèvement dans la durée du délai de garantie d'un an qui suit la réception des travaux, dès lors que celle-ci est prononcée sans réserve ; qu'il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Caen a condamné M. Y, solidairement avec l'entreprise Garguilo-Françoise, à réparer, au titre de la garantie de parfait achèvement, les désordres que connaît le dispositif d'accès aux combles du musée des Beaux-Arts ;

En ce qui concerne sa condamnation à garantir d'autres constructeurs :

Considérant que si, ainsi qu'il vient d'être dit, seul l'entrepreneur est tenu à la garantie du parfait achèvement en raison des désordres qui lui sont imputables, cet entrepreneur peut cependant demander à être garanti par les autres constructeurs de tout ou partie de la condamnation à la réparation du préjudice subi par le maître de l'ouvrage prononcée à son encontre, si et dans la mesure où les désordres trouvent également leur origine dans des fautes caractérisées commises par ces autres constructeurs ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et ressort en particulier de l'expertise sus évoquée, que les travaux exécutés par l'entreprise Garguilo-Françoise, et qui sont à l'origine des désordres de l'ouvrage, l'ont été de manière incomplète, grossièrement insatisfaisante et au mépris évident des règles de l'art ; qu'ainsi les désordres relevant de la garantie du parfait achèvement sont imputables à l'entreprise Garguilo-Françoise ; que toutefois il apparaît également que M. Y n'a pas, en tant que maître d'oeuvre, exigé de l'entreprise Garguilo-Françoise qu'elle exécute de manière satisfaisante les tâches qui lui revenaient, et a, à l'inverse, attesté de ce que les travaux effectués par l'entreprise Garguilo-Françoise étaient conformes au projet ; qu'il a ainsi gravement manqué à sa mission de surveillance des travaux ;

Considérant qu'alors même que M. Y pouvait être regardé comme n'ayant pas exercé, sur l'exécution des travaux litigieux par l'entreprise Garguilo-Françoise, une surveillance suffisamment étroite qui aurait permis d'éviter les manquements sus rappelés de cet entrepreneur à ses obligations contractuelles et aux règles de l'art, ledit entrepreneur ne saurait cependant se prévaloir d'un tel défaut de surveillance pour demander à être garanti par l'architecte des condamnations mises à sa charge ; que cependant, ainsi qu'il a été dit, il résulte de l'instruction que M. Y a gravement manqué à ses obligations en attestant de l'exécution de travaux qui n'avaient pas été réalisés ou pas été réalisés conformément aux stipulations du marché ; que les désordres dont se plaint le maître de l'ouvrage sont en partie imputables à ces manquements ; que dès lors, M. Y n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges lui ont imposé de garantir l'entreprise Garguilo-Françoise à hauteur de 10 % des condamnations prononcées contre elle ;

Sur les conclusions de l'appel provoqué du bureau d'études BETCI et de la société SOCOTEC :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a condamné le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC, solidairement avec M. Y et l'entreprise Garguilo-Françoise à indemniser la ville de Caen ; que les conclusions du bureau d'études BETCI, tout comme celles de la société SOCOTEC qui ont été provoquées par l'appel de M. Y et présentées après l'expiration du délai d'appel, en vue d'obtenir une réduction des indemnités mises à leur charge, sont recevables dès lors que M. Y, appelant principal, obtient lui-même la décharge de l'indemnité qu'il a été condamné à verser à la ville de Caen ;

En ce qui concerne leur condamnation solidaire :

Considérant, ainsi qu'il a été dit, que ni les principes dont s'inspirent les articles 1792-6 et 2270 du code civil, ni aucune stipulation contractuelle et notamment l'article 44-1 du cahier des clauses administratives générales ne mettent à la charge des constructeurs autres que les entrepreneurs une obligation contractuelle de parfait achèvement dans la durée du délai de garantie d'un an qui suit la réception des travaux, dès lors que celle-ci est prononcée sans réserve ; qu'il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Caen a condamné le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC, solidairement avec l'entreprise Garguilo-Françoise, à réparer, au titre de la garantie de parfait achèvement, les désordres que connaît le dispositif d'accès aux combles du musée des Beaux-Arts ;

En ce qui concerne leur condamnation à garantir d'autres constructeurs :

Considérant qu'il ressort également de l'expertise sus évoquée, que les désordres dont est affecté l'ouvrage litigieux, s'ils sont essentiellement dus aux malfaçons imputables à l'entreprise Garguilo-Françoise, trouvent également leur origine dans la description imprécise et incomplète qu'en a fait le bureau d'études BETCI dans le cadre de la prestation qui lui avait été contractuellement confiée ; que, de même, dès lors qu'il appartenait à la société SOCOTEC, dans le cadre de sa mission de contrôle technique, de s'assurer de ce que les plans et descriptifs établis par le bureau d'études, qui concernaient des équipement de sécurité et de circulation dont dépendait la sécurité des agents de la ville comme celle du public du musée, répondaient au besoin exact de l'ouvrage, les carences constatées par l'expert à cet égard doivent faire regarder la société SOCOTEC comme n'ayant pas assumé sa mission de manière satisfaisante ; que ces carences, tant du bureau d'études BETCI que de la société SOCOTEC, sont constitutives de fautes caractérisées ; que, par suite les sociétés BETCI et SOCOTEC ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen les a condamnées à garantir l'entreprise Garguilo-Françoise à hauteur, respectivement, de 15 % et 5 % des sommes mises à la charge de cette dernière ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la ville de Caen, M. , M. Y, le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC, tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'entreprise Garguilo-Françoise est condamnée à payer la somme de 347 904,13 F (trois cent quarante sept mille neuf cent quatre francs et treize centimes) à la ville de Caen, en réparation des désordres affectant les dispositifs de circulation sous comble du musée des Beaux-Arts.

Article 2 : M. Y, le bureau d'études BETCI et la société SOCOTEC sont condamnés à garantir l'entreprise Garguilo-Françoise à hauteur, respectivement, de 10 %, 15 % et 5 % des condamnations prononcées à son encontre.

Article 3 : Le jugement susvisé du 3 avril 2002 du Tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. Y, ensemble celles de M. , du bureau d'études BETCI, de la société SOCOTEC et de la ville de Caen sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y, à M. , à la société SOCOTEC, au bureau d'études BETCI, à la ville de Caen et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 02NT00567
Date de la décision : 27/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: M. Xavier FAESSEL
Rapporteur public ?: M. MORNET
Avocat(s) : GRIFFITHS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-06-27;02nt00567 ?
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