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30/12/2004 | FRANCE | N°02NT00179

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 30 décembre 2004, 02NT00179


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 décembre 2002, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE, dont le siège social est situé 14 bis avenue Yves Thépot à Quimper (29100), par la SCP Gourves-Dano et associés, avocats au barreau de Quimper ; le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-374 en date du 25 septembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à verser la somme de 35 978,68 euros à M. X, architecte, la somme de 28 831,22 euros à M. Y, architecte, et la somme de 8 187,29

euros à M. Z, ingénieur-conseil, à titre de réparation du préjudice s...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 décembre 2002, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE, dont le siège social est situé 14 bis avenue Yves Thépot à Quimper (29100), par la SCP Gourves-Dano et associés, avocats au barreau de Quimper ; le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-374 en date du 25 septembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rennes l'a condamné à verser la somme de 35 978,68 euros à M. X, architecte, la somme de 28 831,22 euros à M. Y, architecte, et la somme de 8 187,29 euros à M. Z, ingénieur-conseil, à titre de réparation du préjudice subi par eux du fait de la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre du 11 mai 1995 et a annulé la décision du directeur du centre hospitalier du 19 décembre 1995 attribuant un nouveau marché de maîtrise d'oeuvre à un autre groupement ;

2°) de rejeter les conclusions indemnitaires de la demande de MM. X, Y et Z ainsi que les conclusions à fin d'annulation de la décision ci-dessus mentionnée du 19 décembre 1995 présentées par ces derniers ;

3°) de condamner solidairement MM. X, Y et Z à lui verser la somme globale de 142 172,89 euros à titre de réparation du préjudice qu'il a subi ;

4°) de condamner solidairement MM. X, Y et Z à lui verser la somme de 8 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2006:

- le rapport de M. Lesigne, rapporteur ;

- les observations de Me Goaoc, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE ;

- les observations de Me Le Derf-Daniel, substituant Me Bois, avocat de MM. X, Y et Z ;

- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un acte d'engagement du 11 mai 1995, le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE a confié à un groupement, constitué de MM. X et Y, architectes, de M. Z, ingénieur-conseil, du bureau d'études techniques Soulimant, de la SARL ACF ingénierie et de la SARL ACOUSTIBEL, la maîtrise d'oeuvre de l'opération de restructuration et d'extension du service des urgences ; que M. X était le mandataire dudit groupement ; qu'après une mise en demeure en date du 1er septembre 1995, de remettre dans un délai de dix jours le dossier de consultation des entreprises, le centre hospitalier a, par une décision en date du 15 septembre suivant, résilié le contrat susmentionné ; que, par le jugement attaqué du 25 septembre 2002, le Tribunal administratif de Rennes a estimé que la résiliation était irrégulière et mal fondée, a condamné le centre hospitalier à verser à M. X la somme de 35 978,68 euros, à M. Y la somme de 28 831,22 euros et à M. Z la somme de 8 187,29 euros à titre de réparation du préjudice subi et a, en outre, annulé la décision du directeur dudit établissement en date du 19 décembre 1995 de passer un nouveau marché de maîtrise d'oeuvre ; que le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE interjette appel de ce jugement ; que par la voie de conclusions d'appel incident MM. X, Y et Z demandent la condamnation dudit centre hospitalier à leur verser les sommes respectivement de 95 328,48 euros, 79 108,02 euros et 22 779,36 euros ;

Sur l'appel principal :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par MM. X, Y et Z :

Considérant qu'aux termes de l'article 37-1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles (CCAG-PI) : La personne publique peut résilier le marché aux torts du titulaire, après mise en demeure restée infructueuse, lorsque : … b) le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels ; … La mise en demeure doit être notifiée par écrit et assortie d'un délai. Sauf stipulation différente, le titulaire dispose d'un mois, à compter de la notification de la mise en demeure pour satisfaire aux obligations de celle-ci ou pour présenter des observations ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de stipulations contractuelles prévoyant un délai particulier, le délai imposé au titulaire du marché dans la mise en demeure qui lui est adressée ne saurait être inférieur à un mois ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 1er septembre 1995, le directeur du CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE, constatant que le groupement, constitué notamment de MM. X, Y et Z, chargé de la maîtrise d'oeuvre de l'opération de restructuration et d'extension du service des urgences dudit établissement ne s'était pas acquitté de ses obligations, a mis en demeure ce groupement de lui remettre le dossier de consultation des entreprises dans les conditions du marché, dans un délai de 10 jours à compter de la notification de cette mise en demeure, tout en précisant qu'à défaut d'exécution dans ledit délai, il sera procédé, conformément aux dispositions des articles 37 et 38 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, à la résiliation du marché en cause à ses torts et à ses frais et risques ; que le 15 septembre 1995, le directeur du centre hospitalier a, en application de l'article 37-1 b) précité du CCAG-PI, résilié le marché dont s'agit à compter du 15 septembre 1995 ; qu'aucune stipulation du marché litigieux ne prévoyant un délai différent de celui fixé à un mois, à compter de la mise en demeure, par l'article 37-1 b) du CCAG-PI pour satisfaire aux obligations du marché et la mise en demeure du 1er septembre 1995 ne donnant qu'un délai de dix jours au groupement de maîtrise d'oeuvre pour exécuter les prestations qui lui étaient demandées, la résiliation prononcée le 15 septembre 1995 est intervenue sur une procédure irrégulière, les courriers des 20 et 28 juillet 1995 adressés par le directeur de centre hospitalier à M. X ne pouvant être regardés comme constituant des mises en demeure ;

Considérant qu'aux termes de l'article 4 de l'acte d'engagement du 11 mai 1995 : Les délais d'exécution des documents d'étude et du dossier des ouvrages exécutés sont les suivants : APS - 6 semaines, APD - 8 semaines, PRO - 8 semaines, (EXE) - 4 semaines, DCE - 7 semaines. Le point de départ de chacun de ces délais est fixé à l'article 7.1.1 du CCAP ; qu'aux termes de l'article 7.1.1 du cahier des clauses administratives particulières : La durée des délais d'établissement des documents d'étude est fixée dans l'acte d'engagement. Le point de départ de ces délais est fixé comme suit : …PROJET-ETUDES D'EXECUTION - date de l'accusé de réception par le maître d'oeuvre du prononcé de la réception du document d'études le précédant dans l'ordre chronologique de l'opération… ; qu'il résulte de l'instruction et notamment des constatations effectuées par l'expert désigné par ordonnance du 17 juin 1997 du juge des référés du Tribunal administratif de Rennes que, compte tenu de la date de notification de la réception de l'avant-projet détaillé (APD), le 22 juin 1995, la remise du projet devait intervenir le 17 août 1995 ; que, toutefois, les documents nécessaires aux études supplémentaires n'ayant été fournis par le centre hospitalier à l'équipe de maîtrise d'oeuvre que les 13 et 24 juillet 1995, soit au cours de la phase d'élaboration du projet, ladite équipe n'a pu atteindre un rythme normal de travail entre le 22 juin 1995 et le 24 juillet 1995, ce qui impliquait nécessairement que le projet ne pouvait être remis au maître d'ouvrage avant la semaine du 21 au 28 septembre 1995 ; que si le centre hospitalier soutient que le dépassement contractuel imparti au groupement du maître d'oeuvre est imputable au comportement des membres de ce dernier, lesquels n'ont cessé de solliciter de sa part des informations complémentaires, il résulte cependant de l'instruction que ce dépassement est dû aux modifications du programme apportées par le centre hospitalier et à la remise tardive audit groupement des éléments nécessaires à l'accomplissement de sa mission dans les délais prévus ; que dans ces conditions, et alors même que par un courrier en date du 22 juin 1995 le mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre se serait engagé à remettre au maître d'ouvrage le dossier de consultation des entreprises à la fin du mois de juillet 1995, un tel engagement n'ayant pas de valeur contractuelle, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'à la date à laquelle la résiliation à été prononcée, soit le 15 septembre 1995, la défaillance du groupement de maîtrise d'oeuvre n'était pas acquise ;

Considérant qu'il ressort des termes tant des courriers des 20 et 28 juillet 1995 susrappelés que de la mise en demeure du 1er septembre 1995 et de la décision du 15 septembre 1995 elle-même que le marché de maîtrise d'oeuvre a été résilié aux torts du groupement, dont M. X était le mandataire, conformément à l'article 37-1 b) précité du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ; que, dès lors, le centre hospitalier ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir de l'application de la résiliation résultant de l'arrêt de l'exécution des prestations prévue à l'article 18 du même cahier des clauses administratives générales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a estimé que la résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre passé avec le groupement, dont M. X était le mandataire, était intervenu sur une procédure irrégulière et n'était pas justifiée au fond et qu'il a, par voie de conséquence, annulé la décision du 19 décembre 1995 de son directeur de passer un nouveau marché de maîtrise d'oeuvre et rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur l'appel incident :

En ce qui concerne l'annulation de la décision du 15 septembre 1995 du directeur du CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE :

Considérant qu'il n'appartient pas au juge du contrat de prononcer l'annulation d'une mesure de résiliation prise par le maître d'ouvrage à l'égard de son contractant ; qu'il lui appartient seulement de rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir au profit de celui-ci droit à indemnité ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les conclusions de la demande de MM. X, Y et Z tendant à l'annulation de la décision du 15 septembre 1995 du directeur du CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE prononçant la résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre ne pouvait être accueillie ;

En ce qui concerne les prestations effectuées et non payées :

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise qu'à la date de la résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre le taux d'avancement de la phase projet pouvait être estimé non à 90 % comme le soutiennent MM. X, Y et Z mais à 75 % ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction qu'en retenant la moitié des prestations supplémentaires réalisées sur les avants-projets et le projet, les premiers juges aient fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce ;

En ce qui concerne l'indemnité de résiliation :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 36 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles : Lorsque la personne publique résilie le marché, en tout ou partie, sans qu'il y ait faute du titulaire et en dehors des cas prévus à l'article 39, elle n'est pas tenue de justifier sa décision. Elle délivre une pièce écrite attestant que la résiliation du marché n'est pas motivée par une faute du titulaire, si ce dernier le demande. Le titulaire est indemnisé dans les conditions prévues au 2 du présent article. ; qu'aux termes du 2 de même article : Sauf stipulation particulière du marché, le décompte de liquidation comprend : … b) Au crédit du titulaire : … 4° Une somme forfaitaire calculée en appliquant au montant hors TVA, non révisé, de la partie résiliée du marché, un pourcentage fixé par le marché ou, à défaut, égal à 4 p. 100 ; qu'aux termes de l'article 20.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre : Pour la fixation de la somme forfaitaire figurant au crédit du maître d'oeuvre, à titre d'indemnisation, le pourcentage prévu au 4ème de l'article 36-2 du CCAG est fixé à 10 % ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le groupement de maîtrise d'oeuvre ne peut être regardé comme ayant commis une faute de nature à justifier la résiliation du marché dont il était titulaire ; que dès lors, MM. X, Y et Z peuvent prétendre chacun, en application des stipulations précitées, à l'allocation d'une somme dont le montant, au vu du rapport d'expertise, doit être fixé respectivement à 4 179,17 euros, 5 864,02 euros et 1 746,97 euros ;

En ce qui concerne le manque à gagner :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préjudice allégué par MM. X, Y et Z et consistant, pour chacun d'eux, en un manque à gagner à raison de prestations non effectuées, serait supérieur aux sommes résultant du calcul de l'indemnité de résiliation tel qu'effectué ci-dessus ; que ce chef de préjudice doit en conséquence être rejeté ;

En ce qui concerne les autres préjudices invoqués :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre prononcée par le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE ait causé à MM. X, Y et Z une atteinte à leur réputation professionnelle ou aux droits de propriétés intellectuelles à l'occasion de la reprise de leur oeuvre et de leur travail par la nouvelle équipe de maîtrise d'oeuvre ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté leur demande tendant à l'allocation de dommages-intérêts à ce titre ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. X, Y et Z ne sont pas fondés à se plaindre de l'appréciation portée par le Tribunal administratif de Rennes en ce qui concerne l'évaluation de l'ensemble des préjudices qu'ils ont subi du fait de la résiliation prononcée à leur encontre ; que, par suite, leur appel incident doit être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que MM. X, Y et Z qui ne sont pas dans la première instance la partie perdante soient condamnés à payer au CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE à payer à MM. X, Y et Z la somme que ces derniers demandent au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de MM. X, Y et Z est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER DE CORNOUAILLE, à M. Gilles X, à M. Gilles Y, à M. Jean-Paul Z et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

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N° 02NT01796

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 02NT00179
Date de la décision : 30/12/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Philippe D IZARN de VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : CABANNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2004-12-30;02nt00179 ?
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