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27/10/2005 | FRANCE | N°03NT01131

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 27 octobre 2005, 03NT01131


Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2003, présentée pour :

- M. Nicolas X, demeurant ... ;

- M. Marcel X, demeurant ... ;

- Mme Julienne-Micheline Y, demeurant ... ;

- M. François X, demeurant ... ;

- et Mme Rosalie Y, demeurant ..., par Me Cartron ; Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-1478 du 16 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a condamné le centre hospitalier de Bretagne Atlantique venant aux droits de celui d'Auray à verser une somme de 72 144 euros à M. Nicolas X en répara

tion des conséquences dommageables des fautes médicales commises lors de son hospitalisation à l...

Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2003, présentée pour :

- M. Nicolas X, demeurant ... ;

- M. Marcel X, demeurant ... ;

- Mme Julienne-Micheline Y, demeurant ... ;

- M. François X, demeurant ... ;

- et Mme Rosalie Y, demeurant ..., par Me Cartron ; Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-1478 du 16 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a condamné le centre hospitalier de Bretagne Atlantique venant aux droits de celui d'Auray à verser une somme de 72 144 euros à M. Nicolas X en réparation des conséquences dommageables des fautes médicales commises lors de son hospitalisation à la suite de l'accident dont l'intéressé a été victime le 11 juin 1993 et rejeté les conclusions de M. Marcel X, Mme Julienne-Micheline Y, M. François X et Mme Rosalie Y tendant à la condamnation du centre hospitalier d'Auray à leur verser, respectivement, des indemnités en réparation de leur préjudice moral ;

2°) de statuer à nouveau sur leur demande et condamner le centre hospitalier d'Auray à verser à M. Nicolas X une somme de 384 321,23 euros, ainsi qu'à M. Marcel X une somme de 6 097,96 euros, à Mme Julienne-Micheline Y une somme de 9 975,88 euros, à M. François X une somme de 6 097,96 euros et Mme Rosalie Y une somme de 6 097,96 euros, lesdites sommes assorties d'intérêts au taux légal et capitalisation à compter du 18 novembre 1999 ;

3°) de condamner le centre hospitalier d'Auray à verser à M. Nicolas X une somme de 3 811,23 euros et à M. Marcel X, à Mme Julienne-Micheline Y, à M. François X et à Mme Rosalie Y une somme de 762,25 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 septembre 2005 :

- le rapport de M. Geffray, rapporteur ;

- les observations de Me Cartron, avocat des consorts X et autres ;

- les observations de Me Cabin, substituant Me Mémin, avocat du centre hospitalier de Bretagne Atlantique ;

- les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, le 11 juin 1993, M. Nicolas X, alors âgé de dix-sept ans, a été victime d'un grave accident de la circulation provoquant un polytraumatisme avec fracture ouverte du tibia ; qu'il a été hospitalisé au centre hospitalier d'Auray, puis transféré au centre hospitalier régional et universitaire de Nantes en raison de l'aggravation de l'état de la jambe droite ; qu'en dépit des soins prodigués, celle-ci a été amputée le 24 juin 1993 au-dessous du genou ; que, par jugement du 16 avril 2003, le Tribunal administratif de Rennes a retenu la responsabilité du centre hospitalier d'Auray pour ne pas avoir diagnostiqué à temps un syndrome des loges, ce qui n'a pas permis une récupération normale de l'état de la jambe ; que le Tribunal administratif de Rennes a fixé à une somme de 72 144 euros l'indemnité que le centre hospitalier de Bretagne Atlantique, venant aux droits de celui d'Auray, a été condamné à verser à M. X ; qu'il a rejeté les conclusions de M. Marcel X et de Mme Y ; que les requérants font appel de ce jugement ; que le centre hospitalier ne conteste pas sa responsabilité ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que les requérants demandent expressément à la Cour d'annuler le jugement attaqué et de statuer à nouveau sur leur demande ; que, toutefois, ce jugement, qui leur donne partiellement satisfaction, ne leur fait grief que par son article 2, rejetant le surplus de leurs conclusions ; que la requête d'appel n'est ainsi recevable que contre cette partie du dispositif du jugement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, contrairement à ce que les requérants soutiennent, le jugement du Tribunal administratif de Rennes du 2 avril 2003 contient la mention de ce que le délibéré est intervenu à l'issue de l'audience du 2 avril 2003 et a été prononcé en audience publique le 16 avril 2003 ;

Considérant que les premiers juges, en procédant à une évaluation globale des troubles de toutes natures dans les conditions d'existence, n'ont pas entaché leur jugement d'un défaut de motivation ;

Considérant que si M. X invoque une omission à statuer sur le chef de préjudice relatif au retentissement de l'amputation sur sa scolarité, ce moyen manque en fait, dès lors que le jugement attaqué précise que l'intéressé a pu poursuivre sa scolarité pendant les onze mois passés dans un centre de rééducation ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, le Tribunal administratif de Rennes, en retenant partiellement la demande qu'il a présentée au titre de l'aménagement de son véhicule automobile et des frais futurs de cette nature, n'a pas entaché son jugement de défaut de motivation, dès lors qu'il a indiqué que l'intéressé avait justifié l'acquisition d'un véhicule adapté à vitesse automatique et que, compte tenu des pièces produites, il y avait lieu de prendre en compte la différence de prix, soit la somme de 3 800 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement n'est pas irrégulier ;

Sur les conclusions de M. Nicolas X ;

En ce qui concerne les troubles dans les conditions d'existence :

Considérant que l'incapacité permanente partielle de M. Nicolas X directement liée au retard de diagnostic et de soins a été fixée à 28 % par l'expert désigné par ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Rennes ; que M. X soutient que si, selon les barèmes médicaux, qui n'ont qu'une valeur indicative, la perte totale par amputation d'un membre inférieur au niveau de la jambe doit être évaluée à 40 %, le taux aurait dû être fixé, en l'espèce, à 60 %, compte tenu de ce que l'amputation, bien que réalisée en deçà du genou, n'a pas permis d'ajuster un appareillage convenable ; que, toutefois, l'expert a pris en compte les techniques de l'appareillage dans l'évaluation du taux de l'incapacité permanente partielle de la victime ; qu'en outre, M. Nicolas X n'apporte aucun élément médical permettant de remettre en cause l'évaluation ainsi faite par l'expert ; que, cependant, compte tenu de l'âge de M. Nicolas X, né en 1976 et de l'importance des troubles liés à l'amputation de la jambe droite, les premiers juges n'ont pas fait une appréciation suffisante de ce chef de préjudice en fixant à la somme de 55 000 euros l'indemnité destinée à les réparer ; que, compte tenu de ces éléments ainsi que, d'une part, de l'existence d'un préjudice d'agrément dans la mesure où M. X pratiquait la voile et participait à des compétitions sportives et, d'autre part, des difficultés psychologiques et affectives de l'intéressé, même si l'expert ne conclut à aucun préjudice sexuel, il sera fait une juste appréciation de ces troubles, en allouant à l'intéressé une somme de 72 500 euros, dont les trois-quarts à titre personnel ;

En ce qui concerne les souffrances physiques et du préjudice esthétique :

Considérant que dans son rapport, l'expert a évalué les souffrances endurées par M. X à 6 sur une échelle de 1 à 7 dont 3 sur 7 relèvent du retard de diagnostic et le préjudice esthétique à 2 sur une même échelle ; qu'en fixant à une somme de 3 100 euros la réparation de chacun de ces deux préjudices, le Tribunal administratif de Rennes n'a pas fait une appréciation suffisante de ces préjudices ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances en allouant à M. X une somme de 6 000 euros en réparation de ses souffrances physiques et une somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice esthétique ;

En ce qui concerne l'incapacité temporaire totale :

Considérant que si l'expert a évalué à quatre-vingt jours l'incapacité temporaire totale de M. X, celui-ci n'exerçait aucune activité professionnelle ; que, dès lors, M. X n'a pas subi de perte de revenus pendant la durée de cette incapacité ;

En ce qui concerne les frais futurs d'appareillage :

Considérant que si l'expert conclut au renouvellement annuel d'une partie de l'appareillage, M. X n'établit pas devoir être exposé à des frais futurs pour la partie restant à sa charge, compte tenu de leur prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie ;

En ce qui concerne l'assistance d'une tierce personne :

Considérant que la victime n'apporte aucun élément de nature à justifier le bien-fondé de sa demande d'indemnité au titre de l'assistance d'une tierce personne, alors que la nécessité de cette aide ne ressort pas du rapport de l'expert ; qu'ainsi, aucune indemnisation ne saurait être accordée à ce titre ;

En ce qui concerne la scolarité :

Considérant que l'expert n'a conclu à aucun retentissement scolaire ; que le redoublement de M. X en première était prévu et qu'il s'est orienté par la suite dans une filière de son choix ; qu'ainsi, M. X ne saurait prétendre à une indemnisation à ce titre ;

En ce qui concerne les travaux d'adaptation du logement :

Considérant que si M. X demande à être indemnisé de l'automatisation de la porte du garage et du portail, de l'installation de toilettes au rez-de-chaussée et de celle d'un ascenseur, l'expert n'a pas conclu à la stricte nécessité de ces travaux d'aménagement du domicile parental au regard de son état de santé ; qu'aucune pièce du dossier n'en vient justifier ;

En ce qui concerne l'aménagement du véhicule automobile :

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. Nicolas X, le Tribunal administratif de Rennes n'a pas fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice en limitant l'indemnisation au renouvellement tous les cinq ans du coût de l'aménagement d'une boîte à vitesse automatique d'un véhicule automobile, soit à la somme de 10 944 euros ; qu'il a, toutefois, omis l'indemnisation de l'aménagement initial, soit la somme de 3 800 euros ;

En ce qui concerne les frais de permis de conduire adapté au handicap et de transport :

Considérant que les frais de permis de conduire adapté au handicap et de transport sont des conclusions nouvelles en appel et donc irrecevables ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander que la somme de 72 144 euros qui lui a été allouée par le Tribunal administratif de Rennes, dont devront être déduites les sommes de 19 056,13 euros et 64 181,04 euros versées à titre de provision, soit portée à 97 244 euros, avec la même déduction ;

Sur les conclusions de M. Marcel X, Mme Julienne-Micheline Y, M. François X et Mme Rosalie Y :

Considérant que M. Marcel X, Mme Julienne-Micheline Y, M. François X et Mme Rosalie Y n'ont précisé devant les premiers juges ni leur qualité, ni la nature des préjudices dont ils demandaient réparation ; que leurs conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier d'Auray étaient, ainsi, irrecevables faute de motivation, comme l'a jugé à bon droit le Tribunal ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner le centre hospitalier d'Auray à payer à M. Nicolas X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 72 144 euros (soixante-douze mille cent quarante-quatre euros) que le centre hospitalier de Bretagne Atlantique, venant aux droits du centre hospitalier d'Auray, a été condamné à verser à M. Nicolas X est portée à 97 244 euros (quatre-vingt-dix-sept mille deux cent quarante-quatre euros).

Article 2 : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Rennes du 16 avril 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de MM. Nicolas et Marcel X, Mme Julienne-Micheline Y, M. François X et Mme Rosalie Y est rejeté.

Article 4 : Le centre hospitalier d'Auray versera à M. Nicolas X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Nicolas X, à M. Marcel X, à Mme Julienne-Micheline Y, à M. François X, à Mme Rosalie Y, au centre hospitalier d'Auray, à la caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan et au ministre de la santé et des solidarités.

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N° 03NT01131

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 03NT01131
Date de la décision : 27/10/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : CARTRON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-10-27;03nt01131 ?
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