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30/03/2006 | FRANCE | N°05NT00013

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 30 mars 2006, 05NT00013


Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2005, présentée pour M. Pascal X, demeurant ..., par Me Lerasle ; M. Pascal X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-99 du 9 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département du Cher à lui verser la somme totale de 241 215,46 euros en réparation des préjudices résultant de son accident survenu le 19 juillet 1998 ;

2°) de condamner le département du Cher à lui verser ladite somme ;

3°) de condamner le département du Cher à lui ve

rser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice adminis...

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2005, présentée pour M. Pascal X, demeurant ..., par Me Lerasle ; M. Pascal X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-99 du 9 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département du Cher à lui verser la somme totale de 241 215,46 euros en réparation des préjudices résultant de son accident survenu le 19 juillet 1998 ;

2°) de condamner le département du Cher à lui verser ladite somme ;

3°) de condamner le département du Cher à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mars 2006 :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort, rapporteur ;

- les observations de Me Flynn, substituant Me Dora, avocat du département du Cher ;

- les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :

Considérant que, le 19 juillet 1998 vers 1 heure 30, alors que venant de Bourges, il quittait la route départementale n° 23 et s'engageait sur la route départementale n° 160 en direction de Marmagne, M. X a été victime d'un accident causé par le dérapage de sa motocyclette sur des gravillons répandus sur la chaussée ; que les photographies et les attestations produites par le requérant, qui ne sont pas contestées par le département du Cher, établissent que, au niveau de l'intersection avec la route départementale n° 23, le terre-plein séparant les deux voies de circulation de la route départementale n° 160 était recouvert de gravillons dont une quantité notable était dispersée sur la courbe formée par la chaussée à cet endroit ; que ce danger n'était pas signalé et qu'il n'y a pas été remédié ; qu'il résulte d'un courrier daté du 12 février 1999 adressé par la direction départementale de l'équipement du Cher au département du Cher que seuls des panneaux alertant les usagers du danger de chaussée déformée étaient en place en prévision de travaux de voirie à effectuer au cours du mois d'août 1998 ; que le procès-verbal de gendarmerie dressé à la suite de l'accident fait état de la présence de gravillons et de sable de carrière sur la chaussée, qui proviendrait, selon les mentions de ce procès-verbal, de la perte d'un chargement lors d'un transport ; que, toutefois, à supposer même que ces matériaux se soient effectivement ajoutés à ceux qui provenaient du terre-plein, la seule indication figurant dans la lettre du 12 février 1999 selon laquelle la présence de gravillons n'a pas été relevée dans le cadre de la surveillance du réseau routier exercée par la subdivision de l'équipement de Bourges-Mehun pour le compte du département du Cher, ni avant, ni après l'accident du 19 juillet 1998, n'établit nullement que ces services n'ont pas disposé d'un délai suffisant pour intervenir et confirme que ce dépôt de matériaux n'a été ni décelé, ni identifié comme un danger pour la circulation ; que, par suite, le département du Cher ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de la voirie dont il est maître d'ouvrage ; qu'ainsi, M. X, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait eu un comportement fautif, est fondé à soutenir que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal administratif d'Orléans par son jugement du 9 novembre 2004, le département du Cher doit être déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident dont il a été victime ;

Sur le préjudice :

Considérant que les frais médicaux, pharmaceutiques, d'hospitalisation et de transport exposés par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Cher à l'occasion de cet accident s'élèvent à la somme de 40 753,33 euros ; que la caisse a versé des indemnités journalières du 19 juillet 1998 au 16 juin 2002 pour un montant de 23 660,78 euros ;

Considérant qu'en se bornant à produire copie, d'une part, d'un contrat de travail conclu avec la société des transports Douy et de bulletins de salaires dont le dernier jour d'activité mentionné est le 22 mai 1998, d'autre part, d'une attestation non datée émanant d'une autre entreprise et aux termes de laquelle celle-ci avait l'intention d'engager M. X, celui-ci n'établit ni qu'il occupait un emploi à la date de son accident, ni qu'il bénéficiait d'une offre sérieuse d'embauche ; que, par suite, il ne peut prétendre à une indemnisation pour perte de revenus au titre de la période d'incapacité temporaire totale du 19 juillet 1998 au 19 novembre 2001 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des rapports des expertises ordonnées en première instance, que l'accident dont M. X a été la victime le 19 juillet 1998 a provoqué une triple fracture de la jambe droite ; qu'il a dû être hospitalisé à plusieurs reprises et suivre une rééducation ; que l'interruption temporaire totale de travail a duré plus de trois ans et que son état de santé n'a été consolidé que le 18 mai 2002 ; qu'il a été plâtré au niveau de la jambe et du bras droits durant plus d'un an ; que les soins reçus doivent être regardés comme étant en relation avec l'accident litigieux, même si certains d'entre eux se justifient également par le traitement des séquelles d'une fracture de la cheville droite survenue antérieurement ; que celui-ci a dû subir une arthrodèse tibio-tarsienne droite du fait des complications apparues sur cette articulation, lesquelles ont entraîné une diminution de mobilité et la réduction du périmètre de marche ; que le taux d'incapacité permanente partielle de M. X, pour sa part en relation avec l'accident du 19 juillet 1998, est de 13 % ; que son état ne lui permet plus d'exercer son métier de chauffeur poids lourd international ; qu'il ne peut plus pratiquer certains sports ; que ces troubles de toute nature dans les conditions d'existence de M. X, âgé de trente-trois ans, seront réparés par l'allocation d'une somme de 18 000 euros, dont la moitié au titre des troubles physiologiques ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant des souffrances physiques d'une intensité de 4,5 sur une échelle de 7 subies par le requérant et de son préjudice esthétique, fixé à 2,5 sur la même échelle en fixant l'indemnisation due à ces titres à 7 000 euros et 3 000 euros ;

Considérant que, par suite, le préjudice global de M. X s'élève à 92 414,11 euros, soit 73 414,11 euros au titre du préjudice relatif à l'intégrité physique et 19 000 euros au titre des autres préjudices ;

Sur les droits de la CPAM du Cher :

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L.376 ;1 du code de la sécurité sociale : Si la responsabilité d'un tiers est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément ;

Considérant que la CPAM du Cher justifie de débours comprenant des frais médicaux, pharmaceutiques, d'hospitalisation et de transport à hauteur de 40 753,33 euros, des indemnités journalières pour un montant de 23 660,78 euros, et les arrérages de la rente servie à M. X échus au 23 mars 2005 qui s'élèvent à 9 958,89 euros, soit un total de 74 373 euros ; que cette dernière somme est supérieure à celle de 73 414,11 euros sur laquelle peuvent s'exercer les droits de cette caisse ; que, dès lors, la CPAM du Cher a seulement droit au paiement de la somme de 73 414,11 euros ;

Sur les droits de M. X :

Considérant que M. X a droit au paiement d'une somme de 19 000 euros correspondant à son préjudice personnel ;

Sur les dépens :

Considérant que le Tribunal administratif d'Orléans a omis de se prononcer sur la dévolution des frais des expertises ordonnées par le juge des référés ; que, par suite, il y a lieu d'annuler également dans cette mesure le jugement attaqué, d'évoquer sur ce point et de statuer sur la charge des frais d'expertise ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département du Cher les frais d'expertise exposés en première instance, taxés et liquidés à la somme de 1 600 F (243,92 euros) et 205 euros par ordonnances des 8 décembre 2000 et 20 mars 2003 du président du Tribunal administratif d'Orléans ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer au département du Cher la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner le département du Cher à payer à M. X la somme de 2 000 euros qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 9 novembre 2004 du Tribunal administratif d'Orléans est annulé.

Article 2 : Le département du Cher est condamné à payer à M. X une somme de 19 000 euros (dix-neuf mille euros) et à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher une somme de 73 414,11 euros (soixante-treize mille quatre cent quatorze euros et onze centimes).

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X et de la caisse primaire d'assurance maladie du Cher est rejeté.

Article 4 : Les frais d'expertise exposés en première instance sont mis à la charge du département du Cher.

Article 5 : Le département du Cher versera à M. X une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions présentées par le département du Cher tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pascal X, au département du Cher, à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

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N° 05NT00013

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 05NT00013
Date de la décision : 30/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CADENAT
Rapporteur ?: M. Philippe D IZARN de VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : LERASLE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-03-30;05nt00013 ?
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