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23/03/2009 | FRANCE | N°07NT02443

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 23 mars 2009, 07NT02443


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2007, présentée pour Mme Christiane X, demeurant ..., par Me Griffon, avocat au barreau de Saint-Nazaire ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1367 en date du 5 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la réduction demandée ;

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) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 76...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2007, présentée pour Mme Christiane X, demeurant ..., par Me Griffon, avocat au barreau de Saint-Nazaire ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1367 en date du 5 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la réduction demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 février 2009 :

- le rapport de Mme Specht, rapporteur ;

- les observations de Me Griffon, avocat de Mme X ;

- et les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que par une décision du 29 février 2008, le directeur des services fiscaux de la Loire-Atlantique a prononcé le dégrèvement d'une somme de 521,22 euros en droits et pénalités au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales de l'année 1996 ; que les conclusions de Mme X sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 200-1 du livre des procédures fiscales : (...) Un membre du tribunal ou de la Cour ne peut siéger dans le jugement d'un litige portant sur une imposition dont il a eu à apprécier la base comme président de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. ;

Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que le commissaire du gouvernement près la formation du Tribunal administratif de Nantes qui a rendu le jugement attaqué, a présidé la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lors de la séance du 9 mai 2001 au cours de laquelle le litige opposant Mme X à l'administration fiscale a été examiné ; que le principe d'impartialité, rappelé par les dispositions précitées de l'article R. 200-1 du livre des procédures fiscales, faisait, dès lors, obstacle à ce qu'il conclut devant la formation de jugement du tribunal lorsque celui-ci a statué sur la demande dont Mme X l'a saisi contre la même imposition ; que, par suite, le jugement attaqué étant intervenu au terme d'une procédure irrégulière, Mme X est fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Nantes et d'y statuer immédiatement ;

Sur le surplus des conclusions de la demande :

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales la charge de la preuve incombe au contribuable en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ;

Considérant que Mme X a fait l'objet dans le cadre d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 1996, 1997 et 1998, selon une procédure dont la régularité n'est pas contestée, d'une taxation d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales des crédits bancaires d'un montant de 593 908 F (90 540,69 euros) au titre de l'année 1996, de 554 708 F (84 564,69 euros) au titre de l'année 1997 et de 272 332 F (41 516,75 euros) au titre de l'année 1998 ; qu'il lui appartient, en application des dispositions précitées, d'apporter la preuve de l'exagération des impositions qu'elle conteste ;

S'agissant des crédits bancaires figurant sur le compte joint ouvert à la BPBA :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ; que Mme X doit être regardée comme ayant eu la disposition, au sens de l'article 12 précité du code général des impôts, de l'intégralité des crédits portés sur le compte BPBA détenu conjointement avec son compagnon M. Y, sauf à démontrer qu'en tout ou partie, ces crédits étaient utilisés pour les besoins de son co-titulaire ;

Considérant que les crédits figurant sur le compte joint BPBA taxés d'office par l'administration s'élèvent à 438 301 F (66 818,56 euros) au titre de l'année 1996, de 409 736 F (62 463,85 euros) au titre de l'année 1997 et de 247 081 F (37 667,26 euros) au titre de l'année 1998 ; que Mme X soutient qu'une part des crédits litigieux figurant sur ce compte était destinée à régler des achats de matériaux et outillage effectués en France pour les besoins de deux sociétés de droit camerounais dont son compagnon était le dirigeant, et qu'elle n'avait pas ainsi la disposition réelle des sommes correspondantes ; que toutefois, en l'absence de corrélation entre les crédits litigieux et les factures produites, dont certaines sont libellées à ses noms et adresses personnels, d'autres au nom d'une des sociétés camerounaises mais à son adresse personnelle et enfin un faible nombre au nom des sociétés camerounaises à l'adresse de leur siège, celles-ci sont insuffisantes pour établir la nature et la cause juridique des crédits litigieux alors même que l'origine de certains d'entre eux est établie ; que par ailleurs, contrairement à ce que soutient Mme X, il n'est pas établi que la somme de 15 000 F versée le 3 mars 1998 aurait été imposée deux fois ;

Considérant en second lieu, que Mme X soutient également qu'une partie des crédits litigieux constituait la contribution de son concubin M. Y à l'entretien de ses deux enfants, dont l'un est l'enfant du couple, et de sa nièce à sa charge, dont elle assurait l'entretien et l'éducation ; qu'il résulte de l'instruction que, durant les années en litige, si la présence alléguée de la nièce de M. Y au domicile de Mme X n'est pas établie, celle des deux enfants est établie ; que, par ailleurs, Mme X justifie, par les pièces produites, que les versements de 100 000 F (15 244,90 euros) du 13 mai 1996, de 15 000 F (2 286,76 euros) du 25 août 1997 et ceux effectués en 1998 pour un total de 182 500 F (27 821,94 euros) ont été personnellement effectués par M. Y ; que, dès lors, pour ce qui concerne ces crédits, la requérante doit être regardée comme établissant qu'ils constituent des subsides ayant le caractère de pures libéralités et ne sont donc pas imposables ; que, toutefois Mme X doit être regardée comme admettant le caractère imposable d'une somme de 138 508 F (21 115,41 euros) au titre de l'année 1996, de 80 305 F (12 242,42 euros) au titre de l'année 1997 et de 80 686 F(12 300,50 euros) au titre de l'année 1998 ; que, par suite, si Mme X est fondée à demander une réduction des bases d'imposition des années 1996 et 1997 à concurrence du montant des libéralités, la réduction de la base d'imposition en ce qui concerne les crédits litigieux sur le compte BPBA au titre de l'année 1998 devra être limitée à 166 395 F (25 366,75 euros) correspondant au montant des crédits diminué du montant de l'imposition admise ;

S'agissant des crédits figurant sur les comptes Caisse d'Epargne :

Considérant que l'administration a également taxé d'office, sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales des crédits figurant sur les comptes détenus par Mme X auprès de la Caisse d'Epargne pour un montant de 155 607 F (23 722,13 euros) au titre de l'année 1996, de 18 373 F (2 800,95 euros) en chèques et 72 600 F (11 067,80 euros) en espèces au titre de l'année 1997 et de 12 251 F (1 867,65 euros) au titre de l'année 1998 ;

Considérant, en premier lieu, que si Mme X soutient avoir prêté une somme de 250 000 F à son frère en octobre 1996 que celui-ci lui aurait remboursée par deux versements en espèces fin octobre 1996 d'un montant de 150 000 F et un virement bancaire de 100 000 F le 13 mars 1997, elle n'établit pas, par les pièces produites, que les divers dépôts d'espèces enregistrés sur ses divers comptes détenus à la Caisse d'Epargne en juillet 1997, janvier 1998 et avril 1998 correspondraient aux remboursements allégués ; que par ailleurs, si un virement de 100 000 F peut être constaté sur ses comptes le 13 mars 1997, l'origine de ce crédit n'est pas établie ;

Considérant en second lieu, que Mme X soutient que des crédits d'un montant de 20 310 F (3 096,24 euros) en 1996, 18 373 F (2 800,95 euros) en 1997 et 12 251 F (1 867,65 euros) en 1998 correspondraient à l'encaissement de loyers pour le compte d'un tiers domicilié au Cameroun, qu'elle lui reversait ; que toutefois elle ne produit aucune pièce permettant de justifier l'encaissement par ses soins de tels loyers pour le compte du propriétaire, ni la réalité et les modalités de leur reversement ; que si elle fait état d'une attestation rédigée par le propriétaire aux termes de laquelle le propriétaire aurait certifié que les loyers encaissés par Mme X lui étaient reversés, qui aurait été remise à l'administration, ce document n'a pas été produit devant le juge de l'impôt ; qu'en outre aucune justification n'est apportée pour le surplus des crédits taxés au titre de l'année 1996 ;

Sur la demande de compensation présentée par le ministre :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande. ;

Considérant que le ministre, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales, demande que, dans le cas où des crédits bancaires seraient considérés comme expliqués et non imposables, il soit procédé à une compensation entre ces crédits et l'enrichissement inexpliqué de Mme X résultant de l'acquisition de biens immobiliers durant les années en litige, soit le 7 septembre 1996 un immeuble situé 18, rue de la Garillère à Saint-Sébastien-sur-Loire (44) pour un montant de 195 000 F et 10 005 F de frais d'enregistrement, le 30 décembre 1996 un immeuble situé à Nantes, 54, rue de la Bourgeonnière (44), pour un prix de 493 000 F et 2 514 F de droits de publicité foncière et le 16 juillet 1998, un immeuble situé 1, rue Pierre de Ronsard à Basse-Goulaine (44) pour un montant de 715 000 F et 51 826 F de droits de mutation, à partir de disponibilités dont l'origine ne se trouverait ni dans les revenus déclarés, ni parmi celles figurant sur les comptes bancaires examinés ;

Considérant toutefois que ces acquisitions immobilières avaient été relevées par l'administration avant l'instruction de la réclamation de la requérante et ne peuvent, par suite, constituer des insuffisances ou omissions dans l'assiette ou le calcul de l'imposition, constatées au cours de l'instruction de cette réclamation ; que, par suite, et en tout état de cause, le ministre ne peut se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est seulement fondée à demander la réduction de ses bases d'imposition ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, soit condamné à payer à Mme X la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme X à concurrence d'une somme de 521,22 euros (cinq cent vingt et un euros vingt-deux centimes) en droits et pénalités au titre de l'impôt sur le revenu et de contributions sociales de l'année 1996.

Article 2 : Le jugement n° 04-1367 en date du 5 juin 2007 du Tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 3 : Les bases d'imposition sur le revenu assignées à Mme X sont réduites d'une somme de 15 244,90 euros (quinze mille deux cent quarante-quatre euros quatre-vingt-dix centimes) au titre de l'année 1996, de 2 286,76 euros (deux mille deux cent quatre-vingt-six euros soixante-seize centimes) au titre de l'année 1997 et de 25 366,75 euros (vingt-cinq mille trois cent soixante-six euros soixante-quinze centimes) au titre de l'année 1998.

Article 4 : Mme X est déchargée en droits et pénalités de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales correspondant à la réduction des bases d'imposition définies à l'article 3 ci-dessus.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Christiane X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N° 07NT02443

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 07NT02443
Date de la décision : 23/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: Mme Frédérique SPECHT
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : GRIFFON

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2009-03-23;07nt02443 ?
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