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04/02/2011 | FRANCE | N°10NT00126

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 04 février 2011, 10NT00126


Vu la requête enregistrée le 21 janvier 2010, présentée pour M. Eric X, demeurant ..., par Me Samson, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n°s 05-6160 et 06-30 en date du 20 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions tendant à ce que soit déclaré nul et non avenu le jugement rendu par ce tribunal le 2 juillet 2002 en ce qu'il l'a condamné à payer à la communauté urbaine de Nantes la somme de 142 612,86 euros, outre les intérêts, a mis à sa charge le versement de la somme

de 1 000 euros à ladite communauté urbaine en application des dispositi...

Vu la requête enregistrée le 21 janvier 2010, présentée pour M. Eric X, demeurant ..., par Me Samson, avocat au barreau de Nantes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n°s 05-6160 et 06-30 en date du 20 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions tendant à ce que soit déclaré nul et non avenu le jugement rendu par ce tribunal le 2 juillet 2002 en ce qu'il l'a condamné à payer à la communauté urbaine de Nantes la somme de 142 612,86 euros, outre les intérêts, a mis à sa charge le versement de la somme de 1 000 euros à ladite communauté urbaine en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'a condamné et garantir M. Y, la SA Socotec et la société Devin Lemarchand Environnement à hauteur de 40 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

2°) de déclarer nul et non avenu le jugement rendu par le tribunal administratif de Nantes le 2 juillet 2002 en ce qu'il a condamné M. X à payer à la communauté urbaine de Nantes la somme de 142 612,86 euros, outre les intérêts, a mis à sa charge le versement de la somme de 1 000 euros à ladite communauté urbaine en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'a condamné à garantir M. Y, la SA Socotec et la société Devin Lemarchand Environnement à hauteur de 40 % des condamnations prononcées à leur encontre ;

3°) de rejeter toutes les demandes formées à son encontre par la communauté urbaine de Nantes et, à titre subsidiaire, de diminuer le pourcentage de garantie mis à sa charge ;

4°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Nantes Métropole le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2010 :

- le rapport de M. Wegner, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Villain, rapporteur public ;

- les observations de Me Cernier, substituant Me Reveau, avocat de la communauté urbaine Nantes Métropole ;

- les observations de Me Diversay, substituant Me Salaun, avocat de la société DLE Ouest ;

- les observations de Me Flynn, substituant Me Viaud, avocat de la SA Socotec ;

- et les observations de Me Bouvattier, avocat de la SARL GCA Ingénierie ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 décembre 2010, présentée pour la société Socotec ;

Considérant que M. X a conclu, le 12 octobre 1992, avec la commune de Nantes, un contrat stipulant dans son préambule que M. Y, a été désigné pour concevoir l'aménagement de la place du commandant L'Herminier et commandité à cet effet par l'Etat et que celui-ci a souhaité voir confier la réalisation de son projet, sous son contrôle, à M. X, habituellement chargé de mettre en oeuvre les oeuvres artistiques ; que, par ce contrat, modifié par un avenant daté du 21 avril 1993, M. X s'est engagé à exécuter, en ce qui concerne les superstructures de l'aménagement, les missions intitulées avant projet sommaire, avant projet détaillé, spécifications techniques détaillées, plans d'exécution des ouvrages et réception des travaux, les autres missions de maîtrise d'oeuvre relatives aux superstructures, notamment la conduite de chantier, devant être assurées par la société GCA ; que le lot gros oeuvre a été attribué à la société Devin Lemarchand Environnement tandis que la société Socotec s'était vu confier une mission de contrôle technique portant sur la solidité des ouvrages et des éléments d'équipement indissociables ; que, postérieurement à la réception de l'ouvrage, intervenue le 20 décembre 1993, des dalles de béton recouvrant des parois verticales se sont décollées ; que la ville de Nantes a recherché la responsabilité décennale des constructeurs devant le tribunal administratif de Nantes qui, par un jugement du 2 juillet 2002, a condamné solidairement M. Y, M. X, les sociétés Socotec et Devin Lemarchand Environnement à payer à la communauté urbaine de Nantes, venant aux droits de la commune de Nantes, la somme de 142 612,86 euros, outre les intérêts, et a condamné M. X à garantir respectivement M. Y, la société Socotec et la société Devin Lemarchand environnement à hauteur de 40 % des condamnations mises à leur charge ; que M. X a formé tierce opposition à ce jugement et relève appel du jugement en date du 20 novembre 2009 en tant que le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions en tierce opposition ;

Considérant que, par un arrêt du 25 mars 2005, la cour a rejeté l'appel formé par M. Y contre le jugement du 2 juillet 2002 du tribunal administratif de Nantes ; qu'ainsi, la tierce opposition, présentée par M. X, postérieurement à la date de cet arrêt, ne pouvait être formée que devant la cour ; que, dès lors, c'est à tort que les premiers juges, qui étaient dessaisis de leur compétence pour connaitre de cette tierce opposition, ont statué sur celle-ci alors qu'il leur appartenait de la transmettre à la cour ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler l'article 2 du jugement du 2 juillet 2002, par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté la tierce opposition présentée par M. X sous le n° 06-30 et, dans cette mesure, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de ce dernier ;

Sur le bien-fondé de la tierce opposition de M. X et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la communauté urbaine Nantes Métropole et la SARL GCA Ingénierie :

Considérant que selon les principes dont s'inspire l'article 1792 du code civil, tout constructeur est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'en vertu des principes dont s'inspire l'article 1792-1 du même code, est réputé constructeur de l'ouvrage tout architecte, entrepreneur, technicien ou toute autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ; qu'en vertu des principes dont s'inspire l'article 2270 dudit code, toute personne dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 de ce code est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle, en application des articles 1792 à 1792-2, après dix ans à compter de la réception des travaux ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, postérieurement à la réception de l'ouvrage, des dalles de béton recouvrant des parois verticales se sont décollées ; qu'il n'est pas contesté que ces désordres, qui représentaient un danger pour la sécurité des personnes se déplaçant sur et aux abords de la place du commandant L'Herminier, étaient de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage et à le rendre impropre à sa destination ;

Considérant que M. X soutient qu'il ne peut être regardé comme étant l'architecte de l'opération dès lors qu'il n'a obtenu qu'en décembre 1993 son diplôme d'ingénieur en architecture et que c'est dans le cadre d'une collaboration professeur/étudiant qu'il a assisté M. Y dans l'opération d'aménagement de la place du commandant L'Herminier sans être couvert par une assurance professionnelle ; que, toutefois, il ressort des stipulations sus-rappelées du marché conclu par l'intéressé avec le maître de l'ouvrage que ses missions incluaient la réalisation de l'avant-projet sommaire, de l'avant-projet détaillé, des spécifications techniques détaillées et des plans d'exécution des superstructures de l'ouvrage, lesquels comprenaient les dalles à l'origine des désordres litigieux ; que, par suite, M. X avait bien la qualité de constructeur de l'opération lié au maitre d'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ;

Considérant qu'il résulte de la nature des rapports existant entre l'architecte et l'entrepreneur pour l'exécution des marchés de travaux publics que la fin des relations contractuelles doit être fixée à la même date pour l'architecte et pour l'entrepreneur, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'architecte n'est pas partie au marché passé entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur ; que ces rapports contractuels cessent, sous réserve du délai de parfait achèvement, à la date de réception des ouvrages à condition que celle-ci ne soit pas assortie de réserves ; qu'il résulte de l'instruction que la réception des travaux correspondant au lot gros oeuvre a été prononcée par le maître de l'ouvrage, le 20 décembre 1993, contradictoirement avec l'entrepreneur, en étant assortie de réserves sans lien avec les désordres litigieux ; qu'en admettant même que M. X n'ait pas été invité à assister aux opérations préalables à ladite réception, la maîtrise d'oeuvre y étant représentée par la société GCA, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que la fin des relations contractuelles entre le maître de l'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre, en ce qui concerne l'ouvrage réceptionné, soit fixée à la date de la réception, ainsi d'ailleurs que le stipulait l'article 2 du contrat conclu par le requérant avec la commune de Nantes ; que ce dernier ne peut utilement invoquer une violation de l'article 1792-6 du code civil, au motif que la réception des travaux n'aurait pas été contradictoire à son égard, pour soutenir que le maître de l'ouvrage serait irrecevable à rechercher sa responsabilité de constructeur au titre de la garantie décennale ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les désordres en litige proviennent de l'inadaptation du mode de fixation par collage des dalles compte tenu du poids de celles-ci, ce mode de fixation n'étant, en outre, autorisé par aucun document technique unifié (DTU) ; que, si M. X fait valoir qu'il n'a pas participé à la rédaction du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) de l'opération, il résulte de l'instruction que l'article 2.03.7 de ce document précise : fourniture et pose de dalles béton verticales selon indications des plans, compris matériaux de fixation sur le support béton (colle spéciale avec certificat) et que les travaux ont été exécutés en conformité avec les plans réalisés par M. X, lesquels indiquaient un mode de pose par collage ; qu'ainsi, les désordres sont, notamment, imputables aux concepteurs de l'ouvrage, M. Y et M. X, ce dernier étant chargé de la mise en oeuvre du projet défini par M. Y, sous le contrôle de celui-ci, qui devait donner son visa à chaque étape de la réalisation de l'ouvrage ;

Considérant que M. X, qui était chargé de la mise en oeuvre du projet conçu par M. Y, a failli à sa mission d'assistance et de conduite du chantier en n'écartant pas un mode de fixation des dalles inadapté ; qu'il sera fait une juste appréciation des fautes commises par M. X en le condamnant à garantir respectivement M. Y, la société Socotec et la société DLE Ouest de 40 % des condamnations mises à leur charge ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions en tierce opposition présentées par M. X doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté urbaine Nantes Métropole, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier la somme que demandent la communauté urbaine Nantes Métropole et les sociétés Socotec et GCA ingénierie au titre des frais de même nature qu'elles ont exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du 20 novembre 2009 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : Les conclusions en tierce opposition présentées par M. Erik X sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Eric X, à la communauté urbaine Nantes Métropole, à la société Socotec, à M. Dan Y, à la société GCA Ingénierie, à la société DLE Ouest et au ministre de l'écologie, de l'aménagement du territoire, des transports et du logement.

Une copie en sera, en outre, adressée au préfet de la Loire-Atlantique.

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N° 10NT00126

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10NT00126
Date de la décision : 04/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: M. Stéphane WEGNER
Rapporteur public ?: M. VILLAIN
Avocat(s) : REVEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-02-04;10nt00126 ?
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