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09/03/2012 | FRANCE | N°09NT01777

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre b, 09 mars 2012, 09NT01777


Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2009, présentée pour M. et Mme Bernard X, demeurant ..., par Me Labrusse, avocat au barreau de Caen ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-2214 du 22 mai 2009 en tant que, par celui-ci, le tribunal administratif de Caen n'a fait droit qu'à hauteur de 2 034,79 euros à leur demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'a subi leur exploitation agricole en raison de la réalisation de la rocade sud de Saint-Lo et a rejeté le surplus de leurs demandes ;

2°) de mettre à la charge du département

de la Manche la somme de 103 021,90 euros, assortie des intérêts au taux l...

Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2009, présentée pour M. et Mme Bernard X, demeurant ..., par Me Labrusse, avocat au barreau de Caen ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-2214 du 22 mai 2009 en tant que, par celui-ci, le tribunal administratif de Caen n'a fait droit qu'à hauteur de 2 034,79 euros à leur demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'a subi leur exploitation agricole en raison de la réalisation de la rocade sud de Saint-Lo et a rejeté le surplus de leurs demandes ;

2°) de mettre à la charge du département de la Manche la somme de 103 021,90 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2006, date de réception de leur demande préalable du 22 décembre 2006 ;

3°) de mettre à la charge du département de la Manche la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2012 :

- le rapport de Mme Grenier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public ;

- et les observations de Me Debuys, substituant Me Gorand, avocat du département de la Manche ;

Considérant que M. et Mme X, exploitants agricoles à Saint-Lo relèvent appel du jugement du 22 mai 2009 par lequel le tribunal administratif de Caen n'a fait droit qu'à hauteur de 2034,79 euros à leur demande tendant à la réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait de la réalisation du contournement sud de la commune de Saint-Lo et demandent que le département de la Manche soit condamné à leur verser une somme de 103 021,90 euros en réparation desdits préjudices résultant de l'allongement de parcours auquel ils sont contraints pour rejoindre certaines parcelles de leur exploitation, de l'absence de rétablissement du réseau d'eau qui desservait plusieurs de leurs parcelles et de divers dommages liés aux travaux de réalisation de la voie expresse ;

Sur les préjudices :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, que le siège de l'exploitation de M. et Mme X est situé au nord-est de la voie de contournement de Saint Lo, issue de la transformation de la RD 972 en voie expresse à deux fois deux voies, alors que plusieurs de leurs parcelles, représentant une surface de plus de huit hectares, sont situées à l'ouest de cette voie ; que les requérants pouvaient, avant la réalisation de cette voie, traverser la route départementale RD 972 qui séparait déjà en deux leur exploitation, à partir du chemin de la Poulinière pour rejoindre les parcelles situées à l'ouest de cette route ; qu'ils doivent désormais contourner cette voie expresse en la longeant d'abord par l'est avant d'emprunter un souterrain le long de la Vire, puis la longer par le chemin agricole situé à l'ouest pour pouvoir rejoindre leurs parcelles ; que cet allongement de parcours de 2,1 à 2,4 kilomètres aller-retour selon les parcelles, qui n'excède pas les inconvénients normaux que les riverains d'un ouvrage public sont appelés à supporter sans indemnité, ne constitue qu'une simple gêne et non une aggravation de leurs conditions d'exploitation ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce nouveau trajet, qui permet de passer sous la voie expresse, serait plus dangereux que celui qui existait antérieurement et contraignait les requérants à traverser la route départementale ; que par suite, les préjudices invoqués liés à l'allongement de parcours ne présentent pas un caractère anormal et spécial de nature à leur ouvrir droit à une indemnisation ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. et Mme X demandent à être indemnisés du préjudice résultant de l'interruption de la desserte en eau des parcelles cadastrées CA 121, 129, 130 et 132 qui leur appartiennent, ils ne produisent à l'appui de leur demande aucune pièce de nature à établir la réalité du préjudice allégué ;

Considérant, enfin, qu'il résulte de ses termes mêmes que l'état des lieux relatif aux "dédommagements à envisager" établi le 3 septembre 2001 par le département de Manche, la direction départementale de l'agriculture et des forêts, les services fiscaux, la chambre d'agriculture et un géomètre en présence des requérants, qui fixe à une somme de 5 024,55 francs, soit 795,98 euros le montant de l'indemnité à verser en réparation de divers dommages de travaux publics, constitue un document provisoire qui ne permet pas d'établir avec certitude la réalité des préjudices subis ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes tendant à l'indemnisation des préjudices liés à l'allongement de parcours, à l'interruption de la desserte en eau de leurs parcelles et à la réparation de divers dommages résultant de la réalisation de la voie de contournement sud de Saint-Lo ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant, d'une part, que la créance détenue sur l'administration existe, en principe, à la date à laquelle se produit le fait qui en est la cause, sans qu'il soit besoin que le juge se livre au préalable à une appréciation des faits de l'espèce et en liquide le montant ; que, saisie d'une demande tendant au paiement de cette créance, l'administration est tenue d'y faire droit dès lors que celle-ci est fondée ; qu'en conséquence, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l'administration ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; que, par suite, M. et Mme X qui, par leur mémoire en réplique, enregistré le 27 septembre 2010 devant la cour, demandent le paiement des intérêts moratoires, ont droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 2 034,79 euros qui leur a été accordée par le jugement attaqué, à compter du 28 décembre 2006, date de réception de leur demande préalable adressée au département de la Manche ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : "Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière" ; que pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que M. et Mme X ont demandé par un mémoire du 27 septembre 2010 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du département de la Manche qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 2 034,79 euros (deux mille trente-quatre euros et soixante-dix-neuf centimes) due à M. et Mme X portera intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2006. Les intérêts échus à la date du 27 septembre 2010, puis à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement du 22 mai 2009 du tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Bernard X et au département de la Manche

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N° 09NT01777 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre b
Numéro d'arrêt : 09NT01777
Date de la décision : 09/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés MINDU
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : LABRUSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-03-09;09nt01777 ?
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