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17/05/2013 | FRANCE | N°11NT00683

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 17 mai 2013, 11NT00683


Vu la requête, enregistrée le 28 février 2011, présentée pour le département de la Loire-Atlantique, représenté par le président du conseil général et dont le siège est hôtel du département, 3, quai Ceineray, BP 94109 à Nantes cedex 01 (44041), par Me Assouline, avocat au barreau de Rennes, qui demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1006764 du 6 janvier 2011 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du Premier ministre du 21 juillet 2010 rejetan

t sa réclamation du 8 avril 2010 et, d'autre part, à la condamnation de l'Et...

Vu la requête, enregistrée le 28 février 2011, présentée pour le département de la Loire-Atlantique, représenté par le président du conseil général et dont le siège est hôtel du département, 3, quai Ceineray, BP 94109 à Nantes cedex 01 (44041), par Me Assouline, avocat au barreau de Rennes, qui demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1006764 du 6 janvier 2011 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du Premier ministre du 21 juillet 2010 rejetant sa réclamation du 8 avril 2010 et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 419 413 849 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 8 avril 2010, en réparation du préjudice résultant de l'insuffisance des ressources prévues par la loi pour compenser ou financer les transferts, extensions ou créations de compétences depuis 2002 concernant l'allocation personnalisée d'autonomie, la prestation de compensation du handicap, le revenu minimum d'insertion auquel s'est substitué le revenu de solidarité active, le fonds d'aide aux jeunes, le fonds de solidarité logement, les centres locaux d'information et de coordination, le patrimoine rural non protégé, le comité départemental des retraités et personnes âgées, le fonds académique de rémunération des personnels d'internat, le forfait d'externat, le transfert de la gestion des personnels ouvriers, techniciens et de service ainsi que des agents des services déconcentrés du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables et le transfert des routes nationales et, enfin, à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler la décision du 21 juillet 2010 et de condamner l'Etat à lui payer en réparation la somme de 419 413 849 euros, majorée des intérêts de droit ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1

du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1607 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu la loi organique n° 2004-758 du 29 juillet 2004 prise en application de l'article 72-2 de la Constitution relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales ;

Vu la charte européenne de l'autonomie locale et le décret n° 2007-679 du 3 mai 2007 en portant publication ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie ;

Vu la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité ;

Vu la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 ;

Vu la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées ;

Vu la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ;

Vu la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 ;

Vu la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ;

Vu la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2007 de finances pour 2007 ;

Vu la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité ;

Vu la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 ;

Vu la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2011-143 QPC du 30 juin 2011 ;

Vu la décision du Conseil constiutionnel n° 2011-142/145 QPC du 30 juin 2011 ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2011-144 QPC du 30 juin 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2013 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne le moyen tiré d'un vice propre de la décision du 21 juillet 2010 :

1. Considérant que la décision du Premier ministre du 21 juillet 2010 a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de la demande préalable du département de la Loire-Atlantique qui, en formulant ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer, en réparation, une somme d'argent, a donné à l'ensemble de sa demande de première instance le caractère d'un recours de plein contentieux ; qu'au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de cette collectivité territoriale à percevoir la somme qu'elle réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 21 juillet 2010 est inopérant ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la responsabilité encourue par l'Etat en raison de l'inconstitutionnalité de diverses dispositions législatives :

2. Considérant que le département de la Loire-Atlantique demande la condamnation de l'Etat à lui payer une somme d'un montant en principal de 419 413 849 euros, correspondant au préjudice qu'il estime avoir subi du fait, selon lui, de transferts législatifs de compétences insuffisamment compensées ou de la création par le législateur de nouvelles compétences accompagnées de ressources insuffisantes ; qu'au soutien de ces prétentions, il se prévaut de la méconnaissance des dispositions des articles 72 et 72-2 de la Constitution par :

- en ce qui concerne l'allocation personnalisée d'autonomie, l'article 1er de la loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées, les articles 11 et 12 de la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées ainsi que l'article L. 14-10-6 du code de l'action sociale et des familles ;

- en ce qui concerne la prestation de compensation du handicap, les articles 60 et 61 de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ainsi que les articles L. 14-10-5 et L. 14-10-7 du code de l'action sociale et des familles ;

- en ce qui concerne le revenu minimum d'insertion auquel s'est substitué le revenu de solidarité active, l'article 4 de la loi du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité, l'article 59 de la loi de finances pour 2004 du 30 décembre 2003, les articles 3 et 7 de la loi du 1er décembre 2008 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité, l'article 51 de la loi du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et l'article 135 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 ;

- en ce qui concerne le fonds d'aide aux jeunes, les articles 51 et 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et l'article 52 de la loi du 30 décembre 2005 de finances pour 2005 ;

- en ce qui concerne les centres locaux d'information et de coordination, les articles 56 et 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ainsi que l'article 52 de la loi du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 ;

- en ce qui concerne le patrimoine rural protégé, les articles 95 et 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ainsi que l'article 52 de la loi du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 ;

- en ce qui concerne le comité départemental des retraités et des personnes âgées, les articles 57 et 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ainsi que l'article 52 de la loi du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 ;

- en ce qui concerne le forfait d'externat, les articles 82 et 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et le 2 du II de l'article 29 de la loi du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 ;

- en ce qui concerne le transfert des personnels techniciens, ouvriers et de services des collèges, les articles 82 et 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et l'article 52 de la loi du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 ;

3. Considérant que, par les ordonnances n° 1006764 du 25 novembre 2010 et du 5 janvier 2011 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nantes, une ordonnance du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes n° 11NT00683 du 14 avril 2011, l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes n° 11NT00683 du 17 juin 2011 ainsi que les décisions du Conseil d'Etat n° 348549 du 29 juin 2011 et n° 350726 du 19 septembre 2011, il a été décidé, soit qu'il n'y a pas lieu pour la cour administrative d'appel de statuer sur la demande de transmission au Conseil d'Etat des questions de conformité à la Constitution de certaines de ces dispositions législatives, soit qu'il n'y a pas lieu pour le tribunal administratif de transmettre au Conseil d'Etat des questions de conformité à la Constitution d'autres de ces dispositions législatives, soit qu'il n'y a pas lieu pour le Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité transmises par l'article 1er de l'autre ordonnance du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes n° 11NT00683 du 14 avril 2011 ainsi que l'article 2 de l'arrêt de la même cour du 17 juin 2011 ; qu'en outre, par ses décisions nos 2011-143 QPC, 2011-142/145 QPC et 2011-144 QPC du 30 juin 2011, le Conseil constitutionnel a, d'une part et sous certaines réserves, déclaré conformes à la Constitution les dispositions législatives relatives aux concours de l'Etat au financement par les départements de l'allocation personnalisée d'autonomie, d'autre part et sous certaines réserves, déclaré conformes à la Constitution les dispositions législatives relatives au concours de l'Etat pour le financement par les départements de la prestation de compensation du handicap et, enfin, soit décidé qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la conformité à la Constitution des dispositions législatives relatives au concours de l'Etat au financement par les départements du revenu minimum d'insertion et du revenu minimum d'activité, soit, sous une réserve, déclaré conforme à la Constitution des dispositions législatives relatives à ce concours ainsi qu'au concours de l'Etat au financement par les départements du revenu de solidarité active ; qu'il en résulte que le moyen de la requête tiré de la responsabilité de l'Etat en raison de ce que les diverses dispositions législatives récapitulées au point 2 ci-dessus ont été adoptées en méconnaissance des articles 72 et 72-2 la Constitution ne peut qu'être écarté ; que, par suite, le département de la Loire-Atlantique ne peut davantage soutenir que la mise en oeuvre par l'Etat de ces dispositions constituerait une faute de nature à engager sa responsabilité ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la responsabilité encourue par l'Etat en raison de l'inconventionnalité de certaines dispositions législatives :

4. Considérant que la responsabilité de l'Etat du fait des lois est susceptible d'être engagée, d'une part, sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de l'adoption d'une loi à la condition que cette loi n'ait pas entendu exclure toute indemnisation et que le préjudice dont il est demandé réparation, revêtant un caractère grave et spécial, ne puisse, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés, d'autre part, en raison des obligations qui sont les siennes pour assurer le respect des conventions internationales par les autorités publiques, pour réparer l'ensemble des préjudices qui résultent de l'intervention d'une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la charte européenne de l'autonomie locale, relatif aux ressources financières des collectivités locales : " 1. Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l'exercice de leurs compétences. / 2. Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi. / (...) " ; que ces stipulations ne garantissent pas aux collectivités locales un droit à une compensation spécifique et intégrale des charges liées à l'exercice de chacune de leurs compétences ; que, par suite, le département de la Loire-Atlantique n'est pas fondé à soutenir que les diverses dispositions législatives dont, par ailleurs, il soutient qu'elles méconnaissent les articles 72 et 72-2 de la Constitution, ou le maintien, après la publication de cette charte, de celles de ces dispositions qui lui sont antérieures, seraient incompatibles avec les stipulations du 2 de son article 9 ; que la circonstance que les concours de l'Etat au financement par les départements de l'allocation personnalisée d'autonomie, de la prestation de compensation du handicap et des revenus minimum d'insertion ou d'activité sont, d'après le requérant, insuffisantes pour couvrir les dépenses supportées à ce titre ne méconnaît pas non plus ces stipulations ;

6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le département n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, qui est suffisamment motivée, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande le département de la la Loire-Atlantique au titre des frais par lui exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du département de la Loire-Atlantique est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Loire-Atlantique et au Premier ministre.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT00683
Date de la décision : 17/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PIRON
Rapporteur ?: M. Laurent MARTIN
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : ASSOULINE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-05-17;11nt00683 ?
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