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06/06/2013 | FRANCE | N°09NT02799

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 06 juin 2013, 09NT02799


Vu l'arrêt du 20 octobre 2011 par lequel la cour a, avant de statuer sur la requête présentée par Mme B..., ordonné une nouvelle expertise en vue de déterminer les fautes éventuelles commises lors des interventions subies par l'intéressée les 29 et 31 mars 2006 au centre hospitalier régional universitaire de Tours ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 2011 par laquelle le président de la cour a désigné le docteur A..., urologue, en qualité d'expert ;

Vu l'ordonnance du 21 décembre 2011 par laquelle le président de la cour a accordé à M. A... une allocation provisionn

elle de 1 000 euros à valoir sur le montant des honoraires et débours devant ...

Vu l'arrêt du 20 octobre 2011 par lequel la cour a, avant de statuer sur la requête présentée par Mme B..., ordonné une nouvelle expertise en vue de déterminer les fautes éventuelles commises lors des interventions subies par l'intéressée les 29 et 31 mars 2006 au centre hospitalier régional universitaire de Tours ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 2011 par laquelle le président de la cour a désigné le docteur A..., urologue, en qualité d'expert ;

Vu l'ordonnance du 21 décembre 2011 par laquelle le président de la cour a accordé à M. A... une allocation provisionnelle de 1 000 euros à valoir sur le montant des honoraires et débours devant être ultérieurement taxés ;

Vu le rapport d'expertise, déposé le 25 juin 2012 au greffe de la cour ;

Vu l'ordonnance du 20 août 2012 par laquelle le président de la cour a liquidé et taxé les frais et honoraires d'expertise à la somme totale de 2 220,10 euros TTC ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 septembre 2012, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre, par Me Hervé, avocat au barreau de Nantes, qui conclut à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation du CHRU de Tours à lui verser la somme provisoire de 35 494,89 euros en remboursement de ses débours exposés pour le compte de Mme B..., à ce que cet établissement soit condamné à lui verser la somme de 68 068,10 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 février 2009, en remboursement de ses débours, la somme de 997 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et à ce que soit également mise à la charge de celui-ci la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que la lésion de la vessie de Mme B... est survenue au décours de l'hystérectomie réalisée le 29 mars 2006 ; que l'atteinte à un organe étranger à l'intervention projetée caractérise une maladresse per-opératoire constitutive d'une faute ; qu'il en va de même des manquements dans le choix thérapeutique retenu lors de la deuxième intervention du 31 mars 2006 notamment par l'absence de mise en place de sondes urétérales à l'origine directe et exclusive des complications ultérieures ; que ces fautes sont de nature à engager la responsabilité du CHRU de Tours ;

- que les complications présentées par l'intéressée ne procèdent pas d'une évolution inéluctable de son état de santé mais résultent exclusivement des fautes commises par le CHRU ;

- qu'elle est fondée à réactualiser sa créance ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 octobre 2012, présenté pour le CHRU de Tours, qui persiste dans ses précédentes écritures tendant au rejet de la requête et des conclusions indemnitaires présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre ;

Il soutient en outre :

- qu'aux termes du jugement attaqué la faute retenue n'est à l'origine que d'une perte de chance de 20 % ; que dans ce cas la réparation qui lui incombe doit être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; que la créance de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre ne saurait excéder 20 % des débours exposés ;

- que si cet organisme conteste le taux de perte de chance retenu, il n'apporte aucun élément de nature à contredire cette évaluation ; que la caisse primaire d'assurance maladie n'apporte aucune précision permettant au juge de vérifier si les sommes réclamées sont exclusivement imputables à la faute retenue à... ;

- que les prestations viagères ainsi que les examens de contrôle que Mme B... pourra être amenée à réaliser, qui ne présentent aucun caractère certain, ne peuvent donner lieu à réparation ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2012, présenté pour Mme B... par Me Vérité, avocat au barreau de Nantes, qui conclut à la condamnation du CHRU de Tours à lui verser la somme globale de 46 446,68 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2008 et de leur capitalisation, à payer les frais et honoraires de l'expert, et à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient ;

- que dans son rapport du 25 juin 2012 le docteur A...a considéré que deux fautes avaient été commises par le CHRU de Tours les 29 et 31 mars 2006 et évalué la perte de chance qu'elle avait subie à 80 % ; que ces fautes engagent la responsabilité du CHRU ; que les complications dont elle souffre sont également imputables aux fautes de cet établissement ;

- que l'expert a évalué l'étendue de ses préjudices ;

- que la somme de 104,50 euros exposée au titre des dépenses de santé est restée à sa charge ;

- qu'à compter du mois de juin 2006 et jusqu'à la date de sa consolidation elle a dû faire appel à l'assistance d'une tierce personne pour les actes de la vie courante ; que la somme de 976,55 euros est restée à sa charge, soit 781,24 euros si on tient compte d'une perte de chance de 80 % ; que ces dépenses représentent une somme de 3 666,04 euros pour la période allant de la consolidation de son état en février 2008 jusqu'au 31 mai 2012, soit 2 932,83 euros à raison de 80 % de perte de chance ;

- qu'elle a exposé des frais à hauteur de 699,59 euros pour se rendre à l'expertise médicale du 24 mai 2012 ;

- qu'elle a subi des troubles dans ses conditions d'existence qui peuvent être évalués à 20 000 euros, soit 16 000 euros en tenant compte d'une perte de chance de 80 % ;

- que les souffrances qu'elle a endurées, évaluées à 4 sur une échelle de 7, peuvent être indemnisées à hauteur de 10 000 euros, soit 8 000 euros si la cour retient une perte de chance de 80 % ;

- que son préjudice d'agrément sera également évalué à 10 000 euros, soit 8 000 euros pour une perte de chance de 80 % ;

- que son préjudice esthétique permanent doit être évalué à 1 000 euros, soit 800 euros à raison d'une perte de chance de 80 % ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 décembre 2012, présenté pour le CHRU de Tours, qui maintient ses précédentes écritures par les mêmes moyens et soutient en outre :

- que le second expert, qui a proposé de chiffrer la perte de chance à 80 % au lieu de

20 % comme le proposait le premier expert, ne justifie pas cette différence ;

- que le taux de perte de chance ne saurait excéder 50 % ;

- que les demandes de Mme B... en tant qu'elles excédent les sommes réclamées en première instance sont irrecevables ; que le docteur A...n'a pas retenu d'incapacité permanente partielle au-delà du 28 février 2008 ; que, sur le taux de 25 % retenu par l'expert, seuls 15 % correspondent réellement à une incapacité permanente, les 10 % supplémentaires correspondant aux souffrances endurées déjà évaluées à 4 sur une échelle de 7 ; que l'état de santé de Mme B... ne s'est pas aggravé ;

- que, selon le rapport d'expertise, l'intéressée alors âgée de 70 ans faisait appel avant l'intervention à une aide ménagère à raison de 14 à 16 heures par mois ; qu'elle ne peut donc soutenir que le recours actuel à l'aide d'une tierce personne à raison de 13 heures par mois serait imputable à l'intervention litigieuse ;

- que les sommes de 20 000 euros, 10 000 euros et 1 000 euros réclamées par Mme B... au titre des troubles dans ses conditions d'existence, des souffrances endurées et de son préjudice esthétique sont excessives ; que sa demande tendant à l'octroi d'une somme de 10 000 euros au titre de son préjudice d'agrément sera également rejetée dès lors que l'intéressée n'apporte aucune preuve d'une quelconque activité sportive ou de loisir dont elle serait privée en raison des complications survenues à la suite de l'intervention chirurgicale litigieuse ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 janvier 2013, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre, qui conclut au maintien de ses précédentes écritures et porte le montant de la somme qu'elle sollicite au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion à 1 015 euros ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 janvier 2013, présenté pour Mme B..., qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre :

- que si le CHRU conteste le pourcentage de perte de chance déterminé par le premier expert, le docteur Castaigne avait également indiqué lors de la réunion relative à la première expertise qu'elle allait retenir un taux de 80 % ; que, selon le docteurA..., elle a probablement inversé les chiffres ;

- qu'elle a été contrainte de réduire à 13 heures par mois le recours à une tierce personne en raison de sa situation financière et non en fonction de son état de santé ;

- qu'avant l'intervention elle avait l'habitude d'effectuer des voyages en France et à l'étranger ; qu'elle aimait recevoir ses enfants et petits-enfants et amis ; qu'elle adorait cuisiner, jardiner et faire du bricolage ; qu'elle était adhérente de plusieurs associations et avait beaucoup d'activité de loisirs ; que depuis l'intervention sa vie a énormément changé ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 mai 2013, présenté pour le CHRU de Tours, qui conclut aux mêmes fins que dans ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Vérité, avocat de Mme B... ;

1. Considérant que Mme B..., alors âgée de 70 ans, a subi le 29 mars 2006 une hystérectomie par voie basse au centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Tours ; qu'au cours de cette intervention sa vessie a été perforée ; que, face aux douleurs ressenties par l'intéressée, il a été décidé de procéder, le 31 mars 2006, à une reprise chirurgicale par laparotomie ; qu'au cours de cette seconde intervention, Mme B... a fait une chute de tension artérielle nécessitant son transfert en réanimation jusqu'au 9 avril 2006 ; qu'à partir du 12 avril 2006, l'intéressée a présenté une forte fièvre et des douleurs dorsales ; qu'une hémoculture positive a justifié un traitement par antibiothérapie ; qu'une nouvelle intervention a été réalisée le 14 avril 2006 pour l'évacuation d'un hématome rétro-vésical et la pose d'une sonde urétérale gauche ; qu'une autre intervention a été pratiquée le 25 avril 2006 pour remplacer la sonde par une sonde double J, laquelle a été enlevée le 14 juin 2006 ; que, depuis cette date, Mme B... est régulièrement atteinte de pyélonéphrites ; que, par une ordonnance du 26 novembre 2007, le président du tribunal administratif d'Orléans a ordonné une expertise judiciaire, laquelle a été confiée au docteur Castaigne, qui a remis son rapport le 23 février 2008 ; que suite au rejet implicite de sa réclamation préalable présentée le 29 septembre 2008, Mme B... a saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande indemnitaire ; que, par un jugement du 8 octobre 2009, ce tribunal a condamné le CHRU de Tours à verser à l'intéressée la somme de 3 507,32 euros et a rejeté les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre tendant au remboursement de ses débours ; que Mme B... a fait appel de ce jugement ; que la caisse primaire d'assurance maladie a sollicité par la voie de l'appel incident la condamnation du CHRU à lui verser, à titre principal, la somme de 35 494,89 euros ; que, par un arrêt avant-dire droit du 20 octobre 2011, la cour a ordonné une nouvelle expertise aux fins de préciser les fautes commises par le CHRU de Tours lors des interventions des 29 et 31 mars 2006 ; que le rapport d'expertise déposé par le docteurA..., urologue, est devenu définitif le 6 août 2012 ; que, dans le dernier état de ses écritures, Mme B... demande à titre principal la condamnation du CHRU de Tours à lui verser la somme globale de 45 236,60 euros en réparation de ses préjudices ; que la caisse primaire d'assurance maladie d'Indre demande le versement de la somme de 68 068,10 euros en remboursement de ses débours ;

Sur les fautes du CHRU :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport remis par le docteurA..., expert judiciaire désigné à la demande de la cour, qu'un scanner pratiqué avant l'intervention subie le 29 mars 2006 par Mme B... ne révélait aucune anomalie sur les voies urinaires ; que, par ailleurs, l'hystérectomie pratiquée le 29 mars 2006 était justifiée par un frottis " pathologique " et un risque de cancer de l'utérus ; que si la plaie vésicale au niveau du trigone survenue lors de l'intervention subie par Mme B... le 29 mars 2006 ne constitue pas en elle-même une faute mais un aléa thérapeutique, l'expert relève un manque de précaution de l'opérateur qui n'a pas vérifié l'étanchéité de la suture qu'il venait de réaliser au niveau de la vessie et, surtout, ne s'est pas assuré de l'absence d'atteinte des méats urétéraux ; que cette faute a été réitérée lors de l'intervention du 31 mars 2006 à l'issue de laquelle il n'y a pas eu de vérification de la perméabilité des uretères ; que ces manquements sont constitutifs de fautes de nature à engager la responsabilité du CHRU de Tours ;

3. Considérant, que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter la survenue de ce dommage ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ;

4. Considérant que si l'expert indique que la mise en place d'une sonde urétérale aurait vraisemblablement évité les infections récidivantes que connaît actuellement Mme B..., il admet que la mise en place d'un drainage aurait cependant pu également entraîner un rétrécissement urétral lors de son ablation ; que, dans ces conditions, les fautes commises par le centre hospitalier doivent être regardées comme ayant seulement fait perdre à l'intéressée une chance d'échapper aux complications dont elle reste affectée ; que, dans les circonstances de l'espèce, et eu égard au fait que le manque de prudence de l'opérateur a été relevé à deux reprises, il y a lieu d'évaluer cette perte de chance à 80 % ;

Sur le lien de causalité entre les fautes commises par le CHRU et les préjudices invoqués par la requérante et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les interventions des 31 mars, 14 avril et 25 avril susmentionnées subies par Mme B... ainsi que les pyélonéphrites à répétition dont elle continue de souffrir présentent un lien de causalité direct et certain avec les fautes commises par le CHRU de Tours lors de la première intervention ; que, par suite, les préjudices dont se prévaut l'intéressée ainsi que les débours dont la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre sollicite le remboursement et qui se rapportent à ces dommages sont imputables au centre hospitalier, dans la limite de la perte de chance retenue au... ;

Sur les préjudices de Mme B... :

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

6. Considérant que Mme B... justifie par les pièces qu'elle produit que des dépenses de santé sont restées à sa charge à hauteur d'au moins 104,50 euros ; que par suite, et eu égard au pourcentage de perte de chance mentionné au point 4, il y a lieu de mettre à la charge du CHRU de Tours la somme de 83,60 euros ;

7. Considérant qu'il résulte des deux rapports d'expertise que l'état de santé de Mme B... nécessite l'assistance d'une tierce personne notamment pour les actes de la vie courante ; qu'elle est aidée par sa fille, a eu recours à une infirmière pour sa toilette et son habillement et emploie également une aide ménagère ; que la requérante, qui vit seule depuis le décès en octobre 2008 de son compagnon, justifie par les factures qu'elle produit de dépenses restées à sa charge, après déduction de l'allocation personnalisée d'autonomie dont elle bénéficie depuis le mois de janvier 2007, à concurrence d'une somme de 4 259,52 euros pour la période allant du mois de juin 2006 au mois de mai 2012 ; qu'eu égard au pourcentage de perte de chance retenu au... ;

8. Considérant qu'en exécution de l'arrêt de la cour du 20 octobre 2011 Mme B..., accompagnée de son fils, s'est rendue le 24 mai 2012 à Saint-Grégoire, au cabinet du docteurA..., dans le cadre de la nouvelle expertise diligentée à sa demande ; qu'elle justifie de frais de déplacement exposés à ce titre à concurrence de la somme de 584,88 euros ; que par suite, eu égard à la fraction de perte de chance retenue, il y a lieu de mettre la somme de 467,90 euros à la charge du CHRU de Tours ;

En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :

9. Considérant que Mme B... a subi plusieurs interventions rendues nécessaires par les fautes du CHRU de Tours ; que, selon le docteurA..., la durée de l'incapacité temporaire totale imputable à la faute de cet établissement s'étend du 4 au 28 avril 2006, compte tenu de la durée normale d'hospitalisation à la suite d'une hystérectomie sans complication ; qu'en revanche, l'expert ne retient qu'une incapacité temporaire partielle de 50 % pour la période du 29 avril au 31 juillet 2006 et une incapacité de 25 % pour la période allant du 1er août 2006 au 28 février 2008, date à laquelle il a fixé la date de sa consolidation ; que, par suite, la requérante peut prétendre à une indemnisation qu'il conviendra, compte tenu de ces éléments, de fixer à 2 162,50 euros au titre des troubles dans ses conditions d'existence subis jusqu'à la date de sa consolidation ; qu'eu égard au pourcentage de perte de chance retenu ci-dessus cette somme sera ramenée à 1 730 euros ;

10. Considérant que, selon le premier expert, Mme B... reste atteinte d'une incapacité permanente partielle d'environ 10 à 15 % en raison des menaces pesant sur son rein droit et des pyélonéphrites à répétition dont elle souffre ; que l'intéressée doit être regardée comme ayant maintenu ses conclusions tendant à l'indemnisation de ce chef de préjudice compte tenu des conclusions de sa réclamation préalable, de sa demande présentée devant le tribunal administratif, de sa requête présentée devant la cour et de la somme de 20 000 euros qu'elle sollicite au titre de l'indemnisation de son déficit fonctionnel qualifié par erreur de " temporaire " ; qu'à ce titre Mme B... peut prétendre à une somme de 15 169 euros, ramenée à 12 135 euros compte tenu du pourcentage de perte de chance retenu au point 4, en réparation de ce chef de préjudice dont la réalité n'est au demeurant pas sérieusement contesté par le CHRU de Tours, qui se borne à souligner que le second expert n'a pas fixé le taux d'incapacité permanente partielle de l'intéressée ;

11. Considérant que la requérante a enduré des souffrances évaluées à 4 sur une échelle de 7 en raison des fautes successives commises par le CHRU de Tours ; qu'une somme de 4 800 euros tenant compte du pourcentage de perte de chance retenu ci-dessus, peut lui être allouée à raison de ce chef de préjudice ;

12. Considérant que le préjudice esthétique de Mme B... peut être évalué à 1 sur une échelle de 7 ; qu'ainsi, elle peut prétendre à une indemnisation de ce chef de préjudice à concurrence de la somme de 650 euros compte tenu de la perte de chance imputable au CHRU de Tours ;

13. Considérant que Mme B..., qui est mère, grand-mère et arrière-grand-mère, justifie par les pièces qu'elle produit qu'elle avait l'habitude de voyager avec sa fille et qu'elle participait à diverses activités de loisirs ; qu'en raison des complications de l'intervention qu'elle a subie le 29 mars 2006, elle ne peut plus s'adonner à ces activités ; que par suite, son préjudice d'agrément doit être évalué à 2 427 euros compte tenu de la perte de chance imputable au CHRU de Tours ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée dans la limite de la somme globale de 25 701,12 euros, laquelle reste inférieure à ses prétentions de première instance, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a limité son indemnisation à 3 507,32 euros ;

Sur le préjudice de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre :

15. Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que la faute du CHRU de Tours commise le 29 mars 2006 a rendu nécessaire l'intervention du 31 mars 2006 ainsi que les opérations et soins dispensés depuis cette date à Mme B... ; que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre justifie par les pièces qu'elle produit avoir engagé à compter du 31 mars 2006 et jusqu'au 31 mars 2012 des débours pour l'intéressée à hauteur de la somme de 35 301,48 euros ; qu'en revanche, si elle demande au titre des frais futurs le versement des sommes de 8 611,04 euros pour des " prestations occasionnelles " et de 24 155,58 euros pour des " prestations viagères ", il ne résulte pas de l'instruction que ces dépenses qui, selon l'attestation du médecin conseil de la caisse primaire d'assurance maladie, concerneraient notamment " une réintervention pour traitement de certaines complications ", suggérée par l'expert mais non envisagée par Mme B..., ainsi que des dépenses de transport et des frais médicaux et pharmaceutiques pour partie déjà pris en compte au titre des " frais réels post-consolidation ", présenteraient un caractère certain ; que, par suite, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre est seulement fondée à solliciter la condamnation du CHRU de Tours à lui verser la somme de 35 301,48 euros, ramenée à 28 241,18 euros compte tenu du pourcentage de perte de chance retenu au... ; qu'en application de l'arrêté du 3 décembre 2012 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale, la caisse peut également prétendre au titre de ces dispositions à la somme de 1 015 euros qu'elle demande ;

Sur les intérêts :

16. Considérant que Mme B... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 25 701,12 euros à compter du 30 septembre 2008, date de réception de sa réclamation préalable par le CHRU de Tours ;

17. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 28 241,18 euros à compter du 6 février 2009, date de son premier mémoire en défense présenté devant le tribunal administratif d'Orléans ;

Sur les intérêts des intérêts :

18. Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée par Mme B... le 8 novembre 2012 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;

Sur les frais et honoraires d'expertise :

19. Considérant qu'il y a lieu de laisser à la charge du CHRU de Tours les frais et honoraires de la première expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 580 euros par une ordonnance du 1er avril 2008 du président du tribunal administratif d'Orléans ; que les frais et honoraires de la seconde expertise, liquidés et taxés par l'ordonnance du 20 août 2012 du président de la cour à la somme totale de 2 220,10 euros TTC, seront mis à la charge du même établissement ; que Mme B... n'établit pas avoir avancé ces sommes ; que par suite, les conclusions de l'intéressée tendant au remboursement de ces frais seront rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHRU de Tours le versement à Mme B... de la somme de 2 000 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 3 507,32 euros que le CHRU de Tours a été condamné par le tribunal administratif d'Orléans à verser à Mme B... en réparation de ses préjudices est portée à 25 701,12 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2008. Les intérêts échus à la date du 8 novembre 2012 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle.

Article 2 : Le CHRU de Tours versera à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre la somme de 28 241,18 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 février 2009.

Article 3 : Le CHRU de Tours versera à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre une somme de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Article 4 : Le jugement n° 08-4416 du tribunal administratif d'Orléans en date du 8 octobre 2009 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 5 : Les frais de l'expertise confiée au docteurA..., liquidés et taxés à la somme de 2 220,10 euros TTC sont mis à la charge du CHRU de Tours.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... et le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre sont rejetés.

Article 7 : Le CHRU de Tours versera à Mme B... et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre les sommes respectives de 2 000 et 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., au CHRU de Tours, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre et au docteurA....

Délibéré après l'audience du 16 mai 2013, où siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 juin 2013.

Le rapporteur,

V. GÉLARD Le président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 09NT02799


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09NT02799
Date de la décision : 06/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : THIBAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-06-06;09nt02799 ?
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