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18/12/2014 | FRANCE | N°13NT02011

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 18 décembre 2014, 13NT02011


Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2013, présentée pour M. A... et Mme F...D..., demeurant..., Mme G... I...D..., demeurant ... et Mme E... C..., demeurant..., par Me Guiet, avocat au barreau de Bourges ; M. D... et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-3806 du 13 juin 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier spécialisé George Sand à leur verser la somme globale de 60 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux du décès de leur fils, petit-fils et

neveu Julien D...survenu le 20 juin 2009 à l'occasion d'une permission...

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2013, présentée pour M. A... et Mme F...D..., demeurant..., Mme G... I...D..., demeurant ... et Mme E... C..., demeurant..., par Me Guiet, avocat au barreau de Bourges ; M. D... et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-3806 du 13 juin 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier spécialisé George Sand à leur verser la somme globale de 60 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux du décès de leur fils, petit-fils et neveu Julien D...survenu le 20 juin 2009 à l'occasion d'une permission de sortie ;

2°) de condamner cet établissement à verser à M. A... et Mme F... D... la somme de 20 000 euros chacun et à Mmes G...D...et E...C...la somme de 10 000 euros chacune, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 21 août 2012 ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier spécialisé George Sand la somme de 1 000 euros à verser à chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que :

- les comptes-rendus d'ateliers démontrent que la sortie de Julien était prématurée ; le chef de service qui a signé la permission de sortie du patient n'a pas justement apprécié son état psychique ainsi que ses tendances suicidaires ; ce défaut de surveillance est constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du CHS ;

- le décès de leur fils, petit-fils et neveu leur a occasionné un préjudice moral certain ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 11 décembre 2013 à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2014, présenté pour le centre hospitalier George Sand par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- le patient dont l'état s'était amélioré ne présentait aucun signe annonciateur de son geste, qui était totalement imprévisible ; le défaut de surveillance allégué n'est pas établi ; il n'est pas davantage établi que ses services auraient commis un manquement fautif dans la prise en charge du jeune homme ou que le décès de Julien D...puisse être regardé comme la conséquence d'une faute qui lui serait imputable ;

- les demandes indemnitaires sont au demeurant excessives dans leur montant et non justifiées s'agissant de la tante de la victime ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B... D..., âgé de 29 ans et atteint de schizophrénie, a été hospitalisé à compter du 19 décembre 2008 au centre hospitalier spécialisé (CHS) George Sand de Bourges dans le cadre d'une hospitalisation d'office puis à la demande d'un tiers ; qu'à compter du 16 mars 2009 il a bénéficié de sorties d'essai avec mise en place d'un suivi ambulatoire ; que, le 19 juin 2009, il a été autorisé dans ce cadre à se rendre au domicile familial pour une période allant de ce même jour à 9 heures 15 au 22 juin 2009 à 11 heures 30 ; que cependant il a mis fin à ses jours le 20 juin au matin en se jetant sous un train ; que M. A... et Mme F... D..., ses parents, Mme G... D..., sa grand-mère, ainsi que Mme E...C..., sa tante, ont adressé une réclamation indemnitaire préalable au CHS, qui n'y a pas donné suite ; qu'ils ont alors saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier George Sand à leur verser la somme globale de 60 000 euros en réparation des préjudices résultant pour eux du décès de M. B... D... ; que, par un jugement du 13 juin 2013, le tribunal administratif a rejeté leur demande ; que les consorts D...relèvent appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport réalisé le 25 août 2011 par le docteur Soldati, expert psychiatre mandaté par le substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bourges à la suite du décès de M. B... D..., que ce dernier, qui souffrait de schizophrénie de type paranoïde non profonde tout en conservant certaines capacités intellectuelles, avait bénéficié d'un traitement médicamenteux adapté mais restait sujet à un comportement imprévisible propre à sa pathologie ; que les certificats médicaux figurant au dossier confirment le caractère fluctuant de l'état de santé mentale de M. B... D... ; que si sa famille fait état des tendances suicidaires de l'intéressé, qui ont effectivement été exprimées notamment le 12 juin 2009 dans le cadre d'un groupe PACT (psychose, aider, comprendre et traiter) associant le corps médical, le patient ainsi que ses parents, il ne résulte pas des pièces du dossier qu'un passage à l'acte était prévisible à la date à laquelle l'autorisation de sortie a été délivrée ; que si, à l'occasion d'une précédente sortie d'essai autorisée du 7 mai au 7 juin 2009, le jeune homme a dû être réhospitalisé à compter du 18 mai en raison de troubles du comportement en milieu familial, aucun élément ne permet d'établir qu'il aurait à cette occasion, ou même antérieurement, tenté de mettre fin à ses jours ; que le comportement du jeune homme, tant au sein du groupe PACT réuni à nouveau le 17 juin qu'au cours de l'entretien familial réalisé le 19 juin suivant, semblait apaisé ; que le docteur Soldati, expert désigné, a souligné dans son rapport que les médecins se trouvaient confrontés à des choix thérapeutiques n'excluant pas toute prise de risques en raison d'une pathologie qui " se redéclenche sous une forme ou sous une autre très rapidement alors que tout semblait pouvoir évoluer dans le bon sens " ; qu'ainsi, si les équipes médicales et de soins infirmiers, qui suivaient le jeune homme depuis le mois d'avril 2003 et connaissaient parfaitement sa pathologie, avaient précédemment refusé à plusieurs reprises d'autoriser les sorties sollicitées par lui avec insistance, le comportement du jeune homme avant et au cours de la journée du 19 juin n'a révélé aucun signe particulier laissant prévoir le geste commis le matin du 20 juin, lequel était totalement imprévisible ; que, dans ces conditions, le CHS George Sand ne peut être regardé comme ayant, en accordant le 19 juin une permission de sortie de courte durée à ce patient atteint de schizophrénie, commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CHS, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement aux consorts D...des sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des consorts D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Mme F... D..., à Mme H... D..., à Mme E... C..., au centre hospitalier spécialisé George Sand de Bourges et à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2014, où siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 décembre 2014.

Le rapporteur,

V. GÉLARDLe président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT02011


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02011
Date de la décision : 18/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : AVOCATS CENTRE TANTON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-18;13nt02011 ?
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