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29/10/2015 | FRANCE | N°14NT01667

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 29 octobre 2015, 14NT01667


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des pénalités s'y rapportant auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007.

Par un jugement n° 1101450, 1101451 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 juin 2014 et 29 juin 2015, M

. et Mme C...B..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des pénalités s'y rapportant auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2007.

Par un jugement n° 1101450, 1101451 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 juin 2014 et 29 juin 2015, M. et Mme C...B..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 17 avril 2014 ;

2°) de prononcer la décharge d'imposition demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- à l'occasion de la dissolution de la société, ils n'ont appréhendé aucun bonus de liquidation et cette opération n'a pas généré de valeur économique, de sorte qu'ils ne disposaient d'aucune liquidité leur permettant d'acquitter les sommes mises à leur charge ;

- l'impossibilité de compenser la moins-value constatée lors de la liquidation de la société avec la plus-value bénéficiant du report d'imposition ne leur a pas permis de faire coïncider les situations économiques et fiscales ; de ce fait l'imposition mise à leur charge a un caractère confiscatoire qui s'apprécie lors du fait générateur de l'imposition et méconnait les principes constitutionnels tirés de la protection du droit de propriété protégé par l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et de la contribution en fonction des facultés de chacun prévu à l'article 13 du même texte ;

- dans ces conditions, l'imposition mise à leur charge porte atteinte à leur droit de propriété en méconnaissance des stipulations de l'article 1er du premier protocole de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires enregistrés les 2 février 2015 et 7 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. et MmeB..., lesquels ne contestent plus, en appel, le bien-fondé de l'impôt, ne sont fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son premier protocole additionnel ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Specht,

- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.

1. Considérant que M. et MmeB..., domiciliés à Santec (Finistère), et jusqu'alors exploitants d'un fonds de commerce de restauration-hôtellerie à titre individuel, ont fait, le 1er mars 1993, apport de ce fonds à la SA Gulf Stream, dont ils détenaient 99,97% du capital, réalisant à cette occasion une plus-value de 457 357 euros ; qu'ils ont opté pour le report d'imposition de cette plus-value ainsi que les y autorisaient les dispositions de l'article 151 octies du code général des impôts ; que la société Gulf Stream a cessé son activité le 30 juin 2006, après que M. et Mme B...eurent vendu, pour un montant de 1 480 000 euros, l'immeuble abritant leur activité professionnelle, puis a été dissoute le 30 août 2007 ; que, par une proposition de rectification du 29 juin 2009, l'administration fiscale, estimant que la dissolution de la société avait mis fin au régime de report d'imposition, a imposé la plus-value initiale d'un montant de 457 357 euros au taux de 16% entre les mains de M. et Mme B...au titre de l'année 2007 ; que ces derniers ont contesté le supplément d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorti des intérêts de retard et de la majoration de 10% prévue à l'article 1758-A du code général des impôts en cas d'insuffisance de déclaration, qui en est résulté ; qu'ils relèvent appel du jugement du 17 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la décharge des sommes ainsi mises à leur charge ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 151 octies du code général des impôts : " I.- Les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies et réalisées par une personne physique à l'occasion de l'apport à une société soumise à un régime réel d'imposition d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité peuvent bénéficier des dispositions suivantes : a) L'imposition des plus-values afférentes aux immobilisations non amortissables fait l'objet d'un report jusqu'à la date de la cession, du rachat ou de l'annulation des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport de l'entreprise ou jusqu'à la cession de ces immobilisations par la société si elle est antérieure. (...) " ; que ces dispositions ont pour effet de permettre, par dérogation à la règle suivant laquelle le fait générateur de l'imposition d'une plus-value est constitué au cours de l'année de sa réalisation, de la rattacher à l'année au cours de laquelle intervient l'événement qui met fin au report d'imposition ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté en appel que la dissolution de la SA Gulf Stream à effet du 30 août 2007 a eu pour conséquence de mettre fin au report d'imposition de la plus-value réalisée en 1993 dont les contribuables avaient bénéficié en vertu des dispositions précitées de l'article 151 octies du code général des impôts ; qu'il n'est pas davantage contesté par les intéressés que cette plus value devait être imposée au titre de l'année 2007 ;

4. Considérant que si M. et Mme B...soutiennent qu'ils n'ont pas été en mesure de compenser la plus-value en litige et la moins-value constatée sur les titres de la SA Gulf Stream lors de sa dissolution, une telle impossibilité résulte de l'application régulière de la loi fiscale, dès lors que l'imposition de chacune de ces plus ou moins-value, qui concerne des catégories de revenus distinctes, ne relève pas du même régime d'imposition ; qu'en tout état de cause le principe de l'imposition de la plus-value d'un montant de 457 357 euros entre les mains de M. et Mme B...était acquis dès l'année 1993 ;

5. Considérant que M. et Mme B...soutiennent toutefois que cette situation a conduit à mettre à leur charge un impôt dont le poids est excessif et dont le paiement les contraint à se séparer d'une partie de leur patrimoine, en méconnaissance des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de la Constitution et de son préambule ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'en dehors des cas et conditions où il est saisi sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, il n'appartient pas au juge de l'impôt de se prononcer sur un moyen tiré de la non conformité de la loi à une norme de valeur constitutionnelle ; que, par suite, les moyens tirés de ce que l'impossibilité d'imputer l'imposition de la plus-value réalisée, relevant du régime des plus-values des particuliers sur la moins-value constatée sur les titres de la SA Gulf Stream relevant du régime des plus ou moins values professionnelles, porterait atteinte au droit de propriété protégé par l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et au principe de contribution en fonction des facultés de chacun prévu à l'article 13 du même texte ne peuvent qu'être écartés ;

7. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que le droit au respect de ses biens reconnu à toute personne physique ou morale ne porte pas atteinte au droit des Etats de mettre en oeuvre les lois qu'ils jugent nécessaires pour assurer le paiement des impôts ; que la taxation de la plus-value en litige, née d'un événement qui a mis fin au régime du report d'imposition, ne saurait être regardée comme portant, par elle-même, atteinte au respect des biens du contribuable concerné, au sens de l'article 1er de ce protocole ni au principe d'égalité entre les contribuables ; que l'impossibilité d'imputer des moins-values relevant du régime des plus-values professionnelles sur une plus-value relevant du régime des particuliers ne saurait davantage constituer, compte tenu de la marge d'appréciation dont disposent les Etats en cette matière, une atteinte disproportionnée aux biens de M. et Mme B..., et ce alors même que l'opération de dissolution de la société n'aurait dégagé aucune liquidité ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Specht, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 octobre 2015.

Le rapporteur,

F. SPECHT Le président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01667


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01667
Date de la décision : 29/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Frédérique SPECHT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : AARPI MELOT ET BUCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-10-29;14nt01667 ?
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