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12/11/2015 | FRANCE | N°14NT01939

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 12 novembre 2015, 14NT01939


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl du Capitaine a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'Etat à lui verser la somme de 53 222,53 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait du comportement fautif de l'administration.

Par un jugement n° 1301261 du 23 mai 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 22 juillet 2014 et 12 octobre 2015, l'Earl du Capitaine demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 mai 2014 du tribunal administratif de Caen ;

2°) de condamner l'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl du Capitaine a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'Etat à lui verser la somme de 53 222,53 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait du comportement fautif de l'administration.

Par un jugement n° 1301261 du 23 mai 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 22 juillet 2014 et 12 octobre 2015, l'Earl du Capitaine demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 mai 2014 du tribunal administratif de Caen ;

2°) de condamner l'État à lui verser la somme de 53 222,53 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a déposé le 5 mai 2010 auprès de la direction départementale des territoires et de la mer un dossier d'aides 2010, qui comportait une déclaration de surface au nom du Gaec du Capitaine et une déclaration de changement de statut ainsi que le formulaire administratif de clause de transfert de DPU du Gaec du Capitaine à l'Earl du Capitaine, et l'administration en a établi deux récépissés le 5 mai 2010 ;

- aucune information ne lui a été transmise sur le caractère incomplet de son dossier et cette absence de demande complémentaire de la part de l'administration est fautive ;

Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2015, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'Earl du Capitaine ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil du 29 septembre 2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs (...) ;

- le règlement (CE) n° 795/2004 de la Commission du 21 avril 2004 portant modalités d'application du régime de paiement unique prévu par le règlement (CE) n° 1782/2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs ;

- le règlement (CE) n° 796/2004 de la Commission du 21 avril 2004 portant modalités d'application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par les règlements du Conseil (CE) n° 1782/2003 et (CE) n° 73/2009, ainsi que de la conditionnalité prévue par le règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil ;

- le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs ;

- le code rural et de la pêche maritime :

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me Rousselot, avocat de l'Earl du Capitaine.

1. Considérant que le Gaec du Capitaine a été transformé en Earl du Capitaine à compter du 1er avril 2010 suite au retrait d'un de ses associés ; qu'il a demandé le 5 mai 2010 le transfert à l'Earl du Capitaine de ses droits à paiement unique (DPU) historiques correspondant aux aides découplées ; que, par une lettre de fin d'enregistrement du dossier PAC et DPU 2010 du 1er décembre 2010, le préfet du Calvados a notifié à l'Earl du Capitaine son portefeuille prévisionnel de DPU pour l'année 2010 sans y inclure les DPU acquis et perçus par le Gaec en 2009 ; que l'Earl du Capitaine a contesté ce récapitulatif les 10 et 20 décembre 2010 devant la direction départementale des territoires et de la mer du Calvados puis devant le ministre chargé de l'agriculture ; que, le 30 décembre 2010, le préfet du Calvados a notifié à l'Earl du Capitaine son portefeuille final de droits à paiement unique 2010 limité aux droits à paiement unique normaux au 15 mai 2010, en lui retirant 21 063,45 euros d'aides couplées ; que le portefeuille final des droits à paiement unique 2011 de l'Earl du Capitaine a été arrêté à l'identique par la direction départementale des territoires et de la mer du Calvados le 9 décembre 2011, sur la base uniquement des droits à paiement unique normaux au 15 mai 2011 ; que l'Earl du Capitaine a contesté cette décision en excès de pouvoir devant le tribunal administratif de Caen qui a rejeté sa demande par un jugement du 17 juin 2012 ; que l'Earl requérante a alors présenté le 15 mars 2013 une réclamation préalable indemnitaire d'un montant de 63 190,35 euros auprès du préfet du Calvados qui l'a rejetée le 3 mai 2013 ; que l'Earl du Capitaine a demandé, dans le dernier état de ses écritures, au tribunal administratif de Caen de condamner l'Etat à lui verser la somme de 53 222,53 euros au titre du préjudice financier qu'elle estime avoir subi du fait du refus du préfet du Calvados d'activer, pour les campagnes 2010, 2011, 2012 et 2013, les droits à paiement unique acquis et perçus par le Gaec du Capitaine en 2009 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 19 du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 : " Demande d'aide. 1. Chaque année, l'agriculteur introduit une demande pour les paiements directs, indiquant, le cas échéant : (...) b) les droits au paiement déclarés en vue de leur activation ; c) toute autre information prévue par le présent règlement ou par l'État membre concerné. 2. Les États membres fournissent, entre autres par des moyens électroniques, des formulaires préétablis qui se fondent sur les superficies déterminées l'année précédente ainsi que des documents graphiques situant ces superficies (...). " ; qu'aux termes de l'article 33 du même règlement : " Droits au paiement. 1. Peuvent bénéficier de l'aide au titre du régime de paiement unique les agriculteurs qui : a) détiennent des droits au paiement attribués conformément au règlement (CE) no 1782/2003 ; b) reçoivent des droits au paiement en application du présent règlement : i) par transfert ; ii) au titre de la réserve nationale ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 34 de ce règlement : " Activation des droits au paiement par hectare admissible. 1. L'aide au titre du régime de paiement unique est octroyée aux agriculteurs après activation d'un droit au paiement par hectare admissible. Les droits au paiement activés donnent droit au paiement des montants qu'ils fixent. ( ...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les agriculteurs sont tenus de déclarer à l'administration les droits à paiement unique qui leur ont été attribués ou transférés au titre des aides dites découplées pour pouvoir prétendre au versement de ces aides ;

3. Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article D. 615-62 du code rural : " I. - En application de l'article 63 du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 susmentionné, les aides prévues à l'annexe XI du même règlement (CE) n° 73/2009 sont totalement intégrées dans le régime de paiement unique (...) " ; qu'aux termes de l'article

D 615-62-1 du même code : " I. - Pour l'application de l'article 63 du règlement (CE)

n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009 susmentionné, le montant final à découpler est établi, pour chaque agriculteur, selon les modalités précisées au présent article. (...) V. - Le montant final à découpler correspond à la somme des montants annuels de l'année de référence de l'agriculteur, après prise en compte des événements intervenus entre le 1er janvier 2005 et le 15 mai 2010 (...). Il est incorporé dans le portefeuille de droits au paiement unique de l'agriculteur au 15 mai 2010, selon les modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'agriculture " ; qu'en vertu de l'obligation d'activation résultant des dispositions communautaires rappelées au point 2, l'Earl du Capitaine qui, en raison de son changement de statut juridique, constituait un exploitant différent du Gaec du Capitaine, était tenue, en l'absence de toute automaticité possible dans le transfert des DPU, de déclarer, outre le changement de statut, dans un document distinct adressé à l'administration les DPU détenus par le Gaec qui lui avaient été transférés par ce dernier afin de permettre l'activation des droits transférés ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que si l'Earl du Capitaine a déposé le 30 avril 2010 un formulaire de demande de prise en compte d'un changement de statut ou de dénomination juridique d'une exploitation intervenant au plus tard le 15 mai 2010 et si elle a également, le 5 mai 2010, demandé le transfert des DPU historiques, il est constant qu'elle n'a pas sollicité dans les délais requis, soit au 17 mai pour l'année 2010, le transfert des références initiales générées par le Gaec du Capitaine en matière d'aides issues du nouveau découplage pour l'année 2010 ; que l'administration ne pouvait, dans ces conditions, tenir compte au profit de l'Earl le Capitaine, en le transférant de son propre chef, du montant de référence issu du découplage 2010 de l'exploitation du Gaec le Capitaine ; que le préfet du Calvados n'a, par suite, commis aucune illégalité fautive en notifiant à l'Earl du Capitaine, au titre de la campagne 2010 puis des campagnes suivantes 2011 à 2013, un portefeuille final de DPU n'incorporant pas le transfert des DPU issus du découplage ;

5. Considérant que si l'Earl du Capitaine soutient que les refus qui lui ont été ainsi opposés par le préfet du Calvados pour les campagnes 2010 à 2013 sont de nature à engager la responsabilité de l'administration dès lors que celle-ci ne l'a pas informée du caractère incomplet de son dossier et se prévaut à cet égard de la mention que comportaient les deux récépissés du 5 mai 2010 selon laquelle " la vérification de la complétude du dossier sera assurée par le service compétent, ultérieurement au dépôt. Une lettre de fin d'enregistrement vous sera envoyée. ", il est constant que le dossier de transfert des DPU historiques déposé auprès des services de la direction départementale des territoires et de la mer du Calvados était complet et que les récépissés précités du 5 mai 2010 concernaient uniquement les clauses de transfert de DPU et les surfaces et non les aides issues du nouveau découplage 2010 pour lesquelles elle n'avait pas fait de déclaration selon les références initiales du Gaec du Capitaine ; qu'en effet, et ainsi qu'il a été rappelé au point précédent, la demande de transfert du découplage 2010, distincte de la procédure de DPU normaux, n'a pas été effectuée dans le délai fixé au plus tard au 17 mai 2010 ; qu'en outre, il n'est pas contesté qu'avait été adressée à tous les exploitants la notice d'information " Mise en oeuvre du bilan de santé de la PAC-Découplage 2010 " qui mentionnait expressément que l'exploitant concerné par des évolutions juridiques intervenues depuis le 1er janvier 2005 devait contacter l'administration qui lui fournirait un formulaire de déclaration des évolutions juridiques intervenues ; qu'il en est de même de la " notice explicative des documents permettant le transfert des DPU-nouveautés 2010 " ; qu'enfin et ainsi que l'ont rappelé les premiers juges, M.A..., gérant du Gaec du Capitaine jusqu'à la création de l'Earl du Capitaine au 1er avril 2010 puis gérant de celle-ci à cette même date, a été destinataire d'un courrier en date du 23 avril 2010 de la direction départementale des territoires et de la mer du Calvados relatif au découplage DPU 2010 l'informant des démarches à accomplir pour bénéficier du montant complet de ce découplage ; que ce courrier comportait une invitation à prendre contact avec la direction départementale des territoires et de la mer et à déposer avant le 17 mai 2010 toutes pièces justificatives parmi lesquelles figurait le formulaire de demande de prise en compte d'un changement de statut ou de dénomination juridique relatif au découplage 2010 ; que, dans ces conditions, l'Earl du Capitaine, correctement informée des modalités à suivre pour effectuer le transfert des références détenues par le Gaec du Capitaine afin de bénéficier des DPU issus du découplage 2010, démarche qu'elle était seule en mesure de faire ainsi qu'il a été rappelé au point 4, n'est pas fondée à soutenir que l'Etat aurait commis dans l'instruction de son dossier une faute de nature à engager sa responsabilité et à solliciter à ce titre sa condamnation à lui verser une indemnité de 53 222,53 euros ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Earl du Capitaine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à l'Earl du Capitaine de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'Earl du Capitaine est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'Earl du Capitaine et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller,

Lu en audience publique le 12 novembre 2015.

Le rapporteur,

O. COIFFET

Le président,

I. PERROT

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°14NT01939


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01939
Date de la décision : 12/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP HELLOT ROUSSELOT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-11-12;14nt01939 ?
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