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18/05/2017 | FRANCE | N°15NT01554

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 mai 2017, 15NT01554


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Aubert Etudes Services a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la restitution de crédits d'impôt recherche d'un montant de 6 928 euros au titre de l'année 2011 et d'un montant de 11 850 euros au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1301790-1401993 du 12 mars 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les

18 mai 2015 et 20 avril 2016, la SARL Aubert Etudes Services, représentée par MeA..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Aubert Etudes Services a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la restitution de crédits d'impôt recherche d'un montant de 6 928 euros au titre de l'année 2011 et d'un montant de 11 850 euros au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1301790-1401993 du 12 mars 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 18 mai 2015 et 20 avril 2016, la SARL Aubert Etudes Services, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 12 mars 2015 ;

2°) de prononcer la restitution des crédits d'impôt recherche demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ayant soulevé d'office, sans en informer les parties, le moyen tiré de l'absence de travail de recherche effectué par les salariés dont elle demande la prise en compte au titre du crédit impôt recherche, le jugement est irrégulier ; le caractère non éligible des travaux de recherche menés ne constitue pas un moyen d'ordre public ;

- les salariés qui ont réalisé des travaux sont des chercheurs au sens de l'article 49 septies G de l'annexe III au code général des impôts ; par son rescrit n° 2010/59 du 5 octobre 2010, qui précise les termes du paragraphe 10 du BOI-BIC-RICI-10-10-10-30, l'administration s'est ralliée sur ce point à la définition retenue par la jurisprudence ;

- elle établit la refacturation par sa mère du coût de mise à disposition de ces chercheurs, dans le cadre d'une convention liant les deux sociétés ; l'administration admet, au paragraphe 90 du BOI-BIC-RICI-10-10-10-30 du 12 septembre 2012 que le personnel mis à titre onéreux à la disposition d'une société qui demande le bénéfice du crédit d'impôt recherche soit pris en compte dans les dépenses éligibles ;

- contrairement à ce que soutient le ministre pour la première fois en appel, la méthode de modélisation des informations et données relatives à un bâtiment qu'elle a mise au point présente un caractère innovant au sens et pour l'application de l'article 244 quater B du code général des impôts ;

- le ministère de la recherche n'ayant pas été saisi pour avis sur le caractère innovant de cette méthode, la cour devra faire réaliser une expertise, si elle entend le remettre en cause.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 octobre 2015 et 3 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les travaux de recherche menés ne présentent pas le caractère innovant requis pour bénéficier du crédit impôt recherche ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aubert,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société à responsabilité limitée Aubert Etudes Services.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) Aubert Etudes Services, ayant principalement pour activité la réalisation de documents graphiques, relève appel du jugement du 12 mars 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes tendant au bénéfice du crédit d'impôt recherche au titre de dépenses de recherche engagées pour la réaliser d'une maquette numérique s'élevant à 6 928 euros en 2011 et à 11 850 euros en 2012 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il résulte des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont rejeté les demandes de la SARL Aubert Etudes Services tendant au bénéfice du crédit d'impôt recherche au motif qu'elle ne justifiait pas de la refacturation, par la société holding Manifred, des salaires et des charges sociales relatifs aux salariés mis à sa disposition pour réaliser la maquette numérique et qui constituent selon elle des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt recherche ; que ce n'est que de manière surabondante qu'ils ont précisé que l'existence de travaux de recherches ne pouvait être regardée comme établie ; que, dans ces conditions, ils n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité en mentionnant ce motif de rejet des demandes, tiré de la méconnaissance du champ d'application de l'article 244 quater B du code général des impôts, sans avoir préalablement notifié aux parties un moyen soulevé d'office, alors même que ce moyen n'était opposé en défense que dans l'un des deux dossiers à la jonction desquels ils ont procédé ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales (...) imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) " ; qu'aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au même code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté " ; que ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt recherche que les dépenses exposées pour le développement ou l'amélioration substantielle de matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque considérée, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation de ces techniques ;

4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations, et, notamment, d'examiner si les opérations de développement expérimental en cause présentent un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts ;

5. Considérant que le ministre de l'économie et des finances soutient en appel que la maquette numérique mise au point par la société requérante qui permet de modéliser en trois dimensions un bâtiment, de stocker dans le même fichier l'ensemble des informations s'y rapportant et de le mettre à jour au fur et à mesure des modifications apportées à ce bâtiment ou à son environnement, ne constitue pas un produit innovant au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts ;

6. Considérant qu'il ressort des dossiers de demande de crédit d'impôt recherche que les difficultés que la SARL Aubert Etudes Services a rencontrées tenaient, d'une part, aux problèmes de compatibilité des différents fichiers dits IFC - lesquels utilisent le langage standardisé employé par les professions du bâtiment - existants sur le marché, à l'absence de plateforme informatique opérationnelle permettant d'échanger les informations relatives à un projet de construction et à son évolution, d'autre part, à la réticence des petites et moyennes entreprises à recourir à une telle méthode de travail et, enfin, à la réticence des professionnels à échanger des informations dans un milieu professionnel fortement hiérarchisé et potentiellement conflictuel ; que, selon l'état de l'art décrit dans ces dossiers, les projets déjà menés en vue d'élaborer un outil de travail collaboratif spécifique au domaine de la construction immobilière n'ont pas permis de trouver une solution à l'ensemble des problèmes rencontrés et, notamment, à ceux tenant à la compatibilité des fichiers IFC et à la validation de la maquette numérique partagée ; que, toutefois, il ne ressort pas de ces dossiers ou d'autres pièces produites par les parties que la réalisation de cette maquette résulte du développement ou de l'amélioration substantielle des connaissances informatiques requises pour mener à bien un tel projet ; qu'il ressort au contraire du dossier de demande présenté au titre de l'année 2011 que les travaux effectués ont seulement permis à des petites et moyennes entreprises de disposer d'une technologie et d'un savoir-faire déjà utilisés par les grandes entreprises ; qu'il suit de là que les travaux menés par la société requérante ne présentent pas un caractère de nouveauté ouvrant droit au bénéfice du crédit d'impôt recherche en application de l'article 244 quater B du code général des impôts ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu de faire procéder avant-dire droit à une mesure d'expertise, que la SARL Aubert Etudes Services n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SARL Aubert Etudes Services demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Aubert Etudes Services est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Aubert Etudes Services et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Delesalle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 mai 2017.

Le rapporteur,

S. AubertLe président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT01554 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01554
Date de la décision : 18/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SELARL MAUBANT SARRAZIN VIBERT (FISCALEX)

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-05-18;15nt01554 ?
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