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07/06/2018 | FRANCE | N°16NT03817

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 07 juin 2018, 16NT03817


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner la communauté d'agglomération du pays de Flers à lui verser la somme de 3 488,73 euros qu'il a supportée suite à une opération de pompage d'hydrocarbures dans sa cave, de le décharger de l'obligation de payer les sommes de 1 799,04 euros et de 1 393,94 euros suite à l'émission par la communauté d'agglomération de deux " avis des sommes à payer " des 22 février 2012 et 13 novembre 2014 et de condamner cette dernière aux dépens repr

sentés par les frais d'expertise qu'il a dû supporter.

Par un jugement n° 150...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner la communauté d'agglomération du pays de Flers à lui verser la somme de 3 488,73 euros qu'il a supportée suite à une opération de pompage d'hydrocarbures dans sa cave, de le décharger de l'obligation de payer les sommes de 1 799,04 euros et de 1 393,94 euros suite à l'émission par la communauté d'agglomération de deux " avis des sommes à payer " des 22 février 2012 et 13 novembre 2014 et de condamner cette dernière aux dépens représentés par les frais d'expertise qu'il a dû supporter.

Par un jugement n° 1501223 du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Caen a condamné la communauté d'agglomération du pays de Flers à verser la somme de

9 780,39 euros à M. B..., a annulé les avis des sommes à payer des 22 février 2012 et 13 novembre 2014 et a déchargé M. B... de la somme de 3 192,96 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 novembre 2016, la communauté d'agglomération du pays de Flers, représentée par la SCP Mesnildrey Leprêtre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 6 octobre 2016 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) de condamner M. B... à lui verser les sommes de 1 799,04 euros et 1 393,94 euros ;

4°) de condamner M. B... aux dépens de l'instance ;

5°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

­ M. B... est, en application des dispositions du 1er alinéa de l'article 1384 du code civil, responsable de la pollution par hydrocarbures des eaux de la rivière La Vère survenue en décembre 2011 dès lors qu'il est établi que cette pollution a pour origine la pompe de relevage du puisard de l'immeuble lui appartenant et dont il a la garde alors que l'intéressé n'établit pas avoir obtenu l'autorisation administrative nécessaire pour rejeter les eaux de ce puisard dans le réseau des eaux de pluie ;

­ le tribunal a, à tort, appliqué le principe " Pollueur - Payeur " dès lors que ce principe n'est pas applicable dans un cadre strictement privé et non professionnel ;

­ subsidiairement, elle ne peut être redevable de la somme d'un montant de 3.488,73 euros correspondant à la facture Sanor Aeos dès lors que c'est M. B... qui a signé le bon de commande ;

­ les frais d'expertise ne sauraient être mis à sa charge dès lors que cette expertise a été demandée par M. B... et que la responsabilité de la communauté d'agglomération n'a jamais été mise en cause ;

­ M. B... étant ainsi responsable de la pollution de la Vère en raison du fonctionnement de la pompe de relevage qu'il avait sous sa garde, il est tenu au règlement des sommes de 1 799,04 € et 1 393,94 euros qui lui ont été réclamées et qu'il n'a pas contestées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2017, M. C... B..., représenté par M.D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté d'agglomération du pays de Flers une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la demande présentée par la communauté d'agglomération du pays de Flers est sans fondement.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

­ le code général des collectivités territoriales ;

­ le code de la santé publique,

­ le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

­ le rapport de M. A...'hirondel,

­ et les conclusions de M. Derlange, rapporteur public.

1. Considérant que la communauté d'agglomération du pays de Flers (CAPF) a été conduite à effectuer des travaux de dépollution sur le réseau d'assainissement dont elle a la charge sur la commune de Flers suite à des pollutions par hydrocarbures de la rivière La Vère survenues les 9 et 11 décembre 2011 et dont elle impute la responsabilité à M.B..., propriétaire, dans cette commune, d'un immeuble collectif situé 82, rue de Domfront ; que la CAPF relève appel du jugement du tribunal administratif de Caen du 6 octobre 2016 qui, d'une part, l'a condamnée à verser à M. B... la somme totale de 9 780 euros correspondant au remboursement de la facture réglée par ce dernier à la société Sanor Aos ainsi qu'aux frais d'expertise qu'il a supportés pour déterminer l'origine de la pollution, d'autre part, a annulé les deux avis de sommes à payer qu'elle a émis à son encontre le 22 février 2012 et le 13 novembre 2014 d'un montant respectif de 1 799,02 euros au titre d'une " intervention hydrocarbures F30 " et de 1 393,94 euros afin d'obtenir le remboursement du règlement de la facture émise par la société Sanor Lecorps service et a, enfin, déchargé l'intéressé de ces deux sommes ;

Sur la responsabilité de M. B... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L.5211-9-2 du code général des collectivités territoriales : " I. - A. - Sans préjudice de l'article L. 2212-2, du présent code et par dérogation à l'article L. 1311-2 et au deuxième alinéa de l'article L. 1331-1 du code de la santé publique lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est compétent en matière d'assainissement, les maires des communes membres de celui-ci transfèrent au président de cet établissement les attributions lui permettant de réglementer cette activité (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 2224-11 du même code : " Les eaux entrant dans un système de collecte des eaux usées doivent, sauf dans le cas de situations inhabituelles, notamment de celles dues à de fortes pluies, être soumises à un traitement avant d'être rejetées dans le milieu naturel (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1331-4 du code de la santé publique : " Les ouvrages nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement sont à la charge exclusive des propriétaires et doivent être réalisés dans les conditions fixées à l'article L. 1331-1. Ils doivent être maintenus en bon état de fonctionnement par les propriétaires. La commune en contrôle la qualité d'exécution et peut également contrôler leur maintien en bon état de fonctionnement. " ; qu'aux termes de l'article L. 1331-6 de ce dernier code dans sa rédaction alors applicable : " Faute par le propriétaire de respecter les obligations édictées aux articles L. 1331-1, L. 1331-1-1, L. 1331-4 et L.1331-5, la commune peut, après mise en demeure, procéder d'office et aux frais de l'intéressé aux travaux indispensables. " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, compétent en matière d'assainissement, ne peut procéder d'office à des travaux aux frais du propriétaire qui fait déverser des eaux pluviales dans le système de collecte des eaux usées que si ces travaux sont indispensables pour assurer la bonne qualité d'exécution ou le bon fonctionnement des ouvrages qui permettent d'acheminer ces eaux à la partie publique du branchement et après mise en demeure ;

4. Considérant que la communauté d'agglomération du pays de Flers exerce, au titre de ses statuts, la compétence " assainissement " qui porte sur la collecte et le traitement des eaux pluviales et des eaux usées en assurant notamment l'entretien, la gestion technique et financière des réseaux existants, des stations de traitement, des postes de relevage et des bassins publics de rétention des eaux pluviales ainsi que la vérification technique et le contrôle des installations nouvelles et des réhabilitations des systèmes d'assainissement non collectif ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les investigations menées lors des deux épisodes de pollution constatés sur la rivière La Vère en décembre 2011 ont permis d'établir que les hydrocarbures provenaient du puisard, situé 82, rue de Domfront à Flers, appartenant à M. B... ainsi que le retranscrit le rapport des sapeurs-pompiers intervenus sur place ; que selon ce rapport, ce puisard, qui collecte les eaux de pluie ou de source s'infiltrant dans le sous-sol, était ainsi rempli de 2 000 à 3 000 litres d'hydrocarbures, lesquels étaient ensuite injectés dans le réseau d'eaux pluviales par actionnement de la pompe de relevage ; que, toutefois, l'expertise contradictoire diligentée à l'initiative de M. B... devant le juge judiciaire afin d'établir la cause réelle de cette pollution exclut formellement que les hydrocarbures puissent provenir d'installations appartenant à M. B..., en raison soit de la défectuosité de la cuve à fuel que possède ce dernier dès lors que celle-ci était en bon état général et ne présentait aucun signe de corrosion permettant de soupçonner une fuite du liquide, soit de mauvaises manoeuvres lors du remplissage de cette cuve dès lors que les locaux dans laquelle elle était installée étaient propres et qu'il n'existait au sol aucune trace de fuel ; que, le rapport de l'expert note également que le système de relevage fonctionnait normalement ; que ce même rapport, qui mentionne, par ailleurs, l'existence sous le niveau de la nappe phréatique, d'autres départs de canalisations non identifiables, émet alors deux hypothèses quant à l'origine de la pollution : soit une fuite de vieilles cuves provenant d'une ancienne station-service et enterrées à proximité, soit une fuite en provenance d'une habitation proche dont les canalisations se jettent dans le puisard de M. B... ; que les dépenses dont il s'agit et engagées par la communauté d'agglomération étaient destinées à assurer le pompage du fuel encore présent dans le puisard (facture société Sanor Aos de 3 488, 72 euros réglée par l'intimé) puis, concernant les deux " avis des sommes à payer " émis les 22 février 2012 et 13 novembre 2014, pour faire traiter les eaux de nettoyage (facture société Sanor Lecorps service de 1 393,94 euros) et obtenir le remboursement de frais propres occasionnés au service assainissement suite à ces pollutions (1 799,04 euros) ; que, par suite, compte tenu des conclusions de l'expert, ces dépenses, dont les opérations auxquelles elles se rattachent n'ont, au demeurant, pas donné lieu à une mise en demeure préalable, n'ont pas pour objet d'assurer la bonne qualité d'exécution ou le bon fonctionnement d'ouvrages détenus par M. B... ; qu'elles ne pouvaient, par suite, être mises à la charge de ce dernier ; que la circonstance que M. B... ait signé le bon de commande de la facture Sanor Aos est sans influence dès lors qu'il n'est pas contesté que les travaux réalisés par cette société avaient été commandés par le service assainissement de la communauté d'agglomération ;

6. Considérant que la communauté d'agglomération du pays de Flers ne saurait, enfin, utilement invoquer les dispositions du premier alinéa de l'article 1384 du code civil, devenu depuis article 1242 du même code, qui ne sont pas applicables au présent litige ;

Sur les conclusions indemnitaires :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que, dans les circonstances de l'espèce, le tribunal administratif a mis les frais de l'expertise, dès lors qu'elle a été utile à la solution du litige, à la charge de la communauté d'agglomération du pays de Flers et qui ont été liquidés et taxés, par une ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance d'Argentan du 27 septembre 2012 et par une ordonnance du juge taxateur au même tribunal du 2 avril 2015, aux sommes respectives de 1 000 euros et de 5 223,18 euros, ainsi que les frais d'assignation (68,48 euros) devant le juge des référés de ce tribunal, ce qui représente un montant total de 6 291,66 euros ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la communauté d'agglomération du pays de Flers n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamnée à verser à M. B... la somme totale de 9 780,39 euros, a annulé les avis des sommes à payer des 22 février 2012 et 13 novembre 2014 et a déchargé M. B... de la somme de 3 192,96 euros ;

Sur les frais liés au litige :

9. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la communauté d'agglomération du pays de Flers demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du pays de Flers une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération du pays de Flers est rejetée.

Article 2 : La communauté d'agglomération du pays de Flers versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération du pays de Flers et à M. C...B....

Délibéré après l'audience du 15 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Degommier, président-assesseur,

- M.A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2018.

Le rapporteur,

M. E...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°16NT03817


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03817
Date de la décision : 07/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SCP MESNILDREY LEPRETRE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-06-07;16nt03817 ?
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