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13/09/2018 | FRANCE | N°17NT02042

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 13 septembre 2018, 17NT02042


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sofiv a demandé au tribunal administratif d'Orléans la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2009 au 30 avril 2012 et des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires mises à sa charge au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1402558 du 25 avril 2017, le tribunal administratif d'Orléans l'a déchargée des rappels de taxe sur la valeur aj

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sofiv a demandé au tribunal administratif d'Orléans la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2009 au 30 avril 2012 et des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires mises à sa charge au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1402558 du 25 avril 2017, le tribunal administratif d'Orléans l'a déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2009 au 30 avril 2012 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 juillet 2017, la SAS Sofiv, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 avril 2017 du tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires mises à sa charge au titre des années 2009 à 2011 ;

2°) de prononcer cette décharge ainsi que la restitution de la somme correspondante assortie des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la perception de dividendes par une société holding qui s'immisce dans la gestion de ses filiales et qui exerce, à ce titre, une activité économique est assimilée à une opération soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ouvrant droit à déduction intégrale ; ces dividendes doivent être exclues du numérateur pour le calcul du rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires ;

- les autres produits financiers étant exclus pour le calcul du rapport d'assujettissement dans les conditions prévues par l'instruction BOI-TPS-TS-20-30 § 100 et § 140, elle n'était pas redevable de la taxe sur les salaires au titre des années 2009 et 2011 dès lors que les produits financiers sont inférieurs au seuil de 5% pour les années 2008 et 2010 ;

- les rémunérations de M. E...A..., directeur général, et de Mme D...C..., cadre dirigeante, n'entrent pas dans l'assiette de la taxe sur les salaires dès lors qu'ils n'exerçaient aucune attribution dans le secteur financier dont la gestion avait été confiée exclusivement à M. F...A..., membre du conseil de surveillance, par un procès-verbal du conseil de surveillance du 1er septembre 2004 ;

- M. E...A...ne peut être considéré comme un salarié en raison de son statut de mandataire social.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Malingue,

- et les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Sofiv, anciennement société anonyme (SA) Sofiv, est une société holding qui, d'une part, réalise des prestations de service au profit de ses filiales et, d'autre part, perçoit des dividendes de la part de ces dernières. A la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, étendue au 30 avril 2012 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration a mis à la charge de la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période allant du 1er janvier 2009 au 30 avril 2012 et des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires au titre des années 2009 à 2011. La SAS Sofiv relève appel du jugement du 25 avril 2017 du tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires mises à sa charge au titre des années 2009 à 2011.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. En premier lieu, aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " (...) L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (...). ".

3. Il résulte de ces dispositions, dont la rédaction est issue du I de l'article 18 de la loi du 30 décembre 1993 de finances rectificative pour 1993, lesquelles ont eu pour objet de dissocier le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires du rapport, dit " prorata " de taxe sur la valeur ajoutée, alors prévu à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, que l'assiette de la taxe sur les salaires due par les assujettis partiels à la taxe sur la valeur ajoutée s'obtient en appliquant au montant total des rémunérations, le rapport existant entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Ce rapport est déterminé en faisant figurer, au numérateur, le chiffre d'affaires qui n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, constitué des recettes correspondant à des opérations exonérées ou situées hors du champ d'application de cette taxe, et, au dénominateur, la totalité des recettes, c'est-à-dire celles correspondant à des opérations imposables ou exonérées ou situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée.

4. Si la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit, dans son arrêt du 16 juillet 2015 Larentia + Minerva (C-108/14), que la taxe sur la valeur ajoutée grevant des biens et services dont les coûts font partie des frais généraux d'une société holding qui, s'immisçant dans la gestion de ses filiales, exerce, à ce titre, une activité économique doit, en principe, être déduite intégralement, il ressort d'une jurisprudence constante de cette même Cour que n'étant pas la contrepartie d'une activité économique, la perception de dividendes n'entre pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, même dans l'hypothèse où la société holding qui perçoit les dividendes s'immisce dans la gestion de ses filiales en leur fournissant des prestations de services soumises à cette taxe. Il suit de là que, contrairement à ce que soutient la SAS Sofiv, les dividendes doivent, pour l'application des dispositions de l'article 231 du code général des impôts, être compris au numérateur du rapport prévu à cet article. La société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que le rapport d'assujettissement retenu par l'administration est erroné.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou pour les employeurs de salariés visés aux articles L. 722-20 et L. 751-1 du code rural, au titre IV du livre VII dudit code, et à la charge des personnes ou (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations.(...) ". Aux termes de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale : " Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire (...) ". Aux termes de l'article L. 311-2 de ce code : " Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat ". Aux termes de l'article L. 311-3 du même code : " Sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2 (...) / 12° Les présidents du conseil d'administration, les directeurs généraux et les directeurs généraux délégués des sociétés anonymes (...) ".

6. Il résulte des travaux parlementaires concernant l'article 10 de la loi du 30 décembre 2000 de finances pour 2001, dont sont issues les dispositions de l'article 231 du code général des impôts, qu'en alignant l'assiette de la taxe sur les salaires sur celle des cotisations de sécurité sociale, le législateur a entendu y inclure les rémunérations des personnes explicitement visées par les dispositions combinées des articles L. 311-2 et L. 311-3 du code de la sécurité sociale et celles qui, telles les directeurs généraux d'une société anonyme, sont assimilées à ces personnes. Dès lors, les rémunérations versées au cours des années 2009 à 2011 à M. E...A..., en qualité de directeur général de la SA Sofiv, devaient être soumises à la taxe sur les salaires, bien qu'il n'eût pas la qualité de salarié au sens du droit du travail.

7. En troisième lieu, lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs secteurs distincts, au sens de l'article 209 de l'annexe II au code général des impôts, les dispositions de l'article 231 de ce code doivent recevoir application pour chacun de ces secteurs, en sorte que l'assiette de la taxe sur les salaires soit, pour chacun d'eux, déterminée en appliquant au montant des rémunérations versées au personnel qui lui est spécialement affecté, le rapport qui lui est propre entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. La taxe sur les salaires afférente aux rémunérations des personnels qui ne seraient pas exclusivement affectés à l'un des secteurs ne peut, toutefois, qu'être établie en appliquant à ces rémunérations le rapport existant, pour l'entreprise dans son ensemble, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total.

8. Le directeur général d'une société anonyme à directoire et conseil de surveillance, est investi, en vertu des articles L. 225-64 et L. 225-66 du code de commerce, d'une responsabilité générale dans la gestion de la société. S'agissant d'une société holding, ces pouvoirs s'étendent en principe au secteur financier, même si le suivi des activités est sous-traité à des tiers ou confié à des salariés spécialement affectés à ce secteur et si le nombre des opérations relevant de ce secteur est très faible. Toutefois, s'il résulte des éléments produits par l'entreprise que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l'organisation adoptée, l'un d'entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires.

9. Il résulte de l'instruction que l'activité de la SA Sofiv de prestation de services au profit de ses filiales, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, représentait moins de 90 % de son chiffre d'affaires total au titre des années 2009 à 2011 et que, de ce fait, cette société était passible de la taxe sur les salaires.

10. En se bornant à produire une délibération du conseil de surveillance du 1er septembre 2004, par laquelle ce conseil a confié à l'un de ses membres, M. F...A..., l'exercice d'une mission de " gestion des relations financières et notamment des dividendes perçus des filiales " en contrepartie d'une rémunération mensuelle de 152,15 euros, la SA Sofiv n'établit pas qu'au cours des années 2009 à 2011, M. E...A..., directeur général, et Mme D...C..., cadre dirigeante, lesquels ont vocation à exercer des missions par nature transversales, n'avaient aucune attribution dans le secteur financier. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration fiscale a assujetti leurs rémunérations à la taxe sur les salaires.

11. Il résulte de ce qui précède que la SAS Sofiv n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Sofiv est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Sofiv et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 30 août 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 septembre 2018.

Le rapporteur,

F. MalingueLe président,

F. BatailleLe greffier,

A. Rivoal La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17NT020425


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02042
Date de la décision : 13/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SCP TEN FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-09-13;17nt02042 ?
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