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13/11/2018 | FRANCE | N°16NT00751,16NT01110,16NT01138

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 13 novembre 2018, 16NT00751,16NT01110,16NT01138


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé, à titre principal, au tribunal administratif de Caen d'ordonner une nouvelle expertise afin de réévaluer ses préjudices consécutifs à la complication survenue lors de l'intervention chirurgicale bénigne qu'il a subie le 20 août 2010, à titre subsidiaire de l'indemniser de ses préjudices à hauteur de 676 271,90 euros.

Par un jugement n° 1401533 du 4 février 2016, le tribunal administratif de Caen, après avoir écarté la demande d'expertise complémentaire de M.C..., a co

ndamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogè...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé, à titre principal, au tribunal administratif de Caen d'ordonner une nouvelle expertise afin de réévaluer ses préjudices consécutifs à la complication survenue lors de l'intervention chirurgicale bénigne qu'il a subie le 20 août 2010, à titre subsidiaire de l'indemniser de ses préjudices à hauteur de 676 271,90 euros.

Par un jugement n° 1401533 du 4 février 2016, le tribunal administratif de Caen, après avoir écarté la demande d'expertise complémentaire de M.C..., a condamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 259 338 euros en réparation de ses préjudices.

Procédure devant la cour :

I - Sous le n° 16NT00751, par une requête et un mémoire enregistrés le 2 mars 2016 et le 29 juin 2016, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Manche, représentée par MeA..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier du Cotentin à lui verser la somme de 202 959,59 euros au titre de ses débours et la somme de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une nouvelle expertise médicale et de condamner le centre hospitalier du Cotentin aux entiers dépens ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Cotentin la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif en se fondant sur le rapport des experts, la perforation oesophagienne dont a été victime M. C...au cours de l'intervention chirurgicale du 20 août 2010 a été causée par une tentative de descente de sonde gastrique ;

- l'oesophage du patient ne présentaient pas de fragilité particulière ainsi que l'atteste une fibroscopie gastrique réalisée le 12 juillet 2010 ;

- la responsabilité du centre hospitalier du Cotentin est engagée en raison de la perforation oesophagienne fautive.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2016 le centre hospitalier du Cotentin, représenté par MeF..., conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la CPAM de la Manche ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 13 juillet 2016, l'ONIAM, représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 4 février 2016 ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande indemnitaire de M.C... ;

3°) à titre subsidiaire, de constater que le rapport des experts ne lui est pas opposable et d'ordonner une nouvelle expertise médicale ;

4°) à titre encore plus subsidiaire, de réduire l'indemnisation de M. C...à 650 euros au titre des frais divers, à 1 000 euros au titre de l'assistance par tierce personne, à 7 038,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et d'écarter toute indemnisation au titre du préjudice sexuel, les autres chefs de préjudice ayant été correctement évalués par le tribunal.

Il fait valoir que :

- le dommage dont a souffert M. C...résulte d'une faute du centre hospitalier du Cotentin ;

- les opérations d'expertise n'ayant pas été menées à son contradictoire, le rapport des experts du 4 mai 2012 ne lui est pas opposable ;

- une nouvelle expertise est également justifiée en raison des lacunes de ce rapport ;

- le tribunal n'a pas déduit de l'indemnité accordée à M. C...pour assistance par tierce personne le montant de la prestation que lui verse la CARSAT de Normandie.

Par un mémoire enregistré le 27 juillet 2016, M.C..., représenté par MeH..., conclut à titre principal à ce qu'une nouvelle expertise soit ordonnée et, à titre subsidiaire, que son indemnisation soit portée à la somme de 519 192,36 euros, que ses préjudices postérieurs au 28 mars 2012 soient expertisés, que soient appelées à la cause la CPAM de la Manche et la CARSAT de Normandie et que lui soit versée la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les experts n'ont pas correctement évalué ses préjudices et ont de manière erronée fixé la date de consolidation de son état de santé au 28 mars 2012, alors qu'il a dû subir plusieurs hospitalisations et interventions chirurgicales après cette date ;

- ses troubles postérieurs au 28 mars 2012 sont directement imputables aux séquelles de l'opération du 20 août 2010 et sont à l'origine de nouveaux préjudices ;

- le tribunal n'a pas correctement évalué l'indemnisation qui lui est due au titre des dépenses de santé, des frais divers, des frais de véhicule adapté, des frais d'assistance par tierce personne, du déficit fonctionnel permanent, des souffrances endurées, du préjudice esthétique, du préjudice d'agrément et du préjudice sexuel.

II - Sous le n° 16NT01110, par une requête et un mémoire enregistrés le 31 mars 2016 et le 13 juillet 2016, l'ONIAM, représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 4 février 2016 ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande indemnitaire de M.C... ;

3°) à titre subsidiaire, de constater que le rapport des experts ne lui est pas opposable et d'ordonner une nouvelle expertise médicale ;

4°) à titre encore plus subsidiaire, de réduire l'indemnisation de M. C...à 650 euros au titre des frais divers, à 1 000 euros au titre de l'assistance par tierce personne, à 7 038,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et d'écarter toute indemnisation au titre du préjudice sexuel, les autres chefs de préjudice ayant été correctement évalués par le tribunal ;

Il développe les mêmes moyens que ceux qu'il a soulevés dans l'instance n° 16NT00751.

Par un mémoire enregistré le 29 juin 2016, la CPAM de la Manche, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier du Cotentin à lui verser la somme de 202 959,59 euros au titre de ses débours et la somme de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une nouvelle expertise médicale et de condamner le centre hospitalier du Cotentin aux entiers dépens ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Cotentin la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle développe les mêmes moyens que ceux qu'elle a soulevés dans l'instance n° 16NT00751.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2016, le centre hospitalier du Cotentin, représenté par MeF..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'ONIAM ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2016, M.C..., représenté par Me H..., conclut, à titre principal, à ce qu'une nouvelle expertise soit diligentée et, à titre subsidiaire, que son indemnisation soit portée à la somme de 519 192,36 euros, que ses préjudices postérieurs au 28 mars 2012 soient expertisés, que soient appelées à la cause la CPAM de la Manche et la CARSAT de Normandie et que lui soit versée la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il développe les mêmes moyens que ceux qu'il a soulevés dans l'instance n° 16NT00751.

III - Sous le n° 16NT01138, par une requête et un mémoire enregistrés le 4 avril 2016 et le 27 juillet 2016 M. B...C..., représenté par MeH..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) à titre principal, qu'une nouvelle expertise soit ordonnée ;

2°) à titre subsidiaire, que son indemnisation soit portée à la somme de 519 192,36 euros ou à la somme de 504 192,36 euros et qu'une expertise soit diligentée afin d'évaluer ses préjudices résultant de l'aggravation de son état de santé ;

3°) que soient appelées à la cause la CPAM de la Manche et la CARSAT de Normandie ;

4°) que lui soit versée la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il développe les mêmes moyens que ceux qu'il a présentés dans l'instance n° 16NT00751.

Par un mémoire enregistré le 29 juin 2016, la CPAM de la Manche, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier du Cotentin à lui verser la somme de 202 959,59 euros au titre de ses débours et la somme de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

2°) à titre subsidiaire, d'ordonner une nouvelle expertise médicale et de condamner le centre hospitalier du Cotentin aux entiers dépens ;

3°) que soit mise à la charge du centre hospitalier du Cotentin la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle développe les mêmes moyens que ceux qu'elle a avancés dans l'instance n° 16NT00751.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2016, le centre hospitalier du Cotentin, représenté par MeF..., conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 13 juillet 2016, l'ONIAM, représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 4 février 2016 ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande indemnitaire de M.C... ;

3°) à titre subsidiaire, de constater que le rapport des experts ne lui est pas opposable et d'ordonner une nouvelle expertise médicale ;

4°) à titre encore plus subsidiaire, de réduire l'indemnisation de M. C...à 650 euros au titre des frais divers, à 1 000 euros au titre de l'assistance par tierce personne, à 7 038,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et d'écarter toute indemnisation au titre du préjudice sexuel, les autres chefs de préjudice ayant été correctement évalués par le tribunal.

Il développe les mêmes moyens que ceux qu'il a avancés dans l'instance n° 16NT00751.

Par un arrêt n° 16NT00751, 16NT01110, 16NT01138 en date du 19 janvier 2018, la cour a ordonné une expertise médicale complémentaire avant de statuer sur les requêtes.

Le rapport des experts a été enregistré le 31 juillet 2018 au greffe de la cour.

Par des ordonnances du 14 septembre 2018, la présidente de la cour a liquidé et taxé les frais et honoraires des experts aux sommes de 4 054,33 et 4 900 euros.

Par un mémoire enregistré le 28 septembre 2018, le centre hospitalier du Cotentin persiste dans ses précédentes écritures.

Par des mémoires enregistrés les 28 et 30 septembre 2018, l'ONIAM persiste dans ses précédentes écritures.

Par un mémoire enregistré le 1er octobre 2018, M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 4 février 2016 ;

2°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier du Cotentin à l'indemniser de ses préjudices et de le renvoyer devant le tribunal administratif de Caen pour qu'il soit statué sur le montant de ces préjudices ;

3°) subsidiairement, de mettre à la charge de l'ONIAM l'indemnisation de son préjudice corporel, de condamner le centre hospitalier du Cotentin à réparer son préjudice moral et de le renvoyer devant le tribunal administratif de Caen pour qu'il soit statué sur le montant de ces préjudices ;

4°) de mettre les frais de l'expertise à la charge du centre hospitalier du Cotentin ou solidairement de ce centre hospitalier et de l'ONIAM ;

5°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Cotentin ou de l'ONIAM des sommes de 4 000 et 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions de M. C...présentées dans son mémoire enregistré le 1er octobre 2018 et tendant à la condamnation du centre hospitalier du Cotentin sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.

Par un mémoire enregistré le 12 octobre 2018, M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 4 février 2016 ;

2°) à titre principal, de le renvoyer devant le tribunal administratif de Caen pour qu'il soit statué sur la responsabilité du centre hospitalier de Caen et le montant de ses préjudices ;

3°) subsidiairement, de dire que son dommage constitue un accident médical non fautif et de le renvoyer devant le tribunal administratif de Caen pour qu'il soit statué sur l'indemnisation de ses préjudices ;

4°) de mettre les frais de l'expertise à la charge du centre hospitalier du Cotentin ou solidairement de ce centre hospitalier et de l'ONIAM ;

5°) de lui allouer des sommes de 4 000 et 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 5 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthon,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant le centre hospitalier du Cotentin.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de la CPAM de la Manche, de l'ONIAM et de M. C...sont dirigées contre le même jugement, concernent l'indemnisation d'un même fait dommageable et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. Il résulte de l'instruction que M. C...a été opéré au centre hospitalier du Cotentin le 20 août 2010 d'une sténose antro-pylorique bénigne. Le 22 août 2010, il a de nouveau été admis dans cet établissement de santé en raison de fortes douleurs abdominales. Les médecins ont alors procédé à une révision du champ opératoire qui n'a rien révélé d'anormal. L'état de santé de M. C... s'est toutefois rapidement dégradé avec l'apparition d'une défaillance hémodynamique, d'une insuffisance respiratoire et d'une insuffisance rénale, avec suspicion de perforation oesophagienne au cours de l'opération du 20 août 2010. Le 23 août 2010, M. C...a été transféré en urgence au CHU de Caen, où un examen par scanner a confirmé la perforation de l'oesophage et un diagnostic de péritonite et de médiastinite a été posé, en lien avec la perforation oesophagienne. Depuis, M. C...présente un déficit moteur du membre supérieur droit et une neuropathie périphérique distale des quatre membres. Saisie par M.C..., la commission régionale d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux de Basse-Normandie a désigné deux experts qui ont estimé, le 4 mai 2012, que la perforation de l'oesophage n'avait pas été causée par l'acte chirurgical lui-même mais résultait d'un aléa thérapeutique. Sur la base de cette appréciation, une offre d'indemnisation a été présentée par l'ONIAM. Estimant que cette indemnisation était incomplète et insuffisante, M. C...a, le 29 juillet 2014, saisi le tribunal administratif de Caen d'une demande tendant principalement à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise et, subsidiairement, à la condamnation de l'ONIAM. Le tribunal a, par un jugement du 4 février 2016, mis à la charge de l'ONIAM la somme de 259 338 euros et rejeté les demandes présentées par la CPAM de la Manche. Sous les n° 16NT01110 et n° 16NT00751, l'ONIAM et la CPAM de la Manche ont relevé respectivement appel de ce jugement. M. C..., sous le n°16NT01138, a également relevé appel du même jugement en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande. Par un arrêt en date du 19 janvier 2018, la cour estimant qu'elle n'était pas en mesure de se prononcer sur l'origine de la perforation oesophagienne dont a été victime M.C..., sur la date de consolidation de son état de santé et sur l'étendue de ses différents préjudices a, avant de statuer sur ces requêtes, ordonné une expertise médicale complémentaire qui a été confiée à un médecin hépato-gastro-entérologue-proctologue et à un neurologue. Les experts ont déposé leur rapport le 23 juin 2018.

Sur la responsabilité du centre hospitalier du Cotentin :

3. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. ".

4. D'une part, il résulte de l'expertise complémentaire ordonnée par la cour que, même si sa cause exacte ne peut être déterminée, la perforation de l'oesophage qui est à l'origine des lourdes séquelles supportées par M. C...est nécessairement survenue lors de la gastrectomie qu'il a subie le 20 août 2010, dès lors que les premiers symptômes de cette complication sont apparus dès le réveil et non, comme l'avaient estimé les premiers experts, quarante-huit heures plus tard. D'autre part, toujours selon cette nouvelle expertise, le diagnostic de sténose du pylore posé probablement trop précocement par les médecins du centre hospitalier du Cotentin, n'aurait pas dû, en tout état de cause, donner lieu en l'absence d'urgence à une gastrectomie mais à une simple dilatation endoscopique, alternative thérapeutique moins morbide qui n'a d'ailleurs pas été proposée à l'intéressé. Dans ces conditions, et dans la mesure où le dommage subi par M. C... ne serait pas survenu en l'absence de cette indication thérapeutique fautive, la responsabilité du centre hospitalier du Cotentin est engagée.

5. Il résulte de ce qui vient d'être dit que le jugement du tribunal administratif de Caen du 4 février 2016 doit être annulé et que l'ONIAM est fondé à demander sa mise hors de cause.

6. Il appartient dès lors à la cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer, la responsabilité du centre hospitalier étant retenue, sur la demande présentée par la CPAM de la Manche.

Sur les droits de la CPAM de la Manche :

7. La CPAM de la Manche justifie par les éléments précis et détaillés versés au dossier de débours en lien direct avec le dommage subi par M. C...pour une somme de 202 959,59 euros. Par suite, il y a lieu de condamner le centre hospitalier du Cotentin à lui verser cette somme.

8. La CPAM de la Manche a droit, par ailleurs, à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 1 066 euros auquel elle a été fixée par l'arrêté du 20 décembre 2017 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale.

Sur les conclusions présentées par M.C... :

9. D'un part, les conclusions présentées par M. C...dans son mémoire enregistré le 1er octobre 2018 et tendant à la condamnation du centre hospitalier du Cotentin sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.

10. D'autre part, il n'entre pas dans les pouvoirs de la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de renvoyer M.C..., comme il le demande, devant le tribunal administratif de Caen pour qu'il soit statué sur ses préjudices. Il appartient à M.C..., s'il s'y croit fondé, de saisir ce tribunal d'une demande indemnitaire dirigée contre le centre hospitalier du Cotentin.

Sur les frais de l'instance :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier du Cotentin les frais d'expertise engagés dans le cadre de la présente instance, liquidés et taxés par la présidente de la cour administrative d'appel de Nantes à la somme totale de 8 954,33 euros.

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier du Cotentin des sommes de 1 500 euros à verser à la CPAM de la Manche et à M. C... au titre des exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1401533 du tribunal administratif de Caen du 4 février 2016 est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier du Cotentin est condamné à verser à la CPAM de la Manche la somme de 202 959,59 euros et la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 3 : Le surplus de la requête présentée par M. C...sous le n° 16NT01138 est rejeté.

Article 4 : Le centre hospitalier du Cotentin versera à la CPAM de la Manche et à M. C...1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme totale de 8 954,33 euros sont mis à la charge du centre hospitalier du Cotentin.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la CPAM de la Manche, à l'ONIAM, au centre hospitalier du Cotentin et à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- M. Berthon, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2018.

Le rapporteur,

E. BerthonLe président,

O. Coiffet

Le greffier,

M. G...

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT00751, 16NT01110, 16NT01138


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00751,16NT01110,16NT01138
Date de la décision : 13/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SCP JULIA JEGU BOURDON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-11-13;16nt00751.16nt01110.16nt01138 ?
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