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17/01/2019 | FRANCE | N°17NT01621

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 17 janvier 2019, 17NT01621


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1602211 du 21 mars 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2017, M. et Mme B..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°)

d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le vers...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1602211 du 21 mars 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2017, M. et Mme B..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que l'administration a volontairement dénaturé les faits et les pièces présentées lors des opérations de contrôle ;

- ils ont été privés de la possibilité de saisir l'interlocuteur départemental ;

- l'administration s'est placée implicitement mais nécessairement sur le terrain de l'abus de droit fiscal sans leur accorder les garanties attachées à cette procédure ;

- ils peuvent bénéficier de l'exonération d'impôt sur le revenu prévue à l'article 150-0 D ter du code général des impôts au titre de la plus-value que M. B...a réalisée lors de la cession des actions qu'il détenait dans la société par actions simplifiée (SAS)B....

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 21 mars 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à l'issue d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2009 à 2011 selon la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, la proposition de rectification du 17 décembre 2012 énonce l'impôt sur lequel elle porte, l'année d'imposition, indique les motifs du rehaussement, et notamment les motifs de droit et de fait pour lesquels le vérificateur a remis en cause le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 150-0 D ter du code général des impôts, ce qui a permis à M. et Mme B...de formuler des observations. M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir, en invoquant un vice de forme, que cette proposition n'est pas suffisamment motivée en ce que l'administration n'a pas répondu à tous leurs arguments concernant notamment la situation dans laquelle se trouvait M. B...vis-à-vis de la société Vinci Construction France (VCF) Lyon.

3. En deuxième lieu, la garantie de procédure tenant à la faculté pour le contribuable de saisir l'interlocuteur départemental, instituée par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié mentionnée au quatrième alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, ne peut être invoquée que dans le cadre d'un litige consécutif aux procédures de vérification de comptabilité et d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle prévues aux articles L. 12 et L. 13 du même livre. Il résulte de l'instruction que les impositions supplémentaires contestées par les requérants ont été mises à leur charge à la suite d'un contrôle sur pièces de leur dossier fiscal, dans le cadre duquel l'administration a tiré les conséquences des redressements notifiés à la société par actions simplifiée (SAS)B.... Seule cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité. Compte tenu de la nature de la procédure d'imposition suivie à leur encontre, M. et Mme B...n'avaient pas à être reçus à titre personnel par l'interlocuteur départemental.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / (...) " .

5. Il résulte de l'instruction que, pour justifier la remise en cause du bénéfice de l'exonération prévue par l'article 150-0 D ter du code général des impôts, l'administration n'a pas fait valoir, tant dans la proposition de rectification qu'ultérieurement, que le contrat de travail liant M. B...à la société VCF Lyon était conclu de manière fictive ou dans le seul but d'éluder l'impôt, mais a apprécié la situation de fait de M. B...au regard de ce contrat de travail à durée indéterminée conclu le 3 janvier 2011, à effet au 1er janvier 2011, qui indique expressément que M. B...continue à exercer les fonctions de directeur de l'entreprise B...jusqu'à la désignation d'un nouveau directeur courant 2011, soit dans les faits jusqu'au 30 avril 2011, et continuera d'exercer la fonction de directeur commercial au sein de la SASB..., tout en constatant notamment que la refacturation par la société VCF Lyon à la SAS B...de charges de personnel confirme l'exécution par M. B...des clauses de ce contrat de travail. Ce faisant, l'administration ne s'est pas placée sur le terrain de l'abus de droit fiscal mais a procédé à un examen de la qualification juridique des faits. La circonstance que la mention relative à la possibilité de saisine du Comité de l'abus de droit fiscal n'ait pas été rayée dans la réponse aux observations du contribuable du 21 mai 2013 relève d'une erreur matérielle et n'implique pas que l'administration se soit placée implicitement sur le terrain de l'abus de droit. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'administration s'est implicitement placée sur ce terrain sans respecter les garanties applicables à cette procédure doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts : " (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux (...) de valeurs mobilières, de droits sociaux, (...) sont soumis à l'impôt sur le revenu ". L'article 150-0 D ter du même code, issu de l'article 29 de la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, a prévu, à titre transitoire, que les gains nets que les dirigeants de petites et moyennes entreprises retirent de la cession à titre onéreux des titres de leur société lors de leur départ en retraite bénéficieraient, sous réserve du respect d'un ensemble de conditions relatives au cédant et à la société dont les titres sont cédés, de l'abattement pour durée de détention prévu à l'article 150-0 D bis du même code. Aux termes de ce même article 150-0 D ter, dans sa rédaction applicable : " I. - L'abattement prévu à l'article 150-0 D bis s'applique (...) aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d'actions, de parts ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2006, si les conditions suivantes sont remplies : / (...) ; / 2° Le cédant doit : / (...) / c) Cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession ; / (...) ". Il résulte de cette dernière disposition, qui, compte tenu de son caractère dérogatoire, doit être interprétée strictement, que le bénéfice de l'abattement est subordonné à la cessation effective de toute fonction au sein de la société, qu'il s'agisse ou non de fonctions de dirigeant exercées dans les conditions prévues par l'article 885 O bis du code général des impôts.

7. La contribution exceptionnelle sur les hauts revenus est assise, en vertu de l'article 223 sexies du code général des impôts, sur le revenu fiscal de référence, qui n'intègre les revenus exonérés d'impôt sur le revenu que lorsque l'article 1417 du même code le prévoit et qui exclut ainsi les plus-values exonérées par application de l'article 150-0 D ter.

8. M.B..., alors président de la SASB..., a cédé le 8 décembre 2010 à la société VCF la totalité des trois cent cinquante six actions qu'il détenait dans cette société. M. B..., qui avait fait valoir ses droits à la retraite à effet au 1er janvier 2009, a déterminé la plus-value taxable à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2010 en faisant application de l'abattement pour durée de détention prévu à l'article 150-0 D bis du code général des impôts en application du 150-0 D ter du même code. Pour deux cent quatre vingt dix neuf actions qu'il détenait depuis plus de huit ans, il a bénéficié ainsi d'un abattement de 100 %. L'administration a remis en cause le bénéfice de cet abattement au titre de l'année 2011 au motif que M. B...n'avait pas cessé toute fonction dans la SAS B...au terme du délai de deux ans suivant son admission à la retraite. Cette remise en cause a entraîné l'imposition à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

9. Il résulte de l'instruction qu'en application du paragraphe 2 du contrat de travail signé entre M. B...et la société VCF Lyon le 3 janvier 2011, avec effet au 1er janvier 2011, M. B..., ayant cédé son entreprise au groupe Vinci, devait continuer à exercer ses fonctions de directeur de l'entreprise B...jusqu'à la désignation d'un nouveau directeur courant 2011. Ce nouveau directeur a été désigné le 31 mars 2011. Ainsi, alors même que M. B...n'était plus salarié de l'entreprise B...et rémunéré par elle depuis le 31 décembre 2010, il n'avait pas effectivement cessé toute fonction au sein de cette entreprise dans le délai de deux ans prévu au c du 2° du I de l'article 150-0 D ter du code général des impôts. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a refusé à M. et Mme B...le bénéfice de l'abattement sur la plus-value de cession de titres réalisée et l'a assujetti à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 3 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 janvier 2019.

Le rapporteur,

J.-E. GeffrayLe président,

F. Bataille

Le greffier,

A. Rivoal

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT01621


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01621
Date de la décision : 17/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : JENVRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-01-17;17nt01621 ?
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