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17/07/2020 | FRANCE | N°19NT04255

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 17 juillet 2020, 19NT04255


Vu la procédure suivante :

I. Procédure contentieuse antérieure :

La société Les Moulins a demandé au tribunal administratif de Nantes, en premier lieu, d'ordonner la reprise des relations contractuelles avec la commune de La Guérinière, à compter de la décision de résiliation et, en second lieu, de constater la nullité de la convention de délégation de service public conclue avec la commune de La Guérinière et de condamner la commune à lui verser une somme de 1 738 242, 31 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable du 4 mars 2015

et capitalisation des intérêts, en remboursement des redevances dont elle s'est a...

Vu la procédure suivante :

I. Procédure contentieuse antérieure :

La société Les Moulins a demandé au tribunal administratif de Nantes, en premier lieu, d'ordonner la reprise des relations contractuelles avec la commune de La Guérinière, à compter de la décision de résiliation et, en second lieu, de constater la nullité de la convention de délégation de service public conclue avec la commune de La Guérinière et de condamner la commune à lui verser une somme de 1 738 242, 31 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable du 4 mars 2015 et capitalisation des intérêts, en remboursement des redevances dont elle s'est acquittée depuis 2008 en exécution de la convention.

Par un jugement n° 1501506 et 1501529 du 14 mars 2018, le tribunal administratif de Nantes a, par un article 1er, annulé la convention de délégation de service public conclue le 27 décembre 2007 entre la commune de la Guérinière et la société Les Moulins, par un article 2, condamné la commune de La Guérinière à verser à la société Les Moulins la somme de 428 243,63 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2015 et capitalisation de ces intérêts au 9 mars 2016 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date, par un article 3, rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un arrêt n° 18NT01946, 18NT01961 et 19NT00746 du 19 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a, en premier lieu, rejeté la requête n° 18NT01946 de la société Les Moulins tendant à la réformation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 mars 2018 et à ce que la condamnation de la commune de la Guérinière soit portée à la somme de 1 738 242, 26 euros TTC, rejeté la requête n° 18NT01961 de la commune de la Guérinière tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 mars 2018, au rejet des demandes présentées par la société Les Moulins devant le tribunal administratif et à la condamnation de la SAS Les Moulins à lui verser les sommes de 205 000, 80 euros, 88 029, 18 euros et 103 701, 10 euros, et en second lieu, enjoint à la commune de la Guérinière, en exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 mars 2018 et de l'arrêt de la cour, de verser à la société Les Moulins la part non acquittée de la somme de 428 243, 63 euros dans un délai de trois mois.

Procédure d'exécution devant la cour :

Par une demande, enregistrée le 5 novembre 2019 sous le numéro 19NT04255, la société Les Moulins, représentée par Me B..., a saisi la cour d'une demande tendant à l'exécution de l'arrêt n° 18NT01946, 18NT01961 et 19NT00746 de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 juillet 2019.

Par une ordonnance du 12 novembre 2019, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a décidé l'ouverture de la phase juridictionnelle, prévue par l'article R. 921-6 du code de justice administrative, sur la demande d'exécution de la société Les Moulins.

Par des mémoires, enregistrés le 20 décembre 2019 et le 10 janvier 2020, la SAS Les Moulins, conclut aux mêmes fins.

Elle soutient qu'après deux versements effectués par la commune de la Guérinière le 16 décembre 2019, pour un montant de 328 269, 38 euros et un montant de 662, 36 euros et un versement complémentaire de 2 292, 79 euros le 19 décembre 2019, la commune ne lui est plus redevable que de 85 euros ; sous cette réserve, elle considère que l'arrêt n° 18NT01946, 18NT01961 et 19NT00746 du 19 juillet 2019 a été exécuté par la commune.

Par des mémoires, enregistrés le 20 décembre 2019 et le 24 décembre 2019, la commune de la Guérinière, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) de rejeter la demande d'exécution de la SAS Les Moulins ;

2°) de mettre à la charge de la SAS Les Moulins la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a entièrement exécuté l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes ; une première somme de 138 940, 62 euros a été mandatée le 14 mai 2018 ; la somme globale de 331 224, 53 euros a été versée par trois mandats du 12 novembre 2019 ;

- le décompte produit par la SAS Les Moulins à l'appui de ses écritures est erroné puisque d'une part, il n'a pas tenu compte de l'ensemble des paiements effectués et d'autre part, contient des erreurs notamment dans le compte des jours ; au 16 décembre 2019, le montant du capital et des intérêts restant dus pour l'exécution de l'arrêt du 19 juillet 2019 est de 331 224, 53 euros ; un mandat de 328 269, 38 euros a été émis le 29 octobre 2019 et un mandat de 662, 36 euros a été émis le 12 novembre 2019 ; un mandat de 2 292, 79 euros a été émis le 12 décembre 2019 ;

- l'arrêt du 19 juillet 2019 fait l'objet d'un pourvoi en cassation instruit devant le Conseil d'Etat ; l'exécution de l'arrêt ne vaut en aucun cas acceptation définitive des paiements qu'elle a effectués en application de l'arrêt.

Par une ordonnance du 28 janvier 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 février 2020.

II. Procédure contentieuse antérieure :

La société Les Moulins a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de La Guérinière à lui verser une somme de 2 260 692,56 euros HT, soit 3 110 805,60 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 13 août 2015, au titre de la part non amortie des investissements qu'elle a réalisés sur le camping de La Guérinière, d'enjoindre à la commune de s'acquitter de cette somme dans un délai de 30 jours à compter de la notification du jugement, sous une astreinte de 200 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune une somme de 11 920,90 euros au titre des frais d'expertise judiciaire.

Par un jugement n° 1600180 du 23 mai 2018, le tribunal administratif de Nantes a, par un article 1er, condamné la commune de la Guérinière à verser à la société Les Moulins la somme de 1 667 645 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2015 et capitalisation de ces intérêts, par un article 2, mis les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 11 920,90 euros, à la charge de la commune de La Guérinière et de la société Les Moulins à parts égales, par un article 3, rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un arrêt n° 18NT02517 et 19NT01961 du 19 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a, en premier lieu, rejeté la requête de la commune de la Guérinière tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 mai 2018 et à titre principal au rejet des demandes indemnitaires de la société Les Moulins, en deuxième lieu, réformé, à la demande de la société Les Moulins, le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 mai 2018 en portant de 1 667 645 euros hors taxe à 2 001 174 euros toutes taxes comprises le montant de la condamnation mise à la charge de la commune de la Guérinière, et en dernier lieu, enjoint à la commune de la Guérinière de verser à la société Les Moulins la part non acquittée de cette somme.

Procédure d'exécution devant la cour :

Par une demande, enregistrée le 3 décembre 2019 sous le numéro 19NT04623, la société Les Moulins, représentée par Me B..., a saisi la cour d'une demande tendant à l'exécution de l'arrêt n° 18NT02517 et 19NT01961 de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 juillet 2019.

Par une ordonnance du 4 décembre 2019, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a décidé l'ouverture de la phase juridictionnelle, prévue à l'article R. 921-6 du code de justice administrative, sur la demande d'exécution de la société Les Moulins.

Par des mémoires, enregistrés les 18 février 2020, 20 février 2020, 5 mars 2020, 18 mars 2020 et le 16 juin 2020, la SAS Les Moulins conclut aux mêmes fins.

Elle demande, en outre, à la cour :

1°) d'assortir les mesures d'exécution du jugement n° 1600180 du tribunal administratif de Nantes du 23 mai 2018 et de l'arrêt n° 18NT02517 et 19NT01961 de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 juillet 2019 d'une astreinte de 1 500 euros par jour de retard ;

2°) de mettre à la charge de la commune de la Guérinière la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- au 31 janvier 2020, la commune de la Guérinière lui est redevable de la somme de 2 130 928, 32 euros, après lui avoir versé 108 577, 67 euros le 16 avril 2019 ; en dernier lieu, la commune lui est redevable de la somme de 2 133 921, 64 euros en exécution de l'arrêt n° 18NT02517 et 19NT01961 de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 juillet 2019 et d'une somme de 1 304 428, 51 euros en exécution du jugement n° 1701650 du tribunal administratif de Nantes du 19 février 2020 ;

- malgré les pourvois de la commune devant le Conseil d'Etat, les jugements du tribunal administratif de Nantes et les arrêts de la cour administrative d'appel de Nantes sont exécutoires ; la demande de sursis à statuer présentée par la commune de la Guérinière doit donc être rejetée ; la bonne administration de la justice commande aussi de rejeter cette demande ;

- toute compensation est exclue ; les créances de 298 029, 88 euros et de 395 822 euros avancées par la commune sont contestées ; la commune ne peut procéder d'autorité et ex nihilo au recouvrement des sommes qu'elle estime lui être dues ; les créances revendiquées par la commune ne sont ni certaines, ni déterminées, ni liquides, excluant toute compensation ; les recours en opposition contre les quatre titres exécutoires de 341 276 euros, de 458 307 euros, de 416 612 euros et de 398 277 euros émis le 16 décembre 2018 ont suspendu leur force exécutoire ; aucune compensation ne peut être opérée sur leur fondement sans méconnaitre l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; à la suite du jugement d'incompétence du tribunal administratif de Nantes, elle a saisi le tribunal judiciaire des Sables-d'Olonne contre ces titres exécutoires ; elle a également saisi le tribunal judiciaire contre le titre exécutoire de 395 822 euros du 6 janvier 2020 ;

- sa contestation de la régularité de la compensation opérée par la commune ne soulève pas un litige distinct de celui qui se rapporte à l'exécution du jugement du 23 mai 2018 et de l'arrêt du 19 juillet 2019 ;

o l'ordonnateur n'ayant pas compétence pour opposer une compensation, la maire de la commune n'avait pas compétence ; les actions en recouvrement et de paiement relèvent de la seule compétence du comptable public ;

o il n'est pas possible de compenser une créance publique sur un exercice budgétaire différent de celui où est née la dette compensable ;

o il est impossible, en application de l'article 1347-1 du code civil, d'opérer une compensation avec une créance qui n'est ni certaine, ni liquide, ni exigible ; il n'est pas non plus possible d'opérer une compensation lorsque les dettes et les créances sont de natures juridiques différentes, comme en l'espèce une part non amortie des investissements d'un côté, et des pertes d'exploitation et loyers de l'autre ;

o la compensation implique l'existence d'une décision administrative de compensation qui n'est intervenue que le 2 mars 2020 ;

- par une délibération du 19 octobre 2019, les conseillers municipaux de la commune de la Guérinière se sont engagés à lui verser la somme due par recours à l'emprunt ; il n'est pas établi que le comptable public a accepté la compensation demandée.

Par des mémoires, enregistrés le 9 janvier 2020, le 6 mars 2020 et le 19 juin 2020, la commune de la Guérinière, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la demande d'exécution de la SAS Les Moulins ;

2°) à titre subsidiaire, de prononcer un non-lieu à statuer sur la demande d'exécution de la SAS Les Moulins ;

3°) à titre très subsidiaire, de surseoir à statuer sur la demande d'exécution jusqu'au 14 avril 2020, date de fin des opérations d'enlèvement des hébergements irrégulièrement implantés ;

4°) de mettre à la charge de la SAS Les Moulins la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, et pour prévenir la mise en oeuvre d'une nouvelle action juridictionnelle, il doit être sursis à statuer sur la demande de la société dès lors qu'elle a formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt n° 18NT01946 et 18NT01961 de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 juillet 2019 ; elle a également formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt n° 18NT02517 de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 juillet 2019 ; par ailleurs, elle a également formé une demande de sursis à exécution de l'arrêt n° 18NT02517 de la cour administrative d'appel de Nantes sur le fondement de l'article R. 821-5 du code de justice administrative ; ces demandes sont actuellement en instruction devant le Conseil d'Etat ;

- la société Les Moulins est redevable de créances à son égard, d'un montant total de 688 851, 88 euros, puisqu'elle a émis à son encontre un titre exécutoire le 28 décembre 2019 pour un montant de 293 029, 88 euros et un titre exécutoire le 6 janvier 2020 pour un montant de 395 822 euros ; elle a opéré une compensation entre sa dette et les dettes de la SAS Les Moulins ; un éventuel recours contre les titres exécutoires est sans incidence sur l'exigibilité de la créance constatée par le titre et ne fait pas obstacle à la compensation ; il n'appartient pas au juge de l'exécution de connaitre de l'éventuelle contestation de la régularité de la compensation opérée pour l'exécution d'un jugement ;

- par un jugement n° 1811946 et autres, du 19 février 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté les demandes de la SAS Les Moulins contre les quatre titres exécutoires émis en 2018 ; le rejet de la contestation de ces titres exécutoires implique l'application automatique de la compensation, les sommes mises en recouvrement par ces titres étant redevenus immédiatement exigibles ; l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes a donc bien été exécuté en paiement par compensation de la somme de 1 632 049, 78 euros puisque le montant total des quatre titres exécutoires émis le 16 novembre 2018 s'élève à 1 614 447 euros, auxquels s'ajoutent les intérêts à hauteur de 17 602, 78 euros ; la nouvelle assignation formée le 19 février 2020 par la société Les Moulins à l'encontre des titres exécutoires du 16 novembre 2018 est sans incidence sur l'application de la compensation ; l'extinction des obligations réciproques par compensation en application de l'article 1347 du code civil est automatique ;

- le décompte produit par la SAS Les Moulins est inexact puisqu'il n'a pas tenu compte de l'extinction partielle de la dette par l'application de ses créances de 293 029, 88 euros au 28 décembre 2019 puis de 395 822 euros au 6 janvier 2020 ; le total des créances détenues sur la SAS Les Moulins s'élève à 2 320 900, 66 euros, supérieur au total des créances de la SAS Les Moulins, qui s'élève à 2 130 928, 32 euros ;

- la SAS Les Moulins a abandonné le site du camping municipal le 27 mars 2015 en abandonnant sur place de nombreux hébergements qui entravent l'exploitation normale du service public ; il résulte de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 19 juillet 2019 que ces hébergements étaient illégaux et n'appartiennent pas à la commune ; la présence des hébergements impacte les capacités d'exécution de l'arrêt puisqu'elle empêche l'exploitation complète du camping municipal ; elle a saisi le juge judiciaire aux fins d'obtention d'un titre permettant l'enlèvement forcé des hébergements ; ses difficultés d'exécution sont le fait de la SAS Les Moulins ; par une ordonnance du 6 février 2020, le président du tribunal judiciaire de Paris a condamné la SAS Les Moulins à procéder à l'enlèvement des hébergements irréguliers ;

- à titre subsidiaire, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'exécution de la SAS Les Moulins tant que la procédure de mandatement de la somme n'a pas abouti.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E..., première conseillère,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la SAS Les Moulins et de Me D..., représentant la commune de la Guérinière.

Une note en délibéré présentée pour la SAS Les Moulins a été enregistrée le 25 juin 2020 dans l'instance n° 19NT04623.

Des notes en délibéré présentées pour la commune de La Guérinière ont été enregistrées le 30 juin 2020 et le 15 juillet 2020 dans l'instance n° 19NT04623.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 19NT04255 et 19NT04623 de la société Les Moulins présentent à juger des questions connexes. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

2. Par une convention de délégation de service public du 27 décembre 2007, la commune de la Guérinière (Vendée) a confié à la société SAS Les Moulins l'exploitation de son camping municipal pour une durée de quinze ans. Par une décision du 13 février 2015, le maire de la commune a prononcé la résiliation de la convention de délégation de service public aux torts du délégataire.

3. Saisi par la société Les Moulins, le tribunal administratif de Nantes a, par un jugement n° 1501506 et 1501529 du 14 mars 2018, annulé la convention de délégation de service public conclue le 27 décembre 2007 entre la commune de la Guérinière et la société, en raison de la méconnaissance par l'article 12 de la convention des dispositions de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales, et a condamné la commune de la Guérinière à verser à la société Les Moulins la somme de 428 243, 63 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2015 et capitalisation des intérêts à compter du 9 mars 2016 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette même date. Cette somme correspondait à l'enrichissement sans cause dont avait bénéficié la commune délégante en raison de l'illégalité de l'article 12 de la convention de délégation de service public, qui avait fixé de manière illicite le montant de la redevance due par le délégataire visant à rémunérer les installations et équipements mis à sa disposition par la commune. Par un arrêt n° 18NT01946, 18NT01961 et 19NT00746 du 19 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté les appels de la SAS Les Moulins et de la commune de la Guérinière dirigés contre le jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 mars 2018 et, saisie de conclusions à fin d'exécution de ce même jugement, a enjoint à la commune de la Guérinière de verser à la SAS Les Moulins, dans un délai de quatre mois, la part non acquittée de la somme de 428 243, 63 euros mise à sa charge par le jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 mars 2018. Par la requête n° 19NT04255, la SAS Les Moulins demande à la cour de prescrire les mesures d'exécution de l'arrêt n° 18NT01946, 18NT01961 et 19NT00746 du 19 juillet 2019.

4. Par ailleurs, par un jugement n° 1600180 du 23 mai 2018, le tribunal administratif de Nantes a condamné la commune de la Guérinière à verser à la société Les Moulins la somme de 1 664 645 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 septembre 2015 et capitalisation des intérêts à compter du 9 septembre 2016 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette même date. Cette somme correspondait au montant de la valeur nette comptable de la part non amortie des dépenses d'investissement effectuées par la société Les Moulins sur le camping municipal de la Guérinière et dont le caractère indispensable à l'exécution du service public avait été reconnu. Par un arrêt n° 18NT02517 et 19NT01961 du 19 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a, en premier lieu, rejeté l'appel de la commune de la Guérinière dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 mai 2018, en deuxième lieu, sur appel incident de la SAS Les Moulins, réformé le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 mai 2018 en portant à 2 001 174 euros la somme mise à la charge de la commune, par intégration de la taxe sur la valeur ajoutée à 20 %, et saisie de conclusions à fin d'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes, a enjoint à la commune de la Guérinière de verser à la société Les Moulins, dans un délai de quatre mois, la part non acquittée de cette somme. Par la requête n° 19NT04623, la SAS Les Moulins demande à la cour de prescrire les mesures d'exécution de l'arrêt n° 18NT02517 et 19 NT01961.

5. L'article L. 911-4 du code de justice administrative dispose que : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ". L'article L. 911-8 du code de justice administrative dispose que : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'Etat ". Enfin, l'article R. 921-2 du code de justice administrative dispose que : " La demande d'exécution d'un jugement frappé d'appel, même partiellement, est adressée à la juridiction d'appel. / La demande d'exécution d'un arrêt rendu par une cour administrative d'appel est adressée à celle-ci. / Les conditions de délai prévues à l'article R. 921-1-1 sont applicables à ces demandes. / Lorsque le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée a fait l'objet d'un pourvoi en cassation, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel demeure compétent pour se prononcer sur la demande d'exécution, sous réserve des dispositions de l'article R. 931-5-1 ".

6. Par une décision n° 434353 du 10 juillet 2020, le Conseil d'Etat a annulé tant l'arrêt de la cour n°s 18NT01946, 18NT01961 et 19NT00746 du 19 juillet 2019 que l'arrêt de la cour n°s 18NT02517 et 19 NT01961 du 19 juillet 2019. Dès lors, les requêtes susvisées de la SAS Les Moulins tendant à ce que soient prescrites des mesures d'exécution de ces deux arrêts ont perdu leur objet. Dans ces conditions, les requêtes à fin d'exécution présentées par la SAS Les Moulins ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais du litige :

7. Il n'apparait pas inéquitable, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de chacune des parties les frais d'instance qu'elles ont exposés.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes à fin d'exécution n° 19NT04255 et 19NT04623 présentées pour la SAS Les Moulins sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de la commune de la Guérinière tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Les Moulins et à la commune de la Guérinière.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Jouno, premier conseiller,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique le 17 juillet 2020.

La rapporteure,

M. E...Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au préfet de la Vendée en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT04255 - 19NT04623


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04255
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : SELARL GENESIS AVOCATS ; SELARL GENESIS AVOCATS ; SELARL GENESIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-17;19nt04255 ?
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