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24/09/2020 | FRANCE | N°18NT00377

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 24 septembre 2020, 18NT00377


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (Eurl) Le Clos de l'Archer a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er avril 2011 au 31 juillet 2015.

Par un jugement n° 1604056 du 16 octobre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a déchargé l'Eurl Le Clos de l'Archer des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er avril 20

11 au 31 juillet 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enreg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (Eurl) Le Clos de l'Archer a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er avril 2011 au 31 juillet 2015.

Par un jugement n° 1604056 du 16 octobre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a déchargé l'Eurl Le Clos de l'Archer des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er avril 2011 au 31 juillet 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 30 janvier 2018, 11 avril 2018, 16 octobre 2018 et 11 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de l'Eurl Le Clos de l'Archer la somme de 75 639 euros.

Il soutient que :

- l'application de l'article 268 du code général des impôts, qui prévoit que la cession d'un bien immobilier est soumise à la taxe à valeur ajoutée sur la marge lorsqu'il n'a pas ouvert droit à déduction lors de son acquisition initiale, implique que le bien revendu soit identique au bien dont l'acquisition n'a pas ouvert droit à déduction et qu'il y a lieu de refuser le bénéfice de la marge lorsqu'un bien immobilier est revenu après une transformation telle que ce bien n'est plus le même que celui qui a été initialement acquis, conformément aux intentions du législateur ;

- cette condition d'identité de qualification juridique entre le bien acquis et le bien revendu existe depuis l'origine du texte prévu par l'article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 et a été commenté par l'administration fiscale dès cette date puis repris au point 20 de l'instruction BOI-TVA-IMM-10-20-10 ; l'application du régime sur la marge doit faire l'objet d'une interprétation stricte en tant que régime dérogatoire ;

- les divisions parcellaires ayant été effectuées après l'acquisition initiale, par l'Eurl Le Clos de l'Archer, d'immeubles composés de maison d'habitation et de terrain d'assiette, les terrains à bâtir dont ils sont issus ne relèvent pas du régime de taxation sur la marge prévu à l'article 268 du code général des impôts mais d'une taxation sur le prix de vente total en application des dispositions des articles 266 et 267 du code général des impôts.

Par des mémoires, enregistrés les 2 mars 2018 et 19 juin 2019, l'Eurl Le Clos de l'Archer, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

- les deux dernières opérations soumises à rectification ont été précédées d'une division cadastrale et ne peuvent faire l'objet d'une rectification en application de l'interprétation donnée par le ministre dans la réponse à la question n° 91143 au député M. B... A... du 30 août 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue de la vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2011 au 31 juillet 2015 en matière de taxe sur la valeur ajoutée de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité (Eurl) Le Clos de l'Archer, qui exerce une activité de marchand de biens, l'administration fiscale a remis en cause l'application du régime de taxation sur la marge dont l'entreprise avait fait application sur la vente de terrains à bâtir au profit du régime de taxation sur le prix de vente total. Au terme de la procédure contradictoire, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en résultant ont été mis en recouvrement le 18 avril 2016 pour un montant total, en droits et intérêts de retard, de 75 639 euros. Après le rejet, par décision du 30 septembre 2016, de sa réclamation préalable, l'Eurl Le Clos de l'Archer a sollicité auprès du tribunal administratif d'Orléans la décharge de cette taxation. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du 16 octobre 2017 par lequel ce tribunal a fait droit à la demande de cette société.

2. Le I de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable, issue de l'article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, prévoit que les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles, lesquelles comprennent les livraisons à titre onéreux de terrains à bâtir, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En vertu du 2 du b de l'article 266 du même code, l'assiette de la taxe est en principe constituée par le prix de cession.

3. L'article 392 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dispose toutefois que : " Les Etats membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat ". L'article 268 du code général des impôts, pris pour la transposition de ces dispositions, prévoit, dans sa rédaction également issue de l'article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, que : " S'agissant de la livraison d'un terrain à bâtir (...), si l'acquisition par le cédant n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d'imposition est constituée par la différence entre : / 1° D'une part, le prix exprimé et les charges qui s'y ajoutent ; / 2° D'autre part, selon le cas : / - soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du terrain (...); / - soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu'il a effectués. ".

4. Il résulte de ces dernières dispositions, lues à la lumière de celles de la directive dont elles ont pour objet d'assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elles prévoient s'appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s'appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d'un terrain bâti.

5. Propriétaire de quatre lots immobiliers comportant, chacun, une maison d'habitation et son terrain d'assiette, l'Eurl Le Clos de l'Archer a revendu, après divisions parcellaires postérieures aux actes d'acquisition, cinq terrains à bâtir les 18 janvier 2012, 30 mai 2012, 4 novembre 2013, 5 mai 2014 et 21 novembre 2014. Elle a placé ces livraisons sous le régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge. Toutefois, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, le régime de taxation sur la marge ne peut s'appliquer à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère de terrains bâtis. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause l'application de ce régime au bénéfice d'une taxation sur le prix de vente total des terrains.

6. L'Eurl Le Clos de l'Archer ne peut, par ailleurs, pas se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales de la réponse ministérielle n° 91143 au député O. A... du 30 août 2016 qui est postérieure tant au fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée qu'à la mise en recouvrement de l'impôt.

7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à l'Eurl Le Clos de l'Archer pour la période du 1er avril 2011 au 31 juillet 2015.

8. L'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'entreprise relatives aux frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 16 octobre 2017 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.

Article 2 : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée établis pour la période du 1er avril 2011 au 31 juillet 2015 sont remis à la charge de l'Eurl Le Clos de l'Archer.

Article 3 : Les conclusions de l'Eurl le Clos de l'Archer sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des comptes publics et à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Le Clos de l'Archer.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2020.

Le rapporteur,

F. C...Le président,

F. BatailleLa greffière,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 18NT003772


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00377
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : SCP STOVEN PINCZON DU SEL STOVEN BLANCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-09-24;18nt00377 ?
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