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13/10/2020 | FRANCE | N°18NT04206

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 13 octobre 2020, 18NT04206


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans l'annulation de la décision du 23 septembre 2015 par laquelle le ministre de la défense l'informait de l'existence d'un trop-perçu de solde de 34 000,46 euros et de l'intervention d'un titre de recette pour le recouvrement de cette somme, de la décision implicite de rejet en date du 18 mars 2016 par laquelle la commission des recours des militaires a rejeté son recours gracieux formé contre cette décision, d'enjoindre au ministre des armées de lui

verser la somme de 6 256,34 euros et de condamner l'Etat au versement d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans l'annulation de la décision du 23 septembre 2015 par laquelle le ministre de la défense l'informait de l'existence d'un trop-perçu de solde de 34 000,46 euros et de l'intervention d'un titre de recette pour le recouvrement de cette somme, de la décision implicite de rejet en date du 18 mars 2016 par laquelle la commission des recours des militaires a rejeté son recours gracieux formé contre cette décision, d'enjoindre au ministre des armées de lui verser la somme de 6 256,34 euros et de condamner l'Etat au versement d'une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice.

Par un jugement n° 1601690 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 novembre 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 23 septembre 2015 ainsi que la décision implicite par laquelle la commission des recours des militaires a rejeté le recours gracieux dont il l'avait saisie ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées de lui verser la somme de 6 256,34 euros dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 10 000 euros en application en réparation du préjudice subi du fait du comportement de l'Etat ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la cour est compétente pour statuer sur ce litige ;

- sa requête d'appel est recevable ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- il a adressé à l'administration une demande préalable d'indemnisation par lettre du 4 septembre 2018 ;

- la décision du 23 septembre 2015 est insuffisamment motivée ;

- la répétition des sommes mises à sa charge n'était plus possible compte tenu de la mise en oeuvre de la prescription biennale instituée par l'article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dès lors que les trop versés réclamés correspondaient à des sommes payées entre le 30 septembre 2011 et le 31 juillet 2013 ;

- l'indu de rémunération qui lui a été versé est entièrement imputable à une faute de l'administration due à l'utilisation du logiciel Louvois ;

- il est fondé à demander le versement de la somme de 6256,34 euros comme l'a reconnu le ministre des armées ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la responsabilité pour faute de l'Etat est engagée ;

- son préjudice peut être évalué à la somme de 10 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 février 2020, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable faute pour M. B... de développer des moyens nouveaux ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées le 9 juin 2020, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré du défaut d'intérêt pour agir de M. B... contre la décision du ministre de la défense du 23 septembre 2015 dès lors que cette décision préparatoire ne lui ferait pas grief et, par voie de conséquence, du défaut d'intérêt pour agir de M. B... contre la décision implicite de rejet de la commission des recours des militaires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°2000-321 du 12 avri1 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a servi dans l'armée française comme caporal jusqu'au 1er août 2013, date de sa radiation des contrôles de l'armée. Par une lettre du 23 septembre 2015, le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde du ministère de la défense l'a informé qu'il était redevable envers l'Etat d'une somme de 34 000,49 euros en raison de trop-versés au titre de la solde et des indemnités militaires pour la période du 30 septembre 2011 au 31 juillet 2013. Il était précisé dans ce courrier que la direction des finances publiques territorialement compétente émettrait un titre de perception pour le reversement de ce trop-perçu. M. B... a saisi la commission des recours des militaires d'une demande de retrait de cette décision du 23 septembre 2015, demande qui a été implicitement rejetée. Le 16 mai 2017, la direction départementale des finances publiques d'Eure-et-Loir a effectivement émis à l'encontre de M. B... un titre de perception d'un montant de 34 000 euros au motif d'une restitution d'un indu de solde. M. B... relève appel du jugement du 2 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, qu'il avait saisi, d'une part, d'une demande d'annulation de la décision mentionnée plus haut du 23 septembre 2015 ainsi que de la décision implicite de rejet de la commission de recours des militaires et, d'autre part, d'une demande de condamnation de l'Etat à lui verser les sommes respectives de 10 000 euros et de 6256, 34 euros, a rejeté ces demandes.

Sur la recevabilité des conclusions de première instance tendant à l'annulation de la décision du 23 septembre 2015 et de la décision implicite de rejet de la commission des recours des militaires :

2. La lettre par laquelle l'administration informe un militaire qu'il doit rembourser une somme indument payée et qu'en l'absence de paiement spontané de sa part, un titre de perception lui sera notifié, est une mesure préparatoire de ce titre, qui n'est pas susceptible de recours.

3. En l'espèce, et comme indiqué au point 1, M. B... a été destinataire, le 23 septembre 2015, d'un courrier de l'administration militaire l'informant qu'il était redevable, après prise en compte des trop-perçus et moins-perçus de solde et d'indemnité au cours de la période du 30 septembre 2011 au 30 juillet 2013, d'une somme d'un montant de 34 000,49 euros. Ce courrier lui précisait également qu'après transmission de son dossier à la direction des finances publiques territorialement compétente, un titre de perception serait émis à son encontre afin qu'il soit procédé au recouvrement de ces indus de rémunération. Par la suite, et comme indiqué au point 1, un titre de recette a effectivement été émis le 16 mai 2017 pour un montant de 34 000 euros.

4. Par voie de conséquence, la lettre du 23 septembre 2015 mentionnée plus haut a le caractère d'une mesure préparatoire du titre de recette émis le 16 mai 2017 et ne peut donc faire l'objet ni d'un recours contentieux ni d'un recours administratif préalable. Dès lors, les conclusions de M. B... présentées devant les premiers juges et dirigées tant contre cette lettre du 23 septembre 2015 que contre la décision implicite par laquelle la commission des recours des militaires a rejeté le recours préalable dont l'avait saisi le requérant étaient irrecevables et devaient, en tout état de cause, être rejetées.

Sur la régularité du jugement en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les conclusions indemnitaires présentées par M. B... :

5. M. B... a demandé en première instance la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes de 10 000 euros à titre de préjudice en raison des fautes commises par l'administration en ce qui concerne le traitement de ses rémunérations et de 6 256,34 euros à raison des moins-perçus de solde et d'indemnité constatés pour la période du 30 septembre 2011 au 30 juillet 2013. Ces demandes ont été rejetées par les premiers juges comme irrecevables faute d'avoir fait l'objet d'une demande préalable après que ce moyen a été expressément invoqué par le ministre.

6. Aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date à laquelle il n'avait présenté aucune demande en ce sens devant l'administration lorsqu'il a formé, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, et ce quelles que soient les conclusions du mémoire en défense de l'administration. En revanche, une telle fin de non-recevoir peut être opposée lorsque, à la date à laquelle le juge statue, le requérant s'est borné à l'informer qu'il avait saisi l'administration d'une demande mais qu'aucune décision de l'administration, ni explicite ni implicite, n'est encore née.

7. En l'occurrence, s'il résulte de l'instruction, notamment de la lecture des pièces du dossier, que M. B... a, par lettre notifiée le 8 septembre 2018, demandé au ministre de la défense de procéder au versement de la seule somme de 6 256, 34 euros, aucune décision explicite de rejet n'avait été prise par le ministre et aucune décision implicite de rejet n'était née avant que le tribunal administratif d'Orléans ne statue le 2 octobre 2018. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a rejeté comme irrecevables, faute de demande préalable, ses conclusions à fin d'indemnisation.

8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, d'une part, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de M. B... tendant au prononcé d'une injonction assortie d'une astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais d'instance :

10. Il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. B... de la somme demandée par ce dernier en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- Mme D..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.

Le rapporteur,

F. D...

Le président,

O. COIFFET

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT04206


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04206
Date de la décision : 13/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SELARL NORMANDIE-JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-10-13;18nt04206 ?
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