La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/05/2021 | FRANCE | N°19NT02327

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 17 mai 2021, 19NT02327


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Etablissements G... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la restitution d'une somme de 18 356 euros au titre du crédit impôt recherche de l'année 2012, assortie des intérêts moratoires en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1608908 du 1er mars 2019, le tribunal administratif de Nantes a accordé la restitution à la SAS Etablissements G... d'un montant d'impôt sur les sociétés de 10 42

4 euros au titre de l'année 2012 (article 1er), a mis à la charge de l'Etat une somm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Etablissements G... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la restitution d'une somme de 18 356 euros au titre du crédit impôt recherche de l'année 2012, assortie des intérêts moratoires en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1608908 du 1er mars 2019, le tribunal administratif de Nantes a accordé la restitution à la SAS Etablissements G... d'un montant d'impôt sur les sociétés de 10 424 euros au titre de l'année 2012 (article 1er), a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de la demande (article 3).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 juin 2019 et 28 décembre 2020, ainsi qu'un mémoire enregistré le 25 janvier 2021 qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de la SAS Etablissements G... la somme de 4 170 euros, assortie des intérêts légaux prévus à l'article 1907 du code civil, correspondant au dégrèvement prononcé en exécution de ce jugement ;

3°) de rejeter les conclusions d'appel incident de la SAS Etablissements G....

Il soutient que :

- le tribunal a confondu le montant des dépenses de personnel à retenir comme base de calcul du crédit d'impôt recherche et le montant du crédit impôt recherche à restituer ;

- les moyens soulevés par la SAS Etablissements G... ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, et si la cour estimait que les dépenses revendiquées peuvent être prises en compte dans la base du crédit impôt recherche 2012, il entend se prévaloir de son droit de compensation prévu à l'article L. 203 du livre des procédures fiscales, dès lors que la restitution décidée par les premiers juges devait être d'un montant de 6 254 euros et non de 10 424 euros.

Par des mémoires, enregistrés les 15 octobre 2020 et 11 janvier 2021, la SAS Etablissements G..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) par la voie de l'appel incident, d'annuler l'article 3 de ce jugement, en tant qu'il rejette sa demande portant sur les dépenses de personnel relatives à MM. B..., F... et A... ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés au titre du crédit d'impôt recherche 2012, soit une somme de 10 976 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas de commentaire à faire sur la requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance ;

- le jugement est bien fondé s'agissant des dépenses de personnel relatives à Mme E... mais le tribunal aurait dû admettre les dépenses de personnel relatives à MM. B..., F... et A..., d'un montant total de 18 294 euros, dans l'assiette du crédit impôt recherche dont la société pouvait bénéficier, soit un montant de crédit impôt recherche admissible complémentaire de 10 976 euros, dès lors qu'elle pouvait se prévaloir de l'instruction administrative BOI-BIC-RICI-10-10-20-20 du 7 décembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique,

- et les observations de Me D..., représentant la SAS Etablissements G....

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Etablissements G..., société holding ayant constitué un groupe fiscalement intégré de sociétés spécialisées dans la chocolaterie et la minoterie, a demandé, en sa qualité de société mère du groupe, la restitution d'une créance de crédit d'impôt en faveur de la recherche d'un montant de 57 262 euros au titre de l'exercice clos en 2012. L'administration fiscale, qui a remis en cause l'éligibilité d'une partie des dépenses de personnel déclarées, n'a admis que partiellement sa demande à hauteur de 39 206 euros. La SAS Etablissements G... a demandé au tribunal administratif de Nantes la restitution du solde du crédit d'impôt recherche auquel elle estime avoir droit au titre de l'année 2012, soit la somme de 18 356 euros. Par un jugement du 1er mars 2019, le tribunal administratif de Nantes a accordé la restitution à la SAS Etablissements G... d'un montant d'impôt sur les sociétés de 10 424 euros au titre de l'année 2012 (article 1er), a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de la demande (article 3). En exécution de ce jugement, l'administration, par un avis du 16 mai 2019, a prononcé un dégrèvement de la somme de 10 424 euros, assortie des intérêts légaux. D'une part, le ministre de l'économie, des finances et de la relance fait appel de l'article 1er de ce jugement et, d'autre part, la SAS Etablissements G..., par la voie de l'appel incident, demande à la cour d'annuler l'article 3 de ce jugement, en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande portant sur les dépenses de personnel relatives à MM. B..., F... et A....

Sur les conclusions d'appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance :

2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 decies, 44 undecies, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 quindecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. Le taux du crédit d'impôt est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d'euros et de 5 % pour la fraction des dépenses de recherche supérieure à ce montant. / Le taux de 30 % mentionné au premier alinéa est porté à 40 % et 35 % au titre respectivement de la première et de la deuxième année qui suivent l'expiration d'une période de cinq années consécutives au titre desquelles l'entreprise n'a pas bénéficié du crédit d'impôt. (...) II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. Lorsque ces dépenses se rapportent à des personnes titulaires d'un doctorat ou d'un diplôme équivalent, elles sont prises en compte pour le double de leur montant pendant les vingt-quatre premiers mois suivant leur premier recrutement à condition que le contrat de travail de ces personnes soit à durée indéterminée et que l'effectif salarié de l'entreprise ne soit pas inférieur à celui de l'année précédente ; (...) c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; ces dépenses sont fixées forfaitairement à la somme de 75 % des dotations aux amortissements mentionnées au a et de 50 % des dépenses de personnel mentionnées à la première phrase du b et au b bis (...) ".

3. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance ne conteste pas que la rémunération allouée à M. G..., dirigeant de la société, à raison de ses activités de recherche, était totalement éligible au crédit d'impôt recherche. Il conteste l'article 1er de ce jugement, accordant la restitution à la SAS Etablissements G... d'un montant d'impôt sur les sociétés de 10 424 euros au titre de l'année 2012. Comme le soutient le ministre, il résulte de l'instruction que ce montant de 10 424 euros correspond non pas au montant du crédit d'impôt recherche mais au montant des dépenses de personnel relatives à M. G... et servant de base au calcul du crédit d'impôt recherche. Ce crédit d'impôt recherche, qui correspond à 40 % des dépenses de personnel et des dépenses de fonctionnement, s'élevait à la somme de 6 254 euros. Par suite, le ministre est fondé à soutenir qu'il ne devait être accordé la restitution à la SAS Etablissements G... d'un montant d'impôt sur les sociétés que de 6 254 euros au titre de l'exercice clos en 2012 et que le jugement attaqué du tribunal administratif de Nantes doit être réformé dans cette mesure.

Sur les conclusions d'appel incident de la SAS Etablissements G... :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. Aux termes de l'article 49 septies G de l'annexe III au code général des impôts : " Le personnel de recherche comprend : 1. Les chercheurs qui sont les scientifiques ou les ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. Sont assimilés aux ingénieurs les salariés qui, sans posséder un diplôme, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise. 2. Les techniciens, qui sont les personnels travaillant en étroite collaboration avec les chercheurs, pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche et de développement expérimental. Notamment : Ils préparent les substances, les matériaux et les appareils pour la réalisation d'expériences ; Ils prêtent leur concours aux chercheurs pendant le déroulement des expériences ou les effectuent sous le contrôle de ceux-ci ; Ils ont la charge de l'entretien et du fonctionnement des appareils et des équipements nécessaires à la recherche et au développement expérimental. Dans le cas des entreprises qui ne disposent pas d'un département de recherche, les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt sont exclusivement les rémunérations versées aux chercheurs et techniciens à l'occasion d'opérations de recherche. ".

5. La SAS Etablissements G... soutient que les salariés en cause ont atteint, au sein de son groupe et de par leurs expériences professionnelles, un niveau " Bac + 2 ". Dès lors, contrairement à ce qu'elle allègue, ils ne sauraient être regardés comme assimilés à des ingénieurs mais à des techniciens. La SAS Etablissements G... produit en appel des feuilles horaires pour l'année 2012, indiquant, dans une rubrique intitulée " Vérif ", pour M. A..., " RetD machine Rhéon ", machine qui permet l'amélioration des technologies de fabrication et de l'homogénéité des produits de boulangerie. Cependant, ces mentions sont imprécises, ne permettant pas de savoir en quoi a constitué la vérification. En outre, ces feuilles n'ont été signées ni par le responsable ni par le salarié. Il en est de même des feuilles horaires de M. B..., aux caractéristiques identiques, et des feuilles horaires indiquant que M. F... est intervenu sur la machine " One Shot ", laquelle permet l'amélioration de la fabrication des chocolats. Un compte-rendu d'un " comité chocolat " mentionne les initiales " TP " ; à supposer même qu'elles correspondent à Thomas A..., alors que l'entreprise " Maison G... " a également comme employé Thomas G..., il indique que sa participation se borne à " voir pour commander des chariots s'il en manque ". Deux autres documents, portant les intitulés " Coeur Noisette " et " Brésilien ", mentionnent, de manière manuscrite et en en-tête, alors que le reste des documents est dactylographié, le prénom " Willy ", ce qui n'est pas suffisamment probant. Dès lors, il ne résulte pas de l'instruction que MM. A..., B... et F... puissent être regardés comme travaillant en étroite collaboration avec des chercheurs, pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche et de développement expérimental au sens de l'article 49 septies G de l'annexe III au code général des impôts.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

6. La SAS Etablissements G... n'est pas fondée à se prévaloir de l'instruction administrative référencée au BOI-BIC-RICI-10-10-20-20 du 7 décembre 2016 dès lors qu'elle a été publiée postérieurement à l'année en litige.

7. Il résulte de tout ce qui précède que d'une part, le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a accordé la décharge à la SAS Etablissements G... de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à hauteur de 10 424 euros au titre de l'exercice clos en 2012, alors que ce montant devait être fixé à 6 254 euros, et, d'autre part, la SAS Etablissements G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté le surplus de sa demande portant sur les dépenses de personnel relatives à MM. B..., F... et A.... Par voie de conséquence, les conclusions de la SAS Etablissements G... tendant au paiement des frais liés au litige doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2012, dont le dégrèvement, d'un montant de 4 170 euros, a été assorti des intérêts au taux légal, est remise à la charge de la SAS Etablissements G....

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 1er mars 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident de la SAS Etablissements G... et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la société par actions simplifiée Etablissements G....

Délibéré après l'audience du 15 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2021.

La rapporteure,

P. C...Le président,

F. Bataille

La greffière,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

2

N° 19NT02327

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02327
Date de la décision : 17/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : SELARL JURICA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-05-17;19nt02327 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award