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08/07/2021 | FRANCE | N°19NT03100

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 08 juillet 2021, 19NT03100


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1601693 du 26 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 juillet 2019 et 4 novembre 2019, M. et Mme D..., représentés par Me C

..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge.

Ils sou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2009.

Par un jugement n° 1601693 du 26 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 juillet 2019 et 4 novembre 2019, M. et Mme D..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge.

Ils soutiennent que :

- M. D... exerçait ses missions sous le contrôle et dans le cadre de l'organisation mise en place par la société Egis Bceom International et était assimilé au personnel salarié de cette société ; le fait qu'il disposait d'une certaine autonomie ne signifie pas qu'il agissait en tant qu'expert indépendant ; les revenus perçus par M. D... ne devaient ainsi pas être qualifiés de bénéfices non commerciaux mais de traitements et salaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2019, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés et sollicite, à titre subsidiaire, une substitution de base légale afin que les revenus perçus par M. D... soient imposés dans la catégorie des traitements et salaires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de la comptabilité de la société Egis Bceom International et d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. et Mme D..., l'administration a adressé à ces derniers, le 21 novembre 2012, une proposition de rectification les informant de son intention de réintégrer à leur revenu imposable de l'année 2009, sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts et dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, les sommes perçues par la société Expat Management, société de droit mauricien, de la société Egis Bceom International, en exécution de contrats de prestations d'assistance technique dans le cadre desquels M. D... avait été mis à disposition de la société Egis Bceom International. Après mise en recouvrement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu résultant de cette rectification, M. et Mme D... ont formé une réclamation contentieuse. Le service a partiellement admis cette réclamation en procédant au dégrèvement des intérêts de retard et en substituant à la majoration de 40 % initialement appliquée, une majoration de 10 %. M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des impositions demeurant à leur charge. Par un jugement n° 1601693 du 26 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. M. et Mme D... relèvent appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 155 A du code général des impôts : " I. Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : / -soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; / - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; / - soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A. / II. Les règles prévues au I ci-dessus sont également applicables aux personnes domiciliées hors de France pour les services rendus en France. / III. La personne qui perçoit la rémunération des services est solidairement responsable, à hauteur de cette rémunération, des impositions dues par la personne qui les rend ". Les prestations dont la rémunération est ainsi susceptible d'être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.

3. Au cours de l'année 2009, M. D..., domicilié fiscalement en France, a signé avec la société de droit mauricien Expat Management trois " employment contracts " permettant sa mise à disposition de la société de droit français Egis Bceom International afin, s'agissant des deux premiers contrats, de participer, en qualité d'expert, à une mission d'audit confiée à la société Egis Bceom International par le " State Audit Bureau " de l'émirat du Qatar ayant pour objet le nouvel aéroport international de Doha, et, s'agissant de la dernière période, d'encadrer une mission d'assistance technique à des projets locaux d'infrastructures en République de Macédoine, confiée à Egis Bceom International sous l'égide de la délégation de la Commission européenne à Skopje. Les rémunérations perçues par M. D... au titre de ces missions lui ont été versées par la société Expat Management, qui en a refacturé le coût, majoré d'une commission, à la société Egis Bceom International.

4. Pour justifier l'application des dispositions de l'article 155 A du code général des impôts, le service s'est fondé, d'une part, sur le fait que les sommes perçues par la société Expat Management correspondaient à la rémunération d'un service essentiellement rendu par M. D... et que la facturation par cette société ne trouvait aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière et, d'autre part, sur le fait que la société Expat Management était domiciliée dans un Etat à fiscalité privilégiée. M. et Mme D... ne contestent plus, en appel, l'existence d'un portage salarial par la société Expat management justifiant qu'il soit fait application de l'article 155 A du code général des impôts. Ils font cependant valoir que les revenus perçus ne relevaient pas de la catégorie des bénéfices non commerciaux.

5. Aux termes de l'article 79 du code général des impôts : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu. ". L'article 92 du même code prévoit que : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. ".

6. S'agissant de la mission réalisée au Qatar, il résulte de l'instruction que M. D... a été intégré, en qualité d'auditeur, à l'équipe de la société Egis Bceom International présente sur place. Cette équipe était encadrée par un coordinateur de projet et un " team leader ". Il a par ailleurs rédigé plusieurs rapports avec d'autres membres de l'équipe de la société Egis Bceom International. S'agissant de la mission réalisée en République de Macédoine, il résulte de l'instruction que M. D... a été recruté en qualité de chef de projet (" team leader ") pour le compte de la société Egis Bceom International. Le contrat de chantier conclu entre M. D... et cette société désigne d'ailleurs M. D... comme " le salarié ". Ainsi, au regard de l'ensemble des éléments produits, et en raison de l'objet même du système de portage salarial, il y a lieu de considérer que M. D... a été placé, au cours de l'année 2009, dans un état de subordination vis-à-vis de cette société. M. et Mme D... sont, par suite, fondés à soutenir que les revenus perçus par M. D... ne pouvaient être imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

7. L'administration est néanmoins en droit, à tout moment de la procédure, en vue de justifier devant le juge de l'impôt du bien-fondé des impositions contestées, de leur donner une nouvelle base légale, sous réserve que cette substitution ne prive pas le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi. En appel, le ministre demande, par voie de substitution de base légale, que les revenus perçus par M. D... au titre de l'année 2009 soient imposés dans la catégorie des traitements et salaires, sur le fondement de l'article 79 du code général des impôts. Dès lors que ce changement de base légale ne prive M. et Mme D... d'aucune des garanties de procédure auxquelles ils pouvaient prétendre, il y a lieu de maintenir l'imposition de ces revenus selon les modalités d'imposition des traitements et salaires.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Par conséquent, leur requête doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2021.

Le rapporteur,

H. A...Le président,

F. Bataille

La greffière,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 19NT031002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03100
Date de la décision : 08/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Harold BRASNU
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : CABINET COTTET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-08;19nt03100 ?
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