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02/12/2022 | FRANCE | N°22NT00666

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 02 décembre 2022, 22NT00666


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Atemis a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler le marché conclu par la commune de Saint-Julien-de-Concelles avec la société Axians Communication et Système Nantes ayant pour objet le remplacement de l'autocommutateur et des terminaux pour la mise en place d'une architecture Telecom IP Multisite et d'enjoindre à la commune, à titre principal, de lui attribuer le marché, à titre subsidiaire, de lui verser la somme de 1 646 euros à titre d'indemnisat

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Atemis a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler le marché conclu par la commune de Saint-Julien-de-Concelles avec la société Axians Communication et Système Nantes ayant pour objet le remplacement de l'autocommutateur et des terminaux pour la mise en place d'une architecture Telecom IP Multisite et d'enjoindre à la commune, à titre principal, de lui attribuer le marché, à titre subsidiaire, de lui verser la somme de 1 646 euros à titre d'indemnisation de ses frais de présentation de l'offre et la somme de 8 295,57 euros en réparation de la perte de marge nette.

Par un jugement n° 1912452 du 4 janvier 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires, enregistrés le 4 mars 2022, le 3 juin 2022, le 1er juillet 2022 et le 25 juillet 2022, la SAS Atemis, représentée par Me Breton, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 janvier 2022 ;

2°) d'annuler le marché conclu par la commune de Saint-Julien-de-Concelles avec la société Axians Communication et Système Nantes ayant pour objet le remplacement de l'autocommutateur et des terminaux pour la mise en place d'une architecture Telecom IP Multisite ;

3°) d'enjoindre à la commune, à titre principal, de lui attribuer le marché, à titre subsidiaire, de lui verser la somme de 1 646 euros à titre d'indemnisation de ses frais de présentation de l'offre et la somme de 8 295.57 euros en réparation de la perte de marge nette ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Julien-de-Concelles une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'attribution du marché est irrégulière : il revenait au maire de la commune d'assurer la passation du marché public, comprenant la procédure de consultation, le choix de l'attribution du marché public et la signature de ce marché par délégation de l'assemblée délibérante, et non à la commission d'appel d'offres dont seul l'avis peut être requis en matière de procédure adaptée ;

- le marché a été attribué en vertu d'un rapport d'analyse des offres établi par une personne qui n'avait pas compétence pour le faire et qui n'offrait pas les garanties d'impartialité et de neutralité requise ;

- le rapport d'analyse des offres n'est ni motivé ni explicité ; il a été établi à partir de sous-critères et pondérations qui n'avaient pas été rendus publics dans le règlement de consultation et les notations y figurant ne sont pas explicites, en méconnaissance du principe de publicité et de transparence de la commande publique ;

- le critère sur la valeur technique a fait l'objet d'une analyse erronée par la commune quant à la fiabilité du système proposé dès lors que la SAS Atemis a proposé une solution 3C, déployée dans de nombreuses grandes entreprises, et non Open Source ; le rapport d'analyse des offres est insuffisamment motivé quant à la mauvaise notation de la SAS Atemis sur ce critère alors que le règlement de consultation n'indique pas que le candidat à l'appel d'offres doit justifier de la fiabilité de son système et que la solution proposée doit avoir été déjà expérimentée ;

- le rapport d'analyse est insuffisamment motivé s'agissant du critère sur le conseil et la maintenance et repose sur des conditions non énoncées dans le cahier des charges ;

- la SAS Atemis a présenté la meilleure offre s'agissant du critère du prix de la prestation et il n'est pas justifié de la différence limitée de note obtenue avec ses concurrentes sur ce point ;

- le courrier de la mairie de Saint-Julien-de-Concelles du 27 août 2019 notifiant le refus de lui attribuer le marché est insuffisamment motivé ;

- la pondération des critères d'attribution de l'offre est irrégulière en ce que la note technique est disproportionnée par rapport au critère financier de sorte que les offres ne pouvaient être différenciées de manière significative qu'au regard de la valeur technique.

Par trois mémoires en défense, enregistrés le 3 mai 2022, le 20 juin 2022 et le 7 juillet 2022, la commune de Saint-Julien-de-Concelles, représentée par Me Raimbault, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SAS Atemis une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- l'offre de la SAS Atemis est entachée de fraude en ce qu'elle a été destinataire d'informations confidentielles susceptibles de vicier la procédure en cours de passation de marché ;

- la demande indemnitaire de la SAS Atemis est irrecevable en l'absence de liaison du contentieux ;

- les moyens soulevés par la SAS Atemis ne sont pas fondés.

Par une lettre, enregistrée le 13 juillet 2022, la société Axians Communication et Système Nantes informe la cour qu'elle adhère aux moyens développés par la commune en défense et conclut au rejet de la requête.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,

- et les observations de Me De Bouglon, substituant Me Breton, représentant la SAS Atemis.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Saint-Julien-de-Concelles a lancé en 2019 un appel d'offres selon une procédure adaptée en vue du remplacement de l'autocommutateur et des terminaux de ses services pour la mise en place d'une architecture Telecom IP Multisite. La SAS Atemis, qui était alors le partenaire informatique de la commune, a déposé son offre avant la date limite fixée par la commune et a participé à la phase de négociation diligentée par celle-ci. Elle a cependant été classée 3ème sur 3 candidats. Le marché public a été attribué à la société Axians Communication et Système Nantes pour un montant de 54 472,24 euros HT en offre de base et 2 236,49 euros HT par an de maintenance. La SAS Atemis a demandé par courrier du 29 août 2019 à la commune de Saint-Julien-de-Concelles les raisons du rejet de son offre. Par un courrier du 2 septembre 2019, la commune a confirmé sa décision d'attribution du marché et le classement adopté. La SAS Atemis relève appel du jugement du 4 janvier 2022 du tribunal administratif de Nantes qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation du marché conclu par la commune de Saint-Julien-de-Concelles avec la société Axians Communication et Système Nantes et à ce qu'il soit enjoint à la commune, à titre principal, de lui attribuer le marché, à titre subsidiaire, de lui verser la somme de 1 646 euros à titre d'indemnisation de ses frais de présentation de l'offre et la somme de 8 295,57 euros en réparation de la perte de marge nette.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La SAS Atemis soutient que le jugement attaqué est entaché d'une omission d'examen du moyen tiré de la méconnaissance du principe de publicité et de transparence de la commande publique, en particulier s'agissant de l'analyse du critère sur la valeur technique. Toutefois, les premiers juges ont répondu à ce moyen au point 9 de leur jugement. L'irrégularité alléguée doit donc être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini. Le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini. Les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office.

4. En premier lieu, si l'article 9 du règlement de consultation prévoit que la commission d'appel d'offre retiendra l'offre économiquement la plus avantageuse, il résulte de l'instruction que la décision d'attribuer le marché à la société Axians Communication et Système Nantes a été prise par le maire le 27 août 2019, habilité pour ce faire en vertu d'une délibération du conseil municipal du 22 avril 2014 régulièrement publiée. Aucune disposition législative ou règlementaire ne l'empêchait de se fonder sur le rapport d'analyse des offres de cette commission proposé pour avis, contrairement à ce que soutient la SAS Atemis. Par suite, les moyens tirés de ce que les pouvoirs de négociation des offres, d'évaluation des prestations et de choix de l'attributaire ont été abandonnés par le maire au profit de la commission de la commune et de l'incompétence dont serait entachée la décision d'attribution du marché doivent être écartés.

5. En deuxième lieu, les principes de liberté d'accès à la commande publique et d'égalité de traitement des candidats ainsi que la règle de transparence des procédures qui en découle, n'imposent pas aux pouvoirs adjudicateurs d'indiquer aux candidats évincés les motifs du rejet de leurs offres. La SAS Atemis ne peut ainsi utilement soutenir que le courrier de la mairie de Saint-Julien-de-Concelles du 27 août 2019 lui notifiant le refus de lui attribuer le marché est insuffisamment motivé à l'appui de son recours tendant à la contestation de la validité du contrat passé entre la commune de Saint-Julien-de-Concelles et la société Axians Communication et Système Nantes alors, en tout état de cause, qu'il lui appartenait de demander les motifs de ce refus conformément aux dispositions de l'article R. 2181-2 du code de la commande publique.

6. En troisième lieu, au nombre des principes généraux du droit qui s'imposent au pouvoir adjudicateur comme à toute autorité administrative figure le principe d'impartialité, qui implique l'absence de situation de conflit d'intérêts au cours de la procédure de sélection du titulaire du contrat. Aux termes de l'article L. 2141-10 du code de la commande publique : " Constitue une situation de conflit d'intérêts toute situation dans laquelle une personne qui participe au déroulement de la procédure de passation du marché public ou est susceptible d'en influencer l'issue a, directement ou indirectement, un intérêt financier, économique ou tout autre intérêt personnel qui pourrait compromettre son impartialité ou son indépendance dans le cadre de la procédure de passation du marché public ". L'existence d'une situation de conflit d'intérêts au cours de la procédure d'attribution du marché est constitutive d'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence susceptible d'entacher la validité du contrat.

7. Quand bien même le responsable informatique de la commune, rédacteur et signataire du rapport d'analyse des offres en vue de la passation du marché de la commune de Saint-Julien-de-Concelles, s'est vu refuser un emploi en janvier 2017 par la SAS Atemis, il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait manifesté une animosité personnelle à l'égard de la requérante et aucun élément ne permet de douter de sa capacité à analyser les offres dans le respect des garanties d'impartialité et de neutralité requises, à défaut de tout lien avec les sociétés candidates, contrairement à ce que soutient l'intéressée.

8. En quatrième lieu, pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire, dès l'engagement de la procédure d'attribution du marché, dans l'avis d'appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats. Dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d'autres critères que celui du prix, il doit porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation de ces critères. Il doit également porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation des sous-critères dès lors que, eu égard à leur nature et à l'importance de cette pondération ou hiérarchisation, ils sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats ainsi que sur leur sélection et doivent en conséquence être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection. Il n'est, en revanche, pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres.

9. Le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu'il a définis et rendus publics. Il peut ainsi déterminer tant les éléments d'appréciation pris en compte pour l'élaboration de la note des critères que les modalités de détermination de cette note par combinaison de ces éléments d'appréciation. Une méthode de notation est toutefois entachée d'irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, les éléments d'appréciation pris en compte pour noter les critères de sélection des offres sont dépourvus de tout lien avec les critères dont ils permettent l'évaluation ou si les modalités de détermination de la note des critères de sélection par combinaison de ces éléments sont, par elles-mêmes, de nature à priver de leur portée ces critères ou à neutraliser leur pondération et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l'ensemble des critères pondérés, à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Il en va ainsi alors même que le pouvoir adjudicateur, qui n'y est pas tenu, aurait rendu publique, dans l'avis d'appel à concurrence ou les documents de la consultation, une telle méthode de notation.

10. Le règlement de consultation du marché énonçait, à son article 9, que les offres seraient évaluées à partir de trois critères constitués de la " valeur technique de l'offre " pondérée à hauteur de 12 points, de " la qualité du conseil et de la maintenance " pondérée à hauteur de 4 points et du " prix de la prestation " pondéré à hauteur de 4 points. Le règlement de consultation prévoyait également que la " valeur technique de l'offre " devait être elle-même évaluée selon des sous-critères tenant à la " qualité des matériels et logiciels proposés " et à la " compréhension de la problématique communale ". Le critère de la " qualité du conseil et de la maintenance " devait lui-même être évalué selon les sous-critères " Conseil : gestion de projet avant-vente, assistance au démarrage, assistance au paramétrage, formations prévues " et " Maintenance : facilité de déploiement, compétence et nombre de techniciens, suivi de formation, savoir-faire reconnu en informatique, normalisation ". Enfin, le " prix de la prestation ", noté également sur 4, devait quant à lui être évalué selon des sous-critères tenant au coût total de la prestation d'acquisition, au coût de la prestation d'installation, au coût de la formation et au coût de la maintenance sur 48 mois. La commune de Saint-Julien-de-Concelles a ainsi fourni des indications sur ses attentes quant aux trois critères fixés, sans imposer des sous-critères assimilables à eux seuls à un critère distinct, et n'a, par suite, pas organisé un examen des offres qui ne garantissait pas l'égalité de traitement des candidats et la transparence de la procédure. Il ressort en outre du rapport d'analyse des offres qu'à ces critères et sous-critères sont venus s'ajouter des éléments d'appréciation pour chacun des trois critères que le pouvoir adjudicateur a pondéré afin d'obtenir une note finale sur 20. Ces éléments d'appréciation, qui n'avaient pas à être rendus publics, ne sont pas sans lien avec l'objet du marché, ne modifient pas le règlement de consultation et n'affectent pas la régularité de la méthode de notation de la commune. Enfin, s'il ressort du rapport d'analyse des offres que, pour l'appréciation du critère de la valeur technique, a été utilisé un sous-critère " développement durable " avec deux éléments d'appréciation " politique du constructeur " et " prestataire : choix environnementaux, RSE ", chacun de ces éléments n'est quantifié qu'avec un coefficient 1, si bien qu'au regard de son faible impact ce sous-critère ne peut s'analyser comme un critère d'attribution qui aurait dû être mentionné dans le règlement de la consultation. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que la méthode de notation n'était pas explicite pour les candidats, qu'ont été pris en compte des sous-critères et pondérations qui n'ont pas été rendus publics dans le règlement de consultation en méconnaissance du principe de publicité et de transparence de la commande publique, que les notations ne sont pas explicites et qu'en conséquence le rapport d'analyse des offres n'est ni motivé ni explicité, doivent être écartés.

11. En cinquième lieu, la SAS Atemis critique l'analyse du critère sur la valeur technique en ce que, d'une part, le règlement de consultation n'indique pas que le candidat à l'appel d'offres doit justifier de la fiabilité de son système et que la solution proposée doit avoir été déjà expérimentée, d'autre part, qu'elle est erronée dès lors que la SAS Atemis a proposé une solution 3C, déployée dans de nombreuses grandes entreprises, et non Open Source, enfin, que cette analyse est insuffisamment motivée. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 10 que le sous-critère " logiciels " ne constituait qu'un élément du critère " valeur technique de l'offre " prévu au règlement de consultation. Ainsi, en écartant l'offre de la SAS Atemis au motif, qui résulte du rapport d'analyse de l'offre, que la solution n'a été déployée qu'en interne et chez un seul client de la société et que sa fiabilité et son potentiel d'évolution ne sont pas évaluables à la date d'aujourd'hui, la commune n'a pas mis en œuvre un critère de " fiabilité " ou " d'expérience " non prévu au règlement de consultation mais a simplement fait application du critère de la valeur technique qui était l'un des critères de jugement des offres prévus dans ce règlement. Elle n'a dès lors pas manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence dans des conditions ayant affecté les chances de la SAS Atemis d'obtenir le contrat. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 5, il appartenait à la SAS Atemis de demander les motifs du refus de lui attribuer le marché. En outre, si le rapport d'analyse précise, de manière erronée, que la SAS Atemis a proposé un logiciel Open Source, ce même rapport précise par ailleurs que la solution proposée par la SAS Atemis n'est pas compatible avec tous les opérateurs de téléphonie, ce qui n'est pas contesté par la SAS Atemis. La note de 3 sur 5 ainsi attribuée à l'élément d'appréciation " Logiciels " ne révèle pas une erreur manifeste d'appréciation du pouvoir adjudicateur alors qu'il ressort également du rapport d'analyse que la solution proposée par la société Axians Communication et Système Nantes est conforme à toutes les fonctionnalités techniques demandées par le cahier des clauses techniques particulières (CCTP). En tout état de cause, si la SAS Atemis avait obtenu la note maximale de 5, l'écart final aurait été d'une différence minime et sans incidence sur le choix de l'attributaire. Il en résulte que le vice allégué n'est pas en rapport direct avec l'intérêt lésé dont la requérante se prévaut ni d'une gravité telle que le juge devrait le relever d'office.

12. En sixième lieu, la SAS Atemis soutient que le rapport d'analyse est insuffisamment motivé s'agissant du critère sur le conseil et la maintenance et repose sur des conditions non énoncées dans le cahier des charges dès lors qu'on lui a fait grief de présenter peu de références sur la formation des utilisateurs et qu'une seule société ait déjà choisi sa solution. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 10 que les sous-critères ou éléments d'appréciation " Conseil ", " Formations prévues ", " Compétence et nombre de techniciens ", " Références ", " Savoir-faire " ne constituaient que des éléments du contenu du critère " Conseils et Maintenance " prévu au règlement de consultation. Ainsi, en écartant l'offre de la SAS Atemis au motif, qui résulte du rapport d'analyse de l'offre, que la SAS Atemis ne répond pas à toutes les attentes du CCTP notamment en matière de technologies demandées, qu'elle possède peu de références sur la formation des utilisateurs et qu'une seule société a choisi sa solution, la commune n'a pas mis en œuvre des critères non prévus au règlement de consultation mais a simplement fait application du critère " Conseils et Maintenance " qui était l'un des critères de jugement des offres prévus dans ce règlement. Elle n'a ainsi pas manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence dans des conditions ayant affecté les chances de la SAS Atemis d'obtenir le contrat. Par ailleurs, la commune de Saint-Julien-de-Concelles pouvait tenir compte des références des entreprises candidates pour apprécier le sous-critère " maintenance ", dès lors que le pouvoir adjudicateur peut, en procédure adaptée, pour choisir l'offre économiquement la plus avantageuse, retenir un critère reposant sur l'expérience des candidats, et donc sur leurs références portant sur l'exécution d'autres marchés, lorsque, comme en l'espèce, sa prise en compte est rendue objectivement nécessaire par l'objet du marché et la nature des prestations à réaliser et n'a pas d'effet discriminatoire. En tout état de cause, comme l'ont souligné les premiers juges, si la SAS Atemis avait obtenu la note maximale de 5 sur l'élément d'appréciation " Références ", l'écart final aurait été d'une différence minime et sans incidence sur le choix de l'attributaire.

13. En septième lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la SAS Atemis a présenté la meilleure offre s'agissant du critère du prix de la prestation et qu'il n'est pas justifié de la différence limitée de note obtenue avec ses concurrentes sur ce point, que l'intéressée reprend en appel sans nouvelle précision, par adoption des motifs retenus au point 11 du jugement attaqué.

14. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 2152-7 du code de la commande publique : " Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse sur la base d'un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. / (...) ". Aux termes de l'article R. 2152-7 du même code : " Pour attribuer le marché au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, l'acheteur se fonde : / 1° Soit sur un critère unique qui peut être : / a) Le prix, à condition que le marché ait pour seul objet l'achat de services ou de fournitures standardisés dont la qualité est insusceptible de variation d'un opérateur économique à l'autre ; / (...) / 2° Soit sur une pluralité de critères non-discriminatoires et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux. Il peut s'agir des critères suivants : / a) La qualité, y compris la valeur technique et les caractéristiques esthétiques ou fonctionnelles, l'accessibilité, l'apprentissage, la diversité, les conditions de production et de commercialisation, la garantie de la rémunération équitable des producteurs, le caractère innovant, les performances en matière de protection de l'environnement, de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture, d'insertion professionnelle des publics en difficulté, la biodiversité, le bien-être animal ; / b) Les délais d'exécution, les conditions de livraison, le service après-vente et l'assistance technique, la sécurité des approvisionnements, l'interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles ; / c) L'organisation, les qualifications et l'expérience du personnel assigné à l'exécution du marché lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d'exécution du marché. / D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché ou ses conditions d'exécution. / (...) ".

15. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au pouvoir adjudicateur de déterminer l'offre économiquement la plus avantageuse en se fondant sur des critères permettant d'apprécier la performance globale des offres au regard de ses besoins. Ces critères doivent être liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, être définis avec suffisamment de précision pour ne pas laisser une marge de choix indéterminée et ne pas créer de rupture d'égalité entre les candidats. Le pouvoir adjudicateur détermine librement la pondération des critères de choix des offres. Toutefois, il ne peut légalement retenir une pondération, en particulier pour le critère du prix ou du coût, qui ne permettrait manifestement pas, eu égard aux caractéristiques du marché, de retenir l'offre économiquement la plus avantageuse.

16. Il résulte de l'instruction qu'alors même que le marché est un marché à procédure adaptée, soumis à une simple obligation de hiérarchisation des critères, la commune de Saint-Julien-de-Concelles a décidé de procéder à la pondération des trois critères d'attribution du marché ainsi qu'il a été dit au point 10. Une telle pondération du critère technique, qui a fait l'objet de négociations entre les parties, au détriment de celui du prix n'est pas manifestement disproportionnée aux regard de l'objet du marché alors que l'aspect financier a bien été pris en compte lors du choix de l'offre. Dès lors, il n'est pas établi que la pondération des trois critères retenue, déterminée librement par le pouvoir adjudicateur, ne permettait manifestement pas de retenir l'offre économiquement la plus avantageuse.

17. Il découle des points précédents que la SAS Atemis n'a pas été irrégulièrement évincée du marché en litige. Dès lors, en tout état de cause, ses conclusions présentées aux fins d'indemnisation ne peuvent qu'être rejetées.

18. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité de l'offre de la SAS Atemis ni la fin de non-recevoir opposée par la commune, que la SAS Atemis n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Julien-de-Concelles, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SAS Atemis, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SAS Atemis une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Saint-Julien-de-Concelles et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Atemis est rejetée.

Article 2 : La SAS Atemis versera à la commune de Saint-Julien-de-Concelles une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Atemis, à la commune de Saint-Julien-de-Concelles et à la société Axians Communication et Système Nantes.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Chollet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 décembre 2022.

Le rapporteur,

L. A...

Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT00666


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00666
Date de la décision : 02/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Laure CHOLLET
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : RAIMBAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-12-02;22nt00666 ?
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