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13/01/2023 | FRANCE | N°21NT01660

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 13 janvier 2023, 21NT01660


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et C... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012, à titre subsidiaire, la réduction des seules pénalités au titre des mêmes années, à hauteur de 25 712 euros, 16 838 euros et 4 010 euros en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, et 7 974 euros,

5 934 euros et 1 077 euros en ce qui concerne les contributions sociales, ainsi q...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et C... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012, à titre subsidiaire, la réduction des seules pénalités au titre des mêmes années, à hauteur de 25 712 euros, 16 838 euros et 4 010 euros en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, et 7 974 euros, 5 934 euros et 1 077 euros en ce qui concerne les contributions sociales, ainsi que la décharge de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales d'un montant cumulé de 192 434 euros acquittés à raison de la plus-value de cession des particuliers réalisée par la SCI du Moulin Soline en octobre 2010.

Par un jugement n° 1704278 du 23 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a déchargé M. et Mme A... de la cotisation à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 à raison de la plus-value immobilière des particuliers réalisée à l'occasion de la cession par la SCI du Moulin Soline des lots nos 1 et 2 à Basse Goulaine et de la majoration de 10 % dont ont été assortis les rehaussements qui leur ont été notifiés dans la catégorie des revenus capitaux mobiliers au titre de l'année 2010, et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 juin 2021 M. et Mme A..., représentés par Me Morice-Chauveau, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'intention spéculative caractérisant une activité commerciale taxable n'est pas établie pour la société civile immobilière (SCI) Vijols et la SCI du Moulin Soline et, dès lors, leur assujettissement à l'impôt sur les sociétés n'est pas justifié ;

- ils sont fondés à se prévaloir de l'instruction administrative publiée sous la référence BOI-BIC-CHAMP-20-30-20 du 12 septembre 2012 ;

- ils sont fondés à se prévaloir d'un rescrit qui a résulté du silence de l'administration pendant trois mois à la suite de leurs courriers de mai 2012 ;

- ils sont fondés à se prévaloir d'une décision de rescrit qui leur a été adressée le 9 septembre 2010 et est opposable à l'administration ;

- les pénalités pour manquement délibéré n'étaient pas justifiées.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les requérants ne sauraient prétendre à des décharges d'impôt sur le revenu et de contributions sociales supérieures aux montants laissés à leur charge au titre de l'année 2010, au vu des dégrèvements déjà opérés ;

- les moyens des requérants ne portent que sur la décharge partielle des impositions restant en litige correspondant à une réduction de base égale aux sommes imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

- aucun des moyens soulevés par M. et Mme A... n'est fondé.

Les parties ont été informées le 7 novembre 2022, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le jugement attaqué est irrégulier en tant qu'il a omis de prononcer un non-lieu à statuer sur l'imposition ayant donné lieu à un dégrèvement du 16 novembre 2017 à concurrence de la somme globale de 16 295 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... A..., gestionnaires des sociétés civiles immobilières (SCI) des Lilas, SCI Sanlecque Madeleine, SCI Bonjovi, SCI Kermadio, Vijols et du Moulin Soline, ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2010, 2011 et 2012, tandis que certaines des SCI gérées par eux ont fait l'objet d'une vérification de comptabilité ou d'un contrôle sur pièces. A l'issue de ces contrôles leur ont été réclamées des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre de ces mêmes années, dont ils ont demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge en droits et pénalités. Par un jugement du 23 avril 2021, le tribunal a déchargé M. et Mme A... de la cotisation à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 à raison de la plus-value immobilière des particuliers réalisée à l'occasion de la cession par la SCI du Moulin Soline des lots n°s 1 et 2 à Basse Goulaine et de la majoration de 10 % dont ont été assortis les rehaussements qui leur ont été notifiés dans la catégorie des revenus capitaux mobiliers au titre de l'année 2010 et a rejeté le surplus de leur demande. M. et Mme A... font appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ce surplus.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 16 novembre 2017, postérieure à l'introduction de la demande devant le tribunal administratif, l'administration a accordé à M. et Mme A... un dégrèvement de la cotisation supplémentaire aux contributions sociales de l'année 2010 à hauteur de 11 826 euros et un dégrèvement de la cotisation supplémentaire aux contributions sociales de l'année 2011 à hauteur de 4 469 euros. Le tribunal a omis dans le jugement attaqué de prononcer un non-lieu à statuer du fait de ce dégrèvement. Dès lors, ce jugement doit, dans cette mesure, être annulé.

Sur l'étendue du litige :

3. Il y a lieu, par la voie de l'évocation, de statuer sur les conclusions de la demande présentées devant le tribunal administratif et de les déclarer sans objet à hauteur du dégrèvement de 16 295 euros prononcé par l'administration fiscale au cours de la procédure de première instance. Il n'y a donc plus lieu de statuer sur les conclusions de M. et Mme A... dans cette mesure.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. D'une part, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article 206 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 8 ter, 239 bis AA, 239 bis AB et 1655 ter, sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues au IV de l'article 3 du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié, les sociétés coopératives et leurs unions ainsi que, sous réserve des dispositions des 6° et 6° bis du 1 de l'article 207, les établissements publics, les organismes de l'Etat jouissant de l'autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. / (...) 2. Sous réserve des dispositions de l'article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, même lorsqu'elles ne revêtent pas l'une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35. (...) ". Aux termes de l'article 34 de ce code : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. (...) ". Et aux termes de l'article 35 du même code : " I. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés. / (...) / 3° Personnes qui procèdent à la cession d'un terrain divisé en lots destinés à être construits lorsque le terrain a été acquis à cet effet ; / (...) 4° Personnes bénéficiaires d'une promesse unilatérale de vente portant sur un immeuble qui est vendu par fractions ou par lots à la diligence de ces personnes ; (...) ".

6. Le service a constaté que la SCI Vijols et la SCI du Moulin Soline ont procédé à l'acquisition de terrains en vue de leur vente après lotissement. Il a alors remis en cause leur activité civile de location de biens immobiliers relevant de la gestion patrimoniale pour la requalifier en une activité de marchand de biens, imposable à l'impôt sur les sociétés.

Les résultats reconstitués de ces deux sociétés, au titre des années 2010 et 2011, ont été imposés entre les mains de leurs associés, M. et Mme A..., à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

En ce qui concerne les revenus distribués par la SCI Vijols :

S'agissant de l'acquisition des terrains à bâtir dans la commune de Treillières le 29 juin 2006 :

Quant à l'application de la loi fiscale :

7. Il résulte de l'instruction que la SCI Vijols a acquis le 29 juin 2006 un terrain à bâtir situé à Treillières (Loire-Atlantique), moyennant le prix de 305 000 euros. L'intention spéculative de la SCI apparaît dès l'achat des terrains dès lors qu'a été sollicitée la réalisation d'études antérieurement à l'acquisition des terrains en litige, comme l'indique un courrier du 22 septembre 2005 de la commune de Treillières, qui mentionnait un projet de construction de huit logements, faisant l'objet d'un avis défavorable de la commune, ainsi qu'un projet alternatif de deux maisons. En 2009, le maire de cette commune a autorisé la création de neuf lots pour le lotissement " le clos de Muzon ". Un acte de dépôt de pièces de lotissement a été enregistré le 28 mai 2010 auprès de la conservation des hypothèques de Nantes. Cette opération a permis à la SCI Vijols de céder l'ensemble des lots au cours des années 2009 et 2010. Deux lots ont été vendus en décembre 2009, pour le prix de 130 000 euros, et les sept autres lots ont été vendus en 2010 pour un prix global de 522 000 euros. Dans ces conditions, les requérants ne sauraient sérieusement soutenir que, lors de l'acquisition du terrain en cause, leur intention était uniquement de construire quatre maisons qui devaient être données en location sous le régime de la loi dite " Scellier " et que l'opération ne révèle pas d'intention spéculative. En particulier, ni le courrier précité du 22 septembre 2005 de la commune de Treillières, ni la délivrance, le 2 mai 2006, d'un permis de construire pour édifier quatre habitations, qui a finalement été retiré, à la demande de M. A..., le 29 novembre 2007, ne permettent de tenir pour établi le projet de location de quatre maisons.

Quant à l'interprétation administrative de la loi fiscale :

8. Les requérants se prévalent, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction du 18 juin 1990 référencée 8 D-2-90, reprise au BOI-BIC-CHAMP-20-30-20 n° 30 à 50 du 12 septembre 2012, qui indique : " L'intention de revendre après lotissement -intention spéculative- s'apprécie au moment de l'achat du terrain sans qu'il y ait lieu de prendre en compte les circonstances de l'aliénation des lots : aliénation forcée, expropriation, difficultés de trésorerie, etc. L'intention spéculative s'apprécie en fonction des circonstances de fait de chaque affaire. Elle peut résulter notamment du court délai séparant l'acquisition de la réalisation de l'opération de lotissement, de la situation géographique des terrains ou de la profession du vendeur. Le nombre de lots réalisés est, en principe, sans incidence sur la détermination du régime d'imposition du profit. ". Toutefois, ce paragraphe ne contient pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.

S'agissant de l'acquisition des terrains dans la commune du Loroux-Bottereau le 20 mai 2010 :

9. Aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / (...) 8° Lorsque l'administration n'a pas répondu dans un délai de trois mois à un contribuable de bonne foi qui a demandé, à partir d'une présentation écrite, précise et complète de la situation de fait, si les revenus de son activité professionnelle, lorsqu'elle est soumise à l'impôt sur le revenu, relèvent de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux au sens de l'article 34 du code général des impôts ou des bénéfices des professions libérales et des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants mentionnés à l'article 92 du même code, ou, s'agissant d'une société civile, si les résultats de son activité professionnelle sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés. (...) ".

10. Il résulte de l'instruction que la SCI Vijols a signé le 20 mai 2010 un compromis pour l'acquisition de différentes parcelles de terrain avec bâtiments, situées sur la commune du Loroux-Bottereau (Loire-Atlantique), moyennant le prix de 310 000 euros. Elle a ensuite déposé, le 18 août 2010, une déclaration préalable de division en trois lots pour un futur permis d'aménager de dix lots de terrain à bâtir, accordé le 3 janvier 2011.

Par un acte sous seing privé du 12 mai 2010, la SCI Vijols s'était engagée à céder à la société à responsabilité limitée (SARL) IFI Développement les droits relatifs à la réalisation de l'opération d'un lotissement. Le 6 mai 2011, la SCI Vijols et la SARL IFI Développement ont signé un protocole d'accord transactionnel qui entérine la cession des droits de réalisation de l'opération de lotissement moyennant une indemnité forfaitaire de 225 000 euros.

11. Il résulte des termes des courriers envoyés les 22 et 23 mai 2012 par les intéressés à l'administration fiscale que la demande adressée par M. et Mme A... au service des impôts, dont ils soutiennent qu'elle constituait une demande de rescrit ayant obtenu une réponse implicite favorable à l'expiration du délai de trois mois, était peu précise et ne portait pas explicitement sur la détermination du caractère commercial ou civil de l'opération réalisée par la SCI Vijols, mais sur l'imposition d'un revenu exceptionnel provenant d'une SCI et viré sur leur compte bancaire. Dès lors, cette demande ne peut être regardée comme entrant dans le champ des dispositions, citées au point 9, du 8° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales et les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir d'un rescrit fiscal en leur faveur.

En ce qui concerne les revenus distribués par la SCI du Moulin Soline :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

12. Il résulte de l'instruction que la SCI du Moulin Soline, créée le 19 octobre 2007, a déclaré comme activité principale " l'acquisition, la vente, la propriété, la mise en valeur, la transformation, la construction, l'aménagement, l'administration, la location de tous biens et droits immobiliers ". Elle a acquis le 3 décembre 2007 un terrain situé dans la commune de Basse-Goulaine (Loire-Atlantique), pour une somme de 60 000 euros. Dès le 1er octobre 2008, M. A... a conclu, en tant qu'apporteur d'affaires, une convention de partenariat commercial avec la société anonyme IFI Développement Ouest en vue de l'achat de terrain pour un projet de construction sur le terrain appartenant à la SCI du Moulin Soline. La facture établie à la suite de la réalisation de cette vente portait le nom de la SCI du Moulin Soline, représentée par M. A.... Par la suite, cette SCI s'est constituée maître de l'ouvrage de l'opération de lotissement située dans la commune de Basse-Goulaine, lieudit Moulin Soline, dont la désignation cadastrale avant morcellement était constituée de trois parcelles. Le 30 avril 2009, la SCI du Moulin Soline a déposé le programme des travaux pour la création d'un ensemble immobilier auprès des services techniques de la mairie de Basse-Goulaine. Puis, le 24 juillet 2009, les époux A... ont sollicité un permis d'aménager, en vue de la réalisation d'un ensemble immobilier dénommé " rue du Moulin Soline ", qui a été accordé le 29 septembre 2009 par le maire de la commune de Basse Goulaine, ce qui a permis à la SCI du Moulin Soline de diviser son terrain en cinq lots. Le 22 octobre 2010, la SCI du Moulin Soline et la SCI Kermadio, représentées par M. A..., gérant des deux sociétés, ont déposé les pièces d'un projet de lotissement " rue du Moulin Soline " dans la commune de Basse-Goulaine. Deux parcelles appartenant à la SCI du Moulin Soline ont été cédées en octobre 2010. Le lot 1 a été vendu à la SCI Les Jardins d'Enora, pour la somme de 750 000 euros, et le lot 2 à la SCI Kermadio, moyennant le prix de 90 000 euros. Dans ces conditions, et en particulier du fait que le projet de lotissement est intervenu peu de temps après l'acquisition et des montants en cause, et alors même qu'il ne s'agit que d'une seule opération de lotissement, l'intention spéculative de la SCI du Moulin Soline doit être, comme l'a estimé à juste titre l'administration fiscale, regardée comme établie.

S'agissant de l'application des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales :

13. Aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi. (...) ".

14. Il résulte de l'instruction que la demande déposée par les intéressés auprès de l'administration fiscale le 21 juin 2010 portait uniquement sur le calcul de l'imposition sur les plus-values des particuliers et l'éventuel application d'un abattement par année de détention. Ainsi, l'administration, dans sa réponse du 9 septembre 2010, n'avait pas à se prononcer sur l'éventuel caractère commercial de l'opération de revente des trois parcelles. Par conséquent, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir du rescrit général du 9 septembre 2010, qui ne prend pas position sur la question litigieuse, alors au demeurant que l'administration fait valoir sans être contestée que des faits déterminants n'avaient pas été portés à sa connaissance.

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

16. Pour justifier l'application des pénalités prévues au a) de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale soutient que M. et Mme A... ont systématiquement minorés leurs revenus fonciers imposables à l'impôt sur le revenu en majorant les charges déductibles. Ainsi, malgré l'abandon de certaines d'entre elles, les charges non déductibles représentent encore 35 % des recettes encaissées de 2010 pour la SCI Bonjovi, 30 % des recettes encaissées de 2010 pour la SCI Sanlecque, 37 % des recettes encaissées de 2010 pour la SCI des Lilas. En outre, en tant que gestionnaires de six sociétés civiles immobilières et propriétaires d'un portefeuille immobilier important, M. et Mme A... ne pouvaient pas ignorer ces manquements. Par les éléments précités, l'administration fiscale établit le caractère délibéré du manquement et par suite le bien-fondé des pénalités infligées à M. et Mme A.... Par suite, il n'y a pas lieu d'accorder à ces derniers la décharge des majorations pour manquement délibéré.

17. Enfin, si les requérants concluent, à titre subsidiaire, à la décharge de majorations appliquées en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, pour des montants de 25 712 euros et 7 974 euros au titre de l'année 2010, de 16 838 euros et 5 934 euros pour l'année 2011, et de 4 040 euros et 1 077 euros pour l'année 2012, ils ne précisent toutefois ni les modalités de détermination de ces sommes ni les motifs pour lesquels leur application ne serait pas justifiée.

18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de leurs conclusions en ce qu'elles excéderaient le quantum du litige, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté le surplus de leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1704278 du tribunal administratif de Nantes du 23 avril 2021 est annulé en tant qu'il a omis de prononcer un non-lieu à statuer sur l'imposition ayant donné lieu à un dégrèvement du 16 novembre 2017 à concurrence de la somme de 11 826 euros pour les prélèvements sociaux de l'année 2010 et 4 469 euros pour les prélèvements sociaux de l'année 2011.

Article 2 : A concurrence de la somme de 16 295 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. et Mme A....

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2023.

La rapporteure

P. D...La présidente

I. Perrot

La greffière

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21NT01660

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01660
Date de la décision : 13/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : MORICE-CHAUVEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-01-13;21nt01660 ?
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