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13/01/2023 | FRANCE | N°21NT03002

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 13 janvier 2023, 21NT03002


Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 26 octobre 2021, 25 mai 2022 et 12 juillet 2022, M. B... U..., la SCEA des Brosses, Y..., M. A... O..., le GAEC du Bois Noir, M. Q... G..., la société HDN, Mme R... L..., M. J... et Mme S... N..., le Z..., M. C... et Mme D... V..., M. P... K..., Mme T... I..., M. H... E..., le GAEC de grand Lande Père et fils et M. X... W..., représentés par Me Collet, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 25 juin 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Chaumes

Énergies une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitat...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 26 octobre 2021, 25 mai 2022 et 12 juillet 2022, M. B... U..., la SCEA des Brosses, Y..., M. A... O..., le GAEC du Bois Noir, M. Q... G..., la société HDN, Mme R... L..., M. J... et Mme S... N..., le Z..., M. C... et Mme D... V..., M. P... K..., Mme T... I..., M. H... E..., le GAEC de grand Lande Père et fils et M. X... W..., représentés par Me Collet, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 25 juin 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Chaumes Énergies une autorisation environnementale pour la construction et l'exploitation d'un parc éolien, comprenant cinq aérogénérateurs et deux postes de livraison, implanté sur le territoire de la commune de Chaumes-en-Retz ;

2°) de mettre à la charge de l'État le versement à chacun d'eux d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté attaqué ;

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

- le dossier de demande est incomplet, faute de comporter des éléments précis et étayés quant aux capacités financières de la société Chaumes Énergies ;

- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances, notamment s'agissant de l'analyse des effets sonores du projet et de l'impact du projet sur l'avifaune et les chiroptères ainsi que sur les zones humides ;

- il méconnaît les dispositions des articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l'environnement en raison de ses inconvénients excessifs pour la commodité du voisinage, la préservation de l'avifaune et des chiroptères et la préservation des zones humides ;

- il porte atteinte aux intérêts protégés par l'article L. 211-1 du code de l'environnement et est incompatible avec le SDAGE du bassin Loire-Bretagne ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement dès lors qu'aucune dérogation à l'interdiction de porter atteinte aux espèces protégées n'a été accordée ;

- le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en excluant que l'autorisation environnementale contestée tienne lieu de dérogation à l'interdiction de porter atteinte aux espèces protégées.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 janvier et 20 juin 2022, la SARL Chaumes Énergies, représentée par Me Bonneau, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête, en application des dispositions du 2° de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, ou à ce que l'arrêté attaqué soit annulé partiellement, en application du 1° de l'article L. 181-18 du même code ;

3°) à ce qu'il soit mis à la charge des requérants une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que les requérants ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté attaqué ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés ;

- en tout état de cause, les vices susceptibles d'être retenus par la cour peuvent être régularisés ou ne justifier que d'une annulation partielle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Par un courrier du 6 décembre 2022, la cour a informé les parties, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, qu'elle était susceptible de surseoir à statuer sur la requête de M. U... et autres jusqu'à l'expiration d'un délai de dix-huit mois afin de permettre la régularisation d'un vice susceptible d'être retenu affectant la légalité de l'autorisation environnementale attaquée.

Des observations en réponse à ce courrier ont été enregistrées le 12 décembre 2022 pour la société Chaumes Énergies.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. M...,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- les observations Me Le Guen, substituant Me Collet, représentant M. U... et autres, et les observations de Me Descubes, représentant la société Chaumes Energies.

Une note en délibéré, présentée par la société Chaumes Énergies, a été enregistrée le 21 décembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Le 29 juin 2018, la société Chaumes Énergies, filiale de la société Valorem, a déposé auprès du préfet de la Loire-Atlantique une demande, complétée le 6 février 2020, d'autorisation environnementale portant sur la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de cinq aérogénérateurs, d'une hauteur de 150 mètres en bout de pale et d'une puissance unitaire de 3 MW, et de deux postes de livraison, sur le territoire de la commune de Chaumes-en-Retz, commune nouvelle constituée des communes déléguées de Chéméré et Arthon-en-Retz. Le parc sera implanté à l'est du bourg de Chéméré, de part et d'autre de la route départementale no 751, à raison d'un alignement de trois éoliennes au nord et de deux éoliennes au sud. Par un arrêté du 25 juin 2021, dont M. U... et autres demandent l'annulation, le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Chaumes Énergies l'autorisation environnementale sollicitée.

Sur les fins de non-recevoir opposées par la société Chaumes Énergies :

2. En vertu de l'article R. 181-50 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale peut être déférée à la juridiction administrative " par les tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3 ".

3. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. / (...) ". L'article L. 511-1 du même code dispose que : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ".

4. En l'espèce, les requérants personnes physiques résident à une distance comprise entre 500 mètres et 2 kilomètres des éoliennes projetées les plus proches de leur lieu d'habitation, et invoquent notamment, en s'appuyant sur les indications figurant dans l'étude d'impact du projet, les atteintes à la commodité du voisinage qu'ils subiront du fait de l'impact visuel et sonore des éoliennes. La société Chaumes Énergies ne conteste pas que les éoliennes litigieuses seront visibles depuis chacune de leurs habitations. Le GAEC Grand Lande Père et fils, le Z..., Y... et la SCEA des Brosses, situés respectivement à environ 600 mètres, 750 mètres, 850 mètres et 1,2 kilomètres de l'éolienne la plus proche, et le GAEC du Bois Noir, qui détient des parcelles situées au lieu-dit " La Jarrie Rousse " au sein de la zone sud d'implantation du projet, soutiennent notamment que les éoliennes projetées provoqueront des nuisances sonores et visuelles ainsi que des courants parasites susceptibles d'avoir un impact sur leurs élevages de bovins. Quant à la société HDN, propriétaire d'un haras situé à environ 2 km de l'éolienne la plus proche, elle soutient que la vue des éoliennes engendrera une baisse de la fréquentation du haras et portera atteinte à sa tranquillité en raison de ses effets sur le comportement des chevaux. Dès lors, chacun des requérants justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté attaqué.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

5. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'autorisation unique l'était avant elle ainsi que les autres autorisations mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

En ce qui concerne la compétence :

6. Il résulte de l'instruction que l'arrêté attaqué a été signé par M. J... F..., sous-préfet de l'arrondissement de Saint-Nazaire, qui disposait d'une délégation à cet effet du préfet de la Loire-Atlantique en vertu d'un arrêté de délégation de signature du 17 novembre 2020, publié au recueil des actes administratifs du 18 novembre 2020. Le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente doit, par suite, être écarté.

En ce qui concerne la demande d'autorisation :

S'agissant de la présentation des capacités financières de l'exploitant :

7. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité. " Selon l'article D. 181-15-2 du même code : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l'installation ; / (...). "

8. Il résulte des règles de procédure prévues par ces dispositions que le dossier d'une demande d'autorisation déposée depuis le 1er mars 2017 ne doit plus comporter des indications précises et étayées sur les capacités techniques et financières exigées par l'article L. 181-27, mais seulement une présentation des modalités prévues pour établir ces capacités, si elles ne sont pas encore constituées.

9. Le dossier de demande d'autorisation environnementale fait apparaître que la société Chaumes Énergies, au capital social de 1 000 euros, est une société de projet créée en vue de la construction et de l'exploitation du parc éolien litigieux, détenue à 100 % par la société Valorem, au capital social de 8,38 millions d'euros. S'il est vrai que la lettre de demande d'autorisation elle-même ne précise ni le coût global du projet, ni ses modalités de financement, il ressort de deux courriers de juin 2018 émanant de deux établissements bancaires, figurant en annexe 8 à cette lettre de demande d'autorisation, que le coût d'investissement total du projet est estimé entre 23 et 26 millions d'euros et que le montant de l'emprunt bancaire, que ces établissements envisagent d'accorder à la société pétitionnaire sous certaines réserves, se situera entre 18,4 et 23,4 millions d'euros. Ces documents permettent de comprendre que l'investissement sera réparti à hauteur de 80 % d'emprunt bancaire et de 20 % d'apport en fonds propres. En outre, il ressort d'un courrier du 11 juin 2018, adressé par le directeur financier de la société Valorem à la société Chaumes Énergies et également annexé à la lettre de demande d'autorisation, que la société Valorem, en qualité d'actionnaire unique de la société pétitionnaire, s'engage à lui allouer les moyens financiers nécessaires afin de lui permettre " de disposer de suffisamment de capitaux pour assumer l'ensemble des obligations susceptibles de découler de la construction, du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ". Ce courrier précise également que la société Valorem s'engage notamment à apporter à la société Chaumes Énergies un financement par fonds propres, sous la forme d'apport en capital ou de prêt d'actionnaire, afin de lui permettre de réaliser son projet de parc éolien. Ainsi, le dossier de demande d'autorisation comportait une présentation des modalités prévues pour établir les capacités financières dont la société pétitionnaire sera effectivement en mesure de disposer.

S'agissant de l'étude d'impact :

10. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

Quant aux impacts sonores du projet :

11. L'étude d'impact comporte, en pages 45 et suivantes, un diagnostic de l'ambiance sonore de l'environnement du projet de parc éolien, ainsi que, en pages 415 et suivantes, une analyse de ses impacts sonores. L'étude acoustique complète figure en outre en annexe de l'étude d'impact. La localisation des points de mesure de l'ambiance sonore, correspondant à l'ensemble des habitations les plus proches de la zone d'implantation du projet, ressort clairement des cartes figurant en pages 47 et 417 de l'étude et est détaillée en pages 671 et suivantes. S'il est vrai que l'étude d'impact n'indique que de manière extrêmement succincte, en page 674, les conditions météorologiques rencontrées lors de la campagne de mesurage, il ressort de l'avis émis sur le projet par l'agence régionale de santé le 24 juillet 2018 que " le fait que, pendant ces campagnes de mesures, les deux secteurs de vent dominants de la zone concernée (en l'occurrence sud-ouest et nord-est) étaient largement majoritaires rend les résultats encore plus fiables ". Par ailleurs, il ressort de l'étude d'impact que les évaluations du bruit ambiant calculées à puissance maximale des éoliennes ne révèlent pas de dépassement des seuils réglementaires et que les émergences réglementaires seront, avant application des mesures de réduction, respectées en période diurne et légèrement dépassées en période nocturne, ainsi que respectées y compris en période nocturne après application de la mesure de réduction consistant en un plan de bridage des éoliennes. Néanmoins, cette étude ne comporte, s'agissant de l'impact du projet en période nocturne, que des tableaux présentant les émergences sonores après application des " modes de fonctionnement optimisés ", c'est-à-dire après application de mesures de bridage des éoliennes, sans préciser les émergences sonores obtenues avant application des mesures de bridage. Il est seulement indiqué, en page 692 de l'étude d'impact, que, pour un fonctionnement des éoliennes en mode nominal (pleine puissance) des dépassements des seuils réglementaires nocturnes sont relevés sur plusieurs zones d'habitations dans les deux directions de vent étudiées ", à savoir une douzaine de hameaux situés entre 500 mètres et 1,5 kilomètre environ de l'éolienne la plus proche. Dans son avis du 2 juin 2020, la mission régionale d'autorité environnementale des Pays de la Loire a d'ailleurs relevé qu'il serait " utile d'indiquer les niveaux obtenus avant bridage afin d'évaluer l'efficacité attendue des mesures envisagées " de bridage des éoliennes. Ainsi, il résulte de l'instruction que ces omissions de l'étude d'impact quant aux impacts sonores du projet ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population et, en tout état de cause, ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

Quant aux impacts sur les animaux d'élevage :

12. L'étude d'impact précise, en pages 423 et suivantes, les impacts du projet sur les usages agricoles, tant lors du chantier qu'en phase d'exploitation, notamment sur les animaux d'élevage. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, cette étude recense précisément, dans un tableau et sur une carte, l'ensemble des élevages présents dans un rayon de 4 km des éoliennes projetées. Si les requérants soutiennent que les effets sonores et électriques des éoliennes sur les animaux d'élevage des exploitations les plus proches n'ont pas été analysés dans l'étude d'impact, ils n'apportent pas suffisamment d'éléments de nature à établir qu'une telle analyse aurait été nécessaire en l'espèce eu égard aux risques allégués pour ces animaux. Par ailleurs, aucun texte n'exige que soit jointe à l'étude d'impact d'un parc éolien une étude géobiologique. Au demeurant, il ressort de l'étude d'impact que le positionnement des éoliennes et des deux postes de livraison a été " avalisé " par deux géobiologues qui sont intervenus sur le site au début de l'année 2017. Dès lors, l'étude d'impact n'est pas entachée d'omission ou d'insuffisance en ce qui concerne les impacts du projet sur les animaux d'élevage.

Quant aux impacts sur la faune :

13. En ce qui concerne l'avifaune, il résulte de l'instruction que l'étude d'impact comporte, en pages 209 et suivantes, une analyse satisfaisante de l'état initial. À cet égard, s'il est vrai que les cartes reproduites en pages 209 et 210 destinées à replacer la zone d'implantation du projet dans son environnement à l'échelle régionale pour l'avifaune nicheuse, migratrice et hivernante, sont peu lisibles, les commentaires qui les accompagnent permettent de comprendre que le projet est situé au sein d'une unité paysagère d'enjeu modéré pour l'avifaune et que le site d'étude se situe en dehors des voies principales de migration. Il ressort par ailleurs de l'étude d'impact que la partie nord de la zone d'implantation du projet se trouve partiellement incluse dans la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type II " Forêt de Princé ", qui abrite une avifaune forestière diversifiée et notamment la reproduction d'espèces protégées. Les inventaires de terrain, réalisés sur un cycle complet entre mars 2017 et mars 2018, ont permis de recenser 23 espèces en migration active ou en halte migratoire en période de migration post-nuptiale, 29 espèces en période de migration prénuptiale, 58 espèces nicheuses et au moins 35 espèces hivernantes. Au total, 75 espèces d'oiseaux ont été recensées sur le site d'implantation du projet, dont 19 d'intérêt patrimonial. L'étude d'impact indique que le site d'implantation du projet ne semble pas être un lieu de passage important pour l'avifaune migratrice et qu'il n'y a pas d'enjeux majeurs pour cette période. Les enjeux sont également faibles en période hivernale, malgré la présence ponctuelle de quelques espèces patrimoniales, en raison d'une faible diversité et de faibles effectifs. L'avifaune nicheuse présente pour sa part une certaine diversité et sa répartition sur la zone d'implantation du projet s'avère corrélée aux secteurs occupés par des prairies, des mares, des haies et des boisements. Des cartes détaillent les zones à enjeux du site d'implantation du projet selon les espèces et les saisons. L'étude d'impact comporte par ailleurs, en pages 480 et suivantes, une analyse des impacts du projet sur l'avifaune, qui inclut notamment les risques de collision avec les éoliennes pour chacune des espèces fréquentant la zone d'implantation du projet, à l'exception de l'Effraie des clochers. Il résulte cependant de l'instruction, notamment de la réponse de la société Chaumes Énergies à l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale, que cette espèce non patrimoniale, dont un seul spécimen a pu être observé sur le site du projet, n'est pas considérée comme étant sensible à l'éolien au regard du risque de collision. Enfin, l'étude d'impact conclut que les impacts sur l'avifaune seront nuls à faibles, selon les espèces et le type d'impact, en phase d'exploitation, et nuls à modérés en phase travaux.

14. En ce qui concerne les chiroptères, il résulte de l'instruction que la société Chaumes Énergies a fait réaliser par un bureau d'études spécialisées des prospections de terrain, qui ont eu lieu durant neuf nuits entre les mois d'avril et d'octobre 2017, couvrant les trois phases clefs du cycle biologique des chiroptères. Ces prospections ont consisté en des écoutes actives et passives depuis dix points d'écoute au niveau du sol.

15. En revanche, aucune écoute en altitude n'a été réalisée. Or, il ressort de l'analyse bibliographique, menée en amont des inventaires de terrain et figurant en pages 258 et suivantes de l'étude d'impact, que le site d'implantation du projet se trouve au sein d'un secteur forestier et bocager à enjeux chiroptérologiques, selon le schéma régional éolien en Pays de la Loire, et que dix-huit espèces sur les vingt-et-une présentes en Loire-Atlantique ont été recensées dans la zone d'étude par le groupe mammalogique breton. Cette étude bibliographique relève également que " sur la zone d'étude, cinq espèces sont considérées à "risque très important" vis-à-vis de l'éolien : Pipistrelle commune, Pipistrelle de Nathusius, Pipistrelle pygmée, Noctule commune et Noctule de Leisler ", deux autres espèces étant " notées comme à "risque important" : Pipistrelle de Kuhl et Sérotine commune ". La même étude précise que " toutes ces espèces sont particulièrement victimes de collisions avec les pales d'éolienne, en raison de leur comportement de vol. Notamment, la Pipistrelle de Nathusius qui, pendant sa migration, pratique un vol en altitude, à hauteur des rotors ". Elle poursuit en indiquant que " toutes les espèces sensibles de la zone sont potentiellement présentes sur la commune de Chaumes en Retz ", laquelle se situe probablement au niveau d'un important axe migratoire de déplacement Nord-Sud qui relierait le Mont-Saint-Michel à Nantes. L'étude précise que cette hypothèse semble confirmée par les données de mortalité liées aux éoliennes des parcs de la Marne et de la Limouzinière, situés à une vingtaine de kilomètres du parc litigieux, qui ont généré la mortalité d'au moins 128 chiroptères sur les années 2010, 2011 et 2013, dont des espèces migratrices, faisant " vraisemblablement " de ces parcs " les plus mortifères de Loire-Atlantique et de l'Ouest de la France malgré un environnement, à première vue, peu favorable aux chiroptères ".

16. Il ressort également de l'étude d'impact que les investigations de terrain ont permis de recenser " au minimum " seize espèces de chiroptères, ce qui représente une forte diversité au regard des vingt-et-une espèces présentes en Loire-Atlantique et une richesse élevée eu égard à la faible superficie de la zone étudiée. Parmi les espèces identifiées, quatre sont inscrites à l'annexe II de la directive Habitats (Grand murin, Murin de Bechstein, Barbastelle d'Europe, Murin à oreilles échancrées), deux sont classées " vulnérables " par la liste rouge des espèces menacées de mammifères en France (Noctule commune) ou en Pays de la Loire (Grand murin), et cinq sont classées " quasi menacées " par la liste rouge France (Murin de Bechstein, Pipistrelle de Nathusius, Noctule de Leisler, Pipistrelle commune et Sérotine commune). Les espèces les plus présentes sur le site d'implantation du projet sont la Pipistrelle commune, la Pipistrelle de Kuhl, la Noctule commune, la Pipistrelle de Nathusius, la Barbastelle d'Europe et la Sérotine commune. L'étude relève encore que " l'activité chiroptérologique globale est modérée sur le site ", plus forte en été et au printemps et faible en automne. Elle conclut que les enjeux concernant les chiroptères sont " modérés à forts " sur une grande partie de la zone d'étude, en raison d'un contexte paysager qui leur est favorable, composé majoritairement de bocages et de haies qui font la connexion entre les habitats et les points d'eau, ainsi que de quelques boisements. À cet égard, deux boisements de feuillus, le bois des îles enchantées et la forêt de Princé, répertoriés " à potentialité forte de présence de gîtes pour les chiroptères ", se situent en bordure directe du secteur nord de la zone d'implantation du projet. Par ailleurs, il ressort des pages 542 et suivantes de l'étude d'impact que les éoliennes du projet " auront un impact sur les chiroptères les plus abondants du site ", notamment pour les cinq espèces sensibles au risque de collision, ce risque étant d'autant plus grand au niveau des zones qui concentrent l'activité des chauves-souris, à savoir les structures paysagères utilisées par elles comme zones de chasse ou corridors de déplacement. En outre, les trois éoliennes ont une amplitude du rotor qui se situe dans une " zone de sensibilité " au risque de collision jugée " modérée " et deux autres (E2 et E3) dans une " zone de sensibilité " jugée " potentiellement forte ". Il résulte aussi de l'instruction que les pales des éoliennes survoleront ou tourneront à proximité immédiate de haies et de la lisière de boisements utilisés par les chiroptères.

17. Dans ces conditions, eu égard aux forts enjeux pour les chiroptères identifiés lors de l'analyse bibliographique et confirmés par les premières expertises de terrain, ainsi qu'au risque important de collision pour certaines espèces de haut vol fréquentant le site et à l'existence d'une forte mortalité de chiroptères provoquée par d'autres parcs éoliens exploités à proximité du projet litigieux, la description de l'état initial aurait dû être complétée par des écoutes de l'activité des chiroptères en altitude afin de préciser la réalité de cette activité en altitude au niveau de la zone de balayage des pales des éoliennes et les risques inhérents à leur fonctionnement. La mission régionale d'autorité environnementale a d'ailleurs, dans son avis sur le projet, relevé cette lacune qu'elle a qualifiée d'" importante " et a recommandé au pétitionnaire de compléter l'étude d'impact sur ce point.

18. D'une part, si la société Chaumes Énergies a fait valoir, dans son mémoire en réponse à l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale, qu'eu égard au principe de proportionnalité des études d'impact, un " suivi en hauteur n'était pas envisageable en l'absence de mât de mesure de vent préalablement installé et permettant de positionner des micros et appareil d'enregistrement à 80 mètres de hauteur ", cette circonstance n'était pas de nature à la dispenser de la réalisation d'écoutes en altitude de l'activité des chiroptères rendue nécessaire par l'analyse des enjeux du site d'implantation et par son choix d'implanter les éoliennes à proximité immédiate de haies et de boisements utilisés par les chiroptères.

19. D'autre part, la société pétitionnaire a fait valoir dans ce même mémoire en réponse, sur le fondement de plusieurs études scientifiques, que les activités des Noctules au sol et en hauteur sont fortement corrélées, tandis que l'activité enregistrée au sol des Pipistrelles est toujours plus forte que celle enregistrée en altitude, dès lors qu'elles ne passent en moyenne de 10 % de leur temps en altitude. Cependant, alors que ces mêmes études indiquent que l'activité au sol des Pipistrelles ne permet pas d'expliquer les activités en altitude et que les requérants font valoir que certaines espèces dites de haut-vol ne sont pas détectables depuis le sol, il résulte de l'instruction que l'absence d'écoute en altitude n'a pas permis d'établir un diagnostic pertinent de la présence des chiroptères en altitude dans la zone d'implantation du projet, et donc d'apprécier l'ampleur du risque de collision et de barotraumatisme associé, tout au long de leur cycle biologique. Il en résulte également que cette lacune a eu une incidence sur l'évaluation des niveaux d'impacts du projet sur les chiroptères, qui figurent en pages 545 et suivantes de l'étude d'impact, et qui font apparaître, en raison du risque de mortalité par collision, des impacts forts pour la Pipistrelle commune, des impacts modérés pour la Sérotine commune, la Noctule commune, la Pipistrelle de Kuhl, des impacts forts en période de migration et faibles le reste du temps pour la Pipistrelle de Nathusius, et enfin des impacts faibles, voire très faibles, pour les autres espèces.

20. Enfin, la société Chaumes Énergies soutient que, en contrepartie de l'absence d'écoute en altitude lors de la phase de diagnostic, l'arrêté litigieux a prescrit, d'une part, un plan de bridage renforcé par rapport à ce qu'elle avait proposé, consistant à arrêter les cinq éoliennes du 15 mars au 31 octobre en période nocturne sur la plage horaire comprise entre une demi-heure avant le coucher du soleil et une demi-heure après son lever, lorsque les conditions météorologiques présentent à la fois une température supérieure à 10° C, un vent dont la vitesse à hauteur de nacelle est inférieure à 6 m/s et en l'absence de précipitations, d'autre part, un suivi de la mortalité durant les trois années suivant la mise en service du parc, de la semaine 10 à la semaine 43, à raison d'un passage hebdomadaire sous chaque éolienne, assorti d'un suivi en altitude de l'activité chiroptérologique à hauteur de la nacelle de l'éolienne E3, durant un cycle biologique complet au cours des trois années suivant la mise en service du parc, et, enfin, une adaptation du plan de bridage en fonction des impacts constatés sur les chiroptères. Cependant, il résulte de l'instruction qu'en raison des lacunes affectant le diagnostic de la présence des chiroptères en altitude dans la zone d'implantation du projet et l'évaluation de l'ampleur du risque de collision et de barotraumatisme associé au projet, l'efficacité de la mesure de réduction, prescrite par l'arrêté attaqué, consistant à brider les éoliennes, c'est-à-dire les arrêter, lors des périodes favorables à l'activité des chiroptères, ne peut être évaluée de façon pertinente. Il en résulte également que l'autorité administrative n'a pas été mise à même d'apprécier la pertinence, au regard du risque d'impact du projet sur les chiroptères, du choix fait par le pétitionnaire d'implanter ses éoliennes à proximité immédiate de haies et de boisements utilisés par les chiroptères.

21. Dès lors, les insuffisances de l'étude d'impact en ce qui concerne les chiroptères ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population et, en tout état de cause, ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

22. En ce qui concerne la faune autre que les chiroptères et l'avifaune, l'étude d'impact comporte, en pages 311 et suivantes ainsi qu'en pages 547 et suivantes, une analyse suffisante de l'état initial dans la zone d'implantation du projet et des impacts attendus de celui-ci.

Quant aux impacts du projet sur les zones humides :

23. Il résulte de l'instruction que, comme l'a relevé la mission régionale d'autorité environnementale Pays de la Loire dans son avis sur le projet, la description de l'état initial, figurant en pages 205 à 208 de l'étude d'impact, " propose une cartographie des zones humides basée sur plusieurs sources (...) sans toutefois préciser une cartographie "définitive" des zones humides sur la base d'investigations réalisées dans le cadre du projet ". Cette partie de l'étude d'impact conclut ainsi de façon erronée qu'il " n'est pas possible de définir les zones humides au sens légal du terme ", alors que les résultats des sondages pédologiques réalisés figurent en annexe à l'étude d'impact et devaient permettre de délimiter les zones humides sur la zone d'implantation du projet. Néanmoins, si cette lacune n'a pas été suffisamment comblée par les éléments et cartes qui figurent en pages 550 et suivantes, relatives aux impacts du projet sur les zones humides, et dans les annexes figurant en pages 759 et suivantes, elle l'a été dans le mémoire en réponse de la société Chaumes Énergies à l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale, versé au dossier de l'enquête publique, qui comporte des cartographies précises tenant compte des sondages pédologiques complémentaires réalisés sur le site le 16 juin 2020.

24. Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'éolienne E3 ne sera pas implantée en zone humide, pas plus que la partie de son chemin d'accès à créer, qui débutera en dehors de la zone humide. En revanche, il résulte de l'instruction que si le chemin d'accès à l'éolienne E3 et au poste de livraison no 1 empruntera dans sa première partie un chemin existant qui sera seulement renforcé, la seconde partie du chemin d'accès pour accéder au point de livraison no 1 sera créée au sein d'une zone humide, ainsi que cela ressort notamment de la page 548 de l'étude d'impact, pour une surface de 127 mètres carrés. Or cette dernière surface n'a pas été identifiée parmi les surfaces de zones humides impactées par le projet, qui figure en page 550 de l'étude d'impact. Il en résulte une inexactitude quant au total des zones humides impactées, qui représentent 5 098 mètres carrés et non 4 971 mètres carrés comme indiqué à tort dans l'étude d'impact. Cette inexactitude se retrouve par ailleurs dans la partie de l'étude d'impact, figurant en pages 613 et suivantes, relative à la mesure de compensation des zones humides impactées. Pour autant, compte-tenu de la relative faiblesse de la surface de zone humide impactée non prise en compte par la société pétitionnaire et du fait que la mesure de compensation retenue dans l'étude d'impact et reprise à l'article 8.3 de l'arrêté attaqué, à savoir la restauration en prairie humide ou roselière d'une surface de 1,05 hectares, excède le seuil de compensation de 200 % de la surface réellement impactée (10 196 mètres carrés au lieu de 9 942 mètres carrés), cette inexactitude de l'étude d'impact n'a pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ni n'a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

Quant aux autres insuffisances alléguées de l'étude d'impact :

25. En premier lieu, alors que la société Chaumes Énergies avait initialement prévu de réaliser une buse sur le ruisseau de La Blanche afin de permettre aux véhicules légers et lourds d'accéder à l'éolienne E4 lors des travaux de construction et de sa maintenance, la mission régionale d'autorité environnementale a estimé dans son avis sur le projet que la réalisation d'un tel ouvrage permanent sur un cours d'eau situé en tête de bassin versant n'était pas acceptable compte tenu du programme de restauration des cours d'eau. Celle-ci a suggéré deux autres solutions, à savoir la réalisation d'une passerelle ou d'un pont cadre, seule la seconde nécessitant de solliciter une autorisation au titre de la police de l'eau. Les services instructeurs ont alors proposé à la société pétitionnaire de réaliser un ouvrage de type " passerelle ", ce qui a conduit cette société à indiquer, dans son mémoire en réponse à l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale, que l'accès à l'éolienne E4 se ferait grâce à une telle passerelle, " sans appui sur le lit mineur et sans modification du profil " du cours d'eau. Alors même que le dossier de demande d'autorisation ne comportait pas davantage de précisions quant aux caractéristiques de cette passerelle, il ne résulte pas de l'instruction que cette insuffisance a pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

26. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent qu'aucun élément du dossier ne permet de garantir une absence d'impact du câble inter-éolien Est sur l'écoulement naturel du ruisseau de La Blanche et des eaux de ruissellement du vallon, la société Chaumes Énergies fait valoir que ce câble franchira le ruisseau dans une gaine prévue à cet effet sous le tablier de la passerelle, de sorte qu'il n'y aura aucune conséquence sur le milieu aquatique ou le lit du cours d'eau. Si les requérants soutiennent également que la société pétitionnaire aurait réduit le bassin versant de ce " micro-vallon " aux parcelles cadastrées section E nos 310 et 339, alors que le cours d'eau prendrait sa source en amont sur la parcelle cadastrée section E no 315, ils n'en justifient pas en se bornant à renvoyer sans autre précision à une cartographie figurant sur le site Internet de la préfecture de la Loire-Atlantique.

27. En dernier lieu, les haies impactées par le projet litigieux ont été recensées et comptabilisées en vue de compenser ces impacts, ainsi que cela ressort des pages 470 et suivantes, 539 et 604 et suivantes de l'étude d'impact.

28. Il résulte de ce qui précède que l'étude d'impact du projet litigieux est seulement entachée d'insuffisance en ce qui concerne son volet chiroptérologique et son volet acoustique, ainsi qu'il a été dit aux points 11 et 14 à 21.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'arrêté attaqué :

S'agissant de l'appréciation des conditions de fond relatives aux capacités financières de la société pétitionnaire :

29. Il résulte des dispositions des articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement, citées au point 7, que lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

30. Ainsi qu'il a été dit au point 9, il ressort du dossier de demande d'autorisation que la société Chaumes Énergies prévoit de financer le coût d'investissement total du projet, estimé entre 23 et 26 millions d'euros, à hauteur de 80 % par emprunt bancaire et de 20 % par un apport en fonds propres. La lettre de demande énonce par ailleurs que la mise en œuvre des garanties financières pour la remise en état du site donnera lieu à un cautionnement bancaire consenti à la société pétitionnaire avant la mise en service du parc. Dans ces conditions, à supposer que les requérants aient entendu soulever le moyen tiré du non-respect des dispositions des règles de fond prévues par les articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne les atteintes portées aux intérêts protégés par l'article L. 211-1 du code de l'environnement et la compatibilité du projet avec le SDAGE Loire-Bretagne :

31. Aux termes de l'article L.512-16 du code de l'environnement : " Les installations sont soumises aux dispositions des articles L. 211-1, L. 212-1 (...). " Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement : " I. - Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer : / 1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ; / (...). "

32. Aux termes de l'article L. 212-1 du code de l'environnement, relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) : " (...) III. - Chaque bassin ou groupement de bassins hydrographiques est doté d'un ou de plusieurs schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux fixant les objectifs visés au IV du présent article et les orientations permettant de satisfaire aux principes prévus aux articles L. 211-1 et L. 430-1. (...) / (...). / IX. - Le schéma directeur détermine les aménagements et les dispositions nécessaires (...) pour prévenir la détérioration et assurer la protection et l'amélioration de l'état des eaux et milieux aquatiques, pour atteindre et respecter les objectifs de qualité et de quantité des eaux mentionnées aux IV à VII. (...) / (...) / XI. - Les programmes et les décisions administratives dans le domaine de l'eau doivent être compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux. / (...). "

33. Aux termes de l'article L. 212-3 du même code, relatif aux schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) : " Le schéma d'aménagement et de gestion des eaux institué pour un sous-bassin, pour un groupement de sous-bassins correspondant à une unité hydrographique cohérente ou pour un système aquifère fixe les objectifs généraux et les dispositions permettant de satisfaire aux principes énoncés aux articles L. 211-1 et L. 430-1. / (...). " Aux termes de l'article L. 212-5-2 du même code : " Lorsque le schéma a été approuvé et publié, le règlement et ses documents cartographiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de toute installation, ouvrage, travaux ou activité mentionnés à l'article L. 214-2. / Les décisions applicables dans le périmètre défini par le schéma prises dans le domaine de l'eau par les autorités administratives doivent être compatibles ou rendues compatibles avec le plan d'aménagement et de gestion durable de la ressource en eau dans les conditions et les délais qu'il précise. "

34. Il résulte des dispositions de l'article L. 212-1 du code de l'environnement citées au point 32 que le SDAGE, d'une part, fixe, pour chaque bassin ou groupement de bassins, les objectifs de qualité et de quantité des eaux ainsi que les orientations permettant d'assurer une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, d'autre part, détermine à cette fin les aménagements et les dispositions nécessaires. En outre, lorsque cela apparaît nécessaire pour respecter ses orientations et ses objectifs, le SDAGE peut être complété, pour un périmètre géographique donné, par un SAGE qui doit lui être compatible et qui comporte, en vertu de l'article L. 212-5-1, d'une part, un plan d'aménagement et de gestion durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques, et d'autre part, un règlement pouvant édicter les obligations définies au II de cet article. En vertu du XI de l'article L. 212-1 et de l'article L. 212-5-2 du code de l'environnement, les décisions administratives prises dans le domaine de l'eau, dont celles prises au titre de la police de l'eau en application des articles L. 214-1 et suivants du même code, sont soumises à une simple obligation de compatibilité avec le SDAGE et avec le plan d'aménagement et de gestion durable du SAGE. Pour apprécier cette compatibilité, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire pertinent pour apprécier les effets du projet sur la gestion des eaux, si l'autorisation ne contrarie pas les objectifs et les orientations fixés par le schéma, en tenant compte de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation de l'autorisation au regard chaque orientation ou objectif particulier. En revanche, les décisions administratives prises au titre de la police de l'eau en application des articles L. 214-1 et suivants sont soumises à une obligation de conformité au règlement du SAGE et à ses documents cartographiques, dès lors que les installations, ouvrages, travaux et activités en cause sont situés sur un territoire couvert par un tel document.

35. Le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin Loire-Bretagne pour la période 2022-2027, approuvé par arrêté du 18 mars 2022 de la préfète de la région Centre-Val de Loire, préfète coordinatrice du bassin, comprend quatorze orientations fondamentales, dont une orientation no 8 consistant à " préserver et restaurer les zones humides ". Son point 8B-1 prévoit que " Les maîtres d'ouvrage de projets impactant une zone humide cherchent une autre implantation à leur projet, afin d'éviter de dégrader la zone humide. / À défaut d'alternative avérée et après réduction des impacts du projet, dès lors que sa mise en œuvre conduit à la dégradation ou à la disparition de zones humides, la compensation vise prioritairement le rétablissement des fonctionnalités. / À cette fin, les mesures compensatoires proposées par le maître d'ouvrage doivent prévoir la recréation ou la restauration de zones humides, cumulativement : / - équivalente sur le plan fonctionnel, / - équivalente sur le plan de la qualité de la biodiversité, / - dans le bassin versant de la masse d'eau. / En dernier recours, et à défaut de la capacité à réunir les trois critères listés précédemment, la compensation porte sur une surface égale à au moins 200 % de la surface, sur le même bassin versant ou sur le bassin versant d'une masse d'eau à proximité. / (...). ".

36. En premier lieu, les requérants ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance des dispositions des SAGE du Scorff et du Blavet, dès lors que le projet litigieux n'est pas situé au sein du territoire couvert par ces schémas mais au sein du territoire couvert par le SAGE de l'estuaire de la Loire.

37. En second lieu, il résulte de l'instruction que le parc éolien litigieux est prévu pour prendre place au sein de deux secteurs situés au nord et à l'est du cours d'eau de la Blanche, traversés par deux micro-vallons susceptibles d'accueillir des écoulements temporaires. Si des zones humides ont été recensées sur le site, la ministre de la transition écologique soutient sans être contredite qu'elles ne relèvent pas des " zones humide d'intérêt environnemental particulier " recensées par le SAGE de l'estuaire de la Loire. Par ailleurs, il ressort des pages 409 et suivantes de l'étude d'impact que si les éoliennes E2 et E3 et le poste de livraison no 1 sont prévus dans des secteurs concernés par une nappe sub-affleurante et que les éoliennes E1 et E4 se situent dans des secteurs concernés par un risque de remontée de nappe jugé fort, le site d'implantation du projet repose sur un socle granitique qui n'accueille pas d'importantes nappes d'eau libre dans le sol, avec pour conséquence un faible risque de remontée de nappe pour les installations du projet.

38. Ainsi qu'il a été dit au point 24, le projet litigieux, du fait de la création de chemins d'accès et de la construction des éoliennes E1, E2, E4 et E5, ainsi que des deux points de livraison, va engendrer la destruction de 5 098 mètres carrés de zones humides, et non pas de 4 971 mètres carrés comme indiqué à tort dans l'étude d'impact. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que cette surface, en dehors de la correction nécessaire pour y intégrer le chemin d'accès au point de livraison no 1, aurait été sous-évaluée, dès lors, d'une part, que la réalisation de sondages pédologiques supplémentaires en juin 2020 a conduit la société pétitionnaire à élargir la délimitation des zones humides sur la zone d'implantation du projet, sans que cette extension ait de conséquences en termes d'impacts eu égard à leur localisation, d'autre part, que la ministre fait valoir que le câblage inter-éolien consistera en la pose d'un câble au sein d'une tranchée qui sera refermée, ce qui n'aura aucune incidence sur la zone humide et ses fonctionnalités.

39. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la société pétitionnaire a étudié trois variantes, dont deux comportaient des implantations différentes des éoliennes, chacune de ces variantes ayant un impact équivalent sur les zones humides. En revanche, ainsi que le fait valoir la ministre de la transition écologique, une implantation des éoliennes en dehors des zones humides du site d'implantation du projet aurait eu potentiellement un impact plus fort pour la faune volante ainsi qu'au niveau acoustique et paysager.

40. Enfin, il résulte de l'instruction, notamment des pages 613 et suivantes de l'étude d'impact et du mémoire en réponse du pétitionnaire à l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale, que les zones humides impactées, à savoir des cultures et prairies semées en ray-grass ou fétuque et sans végétation hygrophile, présentent une diversité floristique restreinte et une faible fonctionnalité écologique. Elles présentent également une faible fonctionnalité hydrologique, limitée à la rétention ponctuelle dans le sol en raison des surfaces relativement planes, mais sans que la végétation soit de nature à ralentir les écoulements d'eau. La mesure de compensation retenue par la société pétitionnaire, et validée par le conservatoire des espaces naturels de la région des Pays de la Loire, consistera dans l'arrachage de 1,05 ha de peupleraie situés dans le même bassin versant, sur le site de la Mandine à Bouguenais, à environ 15 km du projet, et dans sa restauration en zones humides constituées de prairies humides ou roselières. Cette mesure, prévue au sein de la zone spéciale de conservation " Estuaire de la Loire ", aura une incidence positive sur la conservation de l'avifaune nicheuse et migratrice ainsi qu'un intérêt supérieur sur le plan fonctionnel aux zones humides supprimées, lesquelles seront compensées à hauteur de plus de 200 % de la surface détruite.

41. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué autorise un projet qui porterait atteinte aux intérêts protégés par l'article L. 211-1 du code de l'environnement et serait incompatible avec le SDAGE du bassin Loire-Bretagne doit être écarté.

En ce qui concerne les atteintes portées aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

42. En premier lieu, en ce qui concerne les impacts du projet pour la commodité du voisinage et les paysages, il résulte de l'instruction, notamment du cahier de photomontages réalisé pour la société Chaumes Énergies, que, depuis les hameaux les plus proches du projet, c'est-à-dire les lieux-dits " Le Bois Gendron ", " Belle-vue ", " Les Épinards ", " Les Grands Houx ", " La Métairie Neuve ", " Jarrie Rousse ", " Grand-Lande ", " Princé ", " Malhara ", situés entre 500 et 900 mètres de l'éolienne la plus proche, les éoliennes seront, en tout ou partie, fortement perceptibles, mais que leur vue sera généralement filtrée par la végétation ou atténuée par la présence de poteaux électriques ou d'éléments boisés présentant une taille apparente équivalente ou légèrement inférieure. La vue sur trois éoliennes, situées à 1 kilomètre environ, sera franche et prégnante depuis le lieu-dit " Belle Perche ", mais selon une implantation lisible et de façon cohérente avec les lignes de force paysagères en place. Les éoliennes E4 et E5 émergeront au-dessus de la végétation depuis la route départementale no 279 à l'est du lieu-dit " La Vinçonnière ", mais seront souvent occultées par la topographie et la végétation depuis ce lieu-dit, sauf depuis son point nord-est où les éoliennes seront très visibles mais sans effet d'écrasement. De même, il ne résulte pas de l'instruction que certains hameaux, notamment celui de " Belle-vue " ou de " Belle Perche ", subiront un effet d'encerclement ou d'écrasement du fait des éoliennes projetées. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les éoliennes seront rarement visibles depuis le bourg de Chéméré, mais seulement depuis les routes d'accès à ce bourg, sans effet d'écrasement ou de domination. Dès lors, le projet litigieux n'apparaît pas, eu égard à son impact visuel, de nature à constituer une atteinte à la commodité du voisinage ou aux paysages.

43. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit aux points 37 à 41, il ne résulte pas de l'instruction que le projet litigieux présente des dangers ou des inconvénients qui ne seraient pas compensés pour la protection de l'environnement en ce qui concerne les zones humides.

44. En dernier lieu, compte tenu des lacunes de l'étude d'impact, relevées aux points 14 à 21, qui entachent le dossier de demande en ce qui concerne son volet chiroptérologique, la cour n'est pas en mesure d'apprécier la conformité du projet à l'article L. 511-1 du code de l'environnement en tant qu'il est soutenu que le projet porte une atteinte excessive aux espèces animales. Il y a lieu, dès lors, pour la cour de réserver la réponse à cette branche du moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, laquelle demeure susceptible d'être écartée ou accueillie après l'éventuelle régularisation du dossier de demande d'autorisation environnementale.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement :

45. D'une part, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle (...) d'animaux de ces espèces (...). " Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " I. - Un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : / (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : / a) Dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ; / b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ; / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; / d) À des fins de recherche et d'éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ; / e) Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d'une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d'un nombre limité et spécifié de certains spécimens. / (...) ".

46. D'autre part, aux termes de l'article L. 181-1 du code de l'environnement, créé par l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " L'autorisation environnementale, dont le régime est organisé par les dispositions du présent livre ainsi que par les autres dispositions législatives dans les conditions fixées par le présent titre, est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : / (...) / 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1. / (...). " En vertu du I de l'article L. 181-2 du même code, créé par la même ordonnance, " l'autorisation environnementale tient lieu, y compris pour l'application des autres législations, des autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments suivants, lorsque le projet d'activités, installations, ouvrages et travaux relevant de l'article L. 181-1 y est soumis ou les nécessite : / (...) / 5° Dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats en application du 4° de l'article L. 411-2 ; / (...) ". Selon l'article L. 181-3 du même code : " (...) / II. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : / (...) 4° Le respect des conditions, fixées au 4° de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation ; / (...) ".

47. Dès lors que l'autorisation environnementale créée par l'ordonnance du 26 janvier 2017 tient lieu des diverses autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés au I de l'article L. 181- 2 du code de l'environnement, dont la dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale peut être utilement contestée au motif qu'elle n'incorpore pas, à la date à laquelle la cour statue, la dérogation dont il est soutenu qu'elle est requise pour le projet en cause.

48. Compte tenu des lacunes de l'étude d'impact, relevées aux points 14 à 21, qui entachent le dossier de demande en ce qui concerne son volet chiroptérologique, et qui ne permettent ni d'apprécier de façon pertinente le risque de collision avec les éoliennes par les chiroptères de haut vol fréquentant le site d'implantation du projet ni l'efficacité potentielle de la mesure de réduction consistant à brider les éoliennes dans certaines conditions temporelles et météorologiques, la cour n'est pas en mesure de se prononcer sur les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement aux motifs qu'aucune dérogation à l'interdiction de porter atteinte aux espèces protégées n'a été accordée et que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en excluant que l'autorisation environnementale contestée tienne lieu de dérogation à l'interdiction de porter atteinte aux espèces protégées. Il y a lieu, dès lors, pour la cour de réserver la réponse à ce moyen, lequel demeure susceptible d'être écarté ou accueilli après l'éventuelle régularisation du dossier de demande d'autorisation environnementale.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :

49. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / II. - En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées. "

50. La faculté ouverte par les dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, relève de l'exercice d'un pouvoir propre du juge, qui n'est pas subordonné à la présentation de conclusions en ce sens. Lorsqu'il n'est pas saisi de telles conclusions, le juge du fond peut toujours mettre en œuvre cette faculté, mais il n'y est pas tenu, son choix relevant d'une appréciation qui échappe au contrôle du juge de cassation. En revanche, lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, le juge est tenu de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient du 2° du I de l'article L. 181-18-du code de l'environnement si les vices qu'il retient apparaissent, au vu de l'instruction, régularisables. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision attaquée, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue.

51. En l'espèce, le vice entachant l'autorisation environnementale en litige relatif aux insuffisances et inexactitudes de l'étude d'impact, relevé aux points 11 et 14 à 21, est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative, prise au vu d'un dossier actualisé à la lumière des motifs du présent arrêt et après consultation d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises.

52. L'avis émis, le cas échéant, par l'autorité environnementale ainsi que le dossier actualisé, seront soumis à une nouvelle phase d'information du public organisée selon les modalités suivantes :

- un dossier présenté par la société Chaumes Énergies sera soumis au public pour compléter son information sur le projet ; ce dossier comprendra des éléments rappelant la nature du projet ; il précisera l'objet de la nouvelle phase d'information du public et une copie du présent arrêt y sera annexée ; il comportera tous éléments utiles relatifs à l'état initial du site au plan chiroptérologique et aux effets du projet sur les chiroptères, ainsi que tous éléments utiles relatifs aux impacts sonores bruts et résiduels du projet en période nocturne ;

- ce dossier sera mis à la disposition du public pendant une durée de quinze jours consécutifs dans les locaux de la mairie de la commune nouvelle de Chaumes-en-Retz aux jours et heures d'ouverture de la mairie et il sera mis en ligne, pendant la même durée, sur le site internet de cette commune ainsi que sur celui de la préfecture de la Loire-Atlantique ;

- le public pourra, pendant cette durée de quinze jours, présenter des observations ; celles-ci seront soit portées sur un registre mis à la disposition du public, soit envoyées par courrier à l'adresse de la mairie ou par courriel à destination d'une personne désignée par le président du tribunal administratif de Nantes et qui sera choisie sur la liste départementale d'aptitude à l'exercice des fonctions de commissaire-enquêteur ;

- un avis au public devra être publié afin de porter à sa connaissance l'ouverture de cette nouvelle phase d'information ; il devra préciser l'objet de cette phase en indiquant en particulier qu'il s'agit d'assurer l'exécution du présent arrêt en vue de la régularisation de l'arrêté du 25 juin 2021 du préfet de la Loire-Atlantique par l'intervention d'une autorisation modificative de régularisation corrigeant les vices retenus par le présent arrêt ;

- cet avis sera publié quinze jours au moins avant le début de cette phase d'information et pendant toute la durée de celle-ci par voie d'affiches et éventuellement par tout autre moyen dans la commune nouvelle de Chaumes-en-Retz ainsi que sur le site internet de cette commune et celui de la préfecture de la Loire-Atlantique ; ce même avis sera également affiché dans les communes concernées au sens de l'article R. 512-4 du code de l'environnement ; il sera publié dans deux journaux locaux diffusés dans le département de la Loire-Atlantique, quinze jours au moins avant le début de cette nouvelle phase d'information du public ; il sera en outre rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci ; la société Chaumes Énergies procédera enfin dans les mêmes conditions de délais à l'affichage de l'avis d'ouverture de cette phase d'information sur le site de réalisation du projet ;

- dans un délai de quinze jours suivant la clôture du registre par la personne désignée par le président du tribunal administratif de Nantes, cette personne remettra au préfet de la Loire-Atlantique et au président du tribunal un rapport dont le contenu devra relater le déroulement de cette nouvelle phase d'information et synthétiser le cas échéant les observations recueillies ;

- la société Chaumes Énergies prendra en charge les frais de cette phase d'information du public, notamment l'indemnisation de la personne qui sera désignée par le président du tribunal administratif de Nantes ;

- le préfet de la Loire-Atlantique devra, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, saisir le président du tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la désignation de cette personne.

53. Eu égard aux modalités de régularisation fixées aux points précédents, l'éventuelle mesure de régularisation devra être communiquée à la cour dans un délai de dix-huit mois à compter du présent arrêt.

54. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de M. U... et autres jusqu'à l'expiration du délai mentionné au point précédent afin de permettre cette régularisation.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête de M. U... et autres jusqu'à l'expiration d'un délai de dix-huit mois, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à l'État et à la société Chaumes Énergies pour produire devant la cour une autorisation environnementale modificative conforme aux modalités définies aux points 51 et 52 du présent arrêt.

Article 2 : Tous droits et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... U..., désigné représentant unique des requérants, à la société Chaumes Énergies et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie du présent arrêt sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 20 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 janvier 2023.

Le rapporteur,

F.-X. M...La présidente,

C. Buffet

La greffière,

K. Bouron

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 21NT03002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03002
Date de la décision : 13/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : RIVIERE AVOCATS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-01-13;21nt03002 ?
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