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13/01/2023 | FRANCE | N°22NT02460

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 13 janvier 2023, 22NT02460


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Trémuson à lui verser la somme de 24 115, 31 euros en réparation du préjudice résultant de sa chute de vélo le 2 septembre 2017.

Par un jugement no 2001674 du 5 juillet 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2022, Mme B..., représentée par Me Baron, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5

juillet 2022 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de condamner la commune de Trémuson à lui ve...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Trémuson à lui verser la somme de 24 115, 31 euros en réparation du préjudice résultant de sa chute de vélo le 2 septembre 2017.

Par un jugement no 2001674 du 5 juillet 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2022, Mme B..., représentée par Me Baron, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2022 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de condamner la commune de Trémuson à lui verser la somme de

24 115, 31 euros en réparation des préjudices résultant de l'accident dont elle a été victime sur la voie publique communale le 2 septembre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Trémuson les frais d'expertise ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Trémuson la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité de la commune de Trémuson doit être engagée sur le fondement de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales du fait de la carence fautive du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police, faute d'avoir procédé au retrait du tuyau ou à la signalisation du danger que sa présence représentait ;

- le fait du tiers ne saurait l'exonérer de sa responsabilité, dès lors que le tuyau était présent sur la voie communale depuis plusieurs jours et que la commune en était informée ;

- la compétence de l'établissement public de coopération intercommunal Saint-Brieuc agglomération pour interdire le stationnement des résidences mobiles sur son territoire, ne fait pas obstacle à l'exercice par le maire de ses pouvoirs de police générale pour faire retirer le tuyau et interdire le stationnement ; en toute hypothèse, le plan local d'urbanisme de la commune interdit le stationnement isolé de caravanes sur son territoire dans la zone 1AUY, dans laquelle est située la parcelle sur laquelle sont installés les gens du voyage ;

- la responsabilité de la commune est engagée en raison du défaut d'entretien normal de la voie publique sur laquelle elle circulait au moment de l'accident et dont elle était en conséquence usagère ;

- la commune doit l'indemniser des divers préjudices que lui a causé sa chute, qu'elle évalue à la somme globale de 24 115, 31 euros, soit 9 600 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, 2 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, 1 000 euros au titre du préjudice d'agrément, 1 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, 7 000 euros au titre des souffrances endurées, 2 038, 95 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total et partiel, 1 470 euros au titre de ses besoins en assistance par tierce personne et 6,36 euros au titre de la franchise des jours de carence.

Par un mémoire, enregistré le 5 octobre 2022, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Côtes-d'Armor, représentée par la caisse primaire d'assurance maladie

d'Ille-et-Vilaine, représentée par Me Di Palma, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2022 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de condamner la commune de Trémuson à lui verser la somme de 9 208,34 euros en remboursement des débours qu'elle a exposés, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et capitalisation de ces intérêts ;

3°) de condamner la commune de Trémuson à lui verser une somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Trémuson la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité de la commune est engagée en raison du défaut d'entretien normal de la voie publique sur laquelle circulait Mme B... au moment de l'accident ;

- elle est également engagée sur le fondement de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales du fait de la carence fautive du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police générale à n'avoir pas retiré le tuyau ou signalé le danger que sa présence représentait sur la voie publique ;

- la compétence de Saint-Brieuc agglomération en matière d'aire d'accueil n'empêche pas le maire de faire usage de ses pouvoirs de police générale pour faire retirer le tuyau litigieux, qui gênait la circulation ;

- elle a exposé des débours en faveur de son assurée à raison de cet accident à hauteur de 9 208,34 euros ;

- elle a droit à une indemnité forfaitaire de gestion de 1 114 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2022, la commune de Trémuson, représentée par Me Lahalle, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... et de la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes-d'Armor la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de Mme B... est irrecevable dès lors qu'elle reprend sa demande de première instance sans critiquer les motifs du jugement attaqué ;

- les moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Vautier, représentant la commune de Tremuson.

Considérant ce qui suit :

1. Le 2 septembre 2017, alors qu'elle circulait à bicyclette à proximité immédiate de son domicile, sur le territoire de la commune de Trémuson, Mme B... déclare avoir chuté en heurtant de sa roue un tuyau traversant la voie communale, qui avait été branché à une borne incendie afin d'alimenter en eau un campement de gens du voyage, stationné à proximité. Par une ordonnance du 13 mai 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a prescrit une expertise afin d'évaluer les préjudices subis par Mme B... à la suite de cette chute. L'expert a déposé son rapport le 3 octobre 2019. Le 4 février 2020, Mme B... a présenté une réclamation préalable auprès de la commune de Trémuson afin d'être indemnisée des préjudices résultant de cet accident qu'elle évalue à la somme globale de 24 115, 31 euros. Cette demande ayant été rejetée par décision du maire du 18 février 2020, elle a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser une indemnité du même montant. Mme B... relève appel du jugement du 5 juillet 2022 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public :

2. Pour obtenir réparation par le maître de l'ouvrage des dommages qu'il a subis, l'usager de la voie publique doit démontrer, d'une part, la réalité de son préjudice et, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et le dommage. Pour s'exonérer de la responsabilité qui pèse sur elle, il incombe à la collectivité, soit d'établir qu'elle a normalement entretenu l'ouvrage, soit de démontrer la faute de la victime ou l'existence d'un évènement de force majeure.

3. Il résulte de l'instruction que le tuyau d'eau présent sur la voie communale, auquel Mme B... impute sa chute à bicyclette, n'appartient pas à la commune et a été mis en place sans autorisation de l'autorité gestionnaire de voirie en travers de la voie publique pour alimenter en eau un campement de gens du voyage, sans qu'il ressorte des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de la séance du conseil municipal du

19 septembre 2017 auquel la requérante renvoie la cour, que la commune aurait eu connaissance de la présence de ce tuyau avant l'accident. Par suite, ni la présence, ni le défaut de signalisation de ce tuyau, au demeurant parfaitement visible et de faible diamètre, ne sont de nature, en l'espèce, à caractériser un défaut d'entretien normal de la voie publique susceptible d'engager la responsabilité de la commune de Trémuson à l'égard de Mme B....

Sur l'exercice par le maire de ses pouvoirs de police :

4. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'éclairage, l'enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices et monuments funéraires menaçant ruine, l'interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autres parties des édifices qui puisse nuire par sa chute ou celle de rien jeter qui puisse endommager les passants ou causer des exhalaisons nuisibles ainsi que le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire, en quelque manière que ce soit, à la sûreté ou à la commodité du passage ou à la propreté des voies susmentionnées ". A cet égard, il appartient notamment au maire de signaler spécialement les dangers excédant ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement, par leur prudence, se prémunir.

5. Il ne résulte pas de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 3 que la commune aurait été informée, à la date de l'accident, de la présence du tuyau d'eau branché sans autorisation à une bouche incendie afin d'alimenter un campement de gens du voyage. Dans ces conditions, la présence de ce tuyau sur la voie publique ne révèle pas de carence fautive du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police générale susceptible d'engager la responsabilité de la commune de Tremuson à l'égard de Mme B....

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune, que Mme B... et la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Sur les frais liés à l'instance :

7. En application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de laisser les frais de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 000 euros par l'ordonnance du président du tribunal administratif de Rennes du 13 mai 2019, à la charge définitive de Mme B....

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Trémuson, qui ne supporte pas la charge des dépens, les sommes que Mme B... et la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... et de la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor la somme demandée par la commune de Trémuson au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor sont rejetées.

Article 2 : Les frais de l'expertise médicale, liquidés et taxés à la somme de 1 000 euros, sont laissés à la charge définitive de Mme B....

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Trémuson sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine, et à la commune de Trémuson.

Une copie en sera, en outre, adressée à l'expert et à la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes-d'Armor

Délibéré après l'audience du, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente assesseure,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2023.

La rapporteure,

J. C...Le président,

D. Salvi

La greffière,

A. Martin

La République mande et ordonne au préfet des Côtes d'Armor en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT024602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02460
Date de la décision : 13/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Judith LELLOUCH
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : DI PALMA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-01-13;22nt02460 ?
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