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31/03/2023 | FRANCE | N°23NT00385

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Juge unique, 31 mars 2023, 23NT00385


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a, par une requête enregistrée le 16 janvier 2023, demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de l'arrêté du 2 janvier 2023 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a prononcé son transfert aux autorités danoises.

Par un jugement n° 2300223 du 24 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2023, et un mémoire en réplique enregistré le 29 mars 2023 -non co

mmuniqué-, le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a, par une requête enregistrée le 16 janvier 2023, demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de l'arrêté du 2 janvier 2023 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a prononcé son transfert aux autorités danoises.

Par un jugement n° 2300223 du 24 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2023, et un mémoire en réplique enregistré le 29 mars 2023 -non communiqué-, le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 2300223 rendu par le tribunal administratif de Rennes le 24 janvier 2023.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu un défaut d'examen particulier de la situation de la requérante au regard des risques encourus dans son pays d'origine, le conduisant à retenir à tort une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2023, Mme B..., représentée par Me Berthet-Le Floch, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 1500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle fait valoir que les moyens du préfet ne sont pas fondés.

Vu la requête n° 23NT00383 par laquelle le préfet d'Ille-et-Vilaine relève appel du jugement n° 2300223 du tribunal administratif de Rennes du 24 janvier 2023.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, (...) le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 ". Par ailleurs, l'article R. 811-15 du même code prévoit que : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.". En application de ces dispositions, lorsque le juge d'appel est saisi d'une demande de sursis à exécution d'un jugement prononçant l'annulation d'une décision administrative, il lui incombe de statuer au vu de l'argumentation développée devant lui par l'appelant et par le défendeur et en tenant compte, le cas échéant, des moyens qu'il est tenu de soulever d'office. Après avoir analysé dans les visas ou les motifs de sa décision les moyens des parties, il peut se borner à relever qu'aucun des moyens n'est de nature, en l'état de l'instruction, à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué et rejeter, pour ce motif, la demande de sursis. Si un moyen lui paraît, en l'état de l'instruction, de nature à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, il lui appartient de vérifier si un des moyens soulevés devant lui ou un moyen relevé d'office est de nature, en l'état de l'instruction, à infirmer ou à confirmer l'annulation de la décision administrative en litige, avant, selon le cas, de faire droit à la demande de sursis ou de la rejeter.

2. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité (...) ". La faculté laissée aux autorités françaises, par les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations.

4. Les moyens développés par le préfet d'Ille-et-Vilaine ne paraissent pas sérieux, en l'état de l'instruction, ni de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué et le rejet des conclusions en annulation de l'arrêté en cause.

5. Il résulte de tout ce qui précède que, la demande de sursis à exécution du jugement n° 2300223 du tribunal administratif de Rennes du 24 janvier 2023 ne peut être accueillie.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et, sous réserve que l'avocate de Mme B... renonce à percevoir la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros à verser à Me Berthet-Le Floch, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La demande du préfet d'Ille-et-Vilaine tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 2300223 du tribunal administratif de Rennes en date du 24 janvier 2023 est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Me Berthet-Le Floch, avocate de Mme B..., la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à la part contributive de l'État.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme C... B....

Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Fait à Nantes, le 31 mars 2023.

Le président de la 6ème chambre La greffière

Olivier A... Pauline BONNIEU

La République mande et ordonne au ministre l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT00385 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Juge unique
Numéro d'arrêt : 23NT00385
Date de la décision : 31/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Suspension sursis

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier GASPON
Avocat(s) : BERTHET-LE FLOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-03-31;23nt00385 ?
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