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13/06/2023 | FRANCE | N°23NT01205

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Juge des référés, 13 juin 2023, 23NT01205


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 24 avril 2023, l'association anti-éolienne du Haut-Vignoble, M. et Mme S... P..., M. U... I..., M. N... L..., M. E... H..., M. C... G..., M. D... K..., M. M... F... et Mme B... T..., Mme W... V..., M. O... Q..., Mme J... R..., représentés par Me Echezar, demandent à la cour :

1°) de prononcer, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 8 février 2017 du préfet de la Loire-Atlantique accordant à la société Ferme Eolienne du Haut Vign

oble l'autorisation d'exploiter le parc éolien du Haut Vignoble, composé de...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 24 avril 2023, l'association anti-éolienne du Haut-Vignoble, M. et Mme S... P..., M. U... I..., M. N... L..., M. E... H..., M. C... G..., M. D... K..., M. M... F... et Mme B... T..., Mme W... V..., M. O... Q..., Mme J... R..., représentés par Me Echezar, demandent à la cour :

1°) de prononcer, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 8 février 2017 du préfet de la Loire-Atlantique accordant à la société Ferme Eolienne du Haut Vignoble l'autorisation d'exploiter le parc éolien du Haut Vignoble, composé de six aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur les communes de La Regrippière, de Vallet et de La Remaudière et de l'arrêté du 7 juillet 2021 du préfet de la Loire-Atlantique portant régularisation de l'autorisation d'exploiter délivrée à la société Ferme éolienne du Haut Vignoble ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- s'agissant de la recevabilité de la requête, ils s'en rapportent à leurs écritures de première instance ;

- il y a urgence à suspendre l'arrêté du 7 juillet 2021, les travaux ont commencé, laissant présager l'imminence de la mise en exploitation ;

- il existe un doute sérieux sur la légalité de l'autorisation accordée compte tenu des multiples illégalités dont elle est entachée ;

- le nouvel avis de la mission régionale d'autorité environnementale (MRAE) relève l'insuffisance de l'étude d'impact en tant qu'elle porte sur l'étude de l'avifaune, l'étude des chiroptères, l'étude des zones humides ainsi que l'insuffisance des mesures compensatoires envisagées en méconnaissance des dispositions du schéma d'aménagement et de gestion de l'eau (SAGE) de la Sèvre nantaise et du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) de Loire Bretagne ;

- l'autorisation porte atteinte à une zone humide sur les parcelles d'implantation des éoliennes 3, 5 et 6 ; la zone présente sur le site de l'éolienne E5 présente un intérêt biologique puisque cette zone a été identifiée par le plan local d'urbanisme comme étant à protéger dans laquelle il est impossible de construire des éoliennes ; elle a été délivrée en méconnaissance des dispositions du SDAGE ; elle porte atteinte aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; les mesures préconisées sont insuffisantes pour compenser la destruction des zones humides ;

- l'autorisation d'exploiter aurait dû faire l'objet d'une demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées.

Par un mémoire enregistré le 7 juin 2023 le ministre de ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas satisfaite ;

- les requérants ne font pas état de moyens propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité des arrêtés portant autorisation d'exploiter ; l'étude chiroptèrologique n'est pas insuffisante ; l'étude d'impact qui présente les impacts du projet sur les zones humides et les mesures de compensation n'est pas insuffisante ; ils n'établissent pas que la mesure de compensation prévue s'agissant de la zone humide ne serait pas pertinente ; le moyen tiré de ce que l'autorisation d'exploiter aurait dû faire l'objet d'une demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées n'est pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité des arrêtés préfectoraux.

Par un mémoire enregistré le 8 juin 2023, la société Ferme Eolienne du Haut Vignoble conclut au rejet de la requête et demande le versement de la somme de 3 000 euros au titre des frais de procès. Elle soutient que :

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir ;

- ils n'apportent pas la preuve d'une telle situation d'urgence ; l'intérêt public qui s'attache au développement d'un projet éolien doit primer sur les intérêts particuliers des requérants ; il n'existe aucune corrélation entre le commencement des travaux d'un parc éolien, et sa mise en service ;

- il n'existe pas de doute sérieux quant à la légalité externe et à la légalité interne des arrêtés du 8 février 2017 et du 7 juillet 2021 ; l'étude d'impact n'est pas entachée des insuffisances alléguées ; le projet ne porte pas atteinte aux intérêt visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, notamment aux zones humides, eu égard aux mesures prises ; le moyen tiré de ce que l'autorisation d'exploiter aurait dû faire l'objet d'une demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées n'est pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité des arrêtés préfectoraux.

Vu la requête n°22NT01665 enregistrée le 30 mai 2022 par laquelle l'association anti-éolienne du Haut Vignoble ont demandé l'annulation :

- du jugement nos 1701059, 1701062, 1701064, 1704959 du tribunal administratif de Nantes du 18 juin 2020 ayant prononcé un sursis à statuer sur la demande 1704959 ;

- du jugement nos 1704959 du tribunal administratif de Nantes du 31 mars 2022 ayant rejeté la requête en annulation ;

- de l'arrêté n° 2016/ICPE/188 du préfet de la Loire-Atlantique du 8 février 2017 accordant à la société Ferme Eolienne du Haut Vignoble l'autorisation d'exploiter le parc éolien du Haut Vignoble, composé de six aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur les communes de La Regrippière (44330), de Vallet (44330) et de La Remaudière (44430) ;

- de l'arrêté n° 2021/ICPE/193 du Préfet de la Loire-Atlantique du 7 juillet 2021 confirmant l'autorisation d'exploiter délivrée à la société Ferme éolienne du Haut Vignoble.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du président de la cour administrative d'appel de Nantes du 1er septembre 2022 désignant Mme Buffet, présidente de chambre, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative, pour statuer en qualité de juge des référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Buffet, présidente-rapporteure ;

- les observations de Me Echezar, représentant l'association anti-éolienne du Haut Vignoble et autres, et les observations de Me Berges, substituant Me Elfassi, représentant la société Ferme éolienne du Haut Vignoble.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".

2. Par un arrêté du 8 février 2017, le préfet de la Loire-Atlantique a délivré à la société Ferme éolienne du Haut Vignoble une autorisation d'exploiter le parc éolien du Haut Vignoble composé de six éoliennes implantées sur les territoires des communes de la Regrippière, Vallet et La Remaudière. A... le cadre du recours formé contre cet arrêté par l'association anti-éolienne du Haut Vignoble ainsi que plusieurs personnes physiques résidant dans les communes concernées, le tribunal a, par un jugement du 18 juin 2020, prononcé un sursis à statuer afin de permettre au préfet de la Loire-Atlantique de régulariser le vice tiré de l'irrégularité de l'avis émis par l'autorité environnementale. Un nouvel avis a été émis par l'autorité environnementale, le 13 janvier 2021. Puis, une enquête publique complémentaire a été organisée du 29 mars au 30 avril 2021 et a donné lieu à un avis favorable. Par un arrêté du 7 juillet 2021, le préfet de la Loire-Atlantique a pris un arrêté de régularisation de l'autorisation d'exploiter délivrée à la société Ferme éolienne du Haut Vignoble. L'association anti-éolienne du Haut Vignoble et autres demandent de prononcer, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution des arrêtés des 8 février 2017 et du 7 juillet 2021 du préfet de la Loire-Atlantique.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société Ferme éolienne du Haut Vignoble :

3. Il résulte de l'instruction que l'association anti éolienne du Haut vignoble, déclarée en préfecture le 22 mars 2013, a notamment pour objet social de défendre l'environnement et de protéger les espaces naturels, le patrimoine bâti, la qualité des paysages, des sites et du patrimoine des communes de La Regrippière, La Remaudière, et Vallet, et de lutter contre les projets de parcs éoliens incompatibles avec la protection de ces intérêts sur le territoire de ces communes. De même, les requérants personnes physiques, sont pour la plupart, propriétaire de biens immobiliers situés à proximité des lieux d'implantation des éoliennes. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société Ferme éolienne du Haut Vignoble doit être écartée.

Sur l'urgence :

4. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. Il lui appartient également, l'urgence s'appréciant objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des parties, l'ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence.

5. Il ressort des pièces du dossier que les travaux de construction du parc éolien sont à ce jour très avancés, les fondations d'au moins une machine ayant été réalisées. La construction de six aérogénérateurs, si elle peut présenter un intérêt public au moins local, est de nature à porter une atteinte grave à la situation des requérants personnes physiques dont les habitations se situent à une distance comprise entre 530 et 1 600 mètres des éoliennes hautes, pour certaines d'entre elles, de près de 150 m. A... ces conditions, la condition d'urgence doit être regardée comme satisfaite.

Sur les moyens propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité des arrêtés préfectoraux :

6. Le moyen tiré de ce que les mesures de compensation prescrites par l'autorisation litigieuse, délivrée pour l'exploitation d'un parc éolien sur certaines parcelles, ou partie d'entre elles, notamment les parcelles d'implantation des éoliennes 3 et 5, comprises dans une zone humide, sont insuffisantes au regard des intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité des arrêtés préfectoraux des 8 février 2017 et 7 juillet 2021.

7. Il résulte de tout ce qui précède que l'exécution des arrêtés des 8 février 2017 et 7 juillet 2021 du préfet de la Loire-Atlantique portant autorisation et autorisation modificative d'exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent, regroupant six aérogénérateurs, sur les territoires des communes de la Regrippière, de Vallet et de La Remaudière doit être suspendue.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à l'association anti-éolienne du Haut Vignoble et autres la somme qu'ils demandent au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association anti-éolienne du Haut Vignoble et autres le versement à la société Ferme éolienne du Haut Vignoble de la somme qu'elle demande au titre de ces mêmes dispositions.

ORDONNE :

Article 1er : L'exécution des arrêtés des 8 février 2017 et du 7 juillet 2021 du préfet de la Loire-Atlantique portant délivrance à la société Ferme éolienne du Haut Vignoble d'une autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent, regroupant six aérogénérateurs, sur les territoires des communes de la Regrippière, Vallet et La Remaudière est suspendue.

Article 2 : Les conclusions présentées par les parties tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association anti-éolienne du Haut Vignoble, représentant unique désigné par Me Echezar, mandataire, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Ferme éolienne du Haut Vignoble.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Loire-Atlantique.

Fait à Nantes, le 13 juin 2023.

La juge des référés,

C. BUFFET

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°23NT01205


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 23NT01205
Date de la décision : 13/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Avocat(s) : ELFASSI PAUL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-06-13;23nt01205 ?
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