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27/10/2023 | FRANCE | N°22NT02966

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 27 octobre 2023, 22NT02966


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

1°) Par une requête enregistrée sous le n° 1900792, la CPAM d'Ille-et-Vilaine a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes à lui verser la somme totale de 466 100,11 euros, outre l'indemnité forfaitaire de gestion, assortie des intérêts de droit et de leur capitalisation, au titre des dépenses de santé exposées pour M. B....

2°) Par une requête enregistrée sous le n° 1903666, la SHAM a demandé au tribunal administratif de Ren

nes d'annuler le titre exécutoire n° 2018-278 du 18 mai 2018 émis à son encontre par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

1°) Par une requête enregistrée sous le n° 1900792, la CPAM d'Ille-et-Vilaine a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes à lui verser la somme totale de 466 100,11 euros, outre l'indemnité forfaitaire de gestion, assortie des intérêts de droit et de leur capitalisation, au titre des dépenses de santé exposées pour M. B....

2°) Par une requête enregistrée sous le n° 1903666, la SHAM a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler le titre exécutoire n° 2018-278 du 18 mai 2018 émis à son encontre par l'ONIAM pour un montant de 106 839,12 euros et de la décharger du paiement de la somme ainsi mise à sa charge

Par un jugement n° 190079,1903666 du 8 juillet 2022 le tribunal administratif de Rennes a condamné le CHU de Rennes à verser à la CPAM d'Ille-et-Vilaine la somme de

80 773,11 euros outre une rente annuelle viagère de 11 131 euros, a rejeté la requête de la SHAM et a condamné cette dernière à verser la somme de 5 500 euros au titre des pénalités prévues à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 12 septembre 2022, le 11 octobre 2022 et le 22 septembre 2023, le centre hospitalier régional et universitaire (CHU) de Rennes et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), représentés par Me Le Prado, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2022 ;

2°) de faire droit à leur demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la CPAM d'Ille-et-Vilaine le versement de la somme de

3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- La responsabilité du CHU ne peut être engagée dès lors que :

. l'indication opératoire n'était pas fautive ;

. aucune alternative thérapeutique n'existait compte tenu de l'échec des précédents traitements et des douleurs dont souffrait M. B... ;

. aucune faute n'a été commise lors de l'intervention chirurgicale du 16 juin 2014 ; l'image faite par IRM la veille a révélé un problème infectieux et non une collection de liquide céphalo-rachidien ;

. il ne peut être constaté de retard dans la prise en charge de M. B... ; le retard observé n'a pas influé sur ses chances de récupération ;

- une perte de chance intégrale est exclue lorsqu'il existe un doute sur l'évolution de l'état de santé de la victime ; cette perte de chance ne pouvait, en l'espèce, qu'être partielle ;

- le titre de recettes émis à l'encontre de la SHAM doit être annulé et cette dernière déchargée des sommes réclamées par l'ONIAM ;

- l'évaluation du préjudice subi au titre du déficit fonctionnel permanent doit être ramené à de plus justes proportions et ne saurait excéder 30 % ;

- le titre exécutoire est irrégulier comme méconnaissant l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration puisque le nom de son auteur diffère entre l'avis des sommes à payer adressé à la SHAM et l'ordre de recouvrer exécutoire ;

- le refus d'indemnisation opposé par la SHAM était légitime compte tenu du caractère contradictoire des deux expertises, de sorte que la pénalité prévue par l'article L. 1142-15 du code de la santé publique ne trouvait pas à s'appliquer.

Par un mémoire enregistré le 24 octobre 2022, la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine, représentée par Me Di Palma, conclut :

1°) à la réformation du jugement du 8 juillet 2022 en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande ;

2°) à la condamnation in solidum du CHU de Rennes et de la SHAM à lui verser la somme de 466 100,11 euros en remboursement de ses débours majorée des intérêts de droit à compter de la date de l'arrêt à intervenir et de la capitalisation de ces intérêts ;

3°) à la condamnation in solidum du CHU de Rennes et de la SHAM à lui verser la somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion due au titre de la première instance et celle de 1 1114 euros au titre de la même indemnité en cause d'appel ;

4°) à ce que soit mise à la charge in solidum du CHU de Rennes et de la SHAM la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés en première instance et celle de 2 000 euros sur le même fondement au titre des frais exposés en cause d'appel ainsi que les dépens de ces deux instances.

Elle soutient que :

- la responsabilité du CHU de Rennes est engagée dès lors que l'indication opératoire n'était pas appropriée et que la technique opératoire et la prise en charge de la complication survenue n'ont pas été conformes aux règles de l'art ;

- c'est à tort que le tribunal a réduit le montant des sommes demandées au titre des indemnités journalières au motif que M. B... perçoit depuis 2009 une pension d'invalidité ;

- c'est à tort que le tribunal a limité à 11 131 euros le montant de la rente annuelle destinée à la prise en charge des frais de santé futurs de M. B... ; ce montant devait être majoré par application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale.

Par un mémoire enregistré le 10 septembre 2023, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), représenté par Me Welsch, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du CHU de Rennes et de la SHAM ;

2°) subsidiairement, de recevoir son appel incident et de faire droit au besoin à sa demande de condamnation au paiement du montant du titre en cas d'annulation de celui-ci pour vice de forme ;

3°) de le recevoir en son appel incident au titre du montant de la pénalité prévue à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et de faire droit à sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 16 025,87 euros correspondant à 15% de la somme de

106 839,12 euros, à mettre à la charge de la SHAM ;

4°) de le recevoir en son appel incident au titre des intérêts et de leur capitalisation et de condamner la SHAM aux intérêts au taux légal sur la somme de 106 839, 12 euros à compter du 21 août 2018 qui seront capitalisés le 22 août 2018 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts ;

5°) de condamner la SHAM à verser à l'ONIAM les frais d'expertise ;

6°) de mettre à la charge de la SHAM la somme de 5 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la responsabilité du CHU est engagée à raison des fautes commises dans le cadre de la prise en charge de M. B... ;

- le titre exécutoire contesté est régulier et bien-fondé ;

- à titre subsidiaire, en cas d'annulation du titre, l'ONIAM est fondé à obtenir à titre reconventionnel la condamnation de la SHAM à lui verser le montant du titre exécutoire, celui-ci, du fait de son annulation, ayant rétroactivement disparu ;

- à titre reconventionnel, l'ONIAM est fondé à demander qu'une pénalité de 15% soit mise à la charge du CHU, en l'absence d'ambiguïté sur la responsabilité du professionnel et de l'établissement de santé ;

- à titre reconventionnel, l'ONIAM est fondé à demander le remboursement de frais de l'expertise amiable conformément aux dispositions de l'alinéa 4 de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique ;

- l'ONIAM est également fondé à demander la condamnation de la SHAM à lui verser les intérêts légaux sur la somme de 106 839,12 euros, à compter du 21 août 2018, date de réception de l'avis des sommes à payer.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 27 décembre 2011 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne,

- et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., né le 5 septembre 1965, exerçant la profession de chauffeur routier et souffrant depuis 2006 de lombalgies à irradiation sciatique, a subi le 4 janvier 2007 une opération chirurgicale du rachis consistant en la réalisation d'une arthrodèse des vertèbres L4-L5-S1. Il a subi, le 27 mars 2008, en raison de la réapparition des douleurs et d'une " lyse de la vis L4 ", une nouvelle intervention consistant en l'ablation et le remplacement du montage précédent, accompagnée d'une laminectomie L3-L4. En 2013, devant la réapparition et l'accentuation de ses douleurs lombaires, le diagnostic de syndrome de néo-charnière avec instabilité au-dessus de l'arthrodèse existante a été posé et a conduit à une nouvelle opération chirurgicale réalisée le 3 juin 2014 au centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes, consistant en une intervention de laminarthrectomie L3-L4 avec extension de l'arthrodèse jusqu'en L2. Eu égard à la survenue de douleurs et de fièvre et au vu des résultats d'une IRM, une reprise chirurgicale destinée à l'évacuation d'un épanchement liquidien dans la cavité opératoire a été réalisée le 16 juin 2014, qui a mis en évidence une infection à staphylocoque épidermitis. Le 19 juin 2014, le diagnostic d'un syndrome de la queue de cheval était posé et une nouvelle intervention chirurgicale a été effectuée le jour même pour soigner un hématome épidural rachidien et fermer une fistule de liquide cérébrospinal. A la suite de ces interventions successives, le patient reste atteint de séquelles neurologiques importantes.

2. Saisie par M. B..., la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI) de Bretagne a ordonné la réalisation d'une expertise, confiée à un neurochirurgien et un infectiologue dont le rapport a été déposé le 13 février 2016. S'estimant insuffisamment informée par ce rapport d'expertise, elle a, le 23 juin 2016, ordonné une nouvelle expertise confiée à un collège composé comme le précédent d'un neurochirurgien et d'un infectiologue. Un second rapport d'expertise a été déposé au greffe du tribunal le

18 décembre 2016. Aux termes d'un avis du 8 février 2017, la CCI de Bretagne a considéré que la prise en charge de M. B... n'ayant pas été conforme aux règles de l'art, la responsabilité du CHU de Rennes pouvait être engagée sur le fondement de la faute et a invité le CHU à adresser à la victime une offre d'indemnisation. Les 17 juillet 2017 et 2 mars 2018, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) assureur du CHU de Rennes, a informé M. B..., la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Ille-et-Vilaine et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) de son refus de donner suite à l'avis de la CCI émis le 8 février 2017 et de présenter à M. B... une offre d'indemnisation. L'ONIAM s'est alors substitué à l'assureur du CHU en vertu de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et, par deux protocoles transactionnels conclus les 29 novembre 2017 et 14 février 2018, a indemnisé les préjudices subis par M. B... pour un montant total de 106 839,12 euros. Le 18 mai 2018, l'ONIAM a émis un titre exécutoire à l'encontre de la SHAM, aux fins de recouvrement des sommes versées à la victime.

3. Par une requête enregistrée sous le n° 1903666 la SHAM a demandé au tribunal d'annuler ce titre exécutoire et de la décharger des sommes mises à sa charge. Par ailleurs, après avoir présenté à la SHAM une réclamation indemnitaire préalable, la CPAM d'Ille-et-Vilaine a, par une requête enregistrée sous le n°1900792, demandé au tribunal de condamner le CHU de Rennes à lui verser la somme totale de 466 100,11 euros outre l'indemnité forfaitaire de gestion au titre des dépenses de santé actuelles et futures engagées pour le compte de

M. B....

4. Aux termes du jugement attaqué du 8 juillet 2022, le tribunal administratif de Rennes, après avoir joint ces deux requêtes, a, d'une part, condamné le CHU de Rennes à verser à la CPAM la somme totale de 80 734,11 euros, une rente viagère annuelle de 11 131 euros revalorisée par application de l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ainsi que la somme de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. Le tribunal a, par ce même jugement, rejeté la requête de la SHAM et mis à la charge de celle-ci le versement de la somme de 5 500 euros au titre de la pénalité prévue par l'article L. 1142-15 du code de la sécurité sociale.

5. Le CHU de Rennes et la SHAM demandent à la cour d'annuler ce jugement et de faire droit à leur demande de première instance. La CPAM d'Ille-et-Vilaine demande quant à elle que le CHU et la SHAM soient condamnés à lui verser la somme totale de 466 100,11 euros en remboursement de ses débours, majorée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et de leur capitalisation, ainsi que des sommes de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, dues tant au titre de la première instance qu'au titre de la procédure d'appel.

6. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus au point 2, la CCI de Bretagne a ordonné la réalisation de deux expertises successives dont les conclusions sont opposées, la première concluant à l'absence de toute faute de l'hôpital ou du chirurgien et à la survenance de complications et d'une infection nosocomiale, la seconde à trois fautes commises successivement, à l'origine respectivement de pertes de chance pour le patient de 100 %, 90 % et 75 % d'éviter les atteintes neurologiques dont il reste atteint, sans relever de conséquences propres à l'infection nosocomiale ou à la manière dont celle-ci a été prise en charge. Les divergences des experts portent, d'abord, sur le bien-fondé de l'indication ayant conduit à pratiquer le 3 juin 2014 une opération chirurgicale supplémentaire eu égard à l'analyse des résultats d'imagerie alors disponibles concernant M. B..., aux examens et traitements préalables prescrits à ce patient ainsi qu'à leurs limites, et à l'existence d'alternatives éventuelles à une solution chirurgicale ou de vérifications et préalables requis avant d'envisager cette solution. Elles portent aussi sur la pratique des interventions elles-mêmes ainsi que la qualité de leur suivi, notamment en ce qui concerne les conséquences d'une lésion de la dure-mère du patient résultant de l'intervention initiale du 3 juin 2014 et la possibilité de la repérer en temps utile à partir des symptômes du patient et des données d'imagerie pour pouvoir la réparer et éviter la pose d'un drain aspiratif qui a pu aggraver les atteintes neurologiques du patient et favoriser le développement d'un hématome intradural délétère. Elles portent enfin sur les conditions de la prise en charge, éventuellement tardive, du syndrome de la queue de cheval. Sur tous ces points, les expertises sont divergentes et l'hôpital a produit des observations s'appuyant sur le rapport argumenté d'un neurochirurgien mandaté par ses soins, lequel défend le bien-fondé, compte tenu des signes cliniques et paracliniques que présentait le patient, de l'indication chirurgicale d'extension de l'arthrodèse jusqu'au niveau de L2, et conteste tant le caractère fautif de la pose d'un drain pour résorber l'hématome le 16 juin 2014, que le caractère tardif de la réintervention du 19 juin suivant pour prendre en charge le syndrome de la queue de cheval.

7. Il y lieu, dans ces conditions, d'ordonner avant dire droit une nouvelle expertise qui portera particulièrement sur les points mentionnés ci-après, mais également, sur l'ensemble des points pouvant révéler des manquements aux règles de l'art dans la prise en charge hospitalière de M. B... à partir de la première intervention du 3 juin 2014, puis lors des réinterventions successives des 16 et 19 juin 2014, ou éclairer la juridiction sur d'éventuelles autres causes des dommages.

DECIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions indemnitaires des parties, procédé, par un neurochirurgien, à une expertise médicale aux fins précisées ci-après.

Article 2 : L'expert aura pour mission :

1°) de prendre connaissance de l'entier dossier médical de M. B... et de l'ensemble des questions et problématiques analysées au point 6 du présent arrêt, de convoquer et d'entendre toute personne qu'il jugera utile et de se faire communiquer tous documents ou pièces utiles ;

2°) de décrire l'état de santé de M. B... et les soins et prescriptions antérieurs à son admission au centre hospitalier universitaire de Rennes pour l'opération du 3 juin 2014 et les conditions dans lesquelles il a été pris en charge et soigné dans cet établissement ;

3°) de donner son avis sur le point de savoir si les diagnostics établis et les traitements, interventions et soins prodigués et leur suivi ont été consciencieux, attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science, et s'ils étaient adaptés à l'état de M. B... et aux symptômes qu'il présentait, tant avant la première intervention du 3 juin 2014 que par la suite et lors des réinterventions des 16 et 19 juin 2014 ;

4°) de manière générale, de réunir tous les éléments devant permettre de déterminer si des fautes médicales, des fautes de soins ou des fautes dans l'organisation des services ont été commises lors de l'hospitalisation de M. B..., de rechercher si les diligences requises pour l'établissement d'un diagnostic exact ont été effectuées, et de rechercher si les examens, interventions et actes médicaux pratiqués ont été exécutés conformément aux règles de l'art ;

5°) de déterminer les raisons de la dégradation de l'état de santé de M. B... et des complications dont il souffre depuis son hospitalisation ; en particulier, de donner son avis sur le point de savoir si le dommage corporel constaté a un rapport avec l'état initial de

M. B... ou l'évolution prévisible de cet état ; de préciser si le dommage allégué constitue une conséquence anormale d'un acte médical pratiqué sur la personne de l'intéressé au regard de son état initial ou de l'évolution prévisible de cet état ; d'indiquer si les actes pratiqués présentaient un risque connu auquel M. B... était particulièrement exposé ; de dire, dans l'affirmative, quelle était l'importance de ce risque et si le CHU de Rennes a satisfait à son obligation d'information prévue par l'article L. 1111-2 du code de la santé publique ;

6°) de déterminer la part du préjudice présentant un lien de causalité avec des manquements éventuellement commis par le centre hospitalier universitaire de Rennes ou une infection contractée en cours d'hospitalisation, en excluant la part des séquelles à mettre en relation avec les conséquences normalement prévisibles de la pathologie initiale, son évolution, ou toute autre cause extérieure ; d'indiquer quelles ont été les conséquences de ces manquements ou de cette infection et de dire dans quelle mesure ils ont entraîné, pour chacun d'entre eux, une perte de chance, dont le taux devra être précisé, d'éviter les séquelles dont M. B... reste atteint ;

7°) d'indiquer à quelle date l'état de M. B... peut être considéré comme consolidé et de donner tous éléments permettant de se prononcer sur les préjudices subis par lui, en lien avec le ou les manquements reprochés, notamment les souffrances endurées, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice esthétique, le préjudice sexuel et le préjudice d'agrément ; de se prononcer sur l'existence de préjudices patrimoniaux, notamment professionnels, et, s'il y a lieu, sur la nécessité d'avoir recours à une tierce personne et, dans l'affirmative, de préciser la qualification requise et la durée quotidienne de son intervention en rapport avec l'incapacité de la victime ;

8°) d'une manière générale, de fournir à la cour toute information ou appréciation utile de nature à lui permettre de déterminer les responsabilités encourues, y compris, le cas échéant, au titre de la solidarité nationale, et d'évaluer l'ensemble des préjudices subis.

Article 3 : L'expert accomplira la mission définie à l'article 2 dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative et dans un délai de 4 mois suivant la notification du présent arrêt. Il pourra, au besoin, se faire assister par un sapiteur préalablement désigné par le président de la cour.

Article 5 : Les frais et honoraires dus à l'expert seront taxés ultérieurement par le président de la cour conformément aux dispositions de l'article R. 621-13 du code de justice administrative.

Article 6 : L'expert déposera son rapport au greffe en deux exemplaires, accompagné de l'état de ses vacations, frais et débours lesquels pourront comprendre les frais exposés pour permettre à M B..., qui n'est pas partie à l'instance, de se rendre à tout ou partie des opérations d'expertise si l'expert l'estime nécessaire. Il en notifiera copie aux personnes intéressées, notification qui pourra s'opérer sous forme électronique avec l'accord desdites parties, à laquelle il joindra copie de l'état de ses vacations, frais et débours.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier régional et universitaire de Rennes, à la société hospitalière d'assurances mutuelles, à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Copie en sera transmise pour information à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2023.

Le rapporteur,

G.-V. VERGNE

La présidente,

C. BRISSON

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT02966


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02966
Date de la décision : 27/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : DI PALMA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-10-27;22nt02966 ?
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