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16/02/2024 | FRANCE | N°22NT03613

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 16 février 2024, 22NT03613


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté n° 2018/BPEF/217 du 26 novembre 2018 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a déclaré d'utilité publique la réalisation du projet de réaménagement de l'îlot de la place de l'église sur le territoire de la commune de Saint-Père-en Retz, incluant les parcelles cadastrées section AH nos 21, 23, 24, 25, 26 et 286, dont elle est propriétaire, ainsi que la décision du préfet de la Loire-Atla

ntique du 12 février 2019 rejetant son recours gracieux formé contre cet acte.



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté n° 2018/BPEF/217 du 26 novembre 2018 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a déclaré d'utilité publique la réalisation du projet de réaménagement de l'îlot de la place de l'église sur le territoire de la commune de Saint-Père-en Retz, incluant les parcelles cadastrées section AH nos 21, 23, 24, 25, 26 et 286, dont elle est propriétaire, ainsi que la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 12 février 2019 rejetant son recours gracieux formé contre cet acte.

Par un jugement n° 1904040 du 29 septembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 novembre 2022, et un mémoire, enregistré le 11 août 2023 qui n' pas été communiqué, Mme B..., représentée par Me Ramdenie, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 29 septembre 2022 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 2018/BPEF/217 du 26 novembre 2018 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a déclaré d'utilité publique la réalisation du projet de réaménagement de l'îlot de la place de l'église sur le territoire de la commune de Saint-Père-en-Retz, incluant les parcelles cadastrées section AH nos 21, 23, 24, 25, 26 et 286, dont elle est propriétaire, ainsi que la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 12 février 2019 rejetant son recours gracieux formé contre cet acte ;

3°) de mettre à la charge du Préfet de la Loire-Atlantique une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il méconnaît l'article R. 711-3 du code de justice administrative, le sens des conclusions du rapporteur public ayant été mis en ligne moins de 24 heures avant l'audience ;

- la commune a méconnu l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme dès lors qu'elle n'a mené aucune concertation avant l'ouverture de l'enquête publique ;

- elle a méconnu l'article R. 112-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; le dossier d'enquête publique comporte une appréciation sommaire des dépenses insuffisante qui ne permet pas au public de vérifier que l'intégralité des acquisitions a été prise en compte et d'apprécier son coût réel ; le coût de l'acquisition de la parcelle AH n°22 n'a pas été pris en compte et les autres dépenses ont été sous-évaluées ;

- quant à son utilité publique, l'opération projetée est dépourvue d'intérêt général et ne va pas apporter une attractivité commerciale au centre du bourg alors que l'offre commerciale de proximité est supérieure à la demande ; il n'est pas démontré que l'opération projetée est nécessaire pour atteindre les objectifs de production de logements ; la parcelle cadastrée AH n°23 sur laquelle est implanté un bâtiment comprenant au rez-de-chaussée deux locaux commerciaux et à l'étage deux appartements loués, n'a pas vocation à changer de destination dans le nouveau projet et ne contrevient pas aux objectifs de l'opération projetée ; aucun des biens composant l'îlot identifié au sein du périmètre de l'opération projetée ne présente un état de vétusté tel que la dépossession s'imposerait ; l'opération projetée peut être réalisée sur d'autres parcelles AH n° 347 et 348 appartenant à la commune, dans des conditions équivalentes, sans recourir à l'expropriation ; la commune aurait pu aussi disposer de la parcelle AH n° 231 appartenant à l'association diocésaine de Nantes, libre d'occupation et désaffectée ; l'opération projetée porte une atteinte excessive à la propriété privée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2023, la commune de Saint-Père-en-Retz, représentée par Me Le Dantec, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de Mme B... ;

2°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chollet,

- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Bourdin, avocat substituant Me Ramdenie, représentant Mme B... et de Me Le Dantec, avocat représentant la commune de Saint-Père-en-Retz.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... est propriétaire indivisaire d'un ensemble immobilier bâti, situé rue du Temple et place de l'église, sur le territoire de la commune de Saint-Père-en-Retz (Loire-Atlantique), correspondant aux parcelles cadastrées section AH n°s 21, 23, 24, 25, 26 et 286. La commune s'est engagée dès 2014 dans la réalisation d'une opération de requalification du secteur urbanisé de son centre ancien en vue de créer 12 à 18 logements collectifs et 500 m2 de surface commerciale, sur une emprise foncière totale de 3 400 m² comprenant les parcelles appartenant à Mme B.... Le préfet a prescrit les enquêtes publiques préalables à la déclaration d'utilité publique du projet et à la cessibilité des terrains nécessaires à sa réalisation par arrêté du 31 mai 2018. Le commissaire enquêteur a émis le 9 août 2018 un avis favorable au projet assorti d'une réserve relative au périmètre de la déclaration d'utilité publique. Par délibération du 29 octobre 2018, le conseil municipal de Saint-Père-en-Retz, conformément à l'article R. 112-23 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, a pris en considération l'avis du commissaire enquêteur et levé la réserve émise par ce dernier, en approuvant la modification du périmètre de la déclaration d'utilité publique. Par un arrêté du 26 novembre 2018, le préfet de la Loire-Atlantique a déclaré d'utilité publique le projet de réaménagement de l'îlot de la place de l'église de la commune de Saint-Père-en-Retz. Par courrier du 22 janvier 2019, Mme B... a formé un recours gracieux contre cet arrêté du 26 novembre 2018. Par décision du 12 février 2019, le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté ce recours. Mme B... relève appel du jugement du 29 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2018 et de la décision portant rejet de son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, si le rapporteur public prononcera ou non des conclusions et, dans le cas où il n'en est pas dispensé, le sens de ces conclusions ". Les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

3. Il est constant que le rapporteur public devant le tribunal administratif a mis en ligne sur " Sagace " le sens de ses conclusions la veille de l'audience, le 31 août 2022 à 10h, cette information ayant été portée à la connaissance des parties par un courrier dématérialisé le 31 août 2022, pour une audience fixée le lendemain à 9h45. Mme A... B... peut, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme ayant été mise en mesure de connaître, dans un délai suffisant avant l'audience, le sens des conclusions du rapporteur public. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêt aurait été rendu au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de concertation préalable :

4. Aux termes de L. 103-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées : / (...) / 4° Les projets de renouvellement urbain. ".

5. En l'absence de toute autre précision, il y a lieu de considérer que les " projets de renouvellement urbain " visés par le 4° de l'article L. 103-2 cité au point 4 sont ceux prévus par la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, telle que modifiée par la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient Mme B..., il ne ressort pas des pièces du dossier que l'opération projetée par la commune, qui consiste en un réaménagement du secteur de l'îlot de la place de l'église afin de redynamiser le centre ancien par la création de logements neufs et de cellules commerciales, constitue un " projet de renouvellement urbain " au sens du 4° de l'article L. 103-2. Dès lors, le moyen tiré de l'absence de soumission du projet à la concertation prévue par ces dispositions doit être écarté.

En ce qui concerne l'appréciation sommaire des dépenses :

6. L'article R. 112-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique impose au dossier soumis à enquête publique, lorsque le projet concerne la réalisation de travaux ou d'ouvrages, de comporter une appréciation sommaire des dépenses. Cette obligation a pour objet de permettre à tous les intéressés d'évaluer les charges pouvant en résulter pour la collectivité ou les usagers et de s'assurer que les travaux ou ouvrages envisagés ont, compte tenu de leur coût total réel, tel qu'il peut être raisonnablement apprécié à la date de l'enquête, un caractère d'utilité publique. L'obligation de présenter l'appréciation sommaire des dépenses n'implique pas de détailler l'ensemble des coûts du projet.

7. Le dossier d'enquête publique comprend une estimation sommaire et globale des dépenses, faisant état d'un coût total du projet de 2 954 000 euros, et une ventilation des dépenses selon qu'elles concernent les acquisitions foncières, pour un montant total de 760 000 euros, les dépenses de travaux d'aménagement, dont les travaux de voirie et réseaux divers, pour 220 000 euros hors taxe (HT), les dépenses de construction, estimés à 1 779 000 euros HT et, enfin, les dépenses d'études et de maîtrise d'œuvres, estimés à 195 000 euros HT. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que soit indiqué, dans le dossier d'enquête, le détail des acquisitions immobilières en distinguant celles déjà acquises de celles à acquérir.

8. De plus, aucun élément versé au dossier ne permet d'estimer que ces coûts auraient été manifestement sous-évalués à la date de l'enquête publique. Ainsi, il ressort de la notice explicative que celle-ci indiquait, en page 7, que la parcelle cadastrées AH n° 22 était comprise dans l'opération projetée, l'additif de la commune faisant suite aux observations de la Direction Départementale des territoires de mars 2018 ne correspondant qu'à la correction d'une erreur de plume s'agissant du périmètre de la déclaration d'utilité publique tel qu'il y était indiqué initialement. Le commissaire enquêteur a d'ailleurs relevé dans son rapport du 10 août 2018 que la nouvelle version du dossier, déposée en avril 2018, est bien celle qui a été proposée à l'enquête publique du 28 juin 2018 au 13 juillet 2018.

9. Le coût global des acquisitions foncières indiqué dans cette notice explicative, soit 760 000 euros, correspond à l'évaluation du service des Domaines telle qu'actualisée le 13 septembre 2018, soit 798 927 euros, avec un écart de seulement 5% du coût prévisionnel. A supposer que Mme B... tende aussi à remettre en cause la sincérité de l'évaluation au stade de la déclaration d'utilité publique, cet écart de 5% n'est pas de nature à vicier l'information du public alors en outre que l'estimation du service des Domaines précise que certains biens ont fait l'objet d'une estimation sans possibilité de visite du fait des propriétaires, dont Mme B..., et qu' " il devra être procédé à un ajustement de l'estimation en cas de discordance entre l'état réel et celui supposé, de même que pour les superficies ou le type d'occupation ".

10. Enfin, la circonstance qu'il y ait une augmentation importante des coûts d'acquisitions foncières entre la déclaration d'utilité publique et la valeur retenue par le juge de l'expropriation par deux arrêts de la cour d'appel de Rennes des 11 décembre 2020 et 24 juin 2022 ne saurait établir à elle-seule une sous-évaluation manifeste des coûts à la date de l'enquête dès lors notamment que le juge de l'expropriation a tenu compte du fait qu'il a pu visiter les lieux en 2019 et a fixé le prix à cette date.

11. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de ce que l'appréciation sommaire des dépenses serait entachée de sous-évaluation manifeste et serait irrégulière ne peuvent qu'être écartés.

En ce qui concerne l'utilité publique de l'opération :

12. Il appartient au juge, lorsqu'il se prononce sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente. Il lui appartient également, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l'expropriation, que l'inclusion d'une parcelle déterminée dans le périmètre d'expropriation n'est pas sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique.

13. En premier lieu, pour contester la nécessité de recourir à l'expropriation, les requérants soutiennent que d'autres parcelles appartenant à la commune auraient permis de réaliser l'opération projetée dans des conditions équivalentes, telles que les parcelles AH nos 347 et 348 appartenant à la commune, mais aussi la parcelle AH n°231 appartenant à l'association diocésaine de Nantes, libre d'occupation et désaffectée. Toutefois, la commune a pour ambition de réaliser une opération de renouvellement urbain sur le secteur de la place de l'église pour redynamiser le centre ancien, caractérisé par " un tissu traditionnel de bâti mitoyen à l'alignement sur rue donnant l'image d'un front bâti continu ", avec notamment la création d'une polarité commerciale en rez de chaussée. Le site choisi, d'une surface totale d'environ 3 400 m2, desservi en eau potable et en électricité, se trouve à l'angle de la rue du Temple et de la Place de l'église, en plein centre bourg de la commune, et est occupé par des constructions en partie désaffectées, par des commerces encore en activité et par deux maisons d'habitation actuellement occupées. Or, il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient la requérante, que les deux projets alternatifs qu'elle propose, eu égard à leur situation, leur superficie, leur configuration ou leur disponibilité, présentent des caractéristiques favorables équivalentes de nature à réaliser l'opération projetée.

14. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la commune de Saint-Père-en-Retz prévoit, après la démolition de toutes les constructions existantes dans le périmètre opérationnel du fait de leur état dégradé, à l'exception d'un bâtiment présent sur la parcelle cadastrée AH n° 23 qui sera préservé en raison de la composition architecturale de sa façade, la réalisation de plusieurs surfaces de commerces ou de services pour une surface de plancher totale d'environ 500 m2 en rez-de-chaussée, la création d'environ 12 à 18 nouveaux logements collectifs de type T2 et T3 en R+1 et R+2 ainsi que d'aires de stationnements liées à ces logements afin de répondre à une approche globale nécessitant de rapprocher commerces et services des populations les moins mobiles et potentiellement les plus isolées, tels que les personnes âgées et les jeunes. Les abords de l'opération doivent être requalifiés pour accueillir du stationnement public ainsi qu'un cheminement doux répondant aux normes des personnes à mobilité réduite, au confort et à la sécurité des piétons et participant à la réduction des déplacements automobiles. Un espace vert public attenant est conservé. Ce projet s'inscrit dans le cadre des objectifs du programme local de l'habitat 2015-2021 de la communauté de communes du Sud-Estuaire et du Schéma de Cohérence Territorial et vise à réduire la dépendance de la production de logements par extension sur des terres agricoles et naturelles de son territoire tout en promouvant les opérations de recyclage foncier de son centre-ancien, paupérisé et actuellement partiellement en friche ou sans insertion dans l'environnement bâti existant. Il s'inscrit également dans les formes urbaines historiques du centre bourg, avec le respect des alignements à la rue, de la mitoyenneté et des gabarits, et de l'intensité des constructions, afin de renforcer et de revaloriser l'identité du noyau ancien. Il résulte de ce qui précède que les objectifs poursuivis par l'opération litigieuse répondent à une finalité d'intérêt général, contrairement à ce que soutient Mme B.... Mme B... ne peut utilement invoquer la circonstance qu'aucun des biens composant l'îlot identifié au sein du périmètre de l'opération déclarée d'utilité publique ne présente " un état de vétusté tel que la dépossession s'imposerait ". En outre, la circonstance que 100 m2 de surfaces commerciales en rez-de-chaussée aient été supprimés dans le permis de construire modificatif délivré le 3 juin 2022 par la commune au profit de places de stationnement supplémentaires ne suffit pas à remettre en cause cette finalité d'intérêt général.

15. En troisième lieu, si Mme B... soutient que la parcelle cadastrée AH n° 23 sur laquelle est implanté un bâtiment comprenant au rez-de-chaussée deux locaux commerciaux et à l'étage deux appartements loués, n'a pas vocation à changer de destination dans le nouveau projet et ne contrevient pas aux objectifs de l'opération projetée, elle ne démontre pas que son expropriation serait sans rapport avec ce projet.

16. En dernier lieu, la requérante soutient que l'opération projetée présente plus d'inconvénients que d'avantages et que les biens dont il s'agit étaient déjà à usage de logements avant la déclaration d'utilité publique et répondaient aux besoins de logements en centre-ville, tout comme l'offre de commerce existante. Toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit au point 14, l'opération en litige vise à promouvoir la mixité sociale et intergénérationnelle, tout en diversifiant les commerces de proximité en centralité, qui ne font l'objet, en l'état, d'aucun aménagement caractéristique d'une destination commerciale et ne répondent pas aux normes d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite. Elle participe à une dynamique générale d'attractivité du centre bourg ancien alors que l'unité départementale de l'architecture et du patrimoine de Loire-Atlantique a souligné " la vétusté du bâti directement concerné ", comme l'a mentionné le commissaire enquêteur dans son rapport. Elle contribue ainsi, comme le souligne en défense la commune, à " optimiser le foncier, inciter à la reconversion d'un espace dégradé, à la résilience du bâti ancien d'intérêt et à la valorisation de l'identité du bourg ". Il ressort d'ailleurs des pièces du dossier qu'elle contribue également à atteindre les objectifs du programme local de l'habitat, au même titre et en complémentarité de l'offre existante dans le cadre de la zone d'aménagement concertée dite de " Vannes " et de la " Garnière ".

17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 16 que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération projetée ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente.

18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Saint-Père-en-Retz au titre de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Mme B... versera à la commune de Saint-Père-en-Retz une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à la commune de Saint-Père-en-Retz et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Chollet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 février 2024.

La rapporteure,

L. CHOLLET

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03613


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03613
Date de la décision : 16/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: Mme Laure CHOLLET
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : CABINET GRANGE MARTIN RAMDENIE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-16;22nt03613 ?
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