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19/03/2024 | FRANCE | N°23NT02903

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 19 mars 2024, 23NT02903


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2022 du préfet de la Mayenne portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination.



Par un jugement n° 2212932 du 30 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, e

nregistrée le 29 septembre 2023, M. C..., représenté par Me Berthet-Le Floch, demande à la cour :



1°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2022 du préfet de la Mayenne portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination.

Par un jugement n° 2212932 du 30 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 septembre 2023, M. C..., représenté par Me Berthet-Le Floch, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 mai 2023 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2022 du préfet de la Mayenne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Mayenne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " travailleur temporaire " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2024, le préfet de la Mayenne conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Quillevéré a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C..., ressortissant malien, déclarant être né le 31 décembre 2002, est entré irrégulièrement en France au cours du mois d'octobre 2018. Il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Mayenne et a bénéficié d'un jugement en assistance éducative prononcé le 25 mars 2019 par le tribunal pour enfants de B.... M. C... a sollicité, le 30 novembre 2021, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 1er juillet 2022, le préfet de la Mayenne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'issue de ce délai. M. C... relève appel du jugement du 30 mai 2023 du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : 1° les documents justifiant de son état civil ; 2° les documents justifiant de sa nationalité (...) ". L'article L. 811-2 du même code prévoit que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. Ce dernier article dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents. Enfin, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement produit aurait un caractère frauduleux.

3. Pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. C..., le préfet de la Mayenne s'est fondé sur la circonstance que les éléments produits à l'appui de sa demande n'étaient pas de nature à justifier de son état civil. Il ressort des pièces du dossier que pour justifier de son identité, l'intéressé a fourni à l'appui de sa demande de titre de séjour l'original d'un extrait de jugement supplétif d'acte de naissance n°5060 du 21 novembre 2018 du tribunal de grande instance de Kayes, un acte de naissance n°124 du 28 novembre 2021 délivré par la commune de Falémé et une carte d'identité consulaire n°1738/CGML/21 délivrée le 27 septembre 2021 par le consulat général du Mali à Lyon. Toutefois, l'extrait de jugement supplétif d'acte de naissance n°5060 du 21 novembre 2018 du tribunal de grande instance de Kayes a été regardé comme entaché de fraude par les experts de la direction interdépartementale de la police aux frontières. En outre, l'acte de naissance du 28 novembre 2021 ne comporte ni numérotation de souche ni numéro d'identification personnelle dit A... ni référence à un jugement supplétif. De plus, il n'est pas contesté que le requérant avait précédemment produit auprès de l'administration un extrait d'acte de naissance n°492 du 20 septembre 2018 délivré par la commune de Falémé qui ne fait aucune référence à une déclaration tardive de naissance ou à un jugement supplétif, et qui ne comporte ni numérotation de souche ni numéro A.... Ainsi, cette succession d'actes de naissance pour une même personne à laquelle M. C... n'apporte aucune explication précise et qui ne concordent pas entre eux est de nature à les priver de caractère probant et à établir le caractère frauduleux du jugement supplétif. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que la consultation du fichier Visabio le 13 décembre 2021 a permis au préfet de la Mayenne de constater, en se fondant sur la correspondance des empreintes digitales, que l'intéressé avait précédemment sollicité un visa sous une autre identité, celle de M. D... E..., ressortissant sénégalais né le 16 mai 2002 à Dakar, et qu'il avait présenté sous cette identité un passeport délivré le 2 janvier 2018 par les autorités sénégalaises, valide jusqu'au 1er janvier 2023, et dont l'authenticité n'a pas été remise en cause par les autorités consulaires françaises à Dakar. M. C... ne produit aucun élément probant pour contester cette correspondance de ses empreintes avec une autre identité. Au regard de l'ensemble de ces éléments, le préfet de la Mayenne a pu renverser, à la date de la décision attaquée, la présomption d'authenticité des documents présentés par M. C... et ce, en dépit de la circonstance selon laquelle les autorités maliennes ont délivré à l'intéressé un passeport, valable du 26 novembre 2021 au 25 novembre 2026 dès lors qu'il n'est pas établi que ce document ait été présenté dans le cadre de la demande de titre de séjour, et qu'en tout état de cause, l'authenticité de ce document ne peut être tenue pour acquise dès lors qu'il a pu être établi sur la base de ceux ne bénéficiant pas d'une présomption d'exactitude. Par suite, le préfet a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser faire droit à la demande de titre de séjour présentée par M. C....

4. En second lieu, le seul motif relatif à l'état civil du requérant suffisait à fonder le refus opposé par le préfet à sa demande de titre de séjour. Par suite, M. C... ne peut utilement soutenir que le préfet de la Mayenne aurait méconnu les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée par le présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation de cette décision de refus doit être écarté.

6. En second lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens invoqués en première instance et tirés de la méconnaissance, par la décision obligeant M. C... à quitter le territoire français, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle dont serait entachée cette décision.

Sur la décision fixant le pays de destination :

7. Les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées par le présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de ces décisions doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Mayenne.

Délibéré après l'audience du 23 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de la chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

Le président-rapporteur,

G. QUILLÉVÉRÉ

Le président-assesseur,

J. E. GEFFRAY

La greffière,

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT029032


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02903
Date de la décision : 19/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. le Pdt. Guy QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : BERTHET-LE FLOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-19;23nt02903 ?
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