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16/04/2024 | FRANCE | N°23NT02758

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 16 avril 2024, 23NT02758


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... D... et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de surseoir à statuer dans l'attente de la fin de la procédure pénale pendante devant la cour d'appel de Rennes, d'annuler l'avis d'imposition sur le revenu de l'année 2016, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui a été mise à leur charge au titre de l'année 2016, de prononcer la décharge de la majoration de 1,25 % qui leur a été infligée sur le fondem

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de surseoir à statuer dans l'attente de la fin de la procédure pénale pendante devant la cour d'appel de Rennes, d'annuler l'avis d'imposition sur le revenu de l'année 2016, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui a été mise à leur charge au titre de l'année 2016, de prononcer la décharge de la majoration de 1,25 % qui leur a été infligée sur le fondement de l'article 158-7 du code général des impôts, de la majoration de 10 % mise à leur charge sur le fondement de l'article 1758 du même code ainsi que des intérêts de retard.

Par un jugement n° 2003158 du 12 juillet 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 et 28 septembre 2023 et le 27 février 2024, M. B... D... et M. C... A..., représentés par Me Joubert des Ouches, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Rennes du 12 juillet 2023 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu dues au titre de l'année 2016 ; à titre subsidiaire, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu dues au titre de l'année 2016 ;

3°) de prononcer la décharge de la majoration de 1,25 % infligée sur le fondement de l'article 158-7-1 du code général des impôts ainsi que la majoration de 10 % mise à leur charge sur le fondement de l'article 1758 du même code ;

4°) de condamner l'État au paiement d'une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'activité de M. D... a relevé du régime des micro-entreprise et il n'était pas tenu de produire un livre journal, un grand livre, un livre d'inventaire, des factures de prestations de services ;

- l'administration fiscale, qui admet que M. D... ne pouvait, à lui seul, réaliser le chiffre d'affaires reconstitué, fonde la reconstitution de recettes sur un hypothétique travail dissimulé et sur le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Saint-Brieuc condamnant M. D... pour de tels faits ; or, l'arrêt du 29 novembre 2022 de la chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé l'arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes le condamnant pour travail dissimulé ; il en résulte qu'il n'y a pas, à ce jour, de décision définitive condamnant M. D... pour de tels faits et qu'un sursis à statuer doit être ordonné dans l'attente de la fin de la procédure ;

- l'URSSAF a estimé que M. D... ne pouvait réaliser son chiffre d'affaires seul ; l'affaire est pendante devant la cour d'appel de Rennes ; des charges sociales et salariales, en cas de condamnation, devraient alors être prises en compte pour la détermination du chiffre d'affaires ; il est fondé, pour ce motif, à demander au tribunal de surseoir à statuer dans l'attente de la fin de la procédure pénale pour travail dissimulé ;

- le montant de chiffre d'affaires reconstitué n'est pas conforme aux conditions de son exploitation ; le chiffre d'affaire réel de l'année 2016 s'est élevé à 26 673 euros ; la méthode de reconstitution aboutit à retenir un chiffre d'affaire qui n'est pas réaliste et qui ne peut être réalisé par un seul tatoueur ; la notoriété qui lui est attribuée par l'administration fiscale est excessive alors qu'il n'a participé à aucune convention de tatouage à l'étranger et qu'il a créé des T-shirts avec flocage seulement dans un but publicitaire et non lucratif ; le montant de son activité réelle se situe en dessous du seuil de franchise de la taxe sur la valeur ajoutée et ne relève pas du régime réel d'imposition ; c'est donc à tort que l'administration fiscale l'a regardé comme ayant l'obligation de tenir une comptabilité alors qu'il relève du régime d'imposition des micro-entreprises ;

- le montant de charges retenues pour l'année 2016 est trop faible et aboutit à la détermination d'une marge irréaliste de 80 % ; les charges retenues ne prennent pas en compte les achats divers (encre, aiguilles, fournitures diverses, frais de déplacement, amortissement du matériel) ;

- la majoration de 1,25 % infligée en application de l'article 158-7 du code général des impôts est infondée dès lors qu'étant soumis au régime des micro-entreprises, il n'avait pas l'obligation d'adhérer à un centre de gestion agréé ; la majoration de 10 % sur le fondement de l'article 1758 a. du code général des impôts est également infondée dès lors qu'il a déclaré les sommes réellement perçues au titre de son activité.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 février 2024, le ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Viéville,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... exerce, à titre individuel, une activité de tatoueur professionnel sous l'enseigne " XXL Tatoo ". Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, à l'issue de laquelle l'administration après avoir constaté l'absence de comptabilité a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires qui a été fixé pour chacune des années vérifiées à des montants supérieurs aux seuils prévus pour bénéficier du régime des micro-entreprises et du régime de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée. Par une proposition de rectification du 11 décembre 2017 l'administration a notifié des redressements au titre des années 2014 à 2016 dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour chacune des périodes vérifiées. La commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires d'Ille-et-Vilaine a rendu un avis favorable au maintien des rectifications le 7 février 2019. Les réclamations présentées par M. D... et M. A... ont été partiellement admises le 29 mai 2020 et des dégrèvements au titre de l'année 2016 et pour la période du 3 mars 2014 au 31 décembre 2016 ont été prononcés. Par un jugement n°s 2003158, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. D... et M. A... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2016 et des pénalités dont ces droits ont été assortis. M. D... et M. A... relèvent appel de ce jugement.

Sur la demande de sursis à statuer :

2. Si M. D... et M. A... demandent à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de la décision définitive du juge pénal sur les poursuites pour travail dissimulé qui pourraient aboutir à la reconnaissance de l'embauche de salarié, le juge de l'impôt n'est pas tenu de surseoir à statuer en cas d'instance parallèle devant le juge pénal. Dans les circonstances de l'espèce, alors que les charges salariales et sociales exposées par l'entreprise individuelle de M. D... demeuraient hypothétiques et étaient donc dénuées de caractère certain dans leur principe et leur montant, elles n'avaient en tout état de cause pas à être prises en compte pour déterminer le résultat imposable de l'entreprise individuelle de M. D... au titre de l'année 2016. Par suite, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions tendant à ce que soit prononcé un sursis à statuer.

Sur les conclusions aux fins de décharge :

En ce qui concerne le défaut de présentation de comptabilité :

3. Aux termes de l'article 50-0 du code général des impôts : " 4. Les entreprises placées dans le champ d'application du présent article peuvent opter pour un régime réel d'imposition. (...) 5. Les entreprises qui n'ont pas exercé l'option visée au 4 doivent tenir et présenter, sur demande de l'administration, un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes professionnelles, appuyé des factures et de toutes autres pièces justificatives. Elles doivent également, lorsque leur commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, tenir et présenter, sur demande de l'administration, un registre récapitulé par année, présentant le détail de leurs achats. ".

4. Si M. D... et M. A... soutiennent que relevant du régime des micro-entreprises, M. D... n'était pas tenu de produire un livre journal, un grand livre, un livre d'inventaire, des factures de prestations de services, il résulte toutefois des dispositions de l'article 50-0 du code général des impôts que M. D..., qui n'avait pas opté pour le régime réel d'imposition, devait tenir à la disposition du vérificateur le détail de ses recettes professionnelles, appuyé des factures et de toutes autres pièces justificatives. De plus, M. D... dont l'activité était assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée était tenu de justifier du détail des opérations réalisées et de présenter un livre journal des recettes ainsi que des factures correspondantes aux prestations réalisées. Par ailleurs, le dépassement des seuils requis pour bénéficier du régime micro-BIC et de la franchise de taxe sur la valeur ajoutée imposait la tenue des documents comptables obligatoires prévus par le code de commerce et le code général des impôts en cas d'imposition selon le régime réel d'imposition et notamment d'un livre-journal, grand-livre, livre d'inventaire, factures de prestations de services. Il est constant que M. D... n'a présenté aucun de ces documents au cours du contrôle. Par suite, le service a pu à bon droit regarder sa comptabilité comme irrégulière et non probante et procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires.

En ce qui concerne la charge de la preuve :

5. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) ". En l'espèce, les impositions litigieuses ayant été établies conformément à l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et M. D... n'ayant pu présenter de comptabilité ou de factures au cours de la vérification, la charge de la preuve de leur exagération incombe à M. D... et M. A....

En ce qui concerne la méthode de reconstitution :

6. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a procédé à la reconstitution des recettes à partir des encaissements enregistrés sur les comptes bancaires professionnels ou les comptes bancaires désignés par M. D... comme des comptes mixtes, et en s'appuyant, plus précisément, sur un tableau établi par son comptable qui liste les crédits bancaires pour un montant de 29 826 euros en 2016 correspondant à des dépôts en espèces qualifiés de professionnels par le requérant. L'administration s'est également fondée sur les informations obtenues auprès de certains fournisseurs dans le cadre du droit de communication et sur les factures de charges produites au cours du contrôle. Le chiffre d'affaires reconstitué au titre de l'année 2016 s'élève ainsi à 64 727,32 euros. En se bornant à faire valoir que la méthode de reconstitution retenue par le service n'est pas conforme aux conditions d'exploitation de son activité de tatoueur et que la notoriété qui lui est attribuée par l'administration est excessive alors que M. D... n'a participé à aucune convention de tatouage à l'étranger et qu'il a créé des T-shirts avec flocage dans un but publicitaire et non lucratif, M. D... et M. A..., qui ne disposent pas comme il a été dit précédemment d'une comptabilité régulière et probante, et qui ne proposent aucune méthode plus précise, n'établissent pas que celle mise en œuvre par le service, qui repose au demeurant sur la prise en compte des données propres à l'entreprise individuelle de M. D..., serait radicalement viciée ou excessivement sommaire. En outre, si M. D... et M. A... font valoir que l'activité de tatoueur exercée seul, génère un chiffre d'affaires mensuel moyen de 2 000 à 3 000 euros et que le chiffre d'affaires réel de l'année 2016 de l'entreprise individuelle de M. D... s'élevait à 26 673 euros, ces allégations, qui ne sont appuyées par aucun justificatif, ne sont pas davantage de nature à établir que le chiffre d'affaires arrêté par le service pour l'année 2016 serait excessif et non conforme à la réalité de l'activité de l'entreprise individuelle de M. D....

En ce qui concerne le régime d'imposition applicable :

7. Aux termes de l'article 50-0 du code général des impôts dans sa version applicable au litige : " 1. Les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel, ajusté s'il y a lieu au prorata du temps d'exploitation au cours de l'année civile, n'excède pas 81 500 euros hors taxes s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures (...), sont soumises au régime défini au présent article pour l'imposition de leurs bénéfices. / (...) / Sous réserve des dispositions du b du 2, ce régime demeure applicable pour l'établissement de l'imposition due au titre des deux premières années au cours desquelles les chiffres d'affaires mentionnés au premier et deuxième alinéa sont dépassés. / (...) / 2. Sont exclus de ce régime : / (...) / b. Les contribuables qui ne bénéficient pas des dispositions du I de l'article 293 B. Cette exclusion prend effet à compter du 1er janvier de l'année de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ; / (...) ". Aux termes de l'article article 293 B du même code, dans sa version applicable au litige, : " I. - Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France (...) bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsqu'ils n'ont pas réalisé : (...) / 2° Et un chiffre d'affaires afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, supérieur à : / a) 32 900 euros l'année civile précédente ; / b) Ou 34 900 euros l'année civile précédente, lorsque la pénultième année il n'a pas excédé le montant mentionné au a. / II. - 1. Le I cesse de s'appliquer : (...) b) Ou à ceux dont le chiffre d'affaires de l'année en cours afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, dépasse le montant mentionné au b du 2° du I. / 2. Les assujettis visés au 1 deviennent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations de services et les livraisons de biens effectuées à compter du premier jour du mois au cours duquel ces chiffres d'affaires sont dépassés. / (...) ". Enfin, le I de l'article 293 D du même code prévoit, notamment, que le chiffre d'affaires mentionné au I de l'article 293 B est constitué par le montant hors taxe sur la valeur ajoutée des livraisons de biens et des prestations de services effectuées au cours de la période de référence.

8. Il résulte de l'instruction que le chiffre d'affaires toutes taxes comprises de l'activité de M. D... reconstitué par le service au titre de l'année 2016 s'élève à 64 927 euros, à 45 702 euros pour l'année 2015 et à 86 570 euros pour l'année 2014. Ainsi, dès lors que le chiffre d'affaires reconstitué dépassait le seuil de 34 900 euros dès 2014 puis au cours des années suivantes, M. D... ne pouvait, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus du 1 du II de l'article 293 B du code général des impôts, bénéficier de la franchise de taxe sur la valeur ajoutée prévue au I de ce même article 293 B, et par suite, en vertu des dispositions du 2 de l'article 50-0 du même code, était exclu du régime des micro-entreprises dès l'année 2014. Par suite, l'activité professionnelle de M. D... relevait du régime simplifié d'imposition prévu à l'article 302 septies A du code général des impôts, qui est de droit pour les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel est compris entre la limite prévue par l'article 293 B du même code pour l'application de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée et le seuil fixé par le I de l'article 302 septies A de ce code.

En ce qui concerne le montant des charges déductibles :

9. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire (...) ".

10. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts, que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Pour être admises en déduction du résultat imposable, les charges doivent être exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de l'entreprise et être appuyées de justifications suffisantes. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée.

11. En premier lieu, en l'absence de comptabilité régulière et probante, le service a reconstitué le montant des charges déductibles d'après les réponses des fournisseurs de M. D... sollicités dans le cadre du droit de communication et d'après les factures d'achats produites. M. D... et M. A... font valoir que le montant de charges retenues par le service est trop faible et aboutit à une marge irréaliste de 80 % en 2016 alors que le montant des charges à prendre en compte devrait se situer dans une fourchette de 45 à 65 % du chiffre d'affaires encaissé dès lors que l'administration a retenu un pourcentage de charges de 63 % au titre de l'exercice 2015, et que le montant de charges admis pour l'année 2016 est comparable à celui admis au titre de l'année 2015. Toutefois, alors que les intéressés ne produisent aucune pièce justificative de la réalité et du caractère professionnel des charges qui n'auraient pas été retenues par l'administration fiscale et qu'il leur appartient d'établir la réalité des dépenses supportées pour l'exercice de l'activité de M. D..., M. D... et M. A... ne démontrent pas que l'administration aurait omis de prendre en compte des dépenses supplémentaires.

12. En second lieu, contrairement à ce que soutiennent M. D... et M. A... en se référant à l'arrêt du 29 novembre 2022 de la chambre criminelle de la Cour de cassation, le principe et le montant des charges salariales et sociales à les supposées exposées ne présentait pas en tout état de cause de caractère certain à la clôture de chaque exercice alors qu'en application des dispositions de l'article 38 du code général des impôts, les dettes engagées au cours d'un exercice doivent être rattachées aux résultats de l'exercice au cours duquel ces dettes sont devenues certaines dans leur principe et dans leur montant.

En ce qui concerne l'application du coefficient multiplicateur de 1,25 prévu par le 7 de l'article 158 du code général des impôts :

13. Aux termes des dispositions de l'article 158 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) 7. Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par 1,25. Ces dispositions s'appliquent : / 1° Aux titulaires de revenus passibles de l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles, réalisés par des contribuables soumis à un régime réel d'imposition : / a) Qui ne sont pas adhérents d'un centre de gestion ou association agréés définis aux articles 1649 quater C à 1649 quater H, à l'exclusion des membres d'un groupement ou d'une société mentionnés aux articles 8 à 8 quinquies et des conjoints exploitants agricoles de fonds séparés ou associés d'une même société ou groupement adhérant à l'un de ces organismes (...) ".

14. Contrairement à ce que soutiennent les appelants et ainsi qu'il a été dit au point 8, l'activité professionnelle de M. D... relevait du régime réel d'imposition, de sorte que ses bénéfices industriels et commerciaux ont pu à bon droit être augmentées, en cas d'absence, non contestée en l'espèce, d'adhésion à un centre de gestion ou association agréés, par le coefficient prévu par les dispositions du 7 de l'article 158 du code général des impôts. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la majoration prévue à l'article 1758 A du code général des impôts :

15. Aux termes de l'article 1758 A du code général des impôts : " I. Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue (...) ". Contrairement à ce que soutiennent M. D... et M. A... et ainsi qu'il a été exposé, les déclarations déposées ne reflétaient le niveau réel d'activité de M. D... tel que reconstitué par le service. Dans ces conditions, c'est à bon droit que la majoration de 10% prévue par les dispositions précitées a été appliquée.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... et M. A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2016 et des pénalités dont ces droits ont été assortis.

Sur les frais liés au litige :

17. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mises à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que M. D... et M. A... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... et M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2024.

Le rapporteur

S. VIÉVILLELe président de chambre

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT0275802


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02758
Date de la décision : 16/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : CABES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-16;23nt02758 ?
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