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20/11/1995 | FRANCE | N°94PA00368

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 20 novembre 1995, 94PA00368


VU la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la cour le 1er avril 1994 et le 6 juin 1994, présentés pour la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE C.M.E.D. par la SCP CELICE-BLANCPAIN avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE C.M.E.D. demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9003500 bis/7 en date du 8 juillet 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en indemnisation du préjudice résultant pour elle de l'illégalité d'un arrêté du Maire d'Issy-les-Moulineaux portant préempt

ion d'un bâtiment lui appartenant sis au ... à Issy-les-Moulineaux ;...

VU la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la cour le 1er avril 1994 et le 6 juin 1994, présentés pour la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE C.M.E.D. par la SCP CELICE-BLANCPAIN avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE C.M.E.D. demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9003500 bis/7 en date du 8 juillet 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en indemnisation du préjudice résultant pour elle de l'illégalité d'un arrêté du Maire d'Issy-les-Moulineaux portant préemption d'un bâtiment lui appartenant sis au ... à Issy-les-Moulineaux ;
2°) de condamner la commune d'Issy-les-Moulineaux à lui verser une indemnité globale de 5.450.000 F, à parfaire, augmentée des intérêts légaux capitalisés, représentative d'agios bancaires indus à concurrence de 2.200.000 F, de frais engagés pour rechercher un acquéreur 250.000 F, d'un manque à gagner de 3.000.000 F ;
3°) d'ordonner finalement une expertise du manque à gagner, des agios bancaires supportés indûment, des frais de recherche d'un acquéreur et de remise en état du local afin de l'exploiter ;
4°) de condamner la commune d'Issy-les-Moulineaux au versement d'une somme de 10.000 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'urbanisme ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 6 novembre 1995 :
- le rapport de M. LIEVRE, conseiller,
-les observations de la SCP CELICE-BLANCPAIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la SARL C.M.E.D.,
- et les conclusions de M. BROTONS, commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le tribunal administratif de Paris a été saisi de conclusions en indemnité pour faute de la commune d'Issy-les-Moulineaux résultant d'une part d'une décision de préemption illégale d'un immeuble appartenant à la société C.M.E.D. et d'autre part d'agissements qui auraient empêché toute vente postérieurement à cette décision de préemption ; qu'en se bornant à juger que le préjudice résultant de l'illégalité de la préemption a été déjà suffisamment réparé par la commune, lorsque celle-ci a acquis par la suite l'immeuble, le tribunal administratif n'a pas statué sur tous les chefs de préjudice dont il était saisi ; que dès lors le jugement susvisé doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société C.M.E.D. devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur la responsabilité :
Considérant que la société C.M.E.D. n'établit pas que les renseignements fournis par la commune, à la demande d'acheteurs potentiels, pour l'éventuel classement de l'immeuble dans une zone d'aménagement concerté, auquel elle a d'ailleurs procédé le 26 juin 1991, aient pu constituer des agissements fautifs de nature à engager la responsabilité de la commune ;
Sur le préjudice :
En ce qui concerne la période de responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 10 août 1989 le maire d'Issy-les-Moulineaux a notifié à la société C.M.E.D. un arrêté de préemption de l'immeuble que celle-ci se proposait de vendre à la société civile immobilière Bram au prix de 7.500.000 F ; que cette décision de préemption a fait échouer la tractation prévue entre ces sociétés ; que le maire d'Issy-les-Moulineaux a retiré cet arrêté considéré comme illégal en tant que contraire aux dispositions de l'article R.213-7 du code de l'urbanisme, par décision du 8 février 1990 ; que la société C.M.E.D., bien qu'elle ait renoncé à la vente de son bien en se prévalant des dispositions de l'article R.213-10 du code de l'urbanisme, n'a retrouvé la possibilité d'aliéner qu'à compter du 20 décembre 1990 date de notification de la décision retirant la décision de préemption illégale ; que dans ces conditions, le préjudice subi par la société C.M.E.D. n'a pu s'étendre que de la notification de la décision de préemption, soit le 10 août 1989, jusqu'à la date de notification du retrait de la préemption illégale ;
En ce qui concerne le montant du préjudice :

Considérant qu'à la suite d'une nouvelle déclaration d'intention d'aliéner déposée par la société C.M.E.D., la commune d'Issy-les-Moulineaux a acquis l'immeuble le 30 novembre 1992 au prix de 8.850.000 F après préemption ; qu'il ressort de l'instruction que la commune a accepté de verser comprise dans ce dernier prix une indemnité de remploi, à laquelle elle n'était pas tenue, en vertu des dispositions de l'article R.213 8 C du code de l'urbanisme, dans le but d'indemniser la société C.M.E.D. ; que cette société en se bornant à invoquer que son préjudice serait supérieur ne conteste pas dès lors qu'elle a déjà obtenu l'indemnisation de son préjudice à hauteur de 1.480.000 F correspondant à une plus value tirée du versement de l'indemnité de remploi ;
Considérant que la société ne saurait prétendre au remboursement de travaux de rénovation qu'elle n'a pas engagés en vue de la revente ; qu'en revanche, elle a droit au versement d'une indemnité de 301.315 F comprenant le manque à gagner résultant du placement de la somme de 7.500.000 F pendant la période du 10 août 1989 au 20 février 1990 ; qu'à supposer même qu'il soit fait droit à sa demande d'indemnisation des agios bancaires qu'elle a supportés, lesquels sont en tout état de cause inférieurs à la somme de 431.993,21 F et aux divers frais d'un montant de 250.000 F, engagés pour la vente de l'immeuble, le préjudice de la société C.M.E.D., y compris les intérêts courant du 13 novembre 1989, date de réception par le maire de sa réclamation préalable, est inférieur à la somme de 1.480.000 F qu'elle a déjà perçue ; qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise, que la société C.M.E.D. n'est pas fondée à soutenir que le préjudice dont elle se prévaut n'aurait pas été déjà réparé en tant qu'il excéderait la somme de 1.480.000 F ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant qu'il n'y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts à la date du 1er avril 1994 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article précité font obstacle à ce que la commune d'Issy-les-Moulineaux soit condamnée à payer à la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE C.M.E.D. partie perdante, une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce il n'y a lieu de condamner la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE C.M.E.D. à verser à la commune d'Issy-les-Moulineaux une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement n° 9003500 bis/7 du 8 juillet 1993 est annulé.
Article 2 : La demande et le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE A RESPONSABILITE C.M.E.D. devant le tribunal administratif de Paris sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'Issy-les-Moulineaux tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 94PA00368
Date de la décision : 20/11/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE L'URBANISME.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PROCEDURES D'INTERVENTION FONCIERE - PREEMPTION ET RESERVES FONCIERES - DROITS DE PREEMPTION - DROIT DE PREEMPTION URBAIN (LOI DU 18 JUILLET 1985).


Références :

Code de l'urbanisme R213-7, R213-10, R213-8
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. LIEVRE
Rapporteur public ?: M. BROTONS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1995-11-20;94pa00368 ?
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