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14/12/1995 | FRANCE | N°93PA00901

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 14 décembre 1995, 93PA00901


VU la requête sommaire enregistrée au greffe de la cour le 4 août 1993 présentée pour la société BAUDRY-MARINE et le mémoire complémentaire enregistré le 9 novembre 1993 présenté pour la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE venant au droit de la société BAUDRY-MARINE par la SCP PEIGNOT, GARREAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1503/TAP/88 en date du 3 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Papeete a rejeté partiellement

sa demande d'indemnisation des préjudices résultant pour elle de l'annula...

VU la requête sommaire enregistrée au greffe de la cour le 4 août 1993 présentée pour la société BAUDRY-MARINE et le mémoire complémentaire enregistré le 9 novembre 1993 présenté pour la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE venant au droit de la société BAUDRY-MARINE par la SCP PEIGNOT, GARREAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1503/TAP/88 en date du 3 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Papeete a rejeté partiellement sa demande d'indemnisation des préjudices résultant pour elle de l'annulation d'un arrêté du Gouvernement de la Polynésie française fixant le régime d'importation et de distribution sur le territoire des ciments nomenclaturés n° 25 23 11 par le service des douanes ;
2°) de condamner le territoire de la Polynésie française à lui verser une somme de 19.843.340 F CFP assortie des intérêts capitalisés au titre du préjudice subi ;
3°) de condamner le territoire de la Polynésie française à lui verser une somme de 20.000 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code civil ;
VU l'arrêté 1040/CM du 28 août 1986 ;
VU l'arrêté 1479/CM et l'arrêté 1480/CM du 1er décembre 1986 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 30 novembre 1995:
- le rapport de M. LIEVRE, conseiller,
- les observations de la SCP PEIGNOT, GARREAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société BAUDRY-MARINE et celles de la SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le territoire de Polynésie française,
- et les conclusions de M. BROTONS, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que par un jugement du 26 novembre 1986, confirmé par un arrêt du Conseil d'Etat du 9 novembre 1988, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'arrêté du Gouvernement du territoire de la Polynésie française en date du 28 août 1986 organisant, par la voie de l'appel d'offres, l'importation des ciments nomenclaturés sous le numéro 25 23 11 ; que le Gouvernement de ce territoire a, après l'avoir suspendu par lettre notifiée le 8 décembre 1986, annulé par lettre notifiée le 9 janvier 1987 le "Marché" d'importation de ciments dont la société BAUDRY-MARINE était devenue titulaire ; que la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE substituée à la société BAUDRY-MARINE demande d'une part la réformation du jugement par lequel le tribunal administratif de Papeete a limité à la somme de 889.899 F CFP le montant du préjudice qu'elle a subi du fait de dépenses engagées à perte pour l'exécution de ses obligations portant sur l'importation de 101.700 tonnes de ciment, d'autre part de porter ce préjudice à un montant de 19.843.340 F CFP ; que le territoire de la Polynésie française demande, par la voie de l'appel incident, la décharge de la somme de 745.455 F CFP qu'il doit à la société BAUDRY-MARINE en vertu du même jugement ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il est constant que l'annulation de l'arrêté du 26 août 1986 du Gouvernement du territoire de la Polynésie française n'a pas privé la société BAUDRY-MARINE de la possibilité d'importer et de commercialiser du ciment sur ce territoire, mais lui a seulement ôté la situation de monopole dont elle devait bénéficier en application de cet arrêté ; qu'ainsi, en dehors des frais de participation à l'appel d'offres ou des frais directement liés à l'annulation de cette procédure, le préjudice dont se prévaut la société BAUDRY-MARINE résulte uniquement de la disparition d'un avantage commercial qui aurait résulté d'une atteinte au principe de la liberté de commerce et de l'industrie ; qu'un tel préjudice n'est pas de nature à être indemnisé ;
Considérant en revanche que le tribunal administratif a accordé à bon droit les frais d'expertise du fournisseur et les frais financiers relatifs à la caution bancaire imposés à la société BAUDRY-MARINE par les stipulations des cahiers des charges ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Nouméa a limité la condamnation du territoire de la Polynésie française à la somme de 889.899 F CFP ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que la somme de 889.899 F CFP doit porter intérêt à compter du 15 février 1988 date de réception par le territoire de la réclamation de la société BAUDRY-MARINE portant sur les sommes précédemment attribuées ; qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué sur ce point en tant qu'il a inclu les frais financiers relatifs à la caution bancaire ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 4 août 1993 et le 9 novembre 1993 ; qu'à la première de ces dates il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'en application des dispositions de l'article 1154 du code civil il n'y a lieu de faire droit qu'à cette première demande ;
Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE, partie perdante, tendant à la condamnation du territoire de la Polynésie française à lui verser une somme au titre des frais non compris dans les dépens ;
Considérant en revanche, qu'il y a lieu de condamner la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE à verser au territoire de la Polynésie française une somme de 10.000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La somme de 889.899 F CFP produira intérêts au taux légal à compter du 15 février 1988. Les intérêts échus le 4 août 1993 seront capitalisés à cette date pour produire aux mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement n° 1503/TAP/88 en date du 3 juin 1993 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société GROUPE MARITIME ET COMMERCIAL DU PACIFIQUE et de l'appel incident du territoire de la Polynésie française sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 93PA00901
Date de la décision : 14/12/1995
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE DANS LES DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER - REGIME ECONOMIQUE ET FINANCIER - IMPORTATIONS ET DROITS DE DOUANE - Monopole d'importation de ciment illégalement conféré en Polynésie française au seul importateur sélectionné - Absence de droit à réparation du préjudice causé par l'annulation contentieuse de la décision conférant ce monopole.

46-01-06-01, 60-01-04-02 L'annulation contentieuse de l'arrêté du président du gouvernement du territoire de la Polynésie française conférant un monopole d'importation d'une catégorie de ciment à une société n'est pas de nature à ouvrir droit au profit de celle-ci à une indemnisation, dès lors que cette annulation n'a pas eu pour effet de la priver de la possibilité d'importer et de commercialiser du ciment sur ce territoire mais a seulement fait cesser la situation de monopole dont elle bénéficiait illégalement.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - RESPONSABILITE ET ILLEGALITE - ILLEGALITE N'ENGAGEANT PAS LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - Monopole d'importation illégalement conféré - Absence du droit à réparation du préjudice causé par l'annulation contentieuse de l'arrêté conférant ce monopole.


Références :

Code civil 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Président : M. Beyssac
Rapporteur ?: M. Lièvre
Rapporteur public ?: M. Brotons

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1995-12-14;93pa00901 ?
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