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15/11/2001 | FRANCE | N°00PA02669;00PA03617;01PA01353

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 15 novembre 2001, 00PA02669, 00PA03617 et 01PA01353


(1ère chambre B)
VU I) la requête enregistrée au greffe de la cour le 20 août 2000, sous le n 00PA02669, présentée pour M. Abdoulaye X..., par Me GONDARD, avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9805890 du 14 juin 2000 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet de la Seine-Saint-Denis, sur le fondement des articles L.8-2 et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compte

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(1ère chambre B)
VU I) la requête enregistrée au greffe de la cour le 20 août 2000, sous le n 00PA02669, présentée pour M. Abdoulaye X..., par Me GONDARD, avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9805890 du 14 juin 2000 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet de la Seine-Saint-Denis, sur le fondement des articles L.8-2 et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 2.000 F par jour de retard ;
2 ) d'ordonner ladite mesure d'exécution ;
3 ) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 20.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU II) enregistrée au greffe de la cour le 31 octobre 2000 sous le n 00PA03617, la lettre en date du 26 octobre 2000 par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a transmis la demande de M. Abdoulaye X... tendant à obtenir l'exécution du jugement n 9805890 rendu le 14 juin 2000 par cette juridiction ;
VU III), la requête enregistrée au greffe de la cour le 17 avril 2001, sous le n 01PA01353, présentée pour M. Abdoulaye X..., ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 7 février 2001 par lequel le tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer sur sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 février 1999 du préfet de la Seine-Saint-Denis rejetant sa demande de titre de séjour ;
2 ) d'annuler ladite décision ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU l'ordonnance n 45-2658 du 2 novembre 1945 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France, modifiée par la loi n 97-396 du 24 avril 1997 et par la loi n 98-349 du 11 mai 1998 ;
VU le décret n 46-1574 du 30 juin 1946 ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 novembre 2001 :
- le rapport de M. JARDIN, premier conseiller,

- les observations de Me GONDARD, avocat, pour M. X...,
- et les conclusions de M. BARBILLON, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes présentées par M. X..., enregistrées sous les numéros 00PA02669, 00PA03617 et 01PA01353, concernent la situation d'un même ressortissant étranger et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne la requête n 00PA02669 :
Considérant que, saisi par M. X... d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le préfet de la Seine-Saint-Denis sur la demande de l'intéressé, en date du 14 novembre 1997, tendant à la délivrance d'une carte de séjour temporaire, sur le fondement des dispositions de l'article 12 bis 3 de l'ordonnance susvisée du 3 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n 97-396 du 24 avril 1997, le tribunal administratif de Paris, par un jugement du 14 juin 2000, après avoir constaté que M. X..., résidant habituellement en France depuis 1981, n'étant pas en situation de polygamie et ne menaçant pas l'ordre public, réunissait les conditions prévues par l'article 12 bis 3 pour la délivrance d'une carte de séjour temporaire, a annulé la décision préfectorale attaquée ; que, cependant, il a rejeté les conclusions de M. X... tendant à ce qu'il soit fait injonction au préfet de lui délivrer le titre sollicité, sur le fondement des articles L.8-2 et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur, au motif que l'annulation prononcée ne rendait pas nécessaire une telle mesure dès lors que le requérant, n'étant pas à même de présenter le certificat médical exigé par l'article 7 du décret susvisé du 30 juin 1946 et refusant d'ailleurs de se soumettre à la visite médicale prévue par l'arrêté ministériel pris pour l'application dudit décret, ne pouvait se voir délivrer le titre litigieux ; que M. X... relève appel du jugement du 14 juin 2000 en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'injonction ;
Considérant que le tribunal administratif, compte tenu des motifs susanalysés de son jugement et de la circonstance que le préfet n'avait pas soutenu que l'absence de certificat médical constituait l'un des motifs justifiant sa décision implicite de rejet, ne s'est pas prononcé, lorsqu'il a statué sur les conclusions d'excès de pouvoir de la demande de M. X..., sur la légalité d'un tel motif de refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire ; qu'il lui appartenait toutefois, en tant que juge de l'exécution, de vérifier si, à la date de l'annulation de la décision attaquée, le requérant réunissait les conditions de délivrance de ce titre de séjour, compte tenu de l'évolution éventuelle des éléments de droit et de fait à apprécier, et, dans la mesure où le motif tiré de l'absence de certificat médical ressortait des pièces du dossier, d'examiner s'il était susceptible de faire obstacle à la délivrance du titre sollicité, que l'annulation de la décision implicite de rejet prise par le préfet n'impliquait pas par elle-même, contrairement ce que soutient M. X... ;

Considérant que l'article 12 bis 3 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n 98-349 du 11 mai 1998, applicable à la date à laquelle le juge de l'exécution a statué : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit ; ...3 ) A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant" ; que l'article 7 du décret susvisé du 30 juin 1946 dispose : "L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à séjourner en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire, présente à l'appui de sa demande : ( ...) 4 Un certificat médical délivré dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la santé" ;
Considérant que l'obligation de présenter un certificat médical et, partant, de se soumettre à une visite médicale, dans l'intérêt de la protection de la santé publique, constitue l'une des formalités administratives compétemment imposées par l'autorité détentrice du pouvoir réglementaire à l'ensemble des étrangers sollicitant une carte de séjour temporaire par le décret du 30 juin 1946, sous peine de refus, le cas échéant du titre sollicité ; que dans la mesure où la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" n'est pas subordonnée au résultat de la visite médicale, les dispositions précitées de l'article 7 du décret du 30 juin 1946 ne sont pas devenues incompatibles avec celles de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 du seul fait que le législateur a prévu que le titre de séjour serait délivré de plein droit aux étrangers remplissant la condition de durée de séjour prévue au 3 ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient M. X..., le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'une erreur de droit en estimant que le motif tiré de l'absence de certificat médical était susceptible de justifier légalement le refus de délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ;
Considérant, toutefois, que l'ordonnance du 2 novembre 1945 et les textes pris pour son application, qui précisent les cas dans lesquels les étrangers présents sur le territoire national ont droit à la délivrance d'un titre de séjour, ne font pas obligation au préfet de refuser un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit sauf lorsque les textes le prévoient expressément ; qu'il appartient au préfet d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé et des conditions non remplies, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., à l'occasion d'une précédente demande de titre de séjour, au cours de l'année 1983, a subi la visite médicale exigée par les dispositions du texte précité ; que l'intéressé, entré en France en 1980, n'a plus quitté le territoire national depuis cette date ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le seul motif tiré de l'absence de certificat médical ne pouvait, sans erreur manifeste d'appréciation, être invoqué à l'appui d'un refus de carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ; qu'il suit de là que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris, par le jugement attaqué, a rejeté ses conclusions tendant à l'application des articles L.8-2 et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution." ; qu'aux termes de l'article L.911-3 du même code : "Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L.911-1 et L.911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet" ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'annulation de la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis implique nécessairement que ladite autorité délivre à M. X... une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ; qu'il y a lieu pour la cour de prescrire audit préfet de la délivrer à M. X..., dans un délai de deux mois courant à compter de la notification du présent arrêt sans qu'il y ait lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cettte injonction d'une astreinte ; qu'il n'appartient pas à la cour, en revanche, et en l'absence de litige sur ce point, d'ordonner au préfet de ne pas délivrer le titre de séjour litigieux sous la forme d'une vignette apposée sur le passeport du requérant ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, repris à l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. X..., qui bénéficie de l'aide juridictionnelle totale, n'allègue pas avoir exposé des frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de cette aide ; que les conclusions susrappelées doivent dès lors être rejetées ;
En ce qui concerne la requête n 00PA03617 :

Considérant que le président de la cour administrative d'appel de céans, par l'ordonnance susvisée du 29 novembre 2000 a ouvert, sous le numéro 00PA03617, une procédure juridictionnelle à la suite de la transmission par le président du tribunal administratif de Paris de la demande de M. X... tendant à l'exécution du jugement attaqué en tant qu'il a annulé la décision implicite de rejet du préfet de la Seine Saint-Denis ;
Considérant que l'annulation de cette décision n'appelle pas d'autre mesure d'exécution que celle prescrite ci-dessus par la cour ; que la requête de M. X... est dès lors devenue sans objet ;
En ce qui concerne la requête n 01PA01353 :
Considérant que la préfecture de la Seine-Saint-Denis, au cours de l'instruction d'une demande de carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale", présentée par M. X... sur le fondement de l'article 12 bis 3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n 98-349 du 11 mai 1998, a adressé à l'intéressé, le 21 janvier 1999, une convocation l'invitant à se rendre à la préfecture le 4 février 1999 muni notamment de justificatifs de domicile, parmi lesquels une "quittance de moins de trois mois (Loyer-EDF-Eau)" ; qu'estimant qu'une décision orale de refus de titre de séjour avait été prise à son encontre le 4 février 1999, M. X... l'a déférée au tribunal administratif de Paris le 19 février 1999 ; que, par le jugement du 7 février 2001 dont M. X... relève appel, le tribunal administratif, après avoir jugé que le préfet de la Seine-Saint-Denis avait délivré le titre de séjour sollicité le 4 juin 1999, a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande du requérant ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet, après avoir muni M. X... d'un récépissé valable du 4 mars 1999 au 3 juin 1999, a fait éditer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" valable du 4 mars 1999 au 27 janvier 2000 mais ne l'a ni signée, ni au surplus notifiée à M. X..., dès lors que ce dernier n'avait pas présenté à l'appui de sa demande le certificat médical exigé par les dispositions précitées de l'article 7 du décret du 30 juin 1946 ; qu'il suit de là que ladite carte de séjour ne saurait être regardée comme ayant été délivrée à M. X..., contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif ; que le requérant est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif, par le jugement attaqué, a considéré que sa demande était devenue sans objet et a prononcé un non-lieu à statuer sur celle-ci ; que ledit jugement doit, par suite, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, alors notamment que le préfet a muni M. X... d'une récépissé, dans les conditions susrappelées, qu'une décision de refus de titre de séjour a été prise à l'encontre de l'intéressé le 4 février 1999 ; que la demande de M. X..., qui n'est ainsi dirigée contre aucune décision lui faisant grief susceptible de faire l'objet d'une recours pour excès de pouvoir, est irrecevable et ne peut qu'être rejetée ;
Article 1er : Le jugement du 14 juin 2000 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. X... tendant à l'application des articles L.8-2 et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. X... une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale", dans un délai de deux mois courant à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n 00PA02669 de M. X... est rejeté.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n 00PA03617.
Article 5 : Le jugement du 7 février 2001 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 6 : La demande de M. X... présentée devant le tribunal administratif de Paris et dirigée contre une prétendue décision de refus de titre de séjour en date du 4 février 1999 est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 00PA02669;00PA03617;01PA01353
Date de la décision : 15/11/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS - AUTORISATION DE SEJOUR - OCTROI DU TITRE DE SEJOUR - DELIVRANCE DE PLEIN DROIT.

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DECISIONS POUVANT OU NON FAIRE L'OBJET D'UN RECOURS - ACTES NE CONSTITUANT PAS DES DECISIONS SUSCEPTIBLES DE RECOURS.

PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - PRESCRIPTION D'UNE MESURE D'EXECUTION.


Références :

Code de justice administrative L911-1, L911-3, L761-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-2, L8-3, L8-1
Décret 46-1574 du 30 juin 1946 art. 7
Loi 97-396 du 24 avril 1997
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 12 bis


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. JARDIN
Rapporteur public ?: M. BARBILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-11-15;00pa02669 ?
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