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17/01/2005 | FRANCE | N°01PA01021

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 17 janvier 2005, 01PA01021


Vu la requête, enregistrée le 16 mars 2001, présentée pour M. Y X, élisant domicile ... par Me Fillon ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 981114 du 21 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui v

erser 45 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 16 mars 2001, présentée pour M. Y X, élisant domicile ... par Me Fillon ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 981114 du 21 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser 45 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 janvier 2005 :

- le rapport de M. Beaufays, rapporteur,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que si l'administration est tenue, même en l'absence de tout texte législatif ou réglementaire, d'indiquer dans la notification de redressements qu'elle adresse au contribuable, la procédure d'imposition mise en oeuvre, il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que les mentions contenues dans la notification de redressements en date du 17 septembre 1993 adressée à M. X l'informaient complètement des droits et garanties qui lui étaient offerts par la procédure de redressements contradictoire qui constitue la procédure de droit commun et dont il n'a pas été privé ; que, par suite, l'omission de la mention de la procédure d'imposition suivie n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, de nature à entacher d'irrégularité ladite procédure ;

Considérant, en second lieu, que M. X soutient que la notification du 17 septembre 1993 serait contraire aux dispositions combinées des articles L. 57 et R* 57-1 du livre des procédures fiscales, qui font obligation à l'administration de motiver chaque chef de redressement proposé de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations, dès lors qu'en ce qui concerne le chef de redressement relatif au paiement par la société SEEP des travaux concernant des locaux lui appartenant, ladite notification mentionnerait indifféremment comme base légale le 1° de l'article 109-1 l'article 111 du code général des impôts ; que, toutefois, la mention portée dans la notification litigieuse, aux termes de laquelle Conformément aux articles 109-1 1°, 110 et 111 du code général des impôts, la somme TTC désinvestie de l'entreprise... n'était pas de nature à priver le requérant de la possiblité d'avoir un dialoge utile avec l'administration ou à l'induire en erreur, dès lors que ladite notification indiquait clairement la nature de ce redressement, son montant et ses motifs ; que par suite, le moyen doit être écarté ;

Sur le bien fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1.Sont considérés comme revenus distribués : ...1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; que le c) de l'article 111 du même code dispose que, sont des revenus distribués : les rémunérations et avantages occultes ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les bénéfices de la société anonyme SEEP imposables à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1991 et 1992 des sommes correspondant, d'une part, à des honoraires techniques payés par la société à M. X et regardés comme ne correspondant pas à la rémunération d'un service effectif, et d'autre part, des charges correspondant au paiement de travaux effectués dans les anciens locaux de l'entreprise et appartenant à M. X, regardés comme un avantage injustifié consenti à ce dernier ; que l'administration a assujetti M. X à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu en regardant ces sommes comme des excédents de distribution imposables au nom du bénéficiaire à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Sur les sommes perçues à titre de redevances supplémentaires pour le développement et l'exploitation de brevets :

Considérant qu'au cours des années 1991 et 1992 et à la suite d'un avenant signé entre les parties le 29 novembre 1990, la société SEEP a versé à M. X des redevances supplémentaires, de 220 000 F en 1991 et 240 000F en 1992, en complément de la rémunération qu'il percevait déjà pour la concession à la SEEP de brevets d'invention dont il était détenteur pour inciter M. X à développer de nouveaux brevets concernant la conception de modèles, dessins et plans dans le domaine de la menuiserie métallique ;

Considérant que l'administration, à qui incombe la charge de la preuve, n'a pas remis en cause les rémunérations du requérant tirées du contrat initial de concession de licence non exclusive à la SEEP de ses brevets ; qu'elle fait toutefois valoir que la SEEP ne justifie d'aucun intérêt à la souscription d'un avenant à ce contrat de concession portant sur une rémunération supplémentaire de M. X, d'un plancher forfaitaire annuel de 220 000 F, pour inciter ce dernier à développer son travail d'innovation, dès lors, d'une part, que le contrat de concession n'étant pas exclusif, la société n'avait aucun intérêt à mettre les moyens de l'entreprise au service d'un travail d'innovation qui restait la propriété exclusive de M. X et que celui-ci pouvait concéder à d'autres entreprises et, d'autre part, le contrat de travail qui liait le requérant à cette société, en tant que conseiller technique du président directeur général durant deux années pour un salaire brut annuel de 360 000F, rémunérait déjà l'implication de l'intéressé dans le développement futur de la société ; qu'à ce titre elle fait notamment valoir que cette rémunération supplémentaire ne pouvait être regardée comme liée à l'exploitation effective des brevets par la société, dès lors, d'une part, que cette exploitation était déjà rémunérée selon les clauses du contrat de concession initial et, d'autre part, que cette rémunération supplémentaire a cessé à compter de la date où M. X a définitivement quitté la société SEEP ; que pour combattre les éléments ainsi apportés par l'administration, le requérant se borne à soutenir que la rémunération de son contrat de travail portait sur des prestations distinctes de celles consistant à concevoir de nouveaux produits brevetés ; que, ce disant, il ne justifie pas en quoi cette dernière activité n'était pas en l'espèce suffisamment rémunérée par le contrat de concession initial qui le liait à la société SEEP ni en quoi celle-ci aurait eu intérêt à lui rémunérer cette activité en dehors de tout intérêt patrimonial sur les futurs brevets ; qu'ainsi l'administration doit être regardée comme apportant sur ce point la preuve dont elle a la charge ;

Considérant toutefois que M. X soutient que ces rémunérations n'auraient pas le caractère d'un avantage occulte, dès lors qu'elles avaient été clairement inscrites en tant qu'honoraires techniques dans la comptabilité de la société SEEP ; que si l'administration n'établit pas que ladite rémunération n'aurait pas été déclarée dans les conditions prévues à l'article 240 du code général des impôts, celle-ci demande, par voie de substitution de base légale, que les distributions de revenus concernées soient imposées sur le fondement de l'article 109-1 1° du code général des impôts ; qu'une telle substitution de base légale est possible, dès lors, que la procédure contradictoire ayant été en l'espèce respectée, elle n'a pas pour effet de priver le requérant des garanties prévues par la loi ; qu'il est constant que les résultats de la société SEEP étaient bénéficiaires au titre des exercices 1991 et 1992 et que le requérant ne conteste pas avoir perçu lesdites rémunérations ni que cette appréhension constituait un désinvestissement pour la société SEEP ; qu'ainsi, il y a lieu de faire droit à la demande de l'administration et de rejeter les conclusions de la requête sur ce redressement ;

Sur les travaux effectués par la société SEEP dans un immeuble appartenant à M. X :

Considérant que l'administration a regardé comme des revenus distribués à M. X, sur le fondement du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts, le montant de 589 086 F payé par la société SEEP en 1992 pour des travaux de remise en état des locaux professionnels dont il était propriétaire et qui étaient occupés jusqu'au 1er novembre 1991 par ladite société ;

Sur l'existence et le montant des revenus distribués :

Considérant qu'il appartient à l'administration de justifier de l'existence et du montant des bénéfices réintégrés dans les bases de l'impôt sur les sociétés assigné à la société, qui sont à l'origine de cette distribution, dès lors que M. X a refusé les redressements qui lui ont été notifiés ;

Considérant que l'administration fait valoir que lesdits travaux ne peuvent être regardés comme ayant été engagés dans l'intérêt de la SEEP, dès lors qu'ils ont été exécutés et payés par ladite société postérieurement à son départ de ces locaux et sans qu'aucun état des lieux n'ait été établi contradictoirement avec le bailleur et alors au surplus qu'une partie de ces travaux portait sur le gros oeuvre de l'immeuble et ne pouvait, en tout état de cause, qu'incomber au propriétaire ; que, pour combattre les éléments ainsi apportés par l'administration, M. X fait valoir, en produisant les factures et des photographies des lieux, que ces travaux constitueraient pour l'essentiel des travaux d'entretien et de remise en état des lieux ; qu'il fait valoir que le principe de ces travaux avait été décidé, en exécution du contrat de bail qui le liait à la SEEP jusqu'au 31 décembre 1990 et qui stipulait que le propriétaire ne gardait à sa charge que les travaux portant sur les gros murs et la toiture, et arrêtés par délibération du conseil d'administration de la société SEEP le 4 octobre 1989, soit à une date où ledit bail courrait ; qu'il fait aussi valoir que si le bail avait expiré le 31 décembre 1990, une convention d'occupation précaire desdits locaux, dont il produit la copie et qui n'est pas contestée par l'administration, passée entre les parties par acte sous seing privé le 27 juillet 1990 autorisait la société SEEP à occuper les locaux jusqu'au 1er novembre 1991, date à laquelle M. X s'engageait à louer à la société de nouveaux locaux professionnels neufs dont la construction était prévue sur une parcelle contiguë de celle occupée par la SEEP, et sous réserve que cette dernière s'engage à effectuer les travaux qu'elle avait décidés le 4 octobre 1989 en exécution du bail ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. X établit, d'une part, que la SEEP était contractuellement liée à son ancien bailleur pour l'exécution de travaux de remise en état des locaux professionnels qu'elle avait occupés jusqu'au 1er novembre 1991 et, d'autre part, qu'elle avait un intérêt à honorer cet engagement, dès lors notamment qu'il conditionnait son accès à de nouveaux locaux professionnels neufs et mieux adaptés à ses besoins de fonctionnement, c'est-à-dire l'acquisition d'un élément de l'actif de l'entreprise ; que, toutefois, et ainsi que l'établit l'administration, l'essentiel de ces travaux concernait le gros oeuvre de l'immeuble et ne peut être regardé comme ayant été réalisé en exécution des conventions précitées ; qu'au vu des pièces et devis produits par le requérant le montant des travaux d'entretien et de remise en état des locaux qui incombait contractuellement à la SEEP doit être évalué à la somme de 150 000F ; qu'il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que le montant payé par la société SEEP des travaux de remise en état des locaux professionnels dont M. X était propriétaire constituaient des revenus distribués au profit de ce dernier à hauteur de 439 086 F seulement, le surplus de 150 000F constituant le montant de la remise en état des locaux qui incombait contractuellement à la société SEEP et qui est, dès lors, déductible du revenu de M. X ;

Sur l'appréhension des revenus distribués :

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'administration, qui contrairement à ce que soutient le requérant, établit que les travaux litigieux ont été exécutés et payés par la société SEEP au cours de l'année 1992, doit être regardée comme apportant la preuve que la somme de 439 086 F a été désinvestie de la société SEEP et appréhendée par M. X au titre de l'année 1992 ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assignée à M. Y X au titre de l'année 1992 est réduite d'une somme de 150 000 F (22 867,35 euros).

Article 2 : M. X est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 21 décembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

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N° 01PA01021


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 01PA01021
Date de la décision : 17/01/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Frédéric BEAUFAYS
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : FILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-01-17;01pa01021 ?
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