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06/06/2006 | FRANCE | N°02PA03791

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4eme chambre, 06 juin 2006, 02PA03791


Vu, enregistrée le 5 novembre 2002, la requête présentée par le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par le président du conseil général en exercice, par la SELARL Molas et associés ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0002967 du 3 septembre 2002 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a limité à 311 841 euros la réparation due par les constructeurs au titre de la garantie décennale et n'a pas condamné la société Ertib en qualité de co-maître d'oeuvre ;

2°) de condamner la SARL André et Chr

istian Roth, le bureau d'études Yavrouyan, la société Ertib, le cabinet Virtz, l'AIN...

Vu, enregistrée le 5 novembre 2002, la requête présentée par le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par le président du conseil général en exercice, par la SELARL Molas et associés ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0002967 du 3 septembre 2002 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a limité à 311 841 euros la réparation due par les constructeurs au titre de la garantie décennale et n'a pas condamné la société Ertib en qualité de co-maître d'oeuvre ;

2°) de condamner la SARL André et Christian Roth, le bureau d'études Yavrouyan, la société Ertib, le cabinet Virtz, l'AINF, la société Saep Equipements et la société Léon Ballot à lui verser 642 406,35 euros à titre d'indemnité principale et 15 245 euros à titre d'indemnité complémentaire, avec intérêts légaux à compter du 15 février 2000 et les intérêts capitalisés à compter du 5 novembre 2002 ;

3°) de condamner solidairement les constructeurs à lui payer 4 000 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative et de mettre à leur charge les frais d'expertise d'un montant de 50 958 euros ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 23 mai 2006 :

- le rapport de Mme Corouge, rapporteur,

- les observations de Me X... pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE et celles de Me Y... pour la société Socotec venant aux droits de la société AINF,

- et les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la réception du parc de stationnement et du collège Danton à Levallois-Perret, réalisés concomitamment par les mêmes constructeurs, a été prononcée les 19 juillet 1989 pour le parking et 21 février 1990 pour le collège ; que, devant le tribunal administratif, le DEPARTEMENT DES HAUTS ;DE ;SEINE a recherché la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale à raison d'infiltrations survenues dans les cinq bâtiments, le gymnase, la cour du collège et le parc de stationnement ; que le département fait appel du jugement du 3 septembre 2002 en tant que le tribunal administratif de Paris a limité à la somme de 311 841 euros l'indemnité due par les constructeurs et demande à ce que ladite indemnité soit portée à 642 406 euros ;

Sur le principe de la responsabilité des constructeurs :

Considérant que si, par convention du 24 juillet 1987, le département a confié une mission M1 de maîtrise d'oeuvre à un groupement solidaire comprenant la SARL André et Christian Roth, le bureau d'études Yavrouyan, la société Ertib, et le cabinet Virtz, l'article 11 de ladite convention prévoit une répartition des honoraires entre les membres du groupement dans la limite de leur mission précisée à l'article 2 de la convention ; que, compte tenu de ces stipulations contractuelles et de la nature très différente des tâches confiées à chacun des intervenants, les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre ne sauraient être regardés comme tenus solidairement de répondre des fautes commises par les autres membres du groupement au titre de la garantie décennale ; que, par suite, le bureau d'études Yavrouyan, chargé des études béton, et le cabinet Virtz, économiste du chantier, sont fondés à demander leur mise hors de cause au motif qu'ils sont étrangers aux désordres en litige et à demander la réformation du jugement attaqué sur ce point ; que les conclusions du département tendant à la condamnation solidaire de la société Ertib, intervenue en qualité de thermicien, à réparer les désordres en litige doivent être rejetées pour le même motif ;

Considérant en revanche que, nonobstant le fait que le DEPARTEMENT DES HAUTS ;DE ;SEINE n'a pas déclaré sa créance éventuelle sur la SARL André et Christian Roth, admise à la procédure judiciaire, dans les conditions et délais fixés par la loi du 25 janvier 1985 et le décret du 27 décembre 1985, ni demandé à être relevé de la forclusion, il appartient au juge administratif d'examiner si le département a droit à réparation des dommages causés par l'ouvrage à la construction duquel la SARL André et Christian Roth a participé ; que le moyen tiré de ce que les circonstances susrappelées entraînent nécessairement l'irrecevabilité des conclusions présentées par le DEPARTEMENT DES HAUTS ;DE ;SEINE devant la juridiction administrative contre la SARL André et Christian Roth doit par suite être écarté ;

Sur la garantie décennale et le montant de la réparation :

Considérant qu'il résulte des constatations de l'expert désigné par les premiers juges que les graves infiltrations apparues après la réception dans tous les bâtiments, dans la cour du collège, dans le parc de stationnement portent atteinte à la destination de ces immeubles et sont de nature à engager la responsabilité des constructeurs ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort du rapport de l'expert que si les infiltrations affectant les bâtiments 2 et 3 du collège sont imputables à hauteur de 80% à la pose d'un gazon synthétique intervenue hors marché, lesdits désordres sont également imputables à hauteur de 20% à des malfaçons de l'entreprise Etanchéité francilienne qui est intervenue en qualité de sous-traitante du groupement d'entreprise Saep Equipements et Fougerolle Ballot ; qu'ils engagent, dans cette mesure, la responsabilité décennale dudit groupement, qui doit répondre des fautes de son sous ;traitant vis-à-vis du maître d'ouvrage ; qu'il suit de là que le département est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande sur ce point ; qu'il résulte de l'instruction que le coût de réparation de ces désordres a été évalué par l'expert à la somme de 770 902 F qui doit être mise à la charge du groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot à hauteur de 20% ;

Considérant, en second lieu, que des infiltrations affectant les bâtiments 1, 4 et 5 et le gymnase du collège sont imputables à la SARL André et Christian Roth, qui a pris un risque architectural en réalisant des toitures végétalisées, à l'Association interprofessionnelle de France, intervenant en qualité de contrôleur technique, qui a insuffisamment évalué le risque inhérent à ce type de construction, et aux malfaçons du groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot ; que les premiers juges n'ont par suite pas commis d'erreur de droit en estimant que ces désordres engageaient la responsabilité décennale des constructeurs susvisés ; qu'il résulte du rapport de l'expert que la pose de verre cellulaire (foam glass) en remplacement de la verrerie existante sur la toiture du gymnase constitue une prestation supérieure à celle initialement prévue ; que c'est par suite à bon droit que le tribunal administratif a rejeté la demande du département tendant à ce que le surcoût induit par la pose de verre cellulaire soit mis à la charge des constructeurs ;

Considérant, en troisième lieu, que, suite au supplément d'instruction diligenté par la cour, le département a versé au dossier le rapport de l'expert, clos le 9 novembre 2001, concernant les désordres de la cour du collège et du parc de stationnement sous-jacent ; que la circonstance que ces désordres ont fait l'objet d'une expertise distincte n'a pas eu pour effet de conférer à la demande du département le caractère d'un litige distinct ; que le DEPARTEMENT DES HAUTS ;DE ;SEINE est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de ces désordres ; qu'il ressort de ce rapport que les désordres constatés dans le parc de stationnement, propriété de la ville de Levallois-Perret, trouvent directement leur origine dans des infiltrations imputables au manque d'étanchéité des fosses dans lesquelles ont été plantés les arbres de la cour du collège ; que ces infiltrations, qui rendent le parking impropre à sa destination, sont de nature à entraîner la mise en jeu de la responsabilité des constructeurs ; qu'ils sont imputables, pour les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment, à l'architecte, au contrôleur technique et au groupement d'entreprises ; que, le département soutenant sans être contredit avoir exposé, pour mettre fin à ces désordres, la somme de 209 132 F (31 882 euros HT), il y a lieu de condamner conjointement et solidairement les constructeurs susvisés au versement de cette somme ;

Considérant, enfin, que les conclusions du département tendant à l'indemnisation pour troubles de jouissance ne sont pas assorties de justifications suffisantes ; que c'est par suite à bon droit que le tribunal a refusé d'y faire droit ;

Sur les appels en garantie :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, les infiltrations affectant les bâtiments 2 et 3 doivent être mises à la charge du seul groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot à hauteur de 20 % ;

Considérant que, s'agissant de tous les autres désordres, compte tenu des fautes respectives commises par la SARL André et Christian Roth, intervenant en qualité architecte, par l'association interprofessionnelle de France, intervenant en qualité de contrôleur technique, et par le groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot, la part des responsabilité de chacun d'eux doit être fixée, conformément à la proposition de l'expert, à 20 % pour l'architecte, 10% pour le contrôleur technique et 70 % pour le groupement d'entreprises ; que le contrôleur technique n'est par suite pas fondé à demander la réformation du jugement sur ce point ;

Sur les conclusions d'appel provoqué du groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot :

Considérant que les entreprises susvisées font valoir qu'elles ont, en cours d'expertise, réalisé à leurs frais avancés des travaux d'un montant de 175 704 F dont elles demandent le remboursement aux autres constructeurs ; que ces conclusions soulèvent un litige distinct de l'appel principal du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE ; qu'elles n'ont pas été présentées dans le délai d'appel et sont par suite irrecevables ;

Sur les intérêts et la capitalisation :

Considérant que le département a droit aux intérêts au taux légal sur la totalité des sommes allouées tant en première instance qu'en appel ; que le point de départ des intérêts doit être fixé au 15 février 2000 ; que le département a demandé, par un mémoire du 5 novembre 2002 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande à la date du 5 novembre 2002 et à chacune des échéances annuelles ultérieures ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La SARL André et Christian Roth, la société Socotec Industries, venant aux droits de l'association interprofessionnelle de France, et le groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot sont condamnés conjointement et solidairement à verser au DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE la somme de 31 882 euros en réparation des désordres d'étanchéité affectant la cour du collège Danton et le parc de stationnement.

Article 2 : La SARL André et Christian Roth, la société Socotec Industries, venant aux droits de l'association interprofessionnelle de France, et le groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot se garantiront mutuellement à hauteur de 20%, 10% et 70% des condamnations prononcées à l'article 1er.

Article 3 : Le groupement d'entreprises Saep Equipements et Fougerolle Ballot est condamné à verser au DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE une somme de 23 504 euros (154 180 F) en réparation des désordres d'étanchéité affectant les bâtiments 2 et 3 du collège Danton.

Article 4 : Les sommes allouées tant en première instance qu'en appel porteront intérêts au taux légal à compter du 15 février 2000. Les intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à la date du 5 novembre 2002 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 5 : Le bureau d'études Yavrouyan et le cabinet Virtz sont déchargés de toute condamnation prononcée à leur encontre par le jugement du 3 septembre 2002 du Tribunal administratif de Paris.

Article 6 : Les articles 1er, 3, 4, 5, 8 du jugement du 3 septembre 2002 du Tribunal administratif de Paris sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.

Article 7 : Le surplus des conclusions du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE et le surplus des conclusions des intimés sont rejetés.

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N° 02PA03791


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 02PA03791
Date de la décision : 06/06/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MERLOZ
Rapporteur ?: Mme la Pré Elise COROUGE
Rapporteur public ?: M. TROUILLY
Avocat(s) : GHAYE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-06-06;02pa03791 ?
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