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10/11/2006 | FRANCE | N°04PA01970

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre - formation b, 10 novembre 2006, 04PA01970


Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2004, présentée pour M. et Mme Christian X, élisant domicile ...), par Me Foucault ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°9712540 en date du 6 avril 2004 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'après avoir constaté un non lieu partiel à statuer, il a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1993 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des p

nalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 12 200 e...

Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2004, présentée pour M. et Mme Christian X, élisant domicile ...), par Me Foucault ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°9712540 en date du 6 avril 2004 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'après avoir constaté un non lieu partiel à statuer, il a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1993 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 12 200 euros en réparation du préjudice qu'ils ont subi en raison de l'indisponibilité des sommes saisies sur leur compte depuis août 1996 ;

4°) de faire injonction à l'administration de verser aux débats l'ensemble des factures justificatives qu'ils ont remises en 1997 au centre des impôts dont ils relèvent ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2006 :

- le rapport de Mme Isidoro, rapporteur,

- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'administration a réintégré au revenu global imposable à l'impôt sur le revenu de l'année 1993 des époux X le déficit foncier qu'ils avaient déduit à hauteur d'un montant de 445 760 francs correspondant au coût des travaux de grosses réparations qu'ils auraient réalisés sur un immeuble sis ... dont M. X est nu-propriétaire ; que les époux X relèvent appel du jugement en date du 6 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté un non lieu partiel à statuer, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande de première instance ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 28 du code général des impôts : « Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété » ; qu'aux termes de l'article 605 du code civil : « L'usufruitier n'est tenu qu'aux réparations d'entretien. Les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire, à moins qu'elles n'aient été occasionnées par le défaut de réparations d'entretien, depuis l'ouverture de l'usufruit ; auquel cas l'usufruitier en est aussi tenu » et qu'aux termes de l'article 606 du même code : « Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. Toutes les autres réparations sont d'entretien. » ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année 1993 : « L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (…) sous déduction (…) I. Du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. (...) Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (…) 3° Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des cinq années suivantes (…) ; cette disposition n'est pas applicable aux propriétaires de monuments classés monuments historiques (…) ni aux nus-propriétaires pour le déficit foncier qui résulte des travaux qu'ils payent en application des dispositions de l'article 605 du code civil, lorsque le démembrement de la propriété d'un immeuble bâti résulte de succession ou de donation entre vifs, effectuée sans charge ni condition et consentie entre parents jusqu'au 4ème degré inclusivement. (…)/. L'imputation exclusive sur les revenus fonciers n'est pas non plus applicable aux déficits fonciers résultant de dépenses autres que les intérêts d'emprunt. L'imputation est limitée à 50 000 francs. La fraction du déficit supérieure à 50 000 francs et la fraction du déficit non imputable résultant des intérêts d'emprunt sont déduites dans les conditions prévues au premier alinéa. (…). » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que dans le cas où un immeuble fait l'objet d'un démembrement du droit de propriété entre un nu-propriétaire et un usufruitier, les dépenses de réparation de cet immeuble sont déductibles des bases de l'impôt sur le revenu dû par celui d'entre eux qui en a effectivement supporté la charge ; que, toutefois, ce dernier ne peut déduire que les charges qui seraient déductibles si la propriété n'était pas démembrée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration, après avoir remis en cause l'imputation sur leur revenu global du déficit foncier résultant des dépenses que les époux X avaient engagées pour la réalisation de travaux sur l'immeuble sis ... au motif qu'ils n'en étaient que nus-propriétaires, a prononcé un dégrèvement à concurrence d'une somme de 47 970 francs au cours de la procédure devant le tribunal administratif de Paris et a rejeté le surplus de la demande des époux X au motif, d'une part, que certaines dépenses ne correspondaient pas à des dépenses de grosses réparations, et, d'autre part, que le déficit devait être calculé au prorata de la surface louée par l'usufruitier ; qu'elle a ainsi rapporté la somme de 422 125 francs correspondant aux dépenses qu'elle a considérées comme étant des dépenses de grosses réparations engagées au titre de l'année 1993 aux 45 m² qu'elle a considérés comme loués sur les 247 m² que comprend l'immeuble pour calculer le montant du déficit qu'elle a fixé à 73 913 francs ;

Considérant que les époux X soutiennent, en premier lieu, que le montant total de grosses réparations qui devrait servir de base au calcul de la part déductible du déficit foncier au titre de leur revenu global pour l'année 1993 devrait s'établir à 431 020 francs et non à 422 125 francs comme l'a retenu l'administration, ce qui, rapporté au prorata retenu par l'administration, devrait aboutir à un montant de 78 559 francs de dépenses déductibles ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que l'administration n'a exclu des dépenses déductibles engagées par les époux X que les sommes de 2 880 francs et de 11 860 francs correspondant respectivement à des travaux liés au déplacement de radiateurs et à des travaux d'électricité dont il n'est pas établi, par les documents produits, qu'ils constituent des travaux de grosses réparations au sens de l'article 606 du code civil précité et qu'ils soient indissociables des travaux de grosses réparations réalisés ; qu'elle a en revanche admis les dépenses de 310 732 francs, 26 685 francs, 58 220 francs, 9 488 francs, 17 000 francs correspondant aux dépenses que les époux X ont eux-mêmes récapitulées, sauf en ce qui concerne les dépenses engagées auprès du cabinet d'architecte Levenok qu'elle n'a prises en compte qu'à concurrence de la somme de 26 685 francs au lieu des 35 580 francs indiqués par les requérants ; que cette minoration de 8 895 francs s'explique par la non prise en compte par l'administration d'une note d'honoraires établie le 16 septembre 1993 pour laquelle les époux X n'ont produit aucun document de nature à établir qu'il l'avait bien acquittée en 1993 ; que, par suite, les époux X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration a fixé le montant des dépenses déductibles au titre de 1993 à la somme de 422 125 francs ;

Considérant que les époux X soutiennent, en deuxième lieu, que l'administration a ajouté à la loi en faisant application d'un prorata pour le calcul du déficit imputable ; que, toutefois, il résulte des dispositions des articles du code général des impôts précités que celles-ci ne permettent pas de déduire du revenu global des dépenses de grosses réparations de logement dont le propriétaire se réserve la jouissance ; qu'il s'ensuit que lorsque l'usufruitier se réserve la jouissance d'un logement, le droit à déduction du nu-propriétaire ne peut porter que sur les dépenses de grosses réparations effectuées sur la partie du bien dont l'usufruitier ne s'est pas réservée la jouissance ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration a calculé leur droit à déduction au prorata de la surface de son bien donnée en location par l'usufruitière ;

Considérant que les époux X soutiennent, en troisième lieu, qu'à supposer qu'un prorata doive être retenu, il ne saurait être de 45/247 dès lors que la surface louée est de 170 m² et non de 45 m² comme l'a retenu l'administration ; que, toutefois, ils n'apportent aucun justificatif de nature à établir la réalité de cette allégation en se bornant à verser au dossier les photocopies de deux plans de géomètre qui seraient relatifs au premier et au deuxième étage d'un immeuble ;

Considérant que les époux X soutiennent, en quatrième lieu, que l'administration ne saurait se fonder sur la doctrine administrative 5 D-2-94 du 24 mars 1994 pour leur refuser le droit d'imputer les dépenses engagées par eux et considérées comme ne correspondant pas à des dépenses de grosses réparations pour un montant de 14 740 francs alors que, selon eux, ces dépenses sont imputables sur leur revenu global de 1993 ; que toutefois, l'article 156-I-3 du code général des impôts réserve l'imputation sur le revenu global aux seules dépenses de grosses réparations supportées par un nu-propriétaire en application de l'article 605 du code civil ;

Considérant qu'il résulte des dispositions susmentionnées de l'article 156-I-3 du code général des impôts, dans la rédaction issue de la loi de finances pour 1977, qu'un nu-propriétaire, qui peut déduire de son revenu global des dépenses de grosses réparations, au sens de l'article 605 du code civil, qu'il a effectivement supportées pour un immeuble donné en location par l'usufruitier, ne peut se prévaloir du régime de droit commun de l'imputation plafonnée des autres dépenses, hormis les intérêts d'emprunt, applicable depuis l'imposition des revenus de 1993, dès lors que ce régime ne s'applique qu'aux déficits fonciers générés par les dépenses de toutes natures exposées par le propriétaire d'un immeuble qu'il a affecté à la location pour en tirer un revenu foncier, ce qui n'est pas le cas des requérants ; que l'instruction précitée du 24 mars 1994 n'ajoute rien à la loi et n'a donc pas, en tant que telle, été opposée à tort aux contribuables par l'administration ;

Considérant que les époux X soutiennent, en cinquième lieu, que la loi de finances pour 1977 en tant qu'elle interdit aux nus-propriétaires la déduction de leur revenu global des charges foncières autres que les dépenses de grosses réparations est incompatible avec le régime de droit commun d'imputation des déficits fonciers ou des déficits relatifs à des locaux loués à titre professionnel ; que, toutefois, il n'appartient pas au juge administratif d'écarter des dispositions législatives en raison de leur contrariété à d'autres dispositions législatives ; qu'au demeurant, le régime de déduction institué en faveur des nus-propriétaires est par nature dérogatoire au régime de déduction de droit commun dès lors que les nus-propriétaires ne perçoivent pas, à la différence des usufruitiers, de revenus fonciers sur lesquels s'imputent les déficits constatés dans cette catégorie de revenus et que les nus-propriétaires ne devraient pas pouvoir déduire de déficit foncier s'il leur était fait application du régime de droit commun prévu par les dispositions de l'article 156-I-1° du code général des impôts ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :

Considérant que les époux X ne sont pas fondés se plaindre que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a jugé que la doctrine 5 D-2-94 précitée n'était pas invocable alors même qu'elle est antérieure à la mise en recouvrement de l'imposition litigieuse ; qu'en effet, il résulte des termes de celle-ci que l'indication relative à la date d'entrée en vigueur des dispositions ne concerne pas l'entrée en vigueur de l'instruction mais celle des dispositions de l'article 156-I-3° dans leur rédaction issue de la loi de 1994 susvisée et qu'elle se borne à commenter la loi fiscale sans y ajouter ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1993 et restant à leur charge à la suite du dégrèvement prononcé par l'administration ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à verser aux époux X des dommages et intérêts :

Considérant que les époux X soutiennent que l'administration leur aurait causé un préjudice en saisissant des sommes sur leur compte bancaire dont ils n'auraient, de ce fait, plus eu la disposition ; que, toutefois, de telles conclusions à fin de condamnation de l'Etat sont irrecevables faute d'avoir été précédées d'une réclamation préalable ; qu'en tout état de cause, les époux X n'établissent pas la réalité du préjudice allégué ;

Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de verser aux débats un certain nombre de documents :

Considérant que l'administration a versé au dossier les documents dont la production était demandée par les époux X ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit fait injonction à l'administration de communiquer lesdits documents sont, par suite, dépourvues d'objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant enfin que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse aux époux X la somme de 1 500 euros qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des époux X est rejetée.

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N° 04PA01970


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 04PA01970
Date de la décision : 10/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ESTEVE
Rapporteur ?: Mme Cécile ISIDORO
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : FOUCAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-11-10;04pa01970 ?
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