La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/2009 | FRANCE | N°07PA01340

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 25 mars 2009, 07PA01340


Vu le recours, enregistré le 11 avril 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9916239/2 en date du 16 janvier 2007 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a accordé à l'Association Cil Unipec la réduction des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles le Cil Le Refuge, aux droits et obligations duquel vient l'Association Cil Unipec, a été assujetti au titre des exercices clos le 31 janvier 1990 et les 31 décembre 1990, 1991, 1992 et 1993 ;


2°) de remettre, partiellement au titre des deux premiers exercices et i...

Vu le recours, enregistré le 11 avril 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9916239/2 en date du 16 janvier 2007 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a accordé à l'Association Cil Unipec la réduction des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles le Cil Le Refuge, aux droits et obligations duquel vient l'Association Cil Unipec, a été assujetti au titre des exercices clos le 31 janvier 1990 et les 31 décembre 1990, 1991, 1992 et 1993 ;

2°) de remettre, partiellement au titre des deux premiers exercices et intégralement au titre des exercices suivants, l'imposition litigieuse à la charge de l'Association Cil Unipec ;

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2009 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- les conclusions de Mme Evgenas, rapporteur public,

- et les observations Me Bénichou pour l'Association Cil Unipec ;

Considérant que le comité interprofessionnel du logement (Cil) Le Refuge, qui avait le statut d'une association à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901, était chargé de collecter la participation des employeurs à l'effort de construction instituée par l'article L 313-1 du code de la construction et de l'habitation et de promouvoir le logement social conformément aux dispositions de ce texte ; que l'administration , estimant que ledit comité n'était pas géré de manière désintéressée, a estimé qu'il était taxable à l'impôt sur les sociétés sur le fondement de l'article 206-1 du code général des impôts ; qu'elle a notamment réintégré dans la base d'imposition de cet organisme le montant des produits financiers auxquels la société avait, selon le service, anormalement renoncé en accordant des avances sans intérêts à différentes sociétés civiles immobilières dans un cadre extérieur à la mission qui était la sienne et qui résultait des dispositions susmentionnées du code de la construction et de l'habitation : que le MINISTRE DU BUDGET DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la cour de réformer le jugement n° 9916239/2 en date du 16 janvier 2007 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a accordé à l'Association Cil Unipec la réduction des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles le Cil Le Refuge, aux droits et obligations duquel vient l'Association Cil Unipec, a été assujetti en conséquence au titre des exercices clos le 31 janvier 1990 et les 31 décembre 1990, 1991, 1992 et 1993 ; que pour sa part, l'association Cil Solendi, venant aux droits et obligations de l'Association Cil Unipec demande la réformation dudit jugement en tant qu'il lui est défavorable ;

Sur le recours du ministre :

Considérant en premier lieu que les premiers juges ont constaté que l'association Cil le Refuge assortissait ses contrats de prêt d'un taux d'intérêt de 4 % ; qu'ils en ont déduit que c'est à tort que le vérificateur avait estimé que les avances litigeuses étaient accordées sans rémunération ; qu'en conséquence, tout en admettant que le taux susmentionné était anormal et que le taux normal était celui retenu par le service, ils ont estimé que le redressement correspondant à la renonciation à percevoir des intérêts devait être calculé en tenant compte des intérêts dont lesdites avances avaient été effectivement assorties ; qu'ils ont en conséquence, à l'article 1er du jugement attaqué, réduit la base d'imposition fixée par l'administration de 4 % du montant annuel des prêts et avances en litige, et à l'article 2 de ce jugement, déchargé l'association des droits et pénalités correspondant à la réduction de base ainsi calculée ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient le ministre, les premiers juges n'ont pas accordé la réduction contestée en estimant que le redressement devait être calculé en appliquant aux encours d'avances en litige un taux de 4 % mais ont au contraire estimé que lesdites avances avaient été assorties d'un intérêt au taux de 4 %, et que par suite le redressement en cause devait être réduit à hauteur des intérêts qui n'avaient pas été abandonnés ; que par suite le moyen tiré de ce que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le taux que le Cil le refuge aurait dû réclamer sur ses avances était de 4 % est inopérant ;

Considérant en deuxième lieu qu'en se bornant à s'en remettre à la sagesse de la cour pour apprécier la portée des contrats de prêt avec les sociétés civiles immobilières emprunteuses produits en appel par le Cil Solendi et à faire valoir que le rapport d'audit présenté par le Cil ne serait pas de nature à établir que lesdits intérêts avaient été comptabilisés, sans présenter la moindre critique précise à l'appui de son moyen, le ministre, ne conteste utilement ni le constat effectué par les premiers juges, selon lequel les avances litigieuses auraient été effectivement consenties au taux de 4 %, ni la conséquence qu'ils en ont tirée au regard du redressement notifié au Cil le refuge, fondé sur l'acte anormal de gestion résultant de ce que lesdites avances auraient été accordées sans rémunération ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à contester le jugement attaqué en tant qu'il lui est défavorable ;

Sur l'appel incident du Cil Solendi :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de la construction et du logement alors applicable : En cas de retrait d'agrément, le ministre chargé du logement procède, par arrêté pris sur proposition ou après avis de l'Agence nationale, à la dissolution de l'association, et nomme, par le même arrêté, un liquidateur. ; qu'aux termes de l'article L. 313-15 du même code : (...) En cas de liquidation administrative d'une association, la situation active et passive résultant de l'encaissement et de l'emploi des ressources au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction est attribuée à une association titulaire de l'agrément prévu à l'article L. 313-7, désignée par le ministre chargé du logement, après avis de l'Agence nationale. ; qu'il résulte de l'instruction que le comité interprofessionnel du logement Le Refuge a fait l'objet d'un retrait d'agrément et d'une dissolution administrative par arrêté du ministre du logement du 27 octobre 1993 ; que, par arrêté du 17 mars 1995, la situation active et passive résultant de l'encaissement et de l'emploi des ressources par le Cil Le Refuge a été attribuée au Cil Unipec, lequel a pris ultérieurement la dénomination de Cil Solendi ; que la circonstance que les dettes fiscales du Cil Le Refuge aient trouvé leur origine dans un emploi irrégulier des fonds recueillis au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction ne permet pas de considérer, comme le soutient le Cil Solendi, que lesdites dettes ne résulteraient pas de l'encaissement et de l'emploi des fonds en cause ; qu'en outre le protocole de reprise des activités du Cil Le refuge en date du 14 novembre 1994, même s'il ne prévoit pas avec précision les modalités de leur financement, prévoit explicitement la reprise par le Cil Unipec des conséquences financières des contrôles fiscaux engagés au titre des exercices en litige ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient le Cil Solendi, le Cil Unipec est ainsi devenu redevable de l'impôt sur les sociétés assigné au Cil Le Refuge au titre des exercices clos les 31 janvier 1990, 31 décembre 1990, 31 décembre 1991, 31 décembre 1992 et 31 décembre 1993;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts : 1 (...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés (...) toutes (...) personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif (...) ; qu'il résulte de l'instruction que le passif de sociétés civiles immobilières appartenant pour partie au Cil Le refuge et pour partie à des dirigeants dudit Cil ou à des membres de leur famille a été comblé par des prêts et avances du Cil sans que les autres associés aient contribué au comblement des dettes sociales ; que le Cil a ainsi accordé un avantage patrimonial à ces associés ; qu'il suit de là que l'administration a pu à bon droit considérer que l'association Cil Le Refuge, qui ne saurait utilement faire valoir que les sociétés civiles immobilières en cause avaient une vocation sociale ni que par jugement en date du 16 février 1995 devenu définitif relatif à des années antérieures, le Tribunal administratif de Paris aurait reconnu que les produits d'intérêts perçus n'étaient pas taxables sur le fondement des dispositions, différentes de celles présentement appliquées, de l'article 206-5 du même code, n'avait pas eu une gestion désintéressée et imposer les sommes en litige à l'impôt sur les sociétés sur le fondement de l'article 206-1 précité du code général des impôts ;

Considérant en troisième lieu que le moyen tiré de ce que les avances litigieuses étaient effectivement rémunérées au taux de 4 % est inopérant, le jugement attaqué ayant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, admis la réalité d'une telle rémunération ;

Considérant en quatrième lieu qu'en se bornant à se prévaloir du taux de 4 % applicable aux avances que le Cil Le refuge devait consentir dans le cadre de son activité réglementée de financement du logement social, l'association Cil Solendi ne conteste pas utilement la remise en cause de la normalité de la rémunération, au taux susmentionné, afférente aux prêts accordés hors de ladite activité réglementée, à des sociétés civiles immobilières dirigées et pour partie détenues par les dirigeants du Cil Le refuge et les membres de leur famille ;

Considérant en cinquième lieu que les avances à un taux anormal accordées par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces avances est une filiale, hormis le cas où la situation des deux entités serait telle que la mère puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté ; que s'il est constant que les situations nettes des sociétés civiles immobilières auxquelles le Cil Le refuge a consenti les avances litigieuses étaient négatives à la clôture des exercices en cause et que le Cil Le refuge pouvait être personnellement tenu des dettes de ces sociétés au-delà de ses apports, il résulte de l'instruction que l'association en cause a consenti auxdites sociétés gérées et pour partie détenues par ses dirigeants ou par des membres de leur famille des prêts importants destinés à combler leur passif ; qu'elle a supporté seule la charge de ce comblement, les autres porteurs de parts des sociétés emprunteuses n'ayant pas participé au financement des avances nécessitées par l'aggravation de leur situation financière ; qu'au cours de la période en litige, le montant des avances ainsi consenties par le Cil Le refuge n'a cessé de s'accroître, en l'absence de toute perspective de remboursement, et sans que le déséquilibre entre les efforts financiers par les porteurs de parts soit corrigé ; que dans ces conditions l'octroi des avances en cause doit être regardé comme procédant d'un acte anormal de gestion ; qu'il en est par suite de même, et en tout état de cause, de l'abandon d'intérêt consenti par le Cil Le Refuge à raison de ces avances ;

Considérant en sixième lieu que l'association Cil Solendi invoque le fait que la perception d'intérêts aurait aggravé les déficits des sociétés civiles immobilières, déductibles des résultats du Cil Le Refuge ; que s'il résulte des dispositions combinées des articles 8 et 238 bis K du code général des impôts que l'avantage consenti à une société de personnes relevant de l'article 8, procuré par la dispense d'acquitter les intérêts relatifs à une avance à un taux anormal, accroît son résultat imposable entre les mains de la personne qui détient les droits de cette société de personnes, l'abandon d'intérêt ainsi consenti n'est dépourvu d'effet fiscal que lorsque les résultats d'exploitation réalisés directement par la personne qui détient les droits et les résultats provenant de ses participations dans des filiales sont imposables à la même date et selon le même régime ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que tel soit le cas en l'espèce ; qu'au surplus l'association Cil Solendi ne peut être regardée comme justifiant, par la production de tableaux non étayés de pièces justificatives, de la part des intérêts abandonnés correspondant aux résultats des sociétés civiles immobilières emprunteuses taxables entre ses mains, et de la part de ces intérêts profitant également aux autres associés desdites sociétés ; qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant en septième lieu que si l'Association Cil Solendi soutient que les résultats de l'association Cil Le refuge étaient globalement déficitaires au titre de l'ensemble des exercices en cause, elle ne l'établit en tout état de cause pas en se bornant à se prévaloir des résultats d'un audit non contradictoire réalisé sur la base d'une comptabilité reconstituée a posteriori ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Association Cil Solendi n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a refusé de la décharger de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie, impliqué par la réintégration dans les résultats du Cil Le refuge des intérêts auxquels le Cil Le Refuge avait renoncé ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions de l'Association Cil Solendi tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de l'appel incident de l'association Cil Solendi sont rejetées.

''

''

''

''

2

N° 07PA01340


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07PA01340
Date de la décision : 25/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FARAGO
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme EVGENAS
Avocat(s) : C/M/S/ BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-03-25;07pa01340 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award